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Critique de Northanger


Un très beau roman qui retrace l'histoire d'une communauté de hippies, à travers le regard d'un de ses membres, Pouce alors enfant, des premiers temps enthousiastes à l'échec inéluctable.

Echec inéluctable comme nous l'indique le titre même du roman, Arcadia, du nom que s'est donné la communauté : l'Arcadie, région De Grèce, a depuis l'Antiquité une résonance mythologique d'âge d'or, de vie champêtre et pacifique. le vers de Virgile, Et ego in Arcadia, cité page 39 parce qu'il est gravé sur le linteau de la porte signifie en effet : « Moi aussi je suis en Arcadie » (la mort). Cependant, personne ne comprend la citation dans ce sens, et la seule qui voudrait l'expliquer, Astrid, est interrompue avant de pouvoir le faire. On a donc dès le début le sentiment d'être face à une utopie qui mènera les personnages de désillusion en désillusion.

C'est pourtant un projet séduisant qui anime les Êtres Libres : rénover une vaste demeure, Arcadia House, pour abriter tous les membres de la communauté dans l'espoir de vivre dans l'entraide, l'auto-subsistance et le retour à la nature, sans notion de hiérarchie, dans le respect de la vie, y compris la vie animale. En attendant, chacun survit comme il peut à Ersatz House, dans un bus ou un camion à pain… Chaque membre bien portant y joue un rôle, géré par les chefs d'équipe : les champs, les sanitaires, l'épicerie libre, la boulangerie, la laiterie de soja, l'épicerie fine… Une grande liberté règne dans la communauté cependant, et les diverses affinités nouées ne sont pas toujours sans heurts : un personnage nommé Wes, par exemple, se retrouve avec deux compagnes enceintes en même temps ! Peu à peu, nous assistons à la rénovation d'Arcadia House et à la mise en place de règles de vie précises. Cependant, le rêve ne dure pas, les arcadiens sont vite rattrapés par la réalité : mauvaise gestion des fonds, disette, jalousie et usage de drogue conduisent les hippies à se disperser.

Ce roman s'organise en quatre parties, les deux premières formant un contraste frappant avec les deux dernières : dans la première, Pouce a cinq ans, dans la deuxième quatorze ; dans les deux dernières, après la dissolution d'Arcadia, on le retrouve adulte, probablement âgé d'une trentaine puis d'une quarantaine d'années. Si les deux premières parties sont dépaysantes voire exaltantes, les deux dernières ont une tonalité essentiellement tragique qui m'a émue parce qu'elles évoquent ce qui nous attend tous malheureusement, la perte des proches et la dégénérescence liée à la vieillesse et à la maladie.

Le récit, mené à la troisième personne, constitue une mosaïque de sensations, de scènes observées par Pouce enfant, des bribes qui constituent le quotidien des arcadiens, saisies au hasard par cet enfant qui gardera en lui la nostalgie de cette vie communautaire.
Pas de longues descriptions, mais au contraire, de brèves notations descriptives puissantes et évocatrices, qui épousent le flux de la réflexion et des perceptions sensorielles du personnage.
Une écriture sensuelle, aux images poétiques faites de concision et d'associations surprenantes.


Étant habituée aux romans «classiques » qui nous emmènent vers un point défini en balisant le chemin d'indices sur la suite de l'histoire, j'ai mis du temps à m'habituer à cette narration qui évolue au fil du cheminement de Pouce à travers la communauté et nous laisse combler les blancs, déduire ce qu'il n'est pas en mesure de comprendre et d'analyser (la mort du Vieux Grigou au début, la dépression de sa mère suite à une fausse couche...). Une fois ce cap passé, je me suis passionnée pour la vie de cette communauté attachante et ses difficultés à concilier besoins vitaux et nobles idéaux.


C'est donc pour moi une lecture marquante que je conseille à tous. Je remercie chaleureusement les éditions Plon pour cette découverte !
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