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EAN : 9782020291538
260 pages
Seuil (02/05/1996)
4.38/5   8 notes
Résumé :
Cinq ans après l'effondrement du communisme, un étrange désarroi hante la modernité démocratique. Triomphante dans les faits, celle-ci dissimule, sous l'intrépidité conquérante du mondialisme, un sentiment de vide, d'épuisement, de doute. L'universalité des lumières, dont nous pensons être les dépositaires, n'exerce plus le même pouvoir d'attraction. Ni au-dedans ni au-dehors. Partout se manifestent des refus, des révoltes, des rejets qu'on ne saurait mettre exclusi... >Voir plus
Que lire après La trahison des Lumières. Enquête sur le désarroi contemporainVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Il convient d'abord de restituer cet ouvrage à sa place, au coeur de l'Europe occidentale, et à l'heure de sa rédaction, dans les années nonante, après les funérailles du communisme alors que la joie fut brève d'un monde réconcilié sur les pierres éboulées du mur de Berlin. Les fantômes du nouveau millénaire se dressaient déjà sur le corps du siècle mourant.

La première mise en garde de Jean-Claude Guillebaud concerne les attitudes et bavardages contemporains teintés de «nostalgie recroquevillée». Passons sur les engouements de magazines, ceux pour les sixties ou les boiseries d'époque, qui ne doivent pas plus inquiéter que si nous projetons de suivre la tournée des idoles "Âge tendre". Plus préoccupants sont ces regards inquiets tournés vers les vieux démons, le retour du mal, qui ne doivent pas faire oublier de vraies préoccupations. Entendons bien : qu'il ne s'agit pas de réhabiliter des opinions extrêmes. Mais préparer la guerre précédente, attendre les nazis l'arme au pied a pour inconséquence que l'on risque d'oublier les problématiques «subalternes» comme l'argent fou, l'individualisme, la techno-science, le mensonge médiatique ou le scientisme revigoré.

L'idée critique de cette enquête réside dans l'abandon progressif par l'Occident des principes qui en faisaient un modèle.

Qu'est-ce qui ne fonctionne plus dans la démarche «universalisante» de nos société riches et libres ? Une consolation serait de convoquer, au-dehors, la persistance de l'obscurantisme, la régression intégriste, les complots du terrorisme, le désenchantement du sous-prolétariat du tiers monde ou l'imposture des dictatures tropicales. C'est pourtant moins le dehors qui est en crise que le dedans, constate Guillebaud. Je retiens, dans un bas de page, une citation cinglante de Cornélius Castoriadis ("Le délabrement de l'Occident", Esprit, décembre 1991) : "Quel est donc "l'exemple" que ces sociétés de capitalisme libéral fournissent au reste du monde ? D'abord celui de la richesse et de la puissance technologique et militaire. Mais contrairement aux dogmes marxistes et même "libéraux", cela en tant que tel n'implique rien et n'entraîne rien quant à l'émergence d'un processus émancipatoire. Ces sociétés présentent au monde une image repoussoir, celle de sociétés où règne un vide total de significations. La seule valeur y est l'argent, la notoriété médiatique ou le pouvoir au sens le plus vulgaire et le plus dérisoire du terme. Les communautés y sont détruites, la solidarité est réduite à des dispositions administratives. C'est face à ce vide que les significations religieuses se maintiennent ou même regagnent en puissance."

C'est sans doute moins l'utopie mondialiste, l'universel ou l'émancipation démocratique qui déclenchent la peur et le repli à l'extérieur, mais plutôt leur traduction idéologique méprisante et impériale. "Le déracinement de la modernité – il résume à lui seul toute l'aventure humaine – n'est pas détestable, continue Guillebaud, c'est l'injonction au déracinement venu du dehors". Simone Veil écrivait en 1949 : "c'est un devoir pour chacun de se déraciner mais c'est toujours un crime de déraciner l'autre". le mondialisme refusé est celui qui prétend imposer la corruption de ses élites, l'arrogance de ses banquiers, le cynisme des nantis et la démission de ses intellectuels. Ce n'est pas celui des Lumières.

À présent que vous percevez l'esprit de l'essai, en arrêter ici le compte-rendu sera frustrant, mais les longs billets découragent (nous ne les lisons pas) et manquent leur but (nous n'en retenons rien). Revenons-y petit à petit, en soulignant quelques points marquants dans les prochains jours.
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Ce court essai s'ouvre sur la chute du Mur . Moment emblématique où l'on put croire à la fin des totalitarismes . Et pourtant nos sociétés sont en plein désarroi ( le livre est sorti en 1995 , il ne me semble pas que ce constat soit obsolète bien au contraire) ; JC Guillebaud avec un regard caustique et une langue brillante , essaie de nous faire réfléchir aux racines de ce malaise . On peut ne pas partager ses options mais le travail est sérieux , honnête et , donc , enrichissant.
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Un Essai écrit en 1995 Une vision sur le monde et sur la chute du mur de Berlin en 1989 incroyablement bien écrit,bouleversant de vérité et de justesse (pratiquement un livre d'histoire)
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Désormais, ce n'est plus une crainte, c'est un constat qui hante le débat politique. Qu'il s'agisse de la ruine de la citoyenneté, de la déliquescence syndicale, de la grande panne éducative, de l'effondrement du civisme, du repli frileux sur la sphère privée, du déclin des modèles de parenté ...
tous ces phénomènes participent d'une même origine: La victoire définitive du «moi» sur le «nous»,la dissolution programmée du lien social.
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Fragilités démocratiques
Chez nous,en Occident, règne encore l'indolence repue et la profusion des marchandises. Nous bivouaquons dans un présent gavé de pain et de jeux. Les temps ne sont durs que pour quelques-uns.Collectivement, en effet,nous avons transféré le poids du présent sur les épaules d'une minorité malchanceuse. Les exclus,ces nouveaux esclaves, assument à eux seuls le souci des dettes.Pour le reste,le scepticisme désenchanté et la dérision rigolarde gouverne l'air du temps.Mais la peur du manque, en vérité, est obscurément revenue dans la cité. Et avec elle, la conscience d'une insécurité nouvelle, d'un ébranlement souterrain.
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Si l'Occident est en crise, c'est parce qu'il a cessé d'exercer sur lui-même la capacité critique qui le constituait.
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Toute guerre politique se ramène peu ou prou à cette ambition rhétorique : investir symboliquement le lieu d'où procède l’innocence. Ainsi le démagogue de l'humanitaire, persécuté par procuration, s'enveloppe-t-il dans le chagrin des mourants, comme le tribun romain dans sa toge. C'est obscène mais ce n'est pas nouveau. Le politicien retors qui parle au nom des miséreux de son canton fait-il autre chose ?
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On n'insistera pas non plus sur la maniaquerie commémorative qui - en France surtout - rassemble tous les trois jours la communauté nationale autour d'un anniversaire héroïque, une figure emblématique, la preuve répertoriée d'une énergie ancienne ou d'un courage notoire. Révolution de 1789, appel du 18 juin, débarquement de Normandie ou de Provence, Libération de Paris et autre lieux : depuis dix ans, on commémore comme on respire.
Certes, en France, plus que nulle part ailleurs, la mémoire est constitutive de l'identité nationale.
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