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EAN : 9782070425099
441 pages
Gallimard (27/11/2002)
3.69/5   32 notes
Résumé :
Quatrième de couverture :

3 mars 1942
On les avertit dès le matin du lundi qu’ils allaient être fusillés. Vildé vit sa femme dans la matinée et eut la force de ne rien lui dire. L’après-midi, on les conduisit de la prison de Fresnes au mont Valérien. Ils traversèrent tout Paris entassés dans un camion avec leurs gardes. Ils chantaient. On épingla à chacun un carré de papier blanc à la place du cœur et ils furent tués presque à bout portant. Vi... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Pourquoi j'ai voulu relire ce livre ?
Dès le moment où j'ai attrapé des boutons en voyant la dernière couverture de chez Folio.
Sur mon édition en Livre de Poche, en couverture, défilent au coeur de Paris, des soldats allemands membres d'une fanfare. Ce sont les années noires. Quand Gallimard se détache de Hachette, pour créer la collection Folio, ce titre est repris avec une couverture similaire (toujours des soldats allemands qui défilent dans Paris en musique).
Mais sans doute que cela gène un peu aux entournures quelques personnes, qui sont prêtes à modifier la couverture afin de gommer une partie de notre histoire ?
Quel est le martien, chez Gallimard, qui a pris cette décision de mettre en couverture des jeunes gens (sans doute des FFI) qui se baladent tranquillement dans une rue (plus de notion de lieu, exit Paris) pour illustrer un journal des années noires 1940-1944 ? Ne sait t'il pas que la France a connu l'occupation des troupes allemandes pendant cette période ? N'a t'il pas lu ce livre, pour ne pas s'apercevoir que ces jeunes gens sont "évoqués" cinq pages avant la fin quand le général Leclerc entre dans Paris ?
Je déteste les falsificateurs de l'histoire.
Alors faites moi plaisir, si ce livre vous tente achetez une ancienne édition.
Car il mérite d'être lu par toute personne qui veut comprendre ce que furent ces années là, en comprendre l'atmosphère.
Jean Guéhenno n'est pas un virtuose de la plume (bien que professeur). Parfois il pontifie se croyant devant ses élèves, mais cela ne dure jamais longtemps. Il sait truffer son récit d'anecdotes qui rendent le livre agréable et son témoignage est au plus près des événements.
J'avais lu ce livre avec bonheur, il y a plus de vingt ans. J'ai pris quelques rides, pas lui.
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Jean-Guehenno ne nous parle pas seulement du quotidien de la guerre mais aussi de ses réflexions sur l'histoire, la politique, du comportement des hommes: ceux qui résistent et ceux qui collaborent. On croise quelques grands écrivains de l'époque (Valéry, Gide, Paulhan, Montherlant), et les autres (Drieu la Rochelle, Brasillach), on découvre leurs faiblesses, leurs ambitions et leur grandeur également.
Et puis il nous parle du courage de résister, de la fierté et du découragement, de ce qu'est un homme.
Le style est celui de l'époque, un peu vieux jeu mais reste tout à fait lisible.

C'est bizarre, mais au fur et à mesure que j'avançais, j'avais l'impression que ce livre venait d'être écrit récemment. Il y a tant de passages, de réflexions qui conviendraient encore aux événements et aux hommes d'aujourd'hui.
Je ne résiste pas au plaisir de mettre plusieurs citations ici, et surtout d'y ajouter mes propres rapprochements:

J'ai pensé à J.P Pernaud sur TF1. Pourquoi donc ?
"Le père-procureur, plein de scrupules devant le micro, devant cette diabolique machine qui chasse de partout le silence, s'est résigné à dire au monde ce qu'était la vocation de ses moines : " La contemplation dans la solitude. " Sur quoi, sans transition, le reporter, d'une voix assouplie par la grâce, nous a conté comment depuis dix siècles, le secret de la chartreuse (la liqueur), avait été providentiellement transmis de procureur en procureur. Tant de vulgarité offense, mais le comble est que cette radio édifiante soit, tout compte fait, assez bien adaptée à la religion commode de tant d'excellents paroissiens qui, le dimanche, vont à la messe de onze heures, communient, " mangent le corps du Christ ", déjeunent là-dessus plantureusement et la digestion de tant de biens étant difficile, recourent vers les deux heures, à la chartreuse des bons pères."

Ici, ce sont les Sarkozy, Hollande, Valls qui me sont venus à l'esprit:
"Les nouveaux grands hommes de ces nouveaux temps, Hitler, Staline, sont des grands hommes de masse. [...] Un grand homme des époques civilisées était grand précisément par ce qui le distinguait de la masse, l'intelligence, la volonté, la culture, la finesse de l'esprit ou du coeur. Ces nouveaux grands hommes sont
grands par ce qui les fait semblables à elle, et ce peut être un assez grossier bon sens, la brutalité, l'inculture. Sans doute le maniement même des affaires peut-il les rendre admirablement rusés et faire d'eux d'étonnants praticiens. Mais il faut, pour qu'ils gardent leur prestige et leur force, qu'ils gardent aussi leur inculture et leur brutalité. Il faut qu'ils restent des primitifs."

"Comment ne pas penser à ces pitoyables ministres que nous avons connus et que nous connaissons en France, qui laissent à des attachés de cabinet le soin d'écrire leurs discours, soit qu'ils y attachent peu d'importance, soit qu'ils en soient incapables. Un grand politique agit-il jamais de la sorte ? Imagine-t-on Mirabeau, Danton, Robespierre, lisant les discours de leurs secrétaires ? le mouvement du discours doit être le mouvement de l'homme même."

Et George Bush avait déjà des émules:
"Je relis l'admirable essai de Benjamin Constant sur l'esprit de conquête. " Il est inépuisable, le vocabulaire de l'hypocrisie et de l'injustice. Certains gouvernements, quand ils envoient leurs légions d'un pôle à l'autre, parlent encore de la défense de leurs foyers ; on dirait qu'ils appellent leurs foyers tous les endroits où ils ont mis le feu."

"Vichy, pour orienter la haine des Français, a fait publier les noms des francs-maçons. Mais la publication n'a pas eu l'effet espéré. [..] presque aucun des grands noms de la troisième République ne s'y retrouve. Alors Vichy, se sentant ridicule et pour se rattraper, explique aujourd'hui, que nous ne devons pas être dupes, que "
la maçonnerie était une société doublement secrète, qu'elle cachait ses activités non seulement au public, mais également à une partie de ses membres ", etc…"

Quelques passages rappelant trop nos grands intellectuels télévisuels:
"Autre collaborateur : X… Célèbre par ses " alternances ", mais aussi par la constance de sa fatuité et de son cynisme. Un jeune centaure imbécile, moins homme que cheval. Il faut qu'il piaffe, qu'il caracole. Serait-ce dans la boue et la merde. Cela éclabousse les autres, mais lui fait à lui une auréole. Homme de lettres accompli aussi brillant que vide. Vedette. Enfant gâté de cinquante ans qui mériterait d'être fouaillé, mais qui y trouverait, pour peu qu'il y eût un public, trop de plaisir."

"Michelet parle de ces contorsions et de ces grimaces que faisaient les esclaves à qui l'empereur accordait la vie sauve et la liberté, si, au milieu des tigres et des lions, ils parvenaient à traverser le cirque en portant un oeuf qui roulait sur un plat. Mais il s'agissait de la vie et de la liberté. Nos grimaciers, eux, craignent seulement qu'on les oublie.[..] L'histoire des deux derniers siècles nous a portés à accorder à l'homme de lettres un crédit qu'il ne mérite pas. Ce n'est le plus souvent qu'un amuseur entre d'autres. Et comme à n'importe quel salarié il lui arrive, pour s'en faire bienvenir, de grimacer devant le patron."

"Les hommes de lettres ne sont pas peut-être si importants et c'est leur faire beaucoup d'honneur que d'attribuer à leurs fautes mêmes tant de gravité.sortes d'hommes de lettres. Un très grand nombre ne songe qu'à s'amuser et à nous amuser. Footit et Chocolat (2 clowns) ont tous les droits de s'étonner et d'ouvrir des yeux ronds dans leur visage enfariné si nous les traitons soudain comme des directeurs de la conscience publique. Et puis ils ne disent jamais, après tout, que ce que nous leur permettons, leur demandons de dire."

Et puis quelques uns de mes contemporains:
"Un homme d'autrefois qui ne savait pas lire se sauvait par la méfiance. Il se savait ignorant, aussi bien qu'un Descartes, et était en garde contre quiconque parlait trop bien. Il pensait seul, ce qui est l'unique manière de penser. Un homme d'aujourd'hui qui a appris à lire, écrire et compter, n'est par rien protégé contre sa vanité. Un diplôme certifie son savoir. Il y croit, il en est fier. Il lit le journal, il écoute la radio, comme les autres, avec les autres. Il ne pense plus jamais seul. Il croit ce que lui disent le journal, la radio, comme les autres, avec les autres. Il est livré à la publicité, aux propagandes. Une chose est vraie dès qu'il l'a lue. La vérité n'est-elle pas dans les livres. Il ne pense pas que le mensonge y est aussi."

"Cent jeunes gens à qui je parle sont bien plus savants en géométrie que ne l'était Euclide, mais peu d'entre eux sont capables de faire réflexion qu'Euclide est un grand géomètre et eux, rien. Plus que les résultats des sciences, il faudrait enseigner leur histoire,[ ...] faire comprendre qu'un savant n'est pas un homme qui sait mais un homme qui cherche, accablé et exalté tout ensemble par l'idée de ce qu'il ne sait pas. Ainsi ferait-on des hommes indépendants et forts et non des bêtes vaniteuses et serviles."
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Bref, j'ai beaucoup aimé malgré quelques longueurs qui expliquent la note que je lui ai attribuée.
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Il est très rare que je débute une chronique par une citation. Jusqu'à cette lecture, je m'étais plié à cet exercice qu'une unique fois. Comme quoi… Je quitte mes mondes habituels pour retourner dans une période chaotique de notre beau pays, à savoir la seconde guerre mondiale. Généralement, j'aurais tendance à lire plusieurs romans dans l'année mais cette fois, et j'ignore pourquoi, j'ai un peu calmé le jeu, préférant des lectures bien plus reposantes. Ici, je sais reconnaître que je me suis montré déçu par le récit de l'auteur et concernant cet être, il a su m'agacer à de très nombreuses reprises. Même si je sais que les atrocités furent légions lors de cette époque horrible, je fus étonné de ne pas trouver grand-chose à ce sujet, au sein de ce journal. Cela doit expliquer en grande partie ma déception. D'ailleurs, j'ai pu constater je n'étais pas le seul pour qui cette expérience littéraire fut difficile… et après ces quelques lignes, il est temps pour moi de passer à la rédaction de mes fameuses listes.

Points négatif :

• L'auteur. C'est un être que je n'aurais pas aimé avoir comme ami car très injuste à mes yeux mais aussi très lâche. Très critique envers son prochain alors que son quotidien fut tout de même bien plus facile. Tout d'abord, l'homme se plaît à se décrire comme étant de la bourgeoisie et même si la plupart de ses voisins peinent à joindre les deux bouts, notre cher ami ici présent a tout de même la chance d'exercer une profession plutôt bien rémunérée. Il se montre acerbe envers la population française, terrorisée vu le contexte dans lequel se déroule ce récit, et enrage que personne ne fasse rien… Alors que monsieur Guéhenno est tout de même le premier à se tourner les pouces, à voyager chez des amis à l'autre bout du pays, à passer de longues journées à lire tranquillement ces acquisitions littéraires… bref, un joli donneur de leçon.
• On se perd très vite dans les nombreuses pensées de l'auteur. Ces dernières partent dans toutes les directions et forcément, cet ensemble provoque de jolies longueurs. Je ne compte plus le nombre de fois où j'ai du relire la même confession.

Points positifs :

• La taille aléatoire des notes.
• Mine de rien, j'ai su apprécier le regard de l'auteur face à la politique de l'époque et merci à lui d'avoir laissé quelques traces sur la conduite menée par Pétain.
• Monsieur Guéhenno a su m'étonner selon certaines de ses lectures. D'ailleurs, il a su conserver une trace de ses nombreux voyages littéraires au sein de son journal tout en partageant ses impressions.
• Enfin, plus on avance dans ce livre et plus on sent la pression quitter nos épaules. Il faut croire que l'approche de la liberté joue également sur la nôtre.
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Lu il y a bien longtemps, dans la bibliothèque de mon père. Je garde le souvenir d'une prose lourde, d'une atmosphère lourde, d'une dépression. le tout rend si bien la vérité de l'époque, que je décidai, du haut de mon adolescence, que que ce prof ennuyeux et sûrement déjà vieux était aussi un honnête homme.
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intéréssant bien que parfois légèrement détaché...
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critiques presse (1)
Telerama
17 septembre 2014
Document exceptionnel sur le quotidien de l'Occupation, ce Journal témoigne aussi du désarroi et de la colère d'un homme contre un régime et sa propagande. Un homme cherchant également à évaluer les indices culturels et politiques qui ont conduit à une telle catastrophe.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (20) Voir plus Ajouter une citation
Au retour, un ami et moi, nous nous étions arrêtés un instant à bavarder avec Pierre M...
Passe la belle Mme K...,suivie de son petit chien, et le petit chien est venu se faire caresser par Pierre M.., puis a couru rejoindre sa maîtresse.
Elle allait chercher du pain. Nous étions encore là quand elle est repassée, et de nouveau le petit chien l'a quittée pour se faire caresser par Pierre M...
Je n'avais, quand à moi, rien remarqué, mais mon ami a de terribles yeux.
Quand nous avons été seuls : - "Quels traîtres que ces chiens, dit-il, ils livrent tous les secrets."
Et comme je ne comprenais pas, sentencieusement : "Le petit chien chérit l'amant de sa maîtresse."
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13 décembre 1940

Discours du chancelier Hitler aux ouvriers du Reich. Je viens d'en lire le texte en allemand. Autant que je puisse juger, c'est une langue horriblement impure, ignoble, mais le mouvement y est, qui fait l'éloquence et lui assure sa prise. La pensée est confuse mais brutale, étonnamment adaptée au public. Ce pourrait aussi bien être un discours de Thaelmann ou de Thorez.
Toute idée claire se perd dans ce gâchis de mots. Le communisme et le national-socialisme s'y accordent par ce qu'il y a en eux de plus bas.
Comment la foule malheureuse s'y reconnaîtrait-elle ?
Elle suit, elle ne peut que suivre. Et tout cela est désespérant.
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3 décembre 1941

Le XVIIIe arrondissement (Montmartre) est puni. Couvre-feu à 17h30, etc.
Pour une fois, j'ai pu avoir des renseignements un peu précis. Dans un bordel, 41 rue Championnet, l'autre soir, des officiers allemands prenaient avec ces dames leurs ébats. L'idée leur vient de faire marcher un pick-up.
Le pick-up cachait une bombe à retardement. La bombe a explosé.
Trois de ces dames et deux de ces messieurs ont été tués.
HELDENTOD, ajoute drôlement mon ami en me rapportant la nouvelle; et il évoque les nobles lettres qui annonceront à leurs familles, à toute l'Allemagne, la mort de ces héros.
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24 août 1940

Le 13 juin, le jour même de la débâcle, je rencontrai un vieux professeur d'Histoire et comme je l'interrogeais sur les causes d'une si rapide catastrophe: "Ah ! me dit-il, il ne faut pas en chercher les raisons trop près de nous, dans la plus récente Histoire . C'est le dénouement d'un drame qui se développe depuis plus de cent ans . Voilà où nous a conduits le conseil de M.Guizot : " Enrichissez-vous" Ne souriez pas. L'esprit de bourgeoisie a fini par tuer la démocratie . Il a tout envahi par contagion, est passé des bourgeois aux paysans, aux ouvriers . La vertu républicaine s'est perdue . On enseignait la personnalité : les gens entendaient intérêt personnel . Michelet avait prévu tout cela . Rappelez-vous ses grands livres d'éducation civique, ce culte de l'effort, ce culte d'Hercule qu'i lrecommandait. Rappelez-vous ses dénonciations du mercantilisme, de l'industrialisme, du capitalisme, du saint-simonisme, toussystèmes qui font plus de part à l'administration des choses qu'à la formation des personnes . Il n'y a plus de peuples, il n'y a plus d'hommes,il n'y a plus que des masses . C'est pour cela que la République a perdu .
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Péguy, quand il fut tué en 1914, était à la veille d'être mis à l'index. Tout ce qui "pense bien" en parle aujourd'hui comme d'une sorte de saint. L'église est merveilleusement habile à tirer parti de la gloire temporaire de ses fils. Elle a condamné Pascal, mais, Pascal ayant décidément réussi dans le monde, il faut que ce succès tourne à la plus grande gloire de Dieu. Nul désormais ne parle plus tendrement de Pascal qu'un Jésuite. On canonise morts les hommes qu'on a persécuté vivants.
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