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Critique de Kirzy


°°° Rentrée littéraire 2020 #32 °°°

Sublime royaume surprend d'emblée en abordant la thématique afro-américaine hors des clichés que sa narratrice pouvait suggérer : celui d'une jeune femme noire, Gifty, née de migrants ghanéens pauvres devenue chercheuse en neurosciences après de brillantes études à Harvard et Stanford.

Tout est subtil dans ce roman, à commencer par son évocation du racisme quotidien insidieux dans la Bible belt, Gifty ayant grandi dans l'Alabama, abordé à travers le douloureux personnage du frère, mort prématurément d'une overdose : marchant courbé pour passer inaperçue dans les rayons de Walmart et éviter d'être accusé de vol ; la communauté blanche ne lui prédisant qu'une réussite par le basket sans même envisager qu'il puisse réussir par les études ; cette même communauté trouvant «  normal » qu'il sombre dans la drogue car il est noir et donc prédisposé à ce type d'addiction.

Le personnage de Gifty est tout aussi subtil dans sa quête quasi philosophique d'identité, s'interrogeant sans relâche sur l'âme et sur les traumatismes qui l'ont façonnée ( la mort du frère, la dépression catatonique de la mère qui dort toute la journée, la trahison du père qui a fuit au Ghana ). Elle qui a connu la religiosité juvénile, qui a perdu la foi suite aux tragédies familiales, qui est devenue une jeune femme sceptique, cherche un équilibre dans sa vie pour concilier sa soif de transcendance avec la rationalité scientifique qui guide sa vie. Car la science n'a pas répondu à toutes ses attentes alors que ses expériences sur les mécanismes neuronaux des souris pourraient déboucher sur une solution à l'addiction et à la dépression qui ont détruit son frère et sa mère.

Ce roman ne m'a pas touchée émotionnellement. Sans doute parce que Gifty a une voix tellement intérieure et cadenassée qu'il m'a été difficile de m'y attacher. Mais, malgré son rythme spiralaire très lent, il m'a touchée intellectuellement avec sa réflexion sage et sobre, pudique et claire sur la complexité du monde. Derrière le calme trompeur d'une récit peu spectaculaire, il y a le cri qu'une femme pousse pour trouver sa place au milieu d'identités conflictuelles tout en relevant le défi fièrement qu'en tant que femme noire, elle devrait avoir " toujours quelque chose à prouver et rien d'assez éclatant ne suffirait à le prouver".
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