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Ce fichu bouquin me faisait de l'oeil sur le présentoir de la médiathèque. Mon moi ricanant ricanait: « Arthur et Paul, la déchirure », ça promet! On est au bord de « Kate et William, la blessure », le suspens en moins. Mon moi bonasse, toujours prompt à espérer, lisait en s'excitant la quatrième de couverture: « [...] l'auteur a écrit une oeuvre de fiction biographique, parfois élucidante. » « Élucidante »! Moi qui adore Hercule Poirot, Pierre Bayard et Prieur et Mordillat prouvant sans contestation que Jésus ne se trouvait pas entre le bon et le mauvais larron, je ne peux résister à une promesse d'explicitation. Voilà, j'ai fini le livre. Et non seulement je n'ai pas le moindre début de commencement d'hypothèse à me mettre sous la dent, mais de mystère non plus. J'ai lu ce que je savais déjà, que Verlaine a tiré sur Rimbaud, que Rimbaud pas rassuré a dénoncé Verlaine à la maréchaussée, que Verlaine en prison a rencontré Dieu... Bon. Après tout c'est un bon début. Mais écrire sur des écrivains est un challenge redoutable et René Guitton a trop présumé de ses forces. le style est plus ou moins poétique -poétiser à propos de Rimbaud et Verlaine, faut oser. Il est surtout académique. « Les voilà bien secs, se dit Arthur. le coeur tari ils ont épuisé tous les plaisirs, y compris les jouissances de la chair, et ils savourent ces funérailles comme un dernier délice. Qu'ils crèvent, claquent, clamsent tous, ces faux dévots ! Ils vont s'affaler sur les bancs, écraseront ostensiblement quelques larmes en priant, et se signeront en invoquant la grandeur du Seigneur, puisque leur Dieu est bon et comble de bienfaits ses fidèles. Leurs enfants pleureront dans des mouchoirs de dentelle ou de soie, quand leurs mères s'éventeront et bâilleront d'ennui. Bourgeois repus, confits dans leurs richesses, ils vont suivre depuis le premier rang du choeur le cérémonial liturgique dans une somnolence de nantis. » Ah, voilà donc ce qu'il se disait Arthur? Et bien clairement il valait mieux pour lui qu'il se fasse journaliste au lieu de poète. Le pire, à mon avis, est atteint quand un pasteur ému raconte la mort de son fils. « Mon Paul, couché là, son ultime regard accroché aux arbres, gisait aux côtés d'un jeune soldat français de son âge, comme s'ils avaient voulu rejoindre ensemble dans leur néant ceux qui les avaient précédés. L'apaisement de mon âme m'est venu de ce vers de Paul Fleming : « Wer jung stirbt, der stirbt wohl. » « Qui meurt jeune, meurt bien. » Au fond de la vallée, mon fils dormait dans l'herbe, la main sur sa poitrine, monsieur Rimbaud, tué de deux balles au côté droit. » « Le Dormeur du val » paraphrasé par Guitton... mais à quoi est-ce que ça peut bien servir ? Voilà. C'est la grande question de ce bouquin : mais à quoi sert-il ? + Lire la suite |