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« Ci-gît Jesse W James, mort le 3 avril 1882 à l'âge de 34 ans, 6 mois, 28 jours. Assassiné par un lâche dont le nom n'est pas digne de figurer ici. » (inscription gravée sur le tombe de Jesse James) Il avait pourtant bien un nom, le lâche assassin : il s'appelait Robert Ford, avait à peine vingt ans, le sourire facile, un visage poupin d'adolescent et la tête pleine de grands rêves mirobolants. Depuis l'âge de huit ans, il collectionnait pieusement tous les articles de journaux se rapportant à la célèbre fratrie de hors-la-loi, Jesse et Franck James, allant jusqu'à acheter à prix d'or des petits objets leur ayant appartenu. Pendant des années, il a rêvé ardemment de rencontrer son idole et voici qu'un beau matin de 1880, son fantasme se réalise enfin : non seulement il se retrouve face à Jesse James en personne, mais il a l'insigne honneur d'être intégré à sa bande ! Hélas, on a bien raison de dire que les rêves ne devraient jamais devenir réalité… Rapidement la tension monte entre les deux hommes. Jesse est vaguement intrigué et un peu révulsé par ce jeunot à peine sorti de l'enfance et obsédé par lui et Bob souffre de l'indifférence de son modèle. Les petites vexations s'accumulent, la rancoeur et la haine s'installent progressivement, jusqu'au jour fatal où, début avril 1882, le lâche Robert Ford assassina d'une balle dans le dos le valeureux Jesse James, rentrant ainsi à jamais dans l'Histoire des Etats-Unis comme le plus grand Judas de la conquête de l'Ouest… A mi-chemin entre un roman d'aventure et une biographie romancée, « L'assassinat de Jesse James » est un excellent Western d'une très grande précision historique – les détails sur l'Amérique post-guerre de Sécession sont légion et tous plus passionnants les uns que les autres. C'est également un roman très freudien et intimiste qui se concentre sur la décortication de la relation entre un « fan » et son idole, relation qui, ne pouvant être réciproque, est destinée fatalement à mal tourner. Les deux personnages principaux sont admirablement campés. le portrait fait de Jesse James est particulièrement fascinant : celui d'un homme bourrelé de contradictions, à la fois courtois et cruel, aimable et violent, extrême dans ses comportements comme dans ses affections. Face à lui, Bob Ford s'avère curieusement attachant malgré certains aspects un peu veules et sournois de sa personnalité. Il y a du petit garçon mal muri chez ce tueur débutant, une indécrottable candeur qui ne peut qu'attirer la compassion. Incapable de prévoir les conséquences de son acte, il est le premier surpris de la détestation que lui vouera le peuple américain et découvrira peu à peu avec horreur qu'en assassinant sa victime, c'est lui-même qu'il a entrainé dans la tombe. Définitivement un roman très réussi, doublé d'une étude passionnante sur le héros américain. Comme le dit tristement l'un des personnages : tuez un seul homme et vous serez conspué par tous, mais tuez en des dizaines en volant des millions et vous deviendrez un héros. + Lire la suite |