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EAN : 9791022607025
240 pages
Editions Métailié (14/09/2017)
3.57/5   7 notes
Résumé :
Ni vivant ni mort, Leonardo a disparu. Il avait 20 ans et voulait changer le monde, une dictature impitoyable dominait le Brésil. Pour Sofia, sa petite sœur, il était un dieu. Les années ont passé et le vide ne s’est pas comblé. Le père est mort, la mère s’est enfermée dans son chagrin et Sofia, étouffée par cette absence, part à la recherche du disparu.

Au cours d’une enquête, qui l’amène sur les chemins de la clandestinité révolutionnaire en lutte c... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Rentrée littéraire du 14 septembre 2017.

Quand il s'agit de coups d'Etat en Amérique latine, on pense surtout à ceux du Chili et d'Argentine. Quant aux guérillas, les plus connues sont probablement celles des FARC en Colombie, du Sentier Lumineux au Pérou ou celle des sandinistes au Nicaragua, j'en passe et des pas meilleures. Mais pour le putsch militaire au Brésil en 1964, j'avoue ne rien en savoir, et de la guérilla de l'Araguaia, n'avoir jamais entendu parler. Il faut dire que le gouvernement de l'époque interdisait de révéler l'existence du moindre mouvement révolutionnaire (entendez « terroriste ») à l'intérieur du pays. Et qu'en plus, la guérilla en question (active au début des années '70) n'a compté que quelques dizaines de membres (environ 70, pour la plupart des intellectuels communistes, aidés d'une poignée de paysans locaux). Ceux-ci s'étaient installés au fin fond de la jungle amazonienne, sur les rives de l'Araguaia, parmi la population locale, dans le but de lui venir en aide (enseignement, soins médicaux,...) et de former sa conscience politique, tout en se préparant à lutter contre la dictature. Et de fait, le petit nombre de « terroristes » n'empêcha pas le pouvoir militaire de déployer 10 000 soldats pour écraser le mouvement.
En 1970, Leonardo (personnage fictif) a 20 ans et rêve de changer le monde, ou au moins son pays. Il disparaît de la surface de la terre, laissant ses parents et sa petite soeur Sofia dans le désarroi le plus total, eux qui ignorent tout de ses activités et de l'endroit où il pourrait se trouver, vivant ou mort.
En 1995, Sofia, qui n'a jamais pu faire le deuil de son frère adoré, se voit remettre par un ami un mystérieux cahier. Celui-ci contient un double récit, anonyme : celui d'une jeune femme racontant son arrivée dans une communauté paysanne et le terrible apprentissage des techniques de survie et de guérilla dans une jungle hostile, et celui d'un jeune guérillero décrivant son errance dans la même jungle mortifère après l'attaque de son village par les soldats.
Ce cahier est pour Sofia le point de départ d'une quête de la vérité sur la disparition de son frère. Ce récit et les circonstances de son écriture puis de sa découverte provoquant plus de questions que de réponses, elle décide de partir sur les traces de son frère, remontant, des années après lui, le cours de l'Histoire et de l'Araguaia.
Un tantinet trop larmoyant, ce roman captivant et édifiant met en lumière un épisode dramatique et méconnu de l'histoire du Brésil qui, malgré la censure de l'époque, resurgit des profondeurs d'une forêt amazonienne grandiose et démesurée, donc menaçante. Tout comme l'était la guérilla pour le pouvoir en place : « Ca n'était rien d'autre qu'un énorme délire, en fait. Des deux côtés. Dans un pays de cette dimension, ils croyaient qu'ils allaient faire la révolution juste en endoctrinant une poignée de paysans ! Et une armée entière à leurs trousses... Tout cela d'une inconséquence totale. D'un non-sens atroce. C'aurait été ridicule, si ce n'avait pas été si tragique ».

En partenariat avec les éditions Métailié.
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Leonardo était l'un de ces étudiants utopistes qui, au cours des années soixante-dix, ont tenté de lutter, aux côtés de paysans contre le régime brésilien en participant à la Guérilla de l'Araguaia… il était l'un de « ces jeunes engagés dans le militantisme étudiant peu avant d'entrer dans la clandestinité »
Aujourd'hui le fils est absent, il n'a pas rejoint sa famille…Sa soeur, qui était encore gamine à l'époque, a grandi dans ce manque, aux cotés de ses parents..Ce manque a lourdement affecté la vie familiale, le père se réfugia dans le silence et la fabrication de jouets pour Sofia, alors que la mère ne vivait que dans l'espoir d'un retour.
A la mort du père dans les années quatre vingt-dix, Sofia reprend les recherches qu'il avait entreprises en ne négligeant aucune piste, aucune rencontre. Elle s'appuie un cahier assez mystérieux transmis par un ami et écrit à la fois par un homme et une femme.
« Marcos était arrivé un jour, de nulle part, avec ce texte dans les mains. Il le lui avait donné en disant :
-Regarde ça, Sofia, c'est le journal de quelqu'un qui a participé à la Guérilla de l'Araguaia »
Ce cahier lui permet de comprendre à la fois ce qu'était la vie de ces paysans et étudiants rebelles, quel était leur idéal, et qui étaient ces combattants fuyant les soldats au coeur de cet environnement hostile à toute vie humaine..La jeune femme découvrait ce monde et l'homme était quant à lui un jeune guérillero racontant la mort de ses amis et sa fuite à la suite de l'attaque de son camp par les soldats… Environ dix mille soldats entraînés et cruels combattaient quelques dizaines d'étudiants et des paysans mal armés. Ils commettaient les pires exactions quand l'un des paysans ou quand l'un des étudiants avait le malheur d'être leur prisonnier.
De leur coté, les guérilleros n'étaient pas des anges. Eux aussi avaient du sang sur les mains.
Ces paysans et étudiants qui avaient rencontré Raoul Castro tentaient de reproduire au Brésil l'expérience cubaine. Ils espéraient mobiliser autour d'eux beaucoup plus de combattants. Idéalistes et généreux, ils voulaient une autre vie, une autre société pour le Brésil, dirigé à l'époque par une dictature militaire très dure.
L'auteure fait alterner les deux voix et les époques, nous fait voyager de Cuba à Brasilia en passant par la forêt amazonienne sans troubler le lecteur.
Bien que le dénouement soit connu, cette quête de Sofia est passionnante. Elle plonge le lecteur dans le quotidien de ces combattants, au coeur de leur entrainement, de leur espoirs, de leurs idéaux, et de la répression. Et dans la tragédie de leur fin! Émotions garanties
Découverte d'une époque, d'une guérilla méconnue, d'une partie de l'histoire mouvementée de l'Amérique du sud. Aujourd'hui encore il semble que le gouvernement brésilien, cache cette triste période.
Un livre récompensé dans son pays, le Brésil, par le Prix National Pen Club.
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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Le livre s'ouvre sur un récit assez dur. le narrateur revient au camp où tout a disparu sauf un carnet. Son carnet « Dans un trou dans le sol, près du mur de la maison, à l'intérieur d'une boîte en bois, il y avait le cahier où tu notais tout. le sang avait séché et la couverture s'était défaite, mais il était là…. Alors j'ai pleuré, pour la première fois, après tous ces jours où j'avais erré dans la forêt. »
Ce carnet, Sofia le tient entre ses mains, remis par son meilleur ami qui refuse de lui dévoiler le nom de la personne qui le lui a remis.
« Sofia lisait et avait l'impression d'être l'interlocutrice à laquelle il s'adressait ».
Des pages où la souffrance se bat avec la désillusion. L'homme décrit son calvaire. Il se cache dans la jungle pour échapper à la police militaire. Il fait partie d'un groupuscule révolutionnaire. Entré par conviction, il y est resté par peur. Là, il a appris à tuer et a tué. « Une mort pour une autre. Jusqu'où irons-nous ? » »
Sofia, sa soeur, ne se sent pas le droit d'être heureuse depuis la disparition de son frère. C'est la raison pour laquelle, elle décide de découvrir ou essayer de découvrir ce qui lui est arrivé. « Cette guérilla est une tache dans l'histoire du Brésil, Sofia, mais surtout à cause de la bêtise, de l'inutilité de tout ça. Une poignée de jeunes qui s'enfoncent dans la jungle dans un pays grand comme le nôtre, en rêvant de changer le monde. »
L'entraînement qu'ils suivent est dur à la limite de l'endurance et de l'humain, le je n'existe plus, c'est le nous qui doit l'emporter, pas d'histoires d'amour, que la préparation à la survie, le maniement des armes et l'endoctrinement avec une nourriture très chiche. Une poignée de jeunes gens, le plus souvent des intellos gauchos, qui croyaient aux théories cubaines et marxistes dans la jungle dont l'idéal était de venir en aide à la population locale en les éduquant, apportant des soins. Oh, ils n'étaient pas nombreux, mais le gouvernement brésilien a envoyé plus de dix mille soldats, les a chassés, pistés un à un pour les tuer après tortures si besoin. La violence n'était pas que du côté de la soldatesque. Les guérilleros ont appris à tuer, ont tué. Cela se passait dans les années 70
« Regarde ce qui est arrivé dans l'Araguaia : une tragédie, ils ont tous été tués. Des gamins. Quelques uns ont été torturés de façon horrible, et pour quoi ? Dis-moi pour quoi ?
Dans un pays de cette dimension, ils croyaient qu'ils allaient faire la révolution en endoctrinant une poignée de paysans ! Et une armée entière à leurs trousses… Tout cela d'une inconséquence totale. D'un non-sens atroce. Ç'aurait été ridicule, si ce n'avait été tragique. »
En lisant ce livre j'avais dans la tête la chanson de Brassens « Mourir pour des idées »
La lecture de ce carnet dur et émouvant permet à Sofia de retrouver trace de la vie de son frère, embarqué, par idéalisme, dans une histoire qui l'a dépassé et tué. Un hymne à un idéal bafoué ; cette faction d'obédience castriste n'est ni humaine ni pacifique.
Le Brésil a enterré cette partie de son histoire sous la chape de l'amnistie « L'amnistie cicatrise par la force, c'est l'oubli imposé, elle induit une sorte d'amnésie collective qui empêche une révision du passé ». Dans la mesure où l'on ne cherche pas à comprendre ce qui s'est passé, il n'y a pas de possibilité de pardon.
L'intrigue va crescendo, façon polar et l'écriture de Guiomar de Grammont fait que vous ne pouvez pas le lâcher ; besoin de connaitre la vérité sous les omissions, les oublis, les secrets.
Comme dans un précédent livre des éditions Métailié, le fils du héros de Karla Suarez, l'auteur brode sur la recherche du disparu et parle de ces conflits inutiles servi par l'orgueil des meneurs.

Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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Citations et extraits (2) Ajouter une citation
- Que lis-tu, jeune fille?
Sofia montra.
Luisa examina la couverture et regarda la petite fille, plus curieuse que fâchée:
- Ce n'est pas un livre de ton âge.
C'était "Madame Bovary" de Flaubert.
Sofia balbutia une supplique. Sa mère feuilleta longuement le livre, puis le lui rendit:
- C'est bien, lis-le. Mais rappelle-toi: rien de mal qui ne dure éternellement et rien de bien qui ne finisse par s'arrêter. C'est de la bêtise de mourir par amour. Toutes les passions ont une fin. C'est idiot de souffrir, prononça-t-elle, le visage impassible.
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La vie est ainsi, elle nous entraîne dans des chemins inconnus. Et il est difficile, souvent, de revenir en arrière. L'idée du retour est terriblement fastidieuse. Le mieux c'est de se souvenir des personnes que nous avons été et des êtres que nous avons aimés plutôt que d'affronter l'inconnu. Les regarder et comprendre que nous ne sentons plus rien, que le lien est définitivement rompu, qu'il n'y a pas de retour. Combien d'exilés ne vivent-ils pas ainsi? Sans passé, sans avenir, expatriés pour l'éternité?
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Video de Guiomar de Grammont (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Guiomar de Grammont
Guiomar de Grammont est écrivain brésilienne, son deuxième roman "Les ombres de Alraguaia" (édition métailié) est traduit pour la première fois en français, invité pour la deuxième fois dans le département par Hamilton Dos Santos elle est aujord'hui vendredi 6 octobre à 17h 00 à la médiathèque de Pézilla-la-Rivière et samedi 7 octobre à 10h00 à la médiathèque d'Argelès-sur-Mer!
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