Léonard de Vinci

Isabelle d'Este, margravine de Mantoue, fut célèbre en son temps pour l'intérêt qu'elle portait aux arts. (...)

Mais plus que les autres artistes, elle appréciait Léonard de Vinci. Elle était très fière de le connaître et le considérait comme un ami. Aussi fut-elle enchantée lorsque, avec sa désinvolture habituelle, il accepta de venir à Mantoue en quittant Milan. Elle avait en arrière-pensée l'espoir qu’il ferait son portrait.
Isabelle n'était retenue en effet par aucun scrupule lorsqu'il s'agissait d'obtenir ce qu'elle voulait en matière de peinture. Pour arriver à ses fins, elle usait d'une petite ruse : elle donnait une modeste somme comme avance à un peintre pauvre, tout en lui laissant croire que ce n'était là qu'un simple don pour l'aider. Puis, quand elle s'était assurée qu'il l'avait dépensée, elle commençait à lui rappeler qu'il lui devait une toile. Poliment, mais sans trêve, elle lui remettait cette dette en mémoire jusqu'à ce que le peintre, exaspéré, finît par lui donner ce qu'elle avait désiré depuis le commencement.
C'est ce qu'aurait fait n'importe quel peintre, sauf Léonard. Là, pour une fois, cette jeune femme volontaire rencontra un adversaire à sa taille. Vous pouviez importuner Léonard encore et encore; cela ne servait à rien ; s'il était intéressé par autre chose que la peinture - ce qui était généralement le cas! - rien ne pouvait l'obliger à faire votre portrait, comme Isabelle le découvrit à ses dépens.

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