Mardi 2 août 2022---
*** Coup de coeur et COUPS AU COEUR !
Hasard très heureux d'un livre- voyageur...placé sur mon chemin...
Depuis quelques semaines, je dépose des livres dans un kiosque à livres, ainsi, j'ai eu la chance de trouver ce petit trésor...par le plus grand des hasards !
Je l'ai aussitôt débuté et " pas lâché "...
Ce texte, pourtant atrocement douloureux, mais l'auteur,
Paul Haim, a un talent certain pour restituer une catastrophe barbare,innommable, causée et voulue par Franco et l'oeuvre-mémoire devenue " chef- d'oeuvre mondial": le " Guernica" de Picasso...
Quand l'Histoire et l'Art se croisent dans la rage et la douleur !
"Guernica, 26 avril 1937 : le premier bombardement et le plus meurtrier jamais perpétré contre une population civile.
Guernica : le chef-d'oeuvre de Picasso, peint dans la rage et l'urgence, durant les semaines qui suivirent le massacre du village basque."
La plus grande partie du récit restitue à la première personne la vie d'Eugenia Echevarria, qui , par flashs-back , nous raconte son enfance, sa jeunesse, sa famille, son premier amour, son affection fusionnelle avec sa soeur, Karmele, sa haine d'un père arrogant, alcoolique et violent, son village Guernica...et la fatale journée du 26 avril 1937...qui brisera son existence et celle de toute une population civile...
Eugenia perdra sa mère, sa soeur, son très jeune fils et l'amour de sa vie, Txomin le père de son enfant unique, Ortzi...Elle est au bord de la folie...Elle trouvera refuge en France, à Biarritz...se reconstruira doucement, très doucement, grâce à l'affection de Raphaël, le frère de son grand Amour et grâce à un voisin attentionné et amoureux, artiste et sculpteur sur bois, Gorka Izaguirre, qui va lui redonner le goût de vivre...jusqu'au moment où il aura la plus mauvaise idée qui soit: lui parler et lui montrer la reproduction du " chef-d'oeuvre " de Picasso, " Guernica"...
Dans un premier temps, elle ne comprend pas pourquoi on qualifie ce tableau de " chef-d'oeuvre "...elle invective le peintre dans son format intérieur...et puis la vue de ce tableau fait son chemin...et tout s'éclaire et explose à la fois, et Eugenia retombe dans l'enfer de ce 26 avril 1937...
Elle retrouve la violence de la mort des êtres aimés ..dans la destruction et les bombardements de sa bourgade natale, Guernica..
"Gorka avait souvent employé devant moi l'expression " chef- d'oeuvre".Je ne voyais rien.(...)
Je regarde encore et encore.Tout est tordu, déformé, éclaté dans un capharnaüm de figures humaines, d'animaux, de carrés, d'angles droits, de triangles. Cet amoncellements disparate éclairé par une ampoule électrique aux rayons en dents de scie ne peut être le chef-d'oeuvre dont Gorka nous rebât les oreilles. Rien n'est achevé, rien n'est coloré. Tout est plat.Nulle perspective ! (...)
C'est alors que le miracle se produit.Le voile qui obstruait mon regard tombe soudain.Deux profils, sur la droite, presque identiques. L'un se dessine sur un fond sombre, l'autre n'est qu'un trait délimitant un visage blême sur une surface blanche.Ma mère et moi !
(...)
Le noir, les noirs du tableau !Tout ces sangles pointus pour les vitres brisées qui se plantaient dans les corps. Je pleure. Je pleure en criant, je pleure en priant et en blasphémant. Je pleure en serrant le journal contre ma poitrine. le baignant de mes larmes, je le porte à mes lèvres pour embrasser les miens.C'est leur portrait que j'embrasse.Le tableau s'illumine. Ils sont tous là ! Tout est là. Il a tout peint !"
La connaissance de ce tableau renverra Eugenia à son désespoir ; elle se réfugiera dans un couvent, quittant définitivement le monde !
Un roman aussi tragique que magnifiquement écrit !
D'autant plus étonnée de ne voir aucune critique de cet ouvrage, alors qu'il a été édité il y a plus de 20ans !
Intriguée, j'ai poursuivi mes recherches sur l'auteur, ce fils d'émigrés grecs, qui a abandonné ses études de médecine à cause de la guerre, a créé très jeune sa première galerie d'art, au Mexique...puis organisera des expositions à travers le monde.Il deviendra l' ami de Picasso et l'exposera...
J'ai déniché d'autres références que j'ai réservées à la Réserve Centrale des Bibliothèques de la ville de Paris, dont "
Marchand de couleurs" ( ses souvenirs), et ses livres sur ses amis peintres,
Matta et
Michel Seuphor, sans oublier "
Soledad et Montserrat" qu'il me faudra dénicher chez un bouquiniste( roman qui parle d'un sculpteur ayant existé : Anton Steiner)