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Critique de Ode


« N'est-ce pas, Louis, que dans la vie de l'autre, il y a le passé qui compte et celui qui ne compte pas ? » Sur le ton de la confidence, à plusieurs voix, mais toujours à la première personne, Hélène Grémillon m'a prise en otage de son récit. Vous voilà prévenus : difficile de se défaire de ce roman avant d'en connaître la fin !

A Paris, en 1975, Camille, éditrice trentenaire, vient de perdre sa mère. Parmi les lettres de condoléances, se glisse celle d'un inconnu prénommé Louis qui relate ses souvenirs d'avant-guerre, auprès d'une certaine Annie. Croyant d'abord qu'il s'agit d'une erreur, ou d'une ruse d'écrivain, Camille se rend vite compte que cette lettre et toutes les suivantes la concernent. Elle va ainsi découvrir un passé familial qu'elle n'aurait jamais soupçonné.

Camille, Louis, Annie, Paul, Elizabeth... le Confident est un roman intimiste. Il ne faut pas attendre de longues descriptions de Paris ou de la Champagne, ni d'indications précises sur le physique des personnages. Tout se passe de l'intérieur, dans un registre d'émotions qui prend aux tripes, grâce à une tension psychologique savamment entretenue.

Dans le choix du sujet (un déchirant secret de famille) et de l'époque (la seconde guerre mondiale), on peut reconnaître l'influence d'autres auteurs. La plus évidente touche Philippe Grimbert avec Un Secret, mais aussi La Petite Robe de Paul, fourmillant de non-dits autour du couple, des origines et du désir d'enfant. Tatiana de Rosnay n'est pas loin non plus, car les retours dans le passé, l'Occupation allemande et les situations poignantes évoquent Elle s'appelait Sarah. D'autres références, plus fugitives, parsèment le récit. Ainsi, la mère d'Annie m'a-t-elle fait penser à Hannah dans le Liseur. Voir aussi l'allusion directe à La part de l'autre, d'Éric-Emmanuel Schmitt (page 43): « Quand je cherche le pourquoi de ce drame, j'en arrive toujours à la même conclusion, si Annie n'avait pas eu le goût de la peinture, rien de tout cela ne serait arrivé. J'ai cette certitude comme d'autres affirment que si Hitler n'avait pas été recalé au concours d'entrée des beaux-arts, le monde n'en aurait été que meilleur. »

Or tout en restant en terrain connu, l'histoire s'avère originale car dès que l'on pense avoir compris, une autre vérité vient bouleverser la donne. Certes, l'auteur y va un peu fort dans sa propension à faire mourir les parents de ses personnages... Mais moins il y a de témoins et plus on peut manipuler le passé, surtout à la faveur d'une période troublée comme celle de la guerre.
La manipulation (des êtres, des consciences, des sentiments, de la vérité...), avec ses conséquences désastreuses, est ainsi le maître mot de ce premier roman au succès bien mérité.
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