Dans cette fiction romanesque parue en 2007,
Jean-Marie Goreau aborde sans pédanterie une question qui revient périodiquement sur le devant de la scène médiatique : la réintroduction d'animaux sauvages dans des territoires où ils avaient été éradiqués par l'Homme car réputés nuisibles, notamment aux yeux des éleveurs, considérant que ces territoires peu "valorisés" leur appartiennent au même titre que les moutons ou les vaches qui y paissent. Ours, lynx, loup sont le sujet d'âpres conflits dans lesquels s'immiscent, du côté des détracteurs, la véhémence, la rumeur, l'angoisse immémoriale.
Le "fou" (on ne peut plus raisonnable en réalité), c'est Jérôme, un jeune biologiste. Il a lâché clandestinement dans la campagne charentaise trois loups, deux mâles et une femelle, qu'il avait "adoptés" tout bébés en Espagne et nourris, sans pour autant en faire des animaux de compagnie. Peu à peu, on s'en doute, son secret sera éventé, et d'abord révélé par lui à des personnes de confiance : Jean-Jules, un vieux paysan pittoresque, Sylvie, la fille du châtelain local, dont il s'éprend (et inversement)... Peu de monde, à vrai dire, des gens discrets face aux voix tonitruantes des partisans de la battue exterminatrice. L'idée, cependant, d'un rééquilibrage du peuplement animal des zones rurales fera peut-être son chemin dans les esprits.
L'écriture de l'auteur est souvent lyrique, tout en ménageant des pauses où un style plus sec, quasi télégraphique, permet de faire retomber la pression émotionnelle. Les dialogues sonnent juste, usant d'expressions vernaculaires vigoureusement imagées.