Abigail n'arrivait toujours pas à se faire à l'idée que le voyage dans le temps était possible. Elle avait vu des films au cinéma qui traitaient du sujet, mettant en scène des appareillages totalement futuristes et des explications pseudo scientifiques alambiquées, quand bien sûr c'était expliqué. La plupart du temps, ce n'était que prétexte à des scènes d'actions, amenant toujours la réflexion du spectateur sur le même paradoxe ou sur les avantages -financiers- qu'on pouvait retirer de ces possibilités.
L'enseignement avait aussi fait un bond en avant. Le changement de paradigme du système solaire fut une des mises en pratique les plus utiles et les plus spectaculaires des découvertes annexes qui avaient été faites. Grâce à cette remise en cause, les enfants progressaient sans efforts à un rythme incroyable. Les notions élémentaires de justice et d'égalité étaient implantées profondément dès l'âge de cinq ans. Et, surtout, les connaissances et les valeurs étaient transmises de manière adaptée à chaque cas particulier.
Maintenant elle se rendait compte que savoir et apprendre permettait d'avancer dans sa propre direction, de se libérer du chemin mortel que d'autres avaient tracé pour soi. Apprendre commençait quand on posait ses propres questions et non quand on tentait de répondre à celles des autres. S'interroger sur soi, c'était le début du chemin, au cours duquel on se préparait à critiquer. La critique, celle de la chose apprise et surtout celle de soi même, c'était la clé qui rompt les chaînes qui entravent, c'était commencer à devenir libre. Et la liberté était bien plus importante à atteindre que le faux bonheur d'une vie sécurisée de prisonnier perpétuel.
Apprendre commençait quand on posait ses propres questions et non quand on tentait de répondre à celles des autres.
- (...) Vous m'avez dit être professeur. Quelle est la matière que vous enseignez?
- La science. L'Histoire. Les Réalités. Les langues. L'assassinat. Et aussi l'Auto-Déplacement K.
Il était inconcevable d’accepter l’idée que d’autres mondes puissent être aussi réels que celui dans lequel elle avait vécu toute sa vie.
Maintenant, elle se rendait compte que savoir et apprendre permettait d’avancer dans sa propre direction, de se libérer du chemin mortel que d’autres avaient tracé pour soi.
Les émissions en direct, les fictions de tout nature et les programmes de téléréalité avaient disparu du réseau Com’vidéo depuis la Grande Elevation. Elles avaient jusqu’alors représenté un frein à l’émancipation spirituelle des individus, les enfermant dans une spirale de dégénérescence cérébrale et les conditionnant à un asservissement mercantile devenu néfaste.
La notion de destin avait ses avantages, dont le principal était de ne pas avoir à prendre de risques. Comme il fallait absolument obéir à la dictature de son Moi, on lui apportait une aide extérieure pour qu’il trouve les excuses qui le laisserait plus facilement exprimer pleinement sa triomphale intelligence. Le destin, c’était une solution pour égo paresseux. Et si ça ne suffisait pas, on le fournissait en solution ultime : Dieu. Le parfait alibi pour ne pas même avoir à s’excuser de soi-même.
Pour le moment, elle était confortablement installée, occupée à se faire ouvrir les canaux, en musique.