Avec sa canne, son galurin, son voisin de pavillon goguenard, le tristement bien-nommé Hilarion Lefuneste, qui prend un malin plaisir à le faire tourner en bourrique et son père amateur de boissons fraîches et bien brassées, le flegmatique et débonnaire
Achille Talon, a tout du français moyen comme on en fait plus - et comme il n'en a peut-être jamais existé.
Sans baguette, ni béret mais avec le maniérisme désuet qu'il sait mettre en toutes choses et surtout dans les affaires de séductions qu'il entretient avec la pétulante Virgule de Guillemets, cet artiste du ridicule, poète des trottoirs parisiens, implacable cuistre et irrésistible clown incarne à merveille le simple quidam érigé en symbole, bien ridicule il faut l'avouer, d'une certaine classe à la française.
Un bonhomme courtois aux proportions, tant au physique qu'au moral, outrancières. Monstre de susceptibilité et de sensibilité, généreux jusque dans les défauts qu'il cultive comme des dons et qui le rendent si attachant.
Avec un inimitable talent pour transformer les événements de la vie quotidienne en scènes de théâtre abracadantes, Greg fait danser dans ses bulles la véritable vedette de ses albums, la langue truculente dans laquelle il fait s'exprimer des personnages plus farfelus les uns que les autres.
Car, il est question ici d'une authentique écriture comique servie dans des dialogues hilarants d'exagérations en tout genres, mêlant des raffinements de mauvaise foi et des sommets de grandiloquences à des envolées lyriques spectaculaires.
Une verve humoristique, proche du meilleur de
Pierre Desproges, qui met à la portée de tout lecteur la quintessence du potentiel comique de la langue française dans ce qu'elle a de fantaisiste, de délicieusement drôle, de potache, sans jamais céder au facile ou au vulgaire.
Si vous voulez transmettre l'amour de la langue à vos enfants, faites les d'abord en rire en leur donnant à lire
Achille Talon.