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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Le peintre d'éventail est un livre à lire lentement, en apesanteur, peut-être à lire autrement. Je préconise de lire ce roman de préférence perché dans un arbre, ou bien sur un rocher devant la mer et en définitive, si vous n'avez ni arbre, ni océan sous la main,- ce qui parfois peut arriver, alors perdez-vous avec ce livre dans le fin fond d'un désert, loin du vacarme du monde...
Hubert Haddad, son auteur, est un écrivain rare, qui ne fait pas de bruit, chacun de ses livres est une offrande, un chemin qui chemine, une respiration qui s'égare, un reste de rosée du matin posé sur la peau de l'être aimée. Voilà comment je vois un peu cet écrivain que j'ai découvert il y a très longtemps, je crois qu'il s'agissait de son premier roman Perdu dans un profond sommeil, il n'est d'ailleurs pas répertorié sur Babelio. Je sens que je vais y remédier dans pas longtemps, mais à condition de le relire...
Le peintre d'éventail, c'est comme un jardin où l'on descend pieds nus. On voudrait que l'être aimée soit seule à entendre le frémissement d'une pluie qui tombe sur les pages des arbres et cela serait le signal mystérieux, magique presque, d'une invitation à venir.
Ce récit est une déambulation...
Autour, il y a le bruit et la fureur, le monde qui ne sait pas se retirer sur la pointe des pieds, qui ne sait pas se retenir... Entrer dans un jardin, c'est comme entrer dans une cathédrale vide, vide de ses prêches et de ses foules, c'est comme venir dans un coeur qu'on aime, c'est comme prier sans croire en Dieu, c'est comme vivre dans l'absolue liberté qui nous a vu naître...
Sans doute les jardins, quels qu'ils soient, ont cette merveilleuse faculté à savoir réparer les âmes un peu abîmées. Plus que jamais, nous avons appris et compris depuis quelques mois que les jardins étaient devenus nos seuls espaces de digression depuis que les bars, les salles de concert, les théâtres et les musées sont fermés.
Ce récit merveilleux porte un jardin ou c'est peut-être l'inverse, mais cela n'a pas d'importance car nous sommes prêts à être renversés dans ce texte magnifique, tendu vers une tragédie universelle, celle du 11 mars 2011, le tsunami qui a dévasté le nord-est du Japon et provoqué le désastre nucléaire de Fukushima...
Hubert Haddad nous invite au fin fond de la contrée d'Atôra, au nord-est de l'île de Honshu. Nous nous glissons dans les pas de Matabei Reien, c'est lui le personnage principal, celui-ci cherche à fuir son passé qui le hante et finit par échouer dans une pension à l'écart du monde, la pension de famille de Dame Hison, une ancienne courtisane...
De multiples personnages venus se mettre en retrait pour différentes raisons, vont ici se croiser, s'effleurer, autour d'un jardin suspendu, hors du temps, comme un lieu catalyseur des douleurs et des blessures du passé, des attentes, des transmissions à venir.
Comme Matabei, parfois j'ai rêvé de devenir le disciple d'un vieux jardinier, artiste et poète, qui me transmettrait son art... Mais le bruit du monde me ramène chaque fois au sol, me faisant à chaque pas encore ressembler à l'albatros de Baudelaire.
Hubert Haddad est un écrivain qui aime le Japon et bien que, connaissant peu ce pays et sa culture, je l'ai ressenti à chaque pas, dans cette lenteur presque hallucinatoire qui effeuille les pages de ce roman avec une grâce et une maîtrise de l'écriture. Parfois on pourrait être amené à penser que cette maîtrise ôte la spontanéité des personnages. Ne vous trompez pas ! Sous l'apparence des dessins finement ciselés sur la soie ou le papier, derrière l'architecture savante des haïkus, se cachent la sensualité des gestes, d'ardentes passions prêtes à dévaster des coeurs aussi violemment que les tsunamis...
Ce roman, c'est juste une quête de la beauté, chacun ira la chercher à l'endroit où ses pas ressentent le moins les sables mouvants...
Ce roman initiatique est une présence au monde rassurante, consolatoire, réparatrice, un jardin mis à l'écart des tentatives de l'apocalypse.
Si par ces quelques mots, j'ai pu vous donner envie d'aller à la rencontre de cet écrivain rare, Hubert Haddad, alors peut-être que ce soir un albatros sur un bateau d'équipage, s'apprête à reprendre son envol vers les lointains...
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Bienvenu à la pension de Dame Hison, havre d'oubli plus que de sérénité, lieu tout indiqué pour disparaitre aux autres et à soi. En y débarquant, Matabei, artiste à succès qui vient de causer la mort d'une jeune fille sur une voie rapide de Kyoto, est bien loin de se douter qu'il y rencontrera enfin son destin et que sa vie en sera transformée à jamais.

C'est un très beau roman sur le Japon, sur la peinture, sur l'art du jardin, sur l'impermanence, avec une dose de mystère, qui fait le charme des romans nippons. le plus fou des deux, de Matabei ou de Xu Hi-Han, n'est peut-être pas celui qu'on pense …

L'histoire se situe à notre époque si tragiquement contemporaine ; je ne m'y attendais pas, je croyais retrouver le Japon féodal du XIXème. Mais le roman n'en pâtit pas, que du contraire.

L'écriture est très dense, ce qui donne l'impression d'être dans un long poème, et très sophistiquée. Pour reprendre une expression du texte, je parlerai d'une écriture d'une « précision joaillière ». Pour ma part, mais c'est un avis tout à fait subjectif, je préfère une langue plus simple et moins travaillée, en tout cas en prose…. Mais c'est bien là le seul (petit) reproche que je ferai à ce roman.
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Matabei, peintre abstrait et designer connaissant un certain succès voit sa vie basculer ; au volant de sa voiture, au retour d'une virée à Kobe, une jeune fille traverse, il ne peut l'éviter, c'est le drame qui bouleversera sa vie.
Le roman débute quelques jours avant le séisme de Kobe de 1995 et s'achève quelques mois après le tremblement de terre et le tsunami du 11 mars 2011.
Après le décès à l'hôpital d'Osué, Matabei va tout quitter et s'établir dans une pension de famille de la région d'Atôra, c'est là qu'il achèvera sa vie, retiré, formé par Osaki Tanako à la peinture d'éventail et à l'entretien d'un magnifique jardin tel que peuvent les réaliser des maîtres japonais. À la mort d'Osaki, Matabei s'installe dans son pavillon et poursuit son oeuvre. le reste il vous faudra le découvrir vous-même à la lecture de ce merveilleux roman.
Le peintre d'éventail est d'une écriture très poétique, les descriptions sont magnifiques, les sentiments décrits avec pudeur et quelques Haïkus émaillent les récits ; ce roman est une vraie perle.
J'ai parfois eu l'impression, au lieu d'une histoire contemporaine, de lire un roman datant de plusieurs centaines d'années, tant la vie au pied de la montagne est intemporelle. À lire !
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C'est à Atôra, dans une petite pension perdue entre l'océan et la montagne que Matabei Reien a choisi de se retirer, loin de la trépidante Kobé. Au sein d'une petite communauté d'exilés de la vie, couvée par Dame Hison, la propriétaire des lieux, ancienne courtisane aux formes épanouies, Matabei retrouve sa sérénité perdue. Mais c'est surtout dans la compagnie du vieux jardinier qu'il trouve un but à sa vie. Osaki Tanaka devient son maître et l'initie au jardinage et à la peinture d'éventails. A la mort de son mentor, il continue le minutieux travail de préservation de la beauté des lieux et à son tour enseigne son art à un disciple, le jeune Xu Hi-han. Entre la transmission de son savoir, ses promenades dans la montagne et ses incursions dans le lit de Dame Hison, Matabei est un homme apaisé et serein. Cependant, comme jamais rien ne dure, ce bel équilibre sera rompu, d'abord par la beauté ensorcelante d'une nouvelle pensionnaire, puis par la nature elle-même, qui se révolte et reprend ses droits sur les hommes qui ont cru la dompter.


Le Japon tel qu'on le rêve dans un roman d'initiation et de transmission qui laisse la part belle à la beauté et à la poésie. Hubert HADDAD nous entraîne dans un univers esthétique et intemporel, dans le calme zen d'un jardin pensé pour sublimer la nature au fil des saisons. Mais la douceur des lieux et la délicatesse des touches de peinture cèdent la place à la violence des sentiments et à celle de la nature déchaînée, prouvant que rien n'est immuable et que le monde finit toujours par rattrapé celui qui veut le fuir.
Un petit bijou à savourer sans se presser. Sublime Japon, sublime roman!
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Tout est éphémère, même une oeuvre s'abolit d'un simple coup du sort. Seule reste, alors, la transmission du savoir ancestral.
C'est ce passage de l'artisan à l'artiste qui sait capter "l'émotion pure" que transcrit, d'une prose toute poétique, Hubert Haddad dans son roman le Peintre d'éventails.
Un seul et même lieu la pension de Dame Hison (veuve passionnée, courtisane "aux formes pleines") dans la bourgade japonaise d'Atorâ où évolue son microcosme. Plusieurs êtres déchirés s'y croisent: un négociant de thé grand buveur jovial, une vieille fille coréenne qui croit aux esprits et une vieille domestique ancienne planteuse de riz fatiguée. Arrive Matabeï, amant occasionnel (solitaire et silencieux) de Dame Hison. Traumatisé par la perte des siens suite aux bombardements d'Hiroshima et Nagasaki, puis par un décés accidentel, il deviendra le disciple d'un vieux peintre d'éventails et jardinier (du jardin de Dame Hison qu'il transforme en oeuvre d'art) serein qui connait les harmonies subtiles. C'est l' histoire de Matabei et le drame passionnel attenant (par l'intermédiaire d'une jeune "demoiselle des neiges ou ardente démonne" encore un vieux fou exalté, ressemblant au "il" de le tailleur gris de Andrea Camilleri, mais un "il" artiste inspiré et non banquier ) que nous conte ici Xu Hi-Han, garçon de chambre gauche devenu cultivé et ayant appris "l'éveil" grâce aux bons soins de son "maître".
"Le monde est une blessure" écrit dans l'un des haïkus raffinés (qui parsèment le Peintre d'éventail) Hubert Haddad (écrivain, poète, historien d'art dont le roman Palestine a été couronné par le prix des Cinq Continents de la Francophonie en 2008 et le prix Renaudot du Livre de poche 2009). Ce sont ici des blessures intimes suite à de vrais séismes japonais (Hiroshima, tremblement de terre de Kobé, récent tsunami) à la violence absurde et destructrice qu'expose ici l'auteur.
L'art, moyen d'expression de la pensée, serait-il le talent de retrouver un équilibre en sublimant l'indicible et en "accordant les contraires"?
Le Peintre de l'éventail est à lire dans un sens artistique et dans un sens plus spirituel, celui du zen. le dépaysement, en prime, emporte son lecteur très loin au coeur d'émotions efflorescentes.
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Un livre que je voulais découvrir depuis déjà très longtemps, mon attente n'a pas été déçue, je suis doublement conquise par l'écriture et par le thème. Un peu perdue cependant au milieu des différents protagonistes, "peintres d'éventails" et par la chronologie de l'histoire. Certains détails sont durs à lire, car ce roman n'est pas particulièrement gai... cependant il offre de très belles descriptions de nature. Un roman emplit de poésie et qui fait voyager.
Une excellente lecture.
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Ce titre évocateur me promettait de belles pages à parcourir, je suis plus que satisfaite après la lecture de ce roman surprenant !
Tout d'abord je découvre une écriture riche, épanouie, à la fois précise et emplie de rêve. Les mots combinés dans les phrases de l'auteur nous emportent dans un univers singulier, un Japon mystique au possible, au sein d'une nature merveilleuse sans commune mesure. Si on aime les jardins, les plantes, les oiseaux, la peinture asiatique et les éventails, on ne peut qu'aimer cette histoire.
Au détour d'une page, cependant, tout est soudainement remis en cause dans le plus grand des bouleversements. Et c'est là que le protagoniste atteindra peut-être le sommet de son art après bien des errements.

J'ai hâte de lire d'autres livres de Hubert HADDAD!

Challenge en Choeur
Challenge 1 mot- 1 livre
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Ce roman nous fait prendre conscience que la beauté, l'art et toutes les valeurs humaines sont extrêmement précaires. Matabei en fera la cruelle expérience. En quelques minutes, la Terre peut reprendre ce qu'elle a donné. Que reste-t-il alors de ce que nous avons aimé ? La peinture, l'harmonie d'un paysage, l'amour d'une femme/d'un homme… Tout cela est à apprécier pour l'instant présent, sans anticiper sur un avenir incertain. Après la catastrophe, tout est à recommencer. le « Mythe de Sisyphe » de Camus. Où est le sens de la vie et des valeurs humaines ? Toujours se préparer à ce qui fait sens pour nous soit détruit. Inlassablement recommencer, toujours. le bouddhisme peut nous éclairer : pour ne pas souffrir, ne pas s'attacher, questionner notre désir.
Haddad écrit comme un auteur japonais. C'est un style qui ne conviendra peut-être pas à tous. Il faut savoir rester dans la contemplation, la description, de la beauté, du temps qui passe, de la nature, des situations fugaces… Même dans sa description de la catastrophe, on perçoit, dans son écriture, la vacuité de l'existence, l'absurde de la situation. Finalement, Matabei, a accompli ce qu'il devait faire. Peut-être est-ce un message ? On doit faire ce que l'on doit. Rester dans la voie que l'on s'est assignée. Quoi qu'il advienne. C'est une interprétation possible. Il y en a sûrement beaucoup d'autres.
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Xu Hi-Han raconte l'histoire de Matabei Reien, son ancien maître qui l'a initié à la peinture d'éventail. « On garde si peu d'une mémoire d'homme. À peine un signe en terre. Quelques images et de rares paroles au meilleur des cas. Moins que son poids de cendre après la crémation. » (p. 18) Dans la pension de dame Hison, le jeune Matabei a fui le traumatisme d'un séisme et cherche la paix dans une contrée reculée. Alors que le traumatisme de la guerre et l'horreur de la bombe sont encore dans toutes les mémoires, les hommes doivent réapprendre à vivre et à contempler la beauté des choses. Matabei découvre la peinture d'éventail auprès du vieux Osaki Tanako. « Peindre un éventail, n'était-ce pas ramener sagement l'art à du vent ? » (p. 44) Matabei apprend également à tenir un jardin pour en faire un art vivant, incarnation de la beauté naturelle. « le spectacle changeant du jardin accompagnait le regard en se jouant des mouvements naturels de l'oeil par à-coups et balayages, ce qui l'égarait dans sa quête d'unité par une manière d'attachement continu ourdi de surprises et de distractions. » (p. 78) Hélas, la sérénité du vieux Matabei est troublée par l'arrivée de la jeune et belle Enjo. Alors que survient un second cataclysme, Matabei appréhende la fragilité de la vie. « Quelle force obstinée vous restitue au monde, après l'apocalypse. » (p. 142)

Constitué de chapitres courts et ciselés, ce superbe roman d'Hubert Haddad tente de percer le mystère de la beauté, notamment celle du paysage qui est mise en abîme dans les éventails. Séisme après séisme, la nature se révèle aussi belle que capricieuse, toujours prête à se réinventer au détriment des vies humaines. Les haïkus et les jardins sont deux arts nippons qui se répondent et se complètent : dans ce roman, ils chantent la grâce et la légèreté de la beauté, ainsi que son évanescence et sa terrible impermanence.
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Superbe texte que ce "Peintre d'éventail" de Hubert Haddad. C'est à la fois un bel hommage à la nature et au jardin vu comme une expression de l'âme humaine, une analyse de la conception japonaise de l'art à travers la fragilité de la vie dans ce qu'elle a d'éphémère et enfin le beau voyage initiatique d'âmes en peine en quête de paix et de réconciliation avec elles-mêmes. C'est à travers des métaphores, des descriptions et des haïkus qu'Haddad exprime le mieux le cheminement de sa pensée et je le crois plus grand poète que romancier, bien que sa façon, très particulière de mêler les deux genres nous enchante et nous éblouit, redonnant à la vie sa quintessence, de par l'intensité et la fidélité avec lesquelles il la transcrit. Les descriptions du séisme et du tsunami de Fukushima sont en particulier un véritable morceau de bravoure qui laisse glacé d'effroi tant les descriptions sont justes, le vocabulaire précis et la vision d'ensemble apocalyptique.
L'âme japonaise est vue avec beaucoup de finesses et de subtilités, en dépit d'un regard occidental qui perce quelquefois malgré tout sur la façon d'être des personnages. Pas de psychologie, mais une volonté d'expliquer les choses qui alourdit et fige par moments le récit, alors que les descriptions et le compte-rendu de l'histoire sont en eux-mêmes extrêmement parlants.
Il me semble que les plus beaux passages sont ceux où Haddad exprime sa vision des choses en poésie, laissant l'histoire "respirer" et vivre à sa manière. Tant il est vrai que, le plus souvent, la poésie se suffit à elle-même...
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