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Citations sur Au commencement était... (16)

Comme nous allons bientôt le découvrir, rien ne permet de penser que les petites communautés sont particulièrement enclines à l’égalitarisme, ni, inversement, que les plus grandes doivent fatalement avoir des rois, des présidents ou même des bureaucratie. De telles déclarations ne sont que des a priori déguisés en faits, voire en lois historiques. 
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La connexion nouvelle entre violence externe et soin interne, c'est-à-dire ce que les relations humaines ont de plus impersonnel et de plus intime, marque-t-elle le début de la confusion générale? Est-ce ainsi que des rapports jusqu'alors souples et négociables ont été gravés dans le marbre? Est-ce à partir de là que nous nous sommes retrouvés bloqués?

Voilà le récit que nous devrions raconter. Plutôt que celle des “origines de l'inégalité”, la grande question à poser à l'histoire de l'humanité devrait être: comment avons-nous pu nous laisser enfermer dans une réalité sociale monolithique qui a normalisé les rapports fondés sur la violence et la domination?
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Renverser le capitalisme, mettre à bas le pouvoir étatique, ce sont des choses que l'on peut se représenter concrètement. "Éliminer les inégalité", en revanche, on ne voit pas très bien ce que cela veut dire.
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Ceux qui vivent dans des sociétés sans État ne sont pas moins politiquement conscients que nous ; ils le sont beaucoup plus.
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Répéter que l'Europe est à la source de tous les aspects louables et positifs de notre monde garantit d'être lu comme un apologiste rétrospectif du génocide. 
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Prenez les villes. On a longtemps pensé qu’elles marquaient une sorte de point de non-retour historique : une fois le pas franchi, et s’ils tenaient à éviter le chaos (ou la surcharge cognitive), les hommes devaient renoncer pour toujours à leurs libertés fondamentales et se plier aux décisions de bureaucrates anonymes, de prêtres rigoristes, de rois protecteurs ou de politiciens va-t-en-guerre. Envisager l’histoire de l’humanité à travers ce prisme, c’est un peu remettre au goût du jour les préceptes du roi Jacques, en postulant que la violence et les inégalités de nos sociétés modernes sont des conséquences naturelles des structures de gestion rationnelle et de soin paternaliste – des structures conçues pour ces populations devenues subitement incapables de s’organiser toutes seules parce qu’elles seraient devenues trop grandes.

Outre qu’elles n’ont aucun fondement psychologique solide, ces interprétations sont contredites par la recherche archéologique. De nombreuses villes à travers le monde ont d’abord été des expériences civiques de grande envergure, bien souvent exemptes de la hiérarchisation administrative et de l’autoritarisme attendus. Il nous manque encore une terminologie adéquate pour les définir. Dire qu’elles étaient égalitaires peut renvoyer à toutes sortes de réalités différentes : un parlement local et des projets de logement social coordonnés, comme dans certaines civilisations précolombiennes ; des familles indépendantes organisées en quartiers et en assemblées citoyennes, comme dans les mégasites préhistoriques du nord de la mer Noire ; l’introduction de principes égalitaires explicites fondés sur l’uniformité et la similitude, comme dans la culture d’Uruk en Mésopotamie…

Cette diversité n’a rien d’étonnant quand on sait à quoi les villes ont succédé dans toutes ces régions. Le paysage pré-urbain n’était pas dominé par des sociétés rudimentaires isolées les unes des autres, mais par de vastes réseaux connectant des groupes écologiquement très variés, entre lesquels les personnes, la faune et les idées circulaient selon d’infinis et tortueux méandres. Les unités démographiques de base, qui restaient plutôt modestes, surtout à certaines périodes de l’année, s’organisaient généralement en coalitions ou confédérations assez lâches. Sous la forme la plus basique, celles-ci correspondaient à une mise en acte de la première des libertés humaines : la liberté de quitter son lieu de vie, avec la certitude que l’on sera accueilli, bien traité et même respecté dans un autre pays.

Lorsqu’elles accédaient à un stade supérieur, elles se rapprochaient des amphictyonies de l’Antiquité grecque, ces fédérations religieuses et politiques de cités ou de peuples voisins chargés de l’entretien des lieux sacrés. Marcel Mauss avait probablement raison de soutenir que le terme « civilisation » devait être réservé à ces grandes zones d’hospitalité. Alors que notre réflexe est de faire des civilisations une émanation des villes, il paraît plus réaliste, compte tenu de ce que nous avons appris, de renverser la définition et d’envisager les premières cités comme de vastes confédérations régionales comprimées à l’intérieur d’un espace restreint.
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Le postulat d`un lien nécessaire entre hiérarchies spatiales et hiérarchies sociales - c`est-a-dire l`idée que l`accroissement démographique engendrerait fatalement des structures de domination - ne semble guere questionné dans le monde de la recherche ni dans d`autres champs. On tient pour acquis que l`étendue et la densité d`un groupe social sont forcément corrélées a la "complexité" de son organisation.

(...) Comme nous l`avons vu, non seulement ces hypotheses ne sont pas vraiment cruciales sur le plan théorique, mais elles sont tres rarement corroborées par les faits. Tous les systemes complexes ne sont pas verticaux, pas plus dans la nature que chez l`etre humain, comme l`a montré Carole Crumley, anthropologue spécialiste de l`age du fer européen. Le fait que nous accrochions a cette fausse croyance en dit probablement plus long sur nous-memes que sur les peuples ou phénomenes étudiés.
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On peut s’interroger par exemple sur la relation spécifique qu’entretiennent les connaissances ésotériques et les connaissances bureaucratiques sur le continent américain. Au premier abord, le lien entre les unes et les autres n’est pas flagrant. Autant on comprend assez bien comment la brutalité pure peut s’incarner, sur le plan institutionnel, à travers la souveraineté ou l’affirmation d’un certain charisme dans l’arène politique, autant la voie conduisant de la maîtrise de l’information (comme forme générale de domination) au pouvoir administratif paraît plus tortueuse. Que peut-il bien y avoir de commun entre le savoir ésotérique que mobilisaient les bâtisseurs de Chavín de Huántar, souvent ancré dans des expériences hallucinatoires, et les méthodes comptables des sociétés incas du XVe siècle ? Rien, serait-on tenté de répondre – avant de se rappeler que, à des époques beaucoup plus proches de nous, les candidats à des postes administratifs se devaient de maîtriser des connaissances qui n’avaient pratiquement aucun rapport avec leurs activités futures et qui n’étaient valorisées que pour leur dimension occulte. Dans la Chine du Xe siècle ou l’Allemagne du XVIIIe, par exemple, on demandait aux aspirants fonctionnaires de prouver leur aptitude à lire des textes classiques rédigés dans des langues anciennes, et même mortes. Leurs homologues modernes, eux, sont tenus de passer des examens portant sur la théorie du choix rationnel ou la philosophie de Jacques Derrida. Ce n’est que dans un second temps qu’on leur enseigne l’art de l’administration proprement dit par le biais de méthodes plus traditionnelles, comme les exercices, les stages ou le tutorat.
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Comme nous le verrons, la pratique même de l’inhumation ne concernait que certains individus atypiques, les autres n’étant pas enterrés du tout.
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Au contact de ces étranges étrangers, les amérindiens ont élaboré une critique propre et remarquablement cohérente des institutions européennes. Mieux encore : celle-ci n'a pas tardé à être prise très au sérieux sur le Vieux Continent. […] La critique indigène ébranla profondément le système en dévoilant au public européen des possibilités d'émancipation humaine qui, une fois connues, ne pouvaient plus être ignorées.
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