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EAN : 9782253099345
440 pages
Grasset (26/01/2005)
3.52/5   28 notes
Résumé :

Ce texte est le récit, presque le roman, d'une expérience qui a transformé radicalement la vie de son auteur. En 1969, alors qu'il est ingénieur agronome, Gérard Haddad rencontre Jacques Lacan et commence avec lui une psychanalyse. Cette aventure va durer une dizaine d'années au cours desquelles se sera opérée une métamorphose. Ce livre raconte donc un parcours et les incroyables rebondissements qu'il suscite.... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Gérard Haddad, d'abord « technicien reconnu de la culture du riz comme arme contre la faim dans le monde », mari et père de famille, commence une analyse avec Jacques Lacan peu avant ses trente ans, loin de se douter des répercussions que cette décision aurait sur le reste de son existence. Il abandonnera son emploi d'ingénieur pour entreprendre des études en médecine, se formant parallèlement à la psychanalyse et à la psychiatrie, mais surtout il subira un « bouleversement idéologique total dont les manifestations externes sont l'étude de l'hébreu, des passages en école talmudique, quelques bonnes années de séjour en Israël et le retour au lieu de ma naissance subjective, le judaïsme. » La thèse de médecine qu'écrira Gérard Haddad sera d'ailleurs pleinement imprégnée des influences de cette tradition. Il la publiera plus tard sous le titre de « Manger le Livre » : « il y a du texte juif dans les coulisses de la psychanalyse. Pas du texte kabbalistique, ésotérique, fascinant de mystère, mais du trivial texte talmudique, maïmonidien, ancêtre du discours des Lumières. »


Gérard Haddad ne se consacre toutefois pas à ce thème dans cet essai. Il cherche plutôt à nous décrire ce que pouvait être une séance avec Lacan, jour après jour, année après année, dans sa manière de procéder, dans ses répliques, dans ses postures, dans ses agacements et dans ses enthousiasmes, et ce jusqu'à la dissolution de l'EPF et jusqu'à sa mort.


Ce récit permet une découverte aisée de l'enseignement lacanien, Gérard Haddad ayant progressivement intégré une certaine approche de ses notions, en lien avec son parcours dans l'analyse et la trajectoire de son existence. Il restitue la limpidité originelle de cet enseignement psychanalytique qui ne semble complexe que des mots dont il use, inscrits pourtant dans leur généalogie propre, et des tournures qu'il ose, Haddad employant quant à lui une langue simple, loin des imitations ratées du style lacanien dont pâtit souvent son héritage.
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Ce récit qui se lit comme un roman est le parcours de l'auteur, tunisien émigré en France, qui, d'ingénieur agronome, devient psychiatre et psychanalyste après avoir suivi une analyse avec Lacan. C'est vrai que les récits d'anecdotes à propos des analyses de Lacan sont nombreux dans l'édition, le plus connu étant "Une saison chez Lacan" de Pierre Rey, il faut dire aussi qu'il y a de quoi raconter sur les séances à durée très variable, les portes laissées ouvertes et les coups de gueule de Lacan.

Ici c'est plutôt l'itinéraire d'un homme qui avait très tôt pensé se diriger vers la psychiatrie et la psychanalyse, mais qui avait dû choisir des études moins coûteuses, ou tout du moins aidées par des bourses. Ce n'est qu'à trente ans, après être presque par hasard arrivé chez Lacan qui l'a pris tout de suite en analyse, qu'il va littéralement se voir évoluer et décider de changer de métier et reprendre des très longues études de médecine. On l'accompagne vraiment pendant toutes ces années, on partage ses doutes, ses enthousiasmes, ses gros gros problèmes d'argent (eh oui, les séances quotidiennes chez Lacan et l'entretien d'une famille, çà vous oblige à faire le grand écart budgétaire).

C'est bien sûr impossible de "raconter" une psychanalyse, pourtant Haddad essaie de nous faire approcher le plus près possible de ce qu'a été la sienne. Et puis, assez rapidement, il choisit d'être lui aussi psychanalyste (en même temps qu'ingénieur à mi-temps et étudiant en médecine, et militant communiste aussi…). Ses rencontres avec ses premiers patients sont inoubliables, l'appartement sent encore la peinture et la moquette n'est pas fixée…. Et lui est à peu près dans le même état ! Mais il s'accroche, il travaille énormément la théorie psychanalytique, et peu à peu on le voit qui devient plus sûr de lui et plus heureux dans sa vie.

Ce livre est bien sûr aussi un très beau portrait de Lacan sur lequel Haddad fait un incroyable transfert filial. Lacan a littéralement un don de double vue sur la vie de Haddad, il l'influencera énormément dans la mesure où il l'éperonnera pour qu'il avance encore et toujours. le monde de la psychanalyse parisienne est bien décrit avec ses clans, ses querelles (de famille par exemple, avec les Miller), ses ruptures, ses prises de pouvoir. Mais on voit bien que Lacan a été et restera le pivot de toute une génération d'analystes qui se positionneront toujours par rapport à lui.
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Citations et extraits (30) Voir plus Ajouter une citation
Le dernier séminaire où il parvint à articuler un discours audible fut celui consacré à Joyce, Le Sinthôme. Comment pallier la psychose dans un espace psychique où la métaphore paternelle est absente ? Par la prothèse de l’ego, c’est-à-dire en parvenant à se faire un nom. Telle fut la thèse nouvelle ou l’aveu d’échec qu’il avança à ce séminaire. Sans Nom-du-Père, déclara-t-il un jour, nous allons vers un monde concentrationnaire dont les nazis furent les précurseurs. Le père moderne avait désormais pris cette figure illustrée par Claudel sous le titre de père humilié. Mais il n’y aura bientôt plus de père du tout. Telle fut, me semble-t-il, la vision tragique qui occupa sa pensée à la fin de sa vie et qu’il résuma un jour à sa présentation par ce « tous à l’asile » déjà rapporté, accompagné d’un effrayant ricanement.
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Ce terme de castration porte dans le langage courant une lourde charge péjorative. Le castré, c’est le pauvre bougre, sans désir ni volonté. L’enseignement de Lacan, à l’inverse, confère à la castration dite symbolique, une signification hautement positive. Elle en devient la visée même de la cure. La castration est l’opération symbolique d’accession au désir par l’acceptation de son destin d’être mortel. Je gravissais péniblement cette pente-là.
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Dolto avait prononcé cette énorme bourde que tout le monde s’empressera de reprendre : « Tout est langage. » Aux débuts de la psychanalyse, certains élèves de Freud n’avaient-ils pas donné dans une exagération semblable, « tout est sexe » ? Si bien que Freud devra lui-même critiquer le pansexualisme de ses disciples. Nous étions confrontés, cette fois, à un « pan-langagisme ». Lacan s’efforcera à maintes reprises de rectifier ce travers, dans sa théorie du nœud borroméen par exemple où l’imaginaire tient un rôle de même importance que le langage. Pour moi, la bulle du pan-langagisme éclata à la présentation de malades le jour où, malicieusement, il demanda…un marteau à réflexes. Puis, consciencieusement, il examina un à un les réflexes rotuliens, puis ceux des tendons d’Achille du malade. Au public qui s’étonnait de voir le maître ès signifiants s’affairer en ces tâches de basse médecine, il lança :
« Vous savez, il y a aussi des maladies réelles. »
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A voir Lacan déployer ainsi une telle énergie malgré son âge avancé, recevoir des consultants sans arrêt du matin au soir, s’accorder si peu de vacances, Jupiter tonnant debout pendant deux heures à son séminaire, portant un amour notoire pour une jeune femme de trente ans, qui deviendra une amie, tout cela produisait en moi l’illusion de son éternité. Il portait sa vieillesse avec une telle élégante dignité que je l’imaginais immortel. Son visage de septuagénaire semblait embelli par les ans, à le comparer à des portraits de jeunesse marqués par je ne sais quelle fatuité que l’âge, tel un sculpteur ôtant le marbre inutile, avait effacée.
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[à propos de la dissolution de l’Ecole de Lacan par Lacan lui-même]

Cette dissolution, c’est lui, et lui seul, qui l’avait voulue, passionnément, avec la rage douloureuse de détruire sa propre œuvre. Pourquoi ? Sans doute pour ne pas laisser peser sur la psychanalyse, passion de sa vie, la charge d’une nouvelle institution perverse, au pouvoir démesuré.
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Vidéo de Gérard Haddad
Agnes Vidalie, éditrice aux éditions du Rocher présente "Antonietta, Lettres à ma disparue" à paraître le 1er septembre 2021.
Quatrième de couverture :
Alors que la maladie d'Alzheimer de sa femme Antonietta progresse, Gérard Haddad prend la plume pour écrire à celle qui ne parle déjà plus. Ces lettres retracent la lente progression de la maladie : d'abord le déni, puis la lutte, les traitements et l'espoir de revivre « comme avant », puis les rechutes et l'entrée à l'Ehpad, peu avant l'épidémie de Covid et l'absolue solitude qu'elle impose pendant plusieurs longs mois. Étrangement, du creuset de la maladie émerge un nouvel amour, triomphant de tous les malentendus des années de vie partagées. Les souvenirs des moments de grâce affluent alors, et chaque instant de vie à partager encore prend une intensité et une profondeur insoupçonnée. Un texte poignant, qui dit toute la force d'un amour conjugal confronté à la maladie.
Gérard Haddad est psychiatre et psychanalyste mais aussi écrivain, traducteur de l'hébreu et éditeur. Il a publié de nombreux ouvrages, notamment coécrits avec Antonietta Haddad, comme "Freud en Italie, psychanalyse du voyage" (Albin Michel, 1995). Plus récemment, il a publié "À l'origine de la violence (Salvator, 2021)".
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>Histoire, géographie, sciences auxiliaires de l'histoire>Biographie générale et généalogie>Philosophes et psychologues : biographies (91)
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