Avant toute chose, dans ce roman, il y a le plaisir de la langue. C'est un brin désuet mais on se régale à la lecture des tournures passives.
Julien Green, auteur américain de langue française, a été l'un des derniers auteurs contemporains à utiliser abondamment le passé simple.
L'histoire ensuite : drame passionnel de facture classique mais baignant dans une atmosphère glauque du début à la fin. Un homme, Gueret, à la recherche de l'amour absolu qu'il croit trouver en la personne d'Angèle. On peut se laisser emporter par cette histoire qui m'a laissé un peu de marbre. Par contre les personnages féminins valent le détour, en particulier le combat au sommet entre Mme Grosgeorges, bourgeoise délaissée et hargneuse, et Mme Londe, sorte de mère maquerelle qui tient sous sa coupe un petit groupe d'hommes soumis et pleutres venant souper chaque jour dans son petit restaurant.
Ecrit au début des années 1930, ce livre subversif (On y aborde sans détour la prostitution et la pédophilie) est une attaque en règle du matriarcat possessif et castrateur. Dans cet écrit de
jeunesse, l'auteur a tout l'air de régler certains comptes. Ce roman est parfait pour rentrer dans l'oeuvre de
J. Green, grand auteur tombé un peu dans l'oubli de nos jours, avant de lire
Adrienne Mesurat, pour moi le meilleur livre que j'ai lu de lui.