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EAN : 9782081375345
272 pages
Flammarion (14/09/2016)
3.51/5   54 notes
Résumé :
Le géographe constate que les classes dominantes captent l'essentiel des bienfaits de la mondialisation en imposant un modèle inégalitaire et défendent un discours qui décrit leur réalité mais pas celle des classes populaires. Le discours anti-Front national n'est alors qu'un prétexte et exclut encore un peu plus la France périphérique.
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Dans son dernier opus, le géographe Christophe Guilluy reprend la thèse provocatrice qui avait fait le succès de ses deux précédents essais : "Fractures françaises" (2013) et "La France périphérique" (2015).
Cette thèse a le mérite de la simplicité : deux France s'opposent, la France des métropoles, connectée, hypermobile, multiculturelle, et la France périphérique des villes petites et moyennes et des territoires ruraux, condamnée à la sédentarité et en voie de désaffiliation des structures traditionnelles (partis, syndicats...).

Je me souviens de l'intérêt qu'avait provoqué chez moi, l'an passé, la découverte de cette thèse. Cet intérêt est à l'origine de la curiosité suscitée par "le Crépuscule de la France d'en haut" et le désir de le lire. Las ! dans son nouveau livre, Christophe Guilluy se borne à surfer sur la vague d'émotion causée par sa thèse et à la nourrir. Il le fait dans le style, pas vraiment sympathique, qui est le sien, procédant non par démonstration mais par affirmation, utilisant quelques formules (la "fanfare républicaine", les métropoles-nouvelles citadelles, la "métropolisation" visage géographique de la mondialisation, le brouillage des classes, la ville ségrégée, l'évitement social, etc.) censées valoir par la seule force de leur répétition.

Contrairement à ce qu'on son titre annonce, le sujet du livre est moins le crépuscule que le procès de la France d'en haut. Sans doute Christophe Guilluy ne porte-t-il pas dans son coeur les élites qui peuplent les quinze plus grandes métropoles françaises. Il leur reproche leur hypocrisie : elles prônent une "société ouverte" et multiculturelle, mais pratiquent de fait, dans le choix de leur résidence et de l'école de leur enfant, l'entre-soi. La charge contre la gauche hashtag et contre tous les bobos – qui se voient bohêmes mais n'en demeurent pas moins avant tout bourgeois – n'est pas toujours habile ; elle n'en est pas pour autant dénué de pertinence : « quand un bobo achète les services d'une nounou africaine, cette « exploitation traditionnelle du prolétariat » sera habillée d' « interculturalité ». Mais si Fatoumata garde les enfants de la petite bourgeoisie, qui gardera les enfants deFatoumata ? » (p. 76)

Pour autant, la détestation qu'il leur voue ne suffit pas à annoncer leur inexorable déclin. Car face à elles, les populations défavorisées qui peuplent la France périphérique ne préparent aucun « grand soir ». le mouvement des Bonnets rouges, que Christophe Guilluy évoque mais qu'il n'étudie pas, aurait pu nourrir la thèse d'une France au bord de l'explosion sociale. C'est moins de révolte que de désaffiliation - ou de "marronnage" pour reprendre le titre du quatrième et dernier chapitre du livre - dont il est question : ces populations qui ne se sentant plus écoutées, plus comprises, plus représentées, abandonnent lentement le navire.

Notons l'intéressante conclusion à laquelle arrive Christophe Guilluy. Elle concerne moins, répétons-le, la France d'en haut et son soi-disant déclin que la France d'en bas. Remarquant non sans motif que « le multiculturalisme à 1000 euros par mois » (p. 203) n'est pas facile à vivre [comprendre : des revenus aisés permettent de tenir un discours multiculturaliste en évitant de devoir en payer le prix quotidien alors que les populations des banlieues de métropoles ou des zones abandonnées de la périphérie n'ont pas cette option-là], l'auteur prédit que : « l'affrontement communautaire à redouter n'est pas prioritairement celui qui opposera les « petits Blancs » aux « musulmans », mais celui des minorités entre elles sur des territoires qu'elles sont contraintes de partager. » (p. 216). Il en donne pour exemple, non pas la Seine Saint Denis ou les quartiers nord de Marseille mais … la Corse qui a, en effet connu en décembre 2015 à Ajaccio et en août 2016 à Sisco d'inquiétantes poussées de violence.
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Guilluy est devenu le penseur fétiche de cette portion des bourgeois bohèmes qui aiment s'encanailler... intellectuellement en se faisant passer pour frondeurs (c'est moins fatigant que de sortir de son hôtel particulier dans le 5e pour aller à Saint-Denis ou de sa villa de Sologne pour aller voir les paysans). Son nom est de toutes les joutes bavassières dans les salons de Paris (car à la cambrousse, on n'a jamais entendu parler de lui). Entre les pro-Guilluy (bobos de droite) et les anti-Guilluy (bobos de gauche), les vocables blessants fusent, impitoyables, parmi les bonbonnières Ikea: "méchant!"- "ouh, la vilaine!" etc.

Cependant, Guilluy n'est pas la vie. Guilluy n'est pas la vérité. Guilluy est lui-même, par le milieu social et professionnel auquel il appartient, un bobo. Il prétend venir de Belleville, la belle affaire. C'était il y a longtemps, et l'enfer, à l'époque, ne nous était pas encore tombé dessus. Aujourd'hui, que sait-il des banlieues? Rien. Des statistiques. Que sait-il des campagnes? Rien. Des statistiques. Il est gérant d'une société de marketing.

J'ai grandi dans une banlieue à haute criminalité, et j'ai choisi la ruralité profonde. J'ai été chômeur, j'ai été au RSA. Je serais donc, en théorie, le parfait exemple de ces individus dont Guilluy parle et qui incarneraient la "France périphérique" (le buzzword qui ne veut rien dire, mais tellement bobo!) Or je ne me reconnais en rien dans ce que raconte Guilluy. En rien. Je ne reconnais rien de la réalité des banlieues criminelles ou des campagnes profondes.

Le problème est que Guilluy ne comprend pas - ou veut nier - deux faits capitaux. Premièrement, dans les campagnes, il n'y a plus de vie sociale: les enfants les plus doués se sont expatriés, seuls les inemployables sont restés à végéter chez eux; le travail a été délocalisé à l'étranger ou dans les grandes métropoles; les curés ont disparu, exception faite de quelques calamiteux pédos post-conciliaires ou autres dégénérés qu'on ne peut plus fourrer nulle part ailleurs. Autant dire que le culte, qui était le principal facteur de rythme de la vie sociale, et le principal contrepoids à la télévision, a complètement disparu. Enfin Guilluy pense-t-il que les programmes de l'Education nationale sont différents à la campagne? Non, et leur application est même pire, parce que les instits ont le "complexe du plouc" et font, pour surcompenser, de la surenchère dans le politiquement correct et la pollution des cerveaux infantiles. Un peuple ne résiste que par la tête. Et il n'y en a justement plus. Donc aucun danger de résistance. Au mieux, ils demanderont une réévaluation de leur RSA à la hausse pour pouvoir picoler encore davantage, donc s'abrutir et se neutraliser d'eux-mêmes comme force politique. Et les Gilets jaunes, idéalisés par les extrêmes qui ont envie de rêver, ce n'est que ça, désolé de casser ton jouet.

Donc que reste-t-il, à la campagne, quand il n'y a plus de famille, plus d'emploi, plus de curé, même plus de bistrot? La TELE! Matin et soir, jour et nuit, le dimanche et les jours fériés, la télé marche plein pot, et les ruraux sont devant, hébétés. Résultat? Non seulement ils ne pensent en RIEN différemment des citadins, mais ils sont même cent fois plus conditionnés. Le seul avantage de vivre à la campagne, c'est qu'il n'y a plus d'argent dans les caisses des communes, et que les maires n'ont plus les moyens financiers de détruire l'environnement en le saccageant.

Mais ce n'est pas tout; j'accuse Guilluy de provoquer par ses thèses stupides une fracture artificielle et suicidaire entre une soi-disant "France du haut" et "France du bas". C'est l'arme du grand capital, l'arme de la haute finance néo-libérale. Il n'y a qu'une seule France, celle de ceux qui se sentent Français, qu'ils soient paysans ou chirurgiens du cerveau, balayeurs ou ingénieurs de l'aérospatiale. C'est l'union des Français, indépendamment des classes sociales, qui pourrait seule menacer réellement le Système. Ce ne sera JAMAIS ce que Guilluy appelle stupidement "la France d'en bas" ou la "France périphérique". D'ailleurs, avec de telles définitions, où met-on les déclassés, qui sont le principal facteur de contestation? Michel Siffre, qui vivote du RSA dans un taudis de Nice: France du haut, du bas? Périphérique? Et pourtant, Michel Siffre, c'est la grande France, c'est le prestige et le rayonnement de la France... Alors, Guilluy?
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Gagné dans le cadre de la dernière Masse Critique, j'ai eu l'occasion de lire le dernier opus du géographe Christophe Guilluy, le crépuscule de la France d'en Haut.
Je remercie Babelio et Flammarion pour cet envoi.

Ne tournons pas autour du pot: j'ai été déçu par cet essai. J'en attendais certainement trop étant donné que j'avais beaucoup apprécié les précédents. Peu de nouveauté dans cet ouvrage si vous connaissez les précédents. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il n'est pas utile de le lire tout de même car il y introduit des concepts nouveaux.

A l'instar de ces derniers, le travail de recherche est conséquent. La volonté d'exhaustivité et de vulgarisation est présente à nouveau mais je trouve qu'il est trop répétitif, pas novateur dans les propositions. D'ailleurs, il n'y a quasiment aucune proposition dans ce livre étonnamment.

Beaucoup de choses narrées sont connues. La stigmatisation entre la France d'en Haut et la France d'en bas est bien mise en exergue. Entre ceux qui sont à l'aise et les autres, entre les citadins et les ruraux, entre le vivre ensemble et se débrouiller à survivre... tout cela est parfaitement décrit. C'est souvent précis, clair, compréhensible mais parfois aussi excessif j'ai trouvé. Cela m'a surpris d'ailleurs.

Si l'enquête est bonne, les remèdes sont quasi inexistants comme je le disais plus haut. Je reste donc un peu sur ma faim. L'auteur décrit le retour de la lutte des classes mais s'arrête à mon gout un peu tôt. C'est surtout souvent trop négatif et politique. Dommage!

je conclurai en disant que si vous ne connaissez pas l'auteur, je vous conseille de le découvrir avec le Crépuscule de la France d'en haut. Dans le cas contraire, je ne suis pas sur que sa dernière parution vous apporte beaucoup. Tout dépend ce que vous y rechercherez...

3/5

(chronique plus détaillée sur le blog à venir)
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Une description de ce que l'on ressentait déjà : une France segmentée entre une élite (politiques, universitaires, media, cadres) à l'aise dans la mondialisation, toujours prête à glorifier le vivre ensemble mais qui se garde bien de le pratiquer, une France des banlieues qui a fait sécession et le gros de la troupe, la soi-disant classe moyenne, les exclus du festin qui vivent dans les villes moyennes et les villages. le livre décrit parfaitement cette situation qu'on ne peut nommer sans être désigné comme populiste par la police de la pensée. C'est une bonne charge contre les bobos, ces idiots utiles du capitalisme, qui profitent bien de l'immigration (nounous africaines, cuistos pakistanais...sous-payés) dans leurs quartiers gentryfiés. La France populaire abandonnée et méprisée (Terra Nova!) va droit dans les bras du FN, on pourra pas dire qu'on aura pas vu venir le coup ! Guilluy aura fait son métier avec précision et clarté.
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Christophe Guilluy analyse une fois encore les deux France ( mais le constat peut s'appliquer à tous les pays riches) : celle qui bénéficie de la mondialisation ou tout au moins n'en souffre pas et l'autre. Ainsi le système ne repose pas seulement sur les élites mais également sur ceux qui acceptent les choix de la classe dominante car protégés.
La fracture idéologique est d'abord sociale. La classe moyenne disparaît et avec elle le modèle républicain égalitaire base de la démocratie parlementaire. La crise sociale se double d'une crise identitaire
La classe dominante, les "bobos" semblent bien plus "cools"que celle décrite par Zola. Elle prône l'ouverture, la bienveillance, le modèle multiculturel, la mixité mais a les moyens de s'en protéger ou d'instaurer des barrières. Le modèle métropolitain, celui des grandes villes favorise cette ségrégation.
Les classes populaires sont en réalité méprisées, dénigrées. le mépris de classe existe toujours avec la fascisation, le repli comme arguments pour la dénigrer.
A cela s'ajoute l'individualisme de la société libérale, de consommation qui a favorisé la sphère privée au détriment des activités sociales, des cultures et sociabilités traditionnelles ( paysannes, ouvrières, nationales...)
La mobilité présentée comme une norme ne concerne qu'une petite partie de la population qui est sédentaire. le discours de la bourgeoisie urbaine devient un discours unique car hégémonique dans les milieux politique, culturel, universitaire mais perd en crédibilité auprès de la classe populaire qui se désintéresse de la politique. Pourtant selon l'auteur le modèle mondialisé dominé par les classes supérieures ne peut être durable car les classes populaires restent majoritaires. Les exclure ne peut être socialement durable.
La thèse est intéressante et on ne peut je pense qu'être d'accord mais Christophe Guilluy surfe sur le succès de ses ouvrages précédents et n'apporte véritablement rien de neuf.
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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
« L'arrivée de réfugiés est une opportunité économique. Et tant pis si la mesure n'est pas populaire. » Cette déclaration d'Emmanuel Macron (Le Figaro, 7 septembre 2015) résume parfaitement la fracture culturelle entre les classes dominantes supérieures et les classes populaires. Réticentes à l'arrivée d'une nouvelle vague migratoire, les catégories modestes ont été moralement condamnées. Il a peu été révélé que cette opposition était très forte en banlieue, notamment dans les milieux populaires issus de l'immigration. La raison en est assez simple : les habitants des quartiers de logements sociaux savent que " l'accueil réel ", la cohabitation à 1000 euros par mois et dans le temps long, se réalisera dans les immeubles et écoles de leur quartier, pas dans les quartiers bourgeois ou bobos des villes-centres. Le partage de la richesse n'existe pas, c'est le partage de la pauvreté qui existe.
Mais de tout cela Emmanuel Macron ne parle pas. Sa déclaration s'inscrit dans une rhétorique connue, celle du patronat. Si la division internationale du travail permet de réduire les coûts salariaux en remplaçant l'ouvrier européen par l'ouvrier chinois ou indien, l'immigration permet d'exercer un dumping social efficace pour les industries et les services qui ne sont pas délocalisables. Les besoins sont d'autant plus importants que les classes populaires traditionnelles ne vivent plus dans les grandes agglomérations. Le marché de l'emploi peu ou pas qualifié des grandes métropoles est ainsi très largement occupé par cette main-d'œuvre, notamment dans le BTP, la restauration et les services. L'immigration permet de répondre aux besoins du marché de l'emploi peu ou pas qualifié des métropoles, mais aussi de contrôler la masse salariale d'une main-d'œuvre bon marché peu syndiquée. Bref, un système d'exploitation " classique " de l'immigration qui repose sur la permanence des flux. D'ailleurs, si le Medef prône la poursuite d'une immigration élevée, c'est d'abord pour exercer une concurrence permanente, non pas entre " autochtone " et " immigré , mais entre immigrés, afin d'empêcher toute augmentation de la masse salariale.

1. LES NOUVELLES CITADELLES : Qui garde les enfants de Fatoumata ?
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Au son de la fanfare républicaine, le France a adopté toutes les normes économiques et sociales de la mondialisation. D' « alternance unique* » en déni de démocratie (la farce référendaire de 2005), la France est devenue une société « américaine » comme les autres, inégalitaire et multiculturelle. En quelques décennies, l'ordre mondialisé de la loi du marché s'est imposé. D'un modèle égalitaire, nous avons basculé en très peu de temps dans une société socialement inégalitaire et sous tensions identitaires. Ce basculement, désastreux pour les classes populaires, a provoqué un chaos social et culturel sans précédent. Un chaos couvert par le son de la fanfare républicaine qui joue de plus en plus fort, mais aussi de plus en plus faux.
(* L'expression est de Jean-Claude Michéa, L'Empire du moindre mal. Essai sur la civilisation libérale, Climats, 2007.)

Préface.
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" C'est d'ailleurs en 1983, au moment ou la gauche française initie son virage libéral, abandonne les classe populaires et la question sociale, qu'elle lance son grand mouvement de résistance au fascisme qui vient. Lionel Jospin reconnaîtra plus tard que cette "lutte antifasciste en France n'a été que du théâtre" et même que "le front national n'a jamais été un parti fasciste". Ce n'est pas un hasard si les instigateurs et financeurs de l'antiracisme et de l'antifascisme sont aussi des représentants du modèle mondialisé. De Bernard-Henri Lévy à Pierre Bergé, des médias (contrôlés par des multinationales), du MEDEF aux entreprises du CAC 40, de Hollywood à Canal Plus, l'ensemble de la classe dominante se lance dans la résistance de salon. "No Pasaran" devient le cri de ralliement des classes dominantes, économiques ou intellectuelles, de gauche comme de droite. Il n'est d'ailleurs pas inintéressant de constater, comme le fait le chercheur Jacques Leclerq, que les groupe "antifa" (qui s'étaient notamment fait remarquer pendant les manifestations contre la Loi travail par des violences contre des policiers), recrutent essentiellement des jeunes diplômés de la bourgeoisie.
Véritable arme de classe, l'antifascisme présente en effet un intérêt majeur. Il confrère une supériorité morale à des élites délégitimées en réduisant toute critique des effets de la mondialisation à une dérive fasciste ou raciste."
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Pendant ce temps, à l'intérieur de l'Europe, les écarts de revenus et de salaires s'accroissent : en Pologne, le smic est à 410 euros par mois, en Roumanie à 218 euros par mois. L'"Europe sociale", évoquée sans relâche par la classe politique est aujourd'hui une réalité. Elle se construit. Par le bas. L'économiste Olivier Berruyer rappelle ainsi que les écarts de salaires ne cessent de s'accroître au fur et à mesure que l'Europe s'élargit. L'harmonisation des salaires par le bas peut donc se poursuivre. La signature d'un traité de libre-échange avec l'Ukraine est ainsi une excellente nouvelle pour le patronat. Le salaire minimum y est d'environ 50 euros par mois. Avec l'entrée de la Turquie (peut-être le Maroc !), pourquoi ne pas imaginer l'alignement d'un salaire minimal européen sur le salaire minimal chinois, soit 250 euros mensuels ? Bonne nouvelle, il a tendance à augmenter !
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"L'arrivée de réfugiés est une opportunité économique. Et tant pis si la mesure n'est pas populaire." Cette déclaration d'Emmanuel Macron résume parfaitement la fracture culturelle entre les classes dominantes supérieurs et les classes populaires. Réticentes à l'arrivée d'une nouvelle vague migratoire, les catégories modestes ont été moralement condamnées. Il a peu été relevé que cette opposition était aussi très forte en banlieue, notamment dans les milieux populaires issus de l'immigration. La raison en est assez simple : les habitants des quartiers de logements sociaux savent que l"accueil réel", la cohabitation à 1 000 euros par mois et dans le temps long, se restera dans les immeubles et écoles de leur quartier, pas dans les quartiers bourgeois ou bobos des villes-centres. Le partage de la richesse n'existe pas, c'est le partage de la pauvreté qui existe.
Mais de tout cela Emmanuel Macron ne parle pas. Sa déclaration s'inscrit dans une rhétorique connue, celle du patronnat. Si la division internationale du travail permet de réduire les coûts salariaux en remplaçant l'ouvrier européen par l'ouvrier chinois ou indien, l'immigration permet d'exercer un dumping social efficace pour les industries et services qui ne sont pas délocalisable. Les besoins sont d'autant plus importants que les classes populaires traditionnelles ne vivent plus dans les grandes agglomérations. Le marché de l'emploi peu ou pas qualifié des grandes métropoles est ainsi très largement occupé par cette main d'oeuvre, notamment dans le BTP, la restauration ou les services. L'immigration permet de répondre aux besoins du marché de l'emploi peu ou pas qualifié des métropoles, mais aussi de contrôler la masse salariale d'une main-d’œuvre bon marché et peu syndiquée. Bref un système d'exploitation "classique" de l'immigration qui repose sur la permanence des flux. D'ailleurs, si le Medef prône la poursuite d'une immigration élevée, c'est d'abord pour exercer une concurrence permanente, non pas entre autochtone et immigré, mais entre immigrés, afin d'empêcher toute augmentation de la masse salariale.
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