En français, il y a un seul mot pour désigner le temps qui passe et le temps qu'il fait. Ce n'est pas comme l'allemand qui différencie « Zeit » et « Wetter » ou l'anglais qui a « time » et « weather ». En fait, je pense que c'est surtout les langues latines qui n'ont pas cette distinction.
Les réflexions de
Denis Grozdanovitch entremêlent ces deux dimensions du temps autour de la vie, des loisirs, de la lecture, de l'écriture. Il pose un regard sur les différents phénomènes météorologiques comme la pluie, les nuages, le vent, la neige et la manière dont ils influencent ses loisirs ou sa découverte de villes comme Paris, Londres, New-York ou Venise.
Puis il s'intéresse au temps qui passe et à sa fuite. Est-il possible de l'arrêter, de répondre à l'appel que lance Lamartine dans « Le lac » ? Grozdanovitch pense que c'est notre « emploi du temps » qui nous permet d'acquérir une certaine liberté physique ou intérieure. Il y a également la prise de notes au quotidien qui est un moyen de ralentir le temps et de récolter des « instants de furtive éternité » comme les appelle
Charles-Albert Cingria. On peut y ajouter aussi la musique, la contemplation des oeuvres d'art ou le jeu d'échecs.
Certaines digressions philosophiques de l'auteur m'ont un peu lassé. Mais il a le bon goût de convoquer au milieu de ses réflexions d'autres auteurs comme il le dit lui-même : « Puisque je ne puis désormais, en sus de mes inévitables digressions, me dérober à cette mission devenue mienne d'être un passeur littéraire... » On rencontre ainsi des auteurs variés comme Horace, Brodsky,
Lewis Caroll et
Marcel Proust évidemment, lui qui « recherchait le temps perdu ». Parmi les compagnons de réflexion de Grozdanovitch, on croise encore des auteurs qui me sont chers, notamment
Claudio Magris - avec des citations de «
Danube » et de «
Microcosmes » (qu'il va falloir que je relise !) - et toute une pléiade d'écrivains suisses comme
Georges Haldas,
Charles-Albert Cingria,
Nicolas Bouvier et Jean-François
Duval (que je ne connaissais pas). Terminons cette agréable variation littéraire sur le temps avec une dernière citation d'un autre écrivain suisse qui n'a pas hésité à tenir son journal pendant 42 ans : c'est Amiel qui nous confie : « Prendre le temps comme il vient et les hommes comme ils sont, cette sagesse-là vaut mieux que la majesté hautaine. »