C'est grâce au soutien du
Goethe-Institut d'Allemagne que
Dominique Venard a pu traduire cette oeuvre de l'Allemand en Français en 2015.
L'auteure est entretemps passée d'élément prometteur à valeur sûre en littérature. À 20 ans,
Nino Haratischwili a quitté Tbilissi et sa Géorgie natale, pour aller faire des études de mise en scène et de dramaturgie à Hambourg en Allemagne. À seulement 36 ans, aujourd'hui, la jeune artiste peut se vanter d'avoir réalisé 13 pièces de théâtre et écrit plusieurs romans. Un autre ouvrage d'elle qui a été traduit en Français "
La huitième vie (pour Brilka)" a eu un bon accueil chez nous et j'espère que son oeuvre ambitieuse "Die Katze und der General" ou 'Le chat et le général' soit également traduit prochainement en notre langue.
L'héroïne principale de ce récit, Stella, a 36 ans et vit paisiblement avec son mari Mark, un réalisateur de films documentaires, et leur fils Theo à Hambourg, lorsque tout à coup "out of the blue" (sorti de nulle part), au bout de 7 ans, apparaît Ivo, son demi-frère et ex-amoureux.
Leur histoire commune est peu banale. le père de Stella, Frank, a eu une liaison avec la mère d'Ivo et lorsque son père est décédé en prison après avoir tué son épouse et mère d'Ivo, Frank a assumé la garde d'Ivo, devenu donc orphelin. La mère de Stella, Gesi, est partie aux États-Unis, à Newark, dans le New Jersey, où elle a refait sa vie avec James. Les 2 enfants et Leni, la soeur de Stella ont été éduqués, en fait, ensemble par Tulja, une tante de Frank, à Niendorf, sur la mer Baltique au nord de Lübeck en Allemagne. Stella avait 9 ans à ce moment, mais n'en avait que 6 lorsque Frank a commencé une affaire avec Emma, la mère d'Ivo, dont le mari était à Berne, en Suisse, pour son travail.
Il est évident que cette situation irrégulière avec ses tensions a rapproché les 2 gosses. Mais la sympathie réciproque a évolué en un amour interdit, ambigu et précaire, et malgré le fait que sa soeur, Leni (de 4 ans son aînée et auteure de livres pour enfants), voyait en Ivo l'incarnation du malheur de la famille, pour Stella son amour pour Ivo était "comme une blessure qui refusait de guérir". Maintenant, qu'il s'est pointé chez elle, elle vit dans "une sorte de brume".
Au cours de leur première rencontre après le retour inattendu d'Ivo, les 2 se chamaillent et se disputent, manifestement mal à l'aise. Cependant à peine une semaine plus tard, Stella succombe au charme d'Ivo.
Son mari Mark sent que leur union est menacée depuis l'arrivée d'Ivo, et pose des questions auxquelles son épouse n'a évidemment pas de réponses. Stella se retrouve dans une situation des plus pénibles, parce qu'elle ne veut pas perdre un bon mari et surtout pas son fils qu'elle adore. La première sonnette d'alarme est l'incapacité de Stella de fournir un travail satisfaisant à la rédaction du magazine régional, où elle est responsable du secteur culturel.
Toujours est-il que Stella décide d'accompagner Ivo en Géorgie pour un reportage sur le conflit en Abkhazie, qui s'est déclaré indépendant de la Géorgie en 1992, mais une indépendance reconnue par seulement 5 États :
la Russie bien entendu (n'est-ce pas monsieur Poutine ?), le Nicaragua, le Venezuela, Nauru (en Océanie, avec ses 14.000 habitants) et la Syrie !
L'ouvrage de
Nino Haratischwili constitue donc une vaste fresque d'amour et de guerre. Un amour que Stella qualifie elle-même à la page 80 de "couturé, torturant, torturé, rapiécé" , mais surtout un amour très fort, dont la reconstitution s'inscrit dans la grande tradition des maîtres littéraires russes. Et ce n'est sûrement pas un hasard si elle a commencé son oeuvre par une citation de la poétesse
Marina Tsvetaïeva (que j'ai posté hier sous la rubrique Citations), car "
Mon doux jumeau" est un bel exemple de prose poétique.