AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,08

sur 413 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Il est des livres dont il est difficile de parler, ce sont des livres qui se ressentent, que l'on respire, pour lesquels on tremblent. Ce sont des livres qui vivent, qui palpitent pendant la lecture...

City on fire fait partie de ceux-ci.

J'ai attendu plus qu'à mon habitude avant d'écrire cette chronique, j'avais besoin de reprendre mon souffle de mettre une distance avec le récit, de le digérer, de l'analyser pour enfin entrevoir si je l'avais aimé ou non.

La réponse est Oui, un Oui majuscule, un Oui empli de la certitude que je n'oublierai pas ce récit.

Une vaste palette de personnages défilent et se croisent dans ce roman, semblables à la foule qui arpente les rues de New York. On se croise sans se voir. On les croise sans les voir.

Nous sommes en 1976, et c'est une New York bigarrée qui se dessine sous nos yeux. Quartiers défavorisés, quartiers huppés, tout le monde s'anime sous les mots d'une plume maitrisée et juste.

Un vent de révolte libertaire gronde, la décadence menace l'Amérique bien pensante en dansant sur du rock-punk. New-York se dresse, palpite. New York est dans l'excès, elle veut vivre. Parce que c'est elle, Oh, New York, New York qui est le protagoniste de ces 1000 pages. Les personnages n'en sont que des composantes, des souffles de sa respiration... Et cette New York des années 70, si fidèlement rendue dans ce roman singulier, n'est pas si différente de celle de maintenant. Les luttes de pouvoir sont encore là, les crimes aussi, on lutte toujours pour le droit à la différence, on essaye toujours de s'évader comme on peut pour faire taire la sauvagerie que l'on porte en nous. le portrait qui en est fait en est même effrayant. Effrayant de réalisme. Effrayant de justesse. Effrayant de noirceur aussi.

Alors oui, j'ai aimé ce roman aux mille facettes. Ces milles pages qui m'ont fait peur dans un premier temps ont été absorbées complètement, même si peut-être un peu plus lentement que d'habitude je dois le reconnaître. New York m'a prise dans ses filets, m'empêchant de me plonger dans toute lecture parallèle pour reprendre mon souffle. Ce premier roman est pour moi une réelle performance.

Ce qui ne gâche rien, l'édition est magnifique, l'insertion de photos a véritablement piqué ma curiosité, et je dois le confesser, si j'ai lu ce roman sur ma liseuse, j'ai ensuite acheté la version papier pour l'avoir dans ma bibliothèque. Je le voulais, il devait y être. Sans plus attendre.

Lien : http://lelivrevie.blogspot.f..
Commenter  J’apprécie          590
« City on fire », c'est le New York de la fin des années 70. Peu avant la coupure d'électricité du 13 Juillet 1977 qui plongera la ville dans le noir plusieurs heures durant.
New York, c'est une ambiance. C'est l'image des trottoirs grouillants de passants, des rues assourdissantes par le klaxon des taxis. Noyé dans la foule, on se sent à la fois perdu et libre. New York, c'est aussi le métro, les nombreux buildings, un lieu de fécondité créative, d'artistes en tout genre, qu'ils soient peintres (Pop Art, Expressionisme abstrait), musiciens (Rock, Punk), etc. C'est un brassage de cultures, de classes sociales, des plus pauvres du Bronx aux plus riches des beaux quartiers. Et, sans oublier le sexe et la drogue qui, eux, n'ont pas de frontière, ni de quartier. New York, on y côtoie le pire et le meilleur.
« City on fire » est le premier roman de Garth Risk Hallberg. Je ne m'attarderai pas sur le buzz autour de la sortie de ce bouquin (le fric, encore). Je préfère m'attacher à ce que j'ai éprouvé en lisant ce pavé de près de 1000 pages.
L'histoire s'articule autour d'une tentative de meurtre d'une jeune femme -Samantha- dans Central Park, la nuit de la Saint-Sylvestre 1976. Ce roman n'est pas un polar puisqu'il mêle différents genres, mais, ce fait divers en est un peu le fil conducteur.
A chaque chapitre, on découvre les personnages. Chacun tient un rôle important, aucun n'est laissé pour compte, ils ont presque tous un premier rôle dans ce grand théâtre : William, ex leader d'un groupe Punk, alias Billy Three-Sticks, fils d'une famille les plus fortunées Hamilton-Sweeney qu'il a rejeté (ou dont il a été rejeté ?) et reconverti en artiste-peintre. Homosexuel, il fréquente un jeune homme black Mercer, prof, provincial, fraichement débarqué dans la grosse pomme. Regan, la soeur de William, en plein divorce, affectée par la séparation d'avec cet homme qu'elle a aimé (ou qu'elle aime encore, malgré tout), faisant de son mieux pour s'occuper de ses deux enfants Willy et Cate. Keith, l'ex-mari, le beau mec plutôt volage, et perturbé par d'autres problèmes professionnels. La belle-famille : Felicia, la nouvelle femme du père, et son frère Amory, jamais loin, un peu vil sangsue, attiré par l'argent et le pouvoir. Un commissaire adjoint Pulaski au corps abimé. Richard, le journaliste. Jenny, la voisine de Richard, assistante de Bruno, propriétaire d'une galerie d'Art. Et bien d'autres encore.
Sans être des clichés, ils sont représentatifs de la ville, de l'époque. Ils composent un melting-pot de personnages, englués sur une immense toile d'araignée.
Chacun de ces personnages, appartenant à des milieux opposés, tous à se dépatouiller de leurs problèmes divers, sont sur cette toile, comme prisonniers de quelque chose ou de quelqu'un. Ils ne se connaissent pas tous, mais chacun d'entre eux est lié, d'une manière ou d'autre, de près ou de loin, avec cette jeune femme Samantha, au centre de la toile.
Les fils de la toile sont ces rues, ces quartiers de New York aux ambiances si particulières. La toile se resserre, les liens se tissent : les personnages se croisent, se rencontrent, s'aident ou luttent les uns contre les autres. Ces personnages -comme des proies collées, piégées sur cette toile, entortillées- se démènent, se débattent, essayent d'avancer, de survivre, de régler leur problème, émettant des vibrations parfois à force de se démener qui ont des répercussions sur les autres personnages.
Cela nous rappelle bien sûr la Théorie des 6 poignées de main, établie par le hongrois Frigyes Karinthy en 1929, évoquant la possibilité que toute personne sur cette planète peut être reliée à n'importe quelle autre, au travers d'une chaîne de relations individuelles comprenant au plus six maillons.
Comme une araignée qui a mûrement réfléchi au piège, l'auteur, s'est (sans nul doute) longuement documenté sur cette période. Par diverses techniques, des références qui nous parlent forcément (la corruption, la population qui commence à s'insurger, comme aux notes de rébellion du Punk, les Sex Pistols, les Clash, mais aussi des artistes comme Bowie ou Patti Smith, tout comme des références littéraires ou cinématographiques - Taxi Driver, le parrain, etc.-, le blackout de Juillet, etc.), on se sent en plein coeur de New York à chaque page, plongés dans son atmosphère, dans le brouhaha, l'effervescence, le sentiment parfois d'insécurité.
A chaque grand chapitre (appelé « Livre »), est inséré un « interlude » : citations, photographies ou encore pages écrites par l'un des protagonistes (article du journaliste, passage d'un journal intime, formulaire rempli par un étudiant,...). La police utilisée et différente selon les textes (note à la main, d'une machine à écrire…) ainsi que d'autres ‘'stratagèmes'' (les oeuvres « Evidences » de William notamment) renforcent le sentiment de réalité de ces écrits et renforcent l'impact du récit. Ces insertions marquent un nouveau chapitre, une nouvelle étape dans l'histoire mais sont, aussi pour le lecteur, des informations supplémentaires, tels des indices laissés ça et là pour nous aider à dénouer lentement l'intrigue.
On démaille aussi les fils de la toile grâce aux allers et retours dans des périodes différentes des protagonistes (des années 60 jusqu'aux années 2000). Si, parfois, on s'interroge sur l'intérêt de certains passages, embrouillant et ralentissant un peu la narration, on réalise rapidement qu'ils ont tous un sens, tels des morceaux du puzzle qui s'emboitent peu à peu. Ils sont autant d'indications pour la compréhension d'un fait de l'histoire, d'un caractère ou d'un comportement d'un tel.
Les personnages sont tous décrits avec profondeur. Ils sont tous en quête de quelque chose. D'un peu de bonheur, en somme, quel qu'en soit sa forme. Ils sont tous pétris par leur passé parfois douloureux, qui les a construits plus ou moins bien, comme chacun de nous. On rentre dans leurs pensées : les interrogations à l'époque adolescente, le manque d'assurance, la difficulté d'intégration, les relations amoureuses belles ou chaotiques qu'on peut vivre à l'âge adulte. le besoin de se connaître, de se comprendre, de se construire sa propre identité, et par là, de s'aimer et d'être aimé. de trouver ces « évidences » du sens de sa vie. Alors, parce qu'on se reconnaît forcément un peu dans l'un d'entre eux, selon notre propre vécu, on s'attache à eux.
Et peu à peu, on distingue le puzzle dans son entier, avec l'image de New York en toile de fond (ou toile d'araignée, devrais-je dire). Mais, ce n'est pas tout à fait juste de dire en « toile de fond » puisque New York, bien entendu, est un personnage en lui-même. Imposant.
J'ai lu précédemment des critiques sur ce roman, certaines plutôt négatives, parce que déçues, parlant notamment de longueurs. Pour ma part, j'avoue avoir été pas mal bluffée par ce premier roman qui ressemble pour moi à une analyse psychologique et historique, d'une réelle originalité. En plus de l'intrigue prenante, ce roman s'apprécie, selon moi, par l'écriture de ce jeune écrivain plutôt juste, lucide et intelligente sur les relations humaines et sur les difficultés (d'être) auxquelles nous sommes confrontées à divers moments de la vie.
Et au final, le plaisir est allé en crescendo, grâce à tous ces personnages et leurs ambiguïtés, leur fragilité tout comme leur force, tous acteurs de cette fiction « historico-psychologico-policier ».
D'ailleurs, si je devais faire une critique quelque peu mesquine, je dirai qu'on tourne les pages Bible avec -obligatoirement- précaution et respect. Pourtant, la finesse de ces pages n'est pas toujours appropriée lorsque les doigts fébriles et impatients veulent connaître la suite…
Commenter  J’apprécie          470
CITY IN FIRE de Garth Risk HALLBERG
Traduit par Élisabeth Peellaert

Éditions Plon (GF) / le Livre de Poche

Ouf ! J'en suis venue à bout ! Il faut dire que je l'ai commencé pendant une panne de lecture (ce qui n'aide pas) et qu'il est très long (1244 pages en format poche). Mais s'il m'a fallu un peu plus de deux semaines pour la première moitié, il ne m'a fallu que trois jours pour les 600 dernières pages. En fait, si je ne l'ai pas lâché, c'est parce que les personnages m'ont obsédée.

J'ai adoré les personnages.

William III du nom (un héritier en rupture avec sa famille) est le personnage central, celui autour duquel tous les autres gravitent. C'est un ex-chanteur punk et artiste peintre qui se défonce au lieu de peindre.

Son amant, Mercer, un aspirant écrivain qui a réussi à quitter les juppes de sa famille pour oser se confronter à la vie new-yorkaise en acceptant un poste de professeur.

Regan, la soeur de William, une femme, moins fragile qu'elle ne le croît, qui n'ose pas s'affirmer et doute d'elle-même.

Keith, le mari volage de Regan.

Will, le fils de Regan et de Keith, aussi sensible et, quelque part, perdu que son oncle William.

Charlie, un enfant adopté et relégué au sous-sol pour dormir lorsque ses frères (jumeaux et enfants narurels) sont nés.

Sam, l'amie de Charlie, qui sera victime d'une agression par arme à feu.

Jenny, une californienne née de parents vietnamiens.

Richard Groskoph, le journaliste.

Larry Pulaski, l'inspecteur du NYPD.

Sans oublier le grand méchant, Amory Gould, un capitaliste surnommé le Frère Démon par William.

Quand à Nicky Chaos, comme son nom l'indique, il sème le désordre là où il passe mais il me fait un peu penser au Faust de Goethe : "une force qui, éternellement, veut le mal, et qui , éternellement, accomplit le bien".

Mais il ne faut pas oublier New-York qui est un véritable personnage. le New-York des année 70, celui des classes sociales, gouverné par de grosses sommes d'argent et insensible aux réformes durables.

Le point commun de ces personnages (sauf du Frère Démon et de Nicky Chaos), c'est qu'ils ont beaucoup de difficultés à s'émanciper de leurs familles respectives et qu'ils recherchent tous une certaine forme de liberté... ce que le blackout (panne d'électricité réelle qui a plongé New-York dans le noir en 1977) leur permettra peut-être de trouver.

Oups ! J'allais oublier de parler de la musique car, dans ce livre, il en est beaucoup question et c'est celle de toute une génération : Patti Smith, David Bowie (pendant une de mes périodes préférée, celle de Ziggy Stardust), Iggy Pop et les Stooges (je suis fan d'Iggy Pop) , Lou Reed, le TRex de Marc Bolan, les Clash, ...

Au final, j'ai énormément aimé ce livre (et je pense que c'est un livre que j'aurai envie de relire plus tard) mais qui rebutera les lecteurs impatients et fébriles d'action.
Commenter  J’apprécie          211
J'ai été immédiatement attirée par ce roman dès sa sortie cette année, mais au vu du nombre de livres dans ma PAL et du fait qu'il contient quand même 970 pages, je me demandais s'il valait le coup que j'investisse… La réponse est oui, j'ai bien fait de craquer ! Déjà pour le scénario : J'aime beaucoup l'idée de suivre plusieurs personnages apparemment sans lien, jusqu'à la nuit d'un nouvel an où une jeune fille se fait tirer dessus dans Central Park ; Alors seulement on entraperçoit que, finalement, tous ces gens pourraient bien être liés d'une manière ou d'une autre. Mais si ce roman sonne comme un policier, son intrigue n'est en réalité qu'un prétexte à nous faire pénétrer la société new-yorkaise des années 70 dans toute sa splendeur et sa décadence.


Il faut dire que la plume de Garth Risk Hallberg fait la majeure partie du boulot, en nous transportant littéralement dans l'espace et le temps : Il nous immerge dans cette ville immense parmi la multitude de personnages et de milieux sociaux, allant de la famille la plus riche dont tous les hommes se nomment William Ier, II, III etc, en passant par la communauté noire, les Hell's Angels, les punks rockers, les artistes, les gays, les drogués, les artificiers, et mêmes une sorte de société plus ou moins secrète de post-humanistes, qui voudrait changer l'ordre établi de la société par des moyens plus ou moins réalistes. Mais ces milieux sont-ils aussi hermétiques qu'ils en ont l'air ? Bien-sûr que non : ils sont tous reliés par cette ville qui les transcende.


L'auteur nous plonge tellement facilement dans la vie de chaque personnage ou groupe de personnages, en nous abreuvant de détails et d'anecdotes présentes et même passées, que nous cherchons en vain ce qui les lie à la tentative de meurtre dans le parc. le motif est-il la drogue ? le hasard ? Un secret de famille ? L'argent ? La police galère autant que nous mais pour les raisons inverses : Elle n'en sait pas assez sur la vie très privée de la victime… Heureusement, un journaliste amené à fouiner un peu partout pour un article commence à relier des événements entre eux… Mais il mourra dans des circonstances troublantes, laissant simplement ses notes personnelles. Rassurez-vous, celles-ci tomberont entre vos mains, et il ne vous restera plus qu'à booster vos neurones pour tenter de trouver le fin mot de l'histoire !


Car c'est le troisième atout de ce roman : L'auteur y a inséré des bribes de documents tombant entre les mains de divers personnages, afin que nous vivions un peu plus l'histoire. Et ça fonctionne à merveille ! le contenu des documents aide vraiment à comprendre le contexte et à le vivre de plus près, et la forme aide à entrer dans la peau des personnages et à mieux visualiser l'époque. Ca permet de comprendre bien des choses sur les gens que nous côtoyons dans ce roman, et de manière divertissante. Et nous en avons bien besoin parce que 1977 fut l'année du blackout de New York, et vous pouvez me croire le lecteur est un certain temps aussi dans le noir le plus total !!


Au final, j'ai beaucoup aimé rechercher dans les vies de chacun les indices de ce qui a pu se passer et me perdre dans mes théories, mais j'ai surtout aimé me plonger dans l'univers de cette ville et la multiplicité de ces habitants, de ses ambiances. Et moi qui aime les fins clairement achevées et propres, j'ai pourtant aimé le joyeux bordel de celle-ci, qui reflète bien la réalité : La plupart du temps, on ne sait pas comment finissent les gens, on imagine simplement la direction que peut prendre leur vie quand on finit par les perdre de vue. On obtient la réponse principale mais pour le reste… A vous d'imaginer en fonction des milliers de détails accumulés durant cette lecture bien fournie : Il n'existe pas qu'une seule fin explosive comme je l'attendais un peu paresseusement sûrement, mais bien autant de fins que de personnages ce qui, a posteriori, semble plus réaliste !


« Car si les faits indiquent quelque chose, c'est que la ville unique et monolithique n'existe pas. Ou si elle existe, elle est la somme de milliers de variations qui toutes rivalisent pour occuper le même lieu géographique.»


(Attention toutefois à vos poignets avec le poids du livre, qui est énorme : La liseuse peut peut-être constituer une alternative pratique !!)
Commenter  J’apprécie          140
Ah, ce n'était pas gagné ! Beaucoup d'éléments dissuasifs, de mon point de vue :
- CITY ON FIRE est un pavé (1244 pages en poche), et depuis que j'ai mis à la poubelle un morceau de ma vie pour avaler « La vérité sur l'affaire Harry Quebert », qui réussit à être à la fois insipide et indigeste alors qu'il en compte environ la moitié (670 p.), je cultivais la méfiance ! Mais je me suis dit que « Belle du Seigneur » (1110 pages) ne m'avait jamais pesé, au contraire, pour m'encourager à passer outre.
- L'un des arguments publicitaires, à l'époque du lancement (2015) consistait à bramer : premier roman le plus cher de l'Histoire ! Deux millions versés à l'auteur par l'éditeur américain !! (Knopf). Hollywood a acheté les droits avant même sa parution !!! Qui dit mieux ? (Plon, pour l'édition française, n'a pas révélé le montant de son offre). Ce n'est pas forcément un gage de qualité… sinon celle du marketing, et celle de l'agent.
- La culture punk, le hard rock, les tourments adolescents, l'alcool, la drogue tiennent une place importante dans la narration (nous sommes en 1976-77) or ce ne sont pas des sujets qui figurent au premier plan de mes thèmes favoris en littérature… ni dans la vie.

Tant pis ! J'ai plongé.

Je ne l'ai pas regretté. A quoi bon tenter de résumer CITY ON FIRE ? J'en suis incapable. Mieux vaut suivre le fil, sinueux et ramifié, depuis « Un sapin de Noël remontait la 11e Avenue » jusqu'à « Je vous vois. Vous n'êtes pas seuls. » Mieux vaut l'habiter, comme Mercer, prof et écrivain, provincial, noir, qui essaie de planter quelques racines à New York et dans le coeur de son amant William, blanc, héritier d'une famille opulente, les Hamilton-Sweeney, qu'il a fuie… Comme Regan, sa soeur, pour qui la rupture avec Keith, mari épris et infidèle, se traduit avant tout par la migration vers un autre appartement, plus coquille que cocon, où la lumière sur un mur peint blesse les yeux, où les rideaux sont dans un carton au lieu d'occulter la grande fenêtre, où les enfants, Will et Cate, sont déjà levés mais où les oeufs qu'ils font frire sentent la mort.

Mieux vaut courir d'une vie à l'autre, au rythme des chapitres : celle de Carmine, le fabricant de feux d'artifice, dont les fusées parfaitement réglées explosent tous les ans dans le ciel du 4 juillet, fête nationale, mais qui vient de se faire ravir son rôle de metteur en scène par un ordinateur. Celle de sa fille Sam, sur qui l'on va tirer pendant une autre fête, lors du Nouvel An. Celle de Nicky Chaos, le bien nommé, chef d'une inquiétante bande de musiciens « post-humanistes » et de Frère Démon, l'encore-mieux-nommé, la pièce rapportée, l'oncle machiavélique et impassible qui a pris le pouvoir chez les Hamilton-Sweeney. Il y en a bien d'autres. le roman foisonne de personnages : tendres et naïfs comme Charlie, amoureux de Sam ; déjantés comme l'inspecteur Pulaski et son ami Richard, le journaliste, tous deux essayant de résoudre par des voies différentes le mystère de l'agression que celle-ci a subie ; ou vulnérables comme Jenny, la voisine de Richard, elle aussi déracinée.

On l'a beaucoup dit, parce que c'est vrai, le personnage capital, c'est la ville de New York. GRH la chante, la dessine, l'étrille, dans une langue irrésistible, même traduite. Mercer contemple « la Ville telle qu'il l'imaginait depuis le coin ingrat où il était né (…) de la neige (…) surgissaient des immeubles crénelés (…) et à Central Park Sud, sur les hôtels en forme de pièce montée, tombait du sucre glace ». Regan a l'estomac soulevé par « la suspension gélifiée du taxi » et par son angoisse. « Elle eut la vision soudaine d'une ville retournée à l'état sauvage. La neige, en disparaissant, laisserait apparaître des lianes grimpant aux maisons, des pumas rôdant à l'entrée des métros ». Richard le journaliste voit clairement « L'Histoire, le théâtre, le destin, l'impermanence, le désastre, la politique, la ville, le tout bien tassé dans une unique fusée promise à l'embrasement ». Mais c'est encore et toujours Regan qui me bouleverse (mon coeur de mère !) quand elle accompagne ses enfants jusqu'au métro (« Maman, on prend tout le temps le métro tout seuls quand on est chez Papa ») et qu'elle les suit à l'intérieur de la station, puis sur le quai, jusqu'à la fermeture des portes… Bien plus tard, les dernières centaines de pages du livre font revivre la panne d'électricité géante, le « black-out » qui frappa New York en juillet 1977, entraînant pillages, émeutes et incendies. Charlie poursuit une hypothétique bombe, une fille en patins à roulettes règle la circulation dans la lueur des phares, Keith et Regan courent dans les rues obscures en criant les prénoms de leurs enfants. Nous hurlons avec eux.

Commenter  J’apprécie          113
Après un déluge de critiques sur Internet et dans la presse, je me suis lancée dans ce roman dense et foisonnant ancré dans le New York des années 70. le soir de la Saint Sylvestre, une jeune fille est agressée dans Central Park. Un fait divers anodin... pourtant beaucoup de conséquences vont en découler, pour plusieurs personnages à priori sans aucun lien entre eux.
Ponctué d'extraits de journaux, de lettres manuscrites, de pages de magazines... ces morceaux de vie, rassemblés, proposent un portrait saisissant de New York, à la manière d'une série TV (j'ai lu quelque part que l'auteur accepte largement cette comparaison). En bref, un roman très intéressant, une écriture très fluide et très évocatrice, dans lesquels il faut vraiment prendre le temps de s'immerger.
Commenter  J’apprécie          90
Voici un livre qui excite la curiosité des lecteurs en ce début d'année.
Tout d'abord par l'a-valoir considérable (2 millions de dollards) payé par l'editeur américain KNOPF à un jeune auteur quasi inconnu, chroniqueur pour le New York Times, Garth Risk Hallberg qu'il est à présent de bon ton de présenter sous ses seules intiales G.R.H ...
Ensuite pour la longueur inhabituelle de l'ouvrage, 971 pages sur papier bible aux Editions Plon
Enfin, et cette remarque est liée à la précédente, par son poids (à vue de nez plus d'un kilo) ,trop pesant pour accompagner les trajets en métro au fond d'un sac à mains...
La boulimique de lecture que je suis avait été séduite par les critiques Presse ,présentant l'auteur comme "le Proust américain " et le livre comme "une Ode à New York" jusqu'au bandeau de l'éditeur affichant l'appréciation suivante "Eblouissant"
Attention toutefois aux risques inhérents à l'hyperbole qui peuvent parfois entrainer un effet inverse à celui recherché...
ceci étant, c'est vraiment un BON livre avec comme chez Proust, mais aussi Henry James une fine analyse des personnages et de leurs problématiques personnelles dans un contexte géographique et historique déterminé qui révèle un travail de documentation remarquable.
Les années 1970 ne sont pas si lointaines mais même pour moi qui les ait vécues, elles se parent d'une aura exotique tant elles sont éloignées de ce qui fait à présent l'air du temps, avec leur vent de révolte libertaire, leur mépris des codes bien pensants et leur parfum de soufre sur fond de musique punk et de consommations de produits stupéfiants divers.
L'intrigue choisie par GRH est intelligente puisqu'elle permet de réunir les parcours de personnages évoluant dans des univers radicalement différents. Les manoeuvres sournoises de ceux qui veulent s'approprier la ville en utilisant comme arme l'amertume des exclus de la socièté de consommation reste un thème d'une consternante actualité.
Les protagonistes de ce vaste récit m'ont tous émue au fur et à mesure que leurs failles se dévoilaient .Les allers et retour dans le temps opérés par l'auteur pour les situer dans le déroulement de leur histoire singulière ne font que relancer l'intérêt du lecteur de même que les intermèdes au graphisme travaillé qui rythment l'ouvrage.
C'est vrai cependant que malgré toutes les évidentes qualités de ce livre, il est un peu trop long et que quelques coupures auraient été bienvenues.
Heureusement que le récit devient plus tonique quand on aborde la black out de juillet 1977 avec la gigantesque panne d'électricité qui a plongé New York dans le chaos et a fait resurgir la sauvagerie primaire issue des fractures sociales.
Un hymne à New York a t'on dit ? Si l'on s'en tient à la prose de GRH, on n'a pas vraiment envie d'aller y passer ses vacances ! Il vaut mieux pour se faire une idée plus positive de la ville emprunter les chemins de Woody Allen et adopter le regard amoureux qu'il en a donné dans "ANNIE HALL"
Je m'interroge sur le succès en France de ce roman a-typique ; seul l'avenir dira si la mayonnaise prend sur la durée....
Commenter  J’apprécie          90
Premier constat pour mon mari : livre volumineux = difficulté de l'auteur à condenser... Je ne lui donne pas tort après plusieurs jours en compagnie des personnages de Garth Risk Hallberg, dont City on fire est le premier roman. Tout un tour de force quand même que de déconstruire à ce point une intrigue somme toute assez simple. le contexte de la grande panne d'électricité à New York City en juillet 1977 donne lieu à des chassés-croisés entre une famille de riches new-yorkais et une frange underground de musiciens punks, à l'affût d'un renouveau social mâtiné de pure bêtise égoïste, aux buts plus que douteux. C'est le meurtre d'une jeune fille dans un parc le soir du Nouvel An qui cristallisera les enjeux de tous.
Un roman choral bien mené, mêlant l'onirique à la réalité cruelle des rues d'une mégalopole américaine et même si les personnages sont nombreux et que les époques se chevauchent, on parvient à garder le cap. Je suggère néanmoins une lecture à intervalles rapprochés.
Commenter  J’apprécie          80
Le premier roman de Garth Risk Hallberg est à la fois une saga familiale (celle des fortunés Hamilton-Sweeney), une fresque urbaine (un New York décadent qui sent le souffre, le sexe, la dope, le sang), un roman historique (milieu des années 70) et documentaire.
Plus particulièrement, il entrecroise les destinées d'un groupe de personnes de l'année 1976 jusqu'au "black-out" (immense coupure de courant) du 13 juillet 1977.
L'auteur nous décrit une ville au bord de la banqueroute, violente, corrompue, sale, bruyante... Il préfigure le New York des années 80-90.
Sur plus de 900 pages, Garth Risk Hallberg arrive à tenir en haleine le lecteur : un livre sur la condition humaine en plein 20ème siècle !?!?!?
Le "black-out" sera l'apothéose de cette anarchie qui régnait dans cette ville. La population sera livrée à elle-même, ville devenue fantôme : pillages, meurtres, tout était permis.
Nous faisons connaissance avec une pléthore de personnages :
- William : l'héritier, en rupture de ban, de la riche famille Hamilton-Sweeney, ancien musicien punk, devenu artiste plasticien,
- Regan : sa soeur qui essaie d'assumer sa part d'héritage dans la Compagnie du même nom,
- Keith : son mari volage,
- Charlie : adolescent banlieusard, fan de musique punk,
- Samantha dit Sam : son amie, aspirée par le mouvement punk, victime d'une grave agression dans Central Park au début du livre et dans le coma,
- Mercer : l'amant de William, professeur et aspirant romancier.
La liste est non exhaustive.
Le roman doit son nom à un titre de la face B d'un disque punk des Ex Post Facto (ancien groupe de musique dont William était le chanteur/leader et dont Charlie et Samantha sont fans).
Le livre et son auteur ont fait les gros titres des journaux... pour des mauvaises raisons (le livre a été remporté aux enchères pour 2 millions de dollars par la maison d'édition Knopf, record battu), tout l'abattage fait autour....
De tout cela, il reste un auteur dont c'est le premier livre avec ses qualités et ses défauts : il lui a fallu, quand même, 12 ans pour concrétiser ce roman-fleuve et un certain "grain" de folie pour imaginer une telle fresque sur le New York des années 70.

Extrait d'une interview donnée par Garth Risk Hallberg au magazine Télérama du 03/02/2016, titrée "Garth Risk Hallberg ou la stature de la liberté"
"C'était un jour de 2003, Garth Risk Hallberg avait alors 24 ans. A travers la vitre de l'autocar qui le ramenait à New York pour la première fois depuis l'effondrement des Twin Towers, le jeune homme contemplait la silhouette tout ensemble familier et mutilée de la fameuse skyline de Manhattan. Soudain, dans ses écouteurs, Billy Joel se mit à fredonner : "J'ai vu s'éteindre les lumières de Broadway , j'ai vu l'Empire State s'effondrer...., j'ai vu les ruines à mes pieds", disait la chanson, composée en 1976. Les paroles évoquaient le crépuscule du New York des années 1970, un lieu étrange et interlope, à la fois dangereux et excitant, un repaire de voyous, de poètes d'avant-garde et de musiciens punk. Rien à voir avec la ville prospère, propre et sûre qu'elle est devenue ensuite, celle que je connaissais depuis mon adolescence. J'ai éprouvé à ce moment une immense nostalgie pour ce temps que je n'avais pas connu, pour cette ville plus risquée mais plus libre, et à cet instant précis, dans l'autocar, je peux dire que ce roman m'est venu. Pas simplement l'idée du livre, mais le livre lui-même, tel que je l'ai écrit des années après, raconte aujourd'hui Garth Risk Hallberg..."
Commenter  J’apprécie          80
Ah ! pour un pavé, c'en est un ! Dans ce très long et très gros roman, l'auteur Garth Risk Hallberg (il s'appelle RISK !!) nous entraîne dans une ville de New York monstrueuse et tentaculaire. C'est un roman choral où des personnages très différents ; des punks, des toxicomanes, des membres d'une riche dynastie se trouvent unis par un "Frère Démon" qui tire les ficelles de l'histoire. Et puis, il y a cette panne d'électricité qui va plonger la ville dans le chaos. Point culminant du récit, cette obscurité où paradoxalement, la lumière va se faire, puisqu'il s'agit aussi d'une énigme policière. La lecture en est assez facile, malgré la longueur, car le rythme ne faiblit pas, on suit le récit comme une série TV. Une originalité à signaler ces pages glissées au milieu des autres et qui sont censées être de "vrais" extraits d'articles écrits par certains personnages. J'ai, quant à moi, ressenti, tout de même, une lassitude vers la fin (au bout de 1200 pages, c'est excusable) lorsque se succèdent les scènes de pillage un peu répétitives. Mais au final, je ne regrette pas d'avoir plongé dans cette histoire.
Commenter  J’apprécie          70




Lecteurs (1197) Voir plus



Quiz Voir plus

Dead or Alive ?

Harlan Coben

Alive (vivant)
Dead (mort)

20 questions
1820 lecteurs ont répondu
Thèmes : auteur américain , littérature américaine , états-unisCréer un quiz sur ce livre

{* *}