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Critique de evascardapelle


Journaliste au New York Times puis au Washington Post, David Grann, titulaire d'un master de Creative Writing, est aussi l'auteur américain du roman "La cité perdue de Z", récemment (et remarquablement) adapté au cinéma par James Gray.
A travers "La note américaine", il nous propose un formidable voyage dans le temps en revenant sur la période la plus sombre de l'histoire de l'Oklahoma : les crimes perpétrés contre les Osages, peuple amérindien installé sur la réserve de Gray Horse en 1870.
L'enquête commence comme un roman, posant ses personnages, une famille amérindienne, celle de Mollie Burkhart et les Blancs, nouveaux riches, cow-boys ou escrocs.
L'histoire commence par un meurtre, dans les années 20, celui de la soeur de Mollie, Anna, qu'on retrouva au fond d'un ravin, une balle dans la tête, le début d'une longue série de décès suspects et de disparitions élucidées (ou non). "La note américaine", c'est celle que font payer les Blancs aux Amérindiens, ces Blancs, racistes, cupides, qui voient la situation se retourner contre eux à la faveur des Osages. En effet, ces derniers se sont trouvés expulsés du Kansas pour habiter les terres rocailleuses de l'Oklahoma. Pas de bol pour les Blancs, il s'avère que ces terres sont très riches en pétrole et que l'exploitation de la ressource va enrichir la tribu de Mollie Burkhart au delà de toute espérance. Le peuple Osage devient alors le plus riche de l'Amérique.
Il n'en fallait pas moins pour susciter les convoitises, déchaîner les esprits les plus vils, et orchestrer de terribles machinations. Il faut récupérer l'argent, cet argent que ces peuples améridiens ne méritent pas. David Grann dresse un constat sans équivoque des conséquences de décisions gouvernementales qui, par mépris, rendront le vol des richesses envisageable et accessible aux pires crapules. Il faudra, par exemple, attendre un bon nombre d'années après la résolution (partielle) de l'affaire, pour que les Osages soient autorisés à gérer leur fortune eux-mêmes et ne soient plus contraints de confier leur pécule aux "curateurs" (Blancs, évidemment), curateurs qui, voyant passer sous leurs yeux des sommes folles, n'auront qu'un objectif : dépouiller leurs clients. Au delà de l'aspect financier, les lois nient toute reconnaissance des peuples amérindiens, considérés comme incultes et stupides.
Plus largement, "La note américaine" nous rappelle que les décisions politiques moralisatrices restrictives en terme de liberté, la Prohibition par exemple, éveillent chez l'Homme les pires vices, favorisent la misère et, de ce fait, la corruption, le crime organisé, au lieu de protéger ses populations et de les faire "grandir".
Parallèlement, Grann raconte la création du FBI avec la prise de pouvoir de l'égocentrique et tyrannique J.E Hoover. Hoover tout aussi attaché à faire de cette traque une vitrine pour son organisation, que Tom White (coup du sort : "Blanc" en anglais !), enquêteur tenace, droit et courageux, l'est à débusquer celui (ou ceux) qui ont commandité les meurtres de la tribu Osage. Car, sans White et son équipe, envoyés en Oklahoma par Hoover, les disparitions des membres de la famille Burkhart n'auraient jamais été élucidées tant la perversité est de mise, le mode opératoire, complexe et la corruption, galopante.
Au fil de ses rencontres avec les descendants Osages, Grann prend la mesure (et le lecteur aussi) de l'envergure exceptionnelle de l'affaire dont maintes disparitions ne furent jamais élucidées et plongèrent dans la torpeur, l'angoisse et la détresse, les survivants. "Cette terre est gorgée de sang" commentera Mary Jo Webb, institutrice à la retraite qui enquêtera pendant des décennies sur la disparition non élucidée de son grand-père, comme bien d'autres le feront, en vain.
Enquête minutieuse, roman historique, "La note américaine" emportera par son écriture fluide les adeptes de la littérature américaine et amérindienne. Il paraît que Martin Scorsese en a commencé le tournage ce printemps. Espérons que le film soit à la hauteur du livre de David Grann.
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