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3,58

sur 92 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Du monde, elle ne connait rien d'autre que cette « maison de femmes » dans laquelle elle est née, où elle a grandi. Un lieu entouré de grands murs de pierres et dans lequel sont enfermées celles que l'on accuse d'avoir déshonoré leur famille, d'avoir été infidèles ou d'avoir failli à leurs devoirs… Des femmes punies par des hommes, parfois même par d'autres femmes, que l'on enferme pendant un an ou deux et que parfois l'on oubli, comme c'est le cas pour la Mère de la narratrice, qui ne compte plus les années passées entre ces murs et dont la santé se dégrade à petit feu. Elle est la mémoire de ce lieu maudit, celle qui accueille et apaise la détresse et la folie des autres femmes, sans se soucier de celle de sa propre fille…


Avec « A l' origine notre père obscur », Kaoutar Harchi nous offre un récit à la première personne, aussi intense que bouleversant, qui résonne comme une longue mélopée, un chant de la narratrice destiné à toucher une mère secrète, rendue folle de douleur, et un père absent. le portrait magnifique d'une jeune fille, noyée au coeur du désespoir des femmes, en quête de l'amour qu'elle n'a jamais connu et prête à aller le chercher elle-même pour le découvrir. Une fable aussi amère que cruelle, qui révèle la noirceur de l'âme humaine, ne laissant que peu de place à l'espoir. Difficile néanmoins de ne pas se laisser frapper et envoûter par la beauté de la plume de Kaoutar Harchi ! Un roman sublime et tragique, qui m'a complètement subjuguée !
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La maison des femmes est un lieu où sont parquées les recluses, celles convaincues d'avoir fauté, celles qui ont bafoué l'honneur de leur mari et de leur famille, celles qui ont parfois simplement voulu être elles-mêmes. La narratrice y vit avec sa mère. Elle y est née. Devenue adolescente, elle se heurte au silence maternel et ne supporte plus la passivité de cette communauté courbant l'échine sous le joug des traditions. Les circonstances vont lui donner la force de pousser la lourde porte en bois de la bâtisse et d'aller chercher des réponses auprès de ce père qu'elle n'a jamais connu.

Au-delà de la quête des origines, ce texte d'une beauté élégiaque est avant tout un cri de révolte. Contre la complaisance, la résignation de ces femmes acceptant leur sort, ces femmes devenues dépendantes au mal qu'infligent les hommes. C'est une voix qui s'élève pour dire « je viens de vous mais je ne suis pas à vous et je refuse de me sacrifier comme les femmes, depuis des millénaires, se sacrifient ». Sacrifiées « par fidélité, par honneur, par devoir, n'osant pas se lever et se rebeller. On les avait, ces femmes, dressées pour et quand est venu mon tour de choisir quel chemin prendre, il y eut, d'abord, ce besoin viscéral de me dresser contre. Contre elles et leur docilité de petites chiennes effrayées par l'ombre du maître quand moi, moi ma vie, moi mon destin, c'était, ce maître, l'approcher, le sentir, le toucher, et, yeux dans yeux, malgré le souffle court et le soulèvement vif du coeur dans la poitrine, lui murmurer à l'oreille : vois comme je n'ai pas peur de toi. Vois comme je te comprends. Vois comme je t'aime. »

Je suis sorti de ce roman abasourdi par la puissance de l'écriture, sensuelle, heurtée, poétique. L'absence d'ancrage géographique et temporel donne au propos un coté universel. Et mon regard masculin ne peut que constater l'évidence : oui, en se réfugiant derrière le poids des traditions et la force brute, les hommes ne font que signifier leur lâcheté. Incontestablement ma lecture la plus marquante de la rentrée littéraire.


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Ce livre est écrit tout en délicatesse. Et pourtant, le sujet est douloureux. Une jeune fille a grandi entre les murs d'une « maison des femmes », ces coupables (ou pas) d'adultère qui se retrouvent là parce qu'elles ont été bannies par leur mari, leur belle-famille. La narratrice n'a pas connu d'autre lieu, elle est née là, d'une mère qui peu à peu va sombrer dans la folie.

C'est l'histoire d'une révolte contre un monde ancré dans les traditions.

Un huis clos dans un monde de femmes, entre silences, non-dits et révélations en pointillés. L'auteure nous tient en haleine, on veut savoir le pourquoi du comment, on veut comprendre la présence de cette femme et sa fille dans ce lieu.

Beau roman, belle écriture à la fois poétique et sensuelle, et qui ne laisse pas insensible.
Lien : http://krolfranca.wordpress...
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Beaucoup de romans s'attachent à mettre en évidence la servitude du corps féminin, issu de traditions implacables, des religions monothéistes, peu amicales avec la femme .Celui de Kaoutar Harchi, récit construit comme une voix off, récitant un texte en illustration d'images, entre dans cette catégorie, il a des chances de marquer de son empreinte cette espèce :Il s'agit d'une jeune fille qui est emprisonnée depuis son plus jeune âge dans une « maison de femmes « de laquelle on ne peut guère sortir, entourée de hauts murs de pierre. Les frères, les maris, les pères y mettent à l'isolement les épouses, les soeurs, les filles seulement coupables d'avoir voulu ou tenté, un jour ou l'autre, d'avoir transgressé la loi patriarcale.
Le récit de Kaoutar Harchi décrit la tentative de cette prisonnière de rejoindre ce « père obscur », qu'elle s'est représentée secrètement .Il n'est à séjour qu'une absence, un vide affectif. On vient prestement au vif du sujet : la condition de la femme à travers les âges, minorée par le patriarcat : « Aucun gardien, ici, ne surveille les femmes .Elles vivent sous le poids des règles familiales inculquées depuis l'enfance et sont devenues leurs propres sentinelles. Vous savez, jamais aucune n'osera ramasser ses affaires, pousser la grande porte et partir. Toutes attendent, même s'il arrive à certaines de le nier, le retour de l'époux qui lèvera la sentence les autorisera à se diriger vers la sortie. (…) Tout n'est question que de gestes, de regard, de paroles .De traditions. »
Cette recherche du père obscur, c'est une quête d'amour, un désir vif et conscient de liberté, de reprise de la possession de son destin et de son corps , par la femme .Il y a dans l'écrit toute une série de descriptions évoquant le corps prisonnier de la femme, l'évocation de scènes de cris et de chuchotements secrets , conspirant contre cette liberté, manifestant leur volonté de prolonger la servitude du corps de la femme, de son sexe : « La part masculine qu'il manquait à mon être et à la conquête de laquelle je suis partie, à mains nues, avec sur le dos une simple robe au col piqué de perles blanches . »

Comme pour mieux mettre en évidence le rôle des religions dans la perpétuation de l'image négative de la femme, Kaoutar Harchi fait précéder le début de chaque chapitre par une citation extraite de la Bible .Le style du récit , marqué par l'usage de l'apostrophe fréquent, de phrases dénuées de verbes, nous surprend ; il nous déstabilise, et provoque largement l'empathie vis-à –vis de cette femme en recherche de ce père obscur dans laquelle on reconnaît sans peine une magnifique tentative d'émancipation .
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Roman méditerranéen à l'écriture puissante qui pose la question de l'émancipation, mais aussi la recherche du père , la lutte contre l'indifférence d'une mère aliénée, l'enfermement. Aucun nom ou prénom n'est prononcé, le texte est torturé et douloureux et l'histoire de cette toute jeune fille est bouleversante et intemporelle.
Magnifique et difficile
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Une maison où vivent recluses les femmes rejetées par leurs familles. Conduites ici et contraintes à l'attente pendant une année, deux, une vie entière. Rejetées parce que leur comportement ne convient pas à ce que l'on attend d'elles ou simplement victimes de la rumeur, du désamour. Des femmes, victimes consentantes dans une société d'hommes. Car elles ne sont pas enfermées ces femmes, elles pourraient partir, quitter ce lieu de réclusion, mais elles ne le font pas. le poids des traditions est une chaîne suffisante.

Et une enfant naît et grandit au milieu de ses bannies. Confrontée au silence elle a envie d'hurler, dans cette maison sans vie elle veut vivre, dans cette maison remplie de solitudes elle a soif d'amour. Mais elle ne trouve rien en face d'elle, sa mère se désintéresse d'elle et se montre indifférente à son égard, les autres femmes la voient comme un substitut de leurs enfants dont elles sont séparées, mais personne n'aime réellement la jeune fille.

Les hommes sont absents de la maison, pourtant la maison vit à leur rythme. Dans l'attente des visites, dans l'espoir d'être ramenée dans la famille. Les hommes dominent, les femmes se soumettent.

Le père vient parfois à la maison, mais la jeune fille ne le voit pas, il est une figure lointaine et inconnue dont elle espère tout. Elle espère de lui tout ce qu'elle n'a jamais trouvé dans la maison auprès de sa mère.

Cette maison se trouve dans une ville, un pays qui ne sont jamais nommés. Qu'importe. Cette maison est un symbole, celui de la condition féminine prisonnière, niée, bafouée dans certaines sociétés où la femme n'est jamais un être à part entière, où la femme est soumise à l'homme et aux traditions, où les voix des femmes se taisent et acceptent. Des sociétés où une femme qui veut vivre est exclue de la famille et de la société, rejetée aussi bien par les hommes que par les femmes.

L'écriture ciselée de l'auteur porte ce texte sublime, comme hors du temps. Quand je pense que l'auteur est une jeune femme qui n'a même pas 30 ans ! Cela laisse présager de très belles choses pour la suite.

Une très jolie découverte.
Lien : http://tantquilyauradeslivre..
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Enfermées dans la « maison de femmes » par leur époux, leur, père, leur frère, leur cousin leur oncle, etc… ; des femmes ont été mises à l'isolement car coupables ou soupçonnées d'avoir failli à la loi patriarcale.
Il en est ainsi pour cette femme, la Mère, vénérée par sa fille qui est enfermée avec elle. Aucun lien de douceur, aucune affection entre elles deux. Chacune n'a de pensées que pour le Père.
Quand la Mère décède, la jeune fille veut retrouver le Père. Hélas, celui-ci la prend pour la Mère et elle est confrontée à la méchanceté de la famille qui ne l'accepte pas, elle est harcelée par son demi-frère et tout ce qu'elle croyait trouver de bonheur, ne sera qu'un rêve inachevé.

Très beau texte, sobre sur la condition des femmes dans certains pays et surtout les réactions primaires des familles, solidaires pour aliéner ces épouses ou soeurs ou cousines soupçonnées.

Un long chemin encore à faire pour l'égalité.

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Très beau livre, avec une histoire terrible écrite d'une main poétique et imaginaire. Beaucoup de colère contre la condition de ces femmes et des pratiques archaïques qui font le jeu de la jalousie et de la haine.
Quelques beaux passages aussi. Juste un bémol, je n'arrive pas à lui coller une époque. J'ai l'impression que ce livre navigue entre les époques et les mondes. Qu'il est un portrait de femme de part le monde et le temps.
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A travers l'histoire de cette jeune fille enfermée avec sa mère dans une "maison des femmes", l'auteure aborde le thème de l'amour entre un enfant et ses parents et celui du confinement d'épouses sensées avoir commis une faute.
Nous sommes dans un pays arabe, Maroc ? et une femme vit, avec sa fille, et d'autres femmes, dans une maison dont elles n'ont pas le droit de sortir ; qu'a-t-elle fait pour avoir été chassée ainsi de la famille, rejetée par l'homme qui l'aimait et qu'elle aime toujours ? Sa fille la voit se débattre dans l'incompréhension, devenir littéralement folle de douleur et s'affaiblir progressivement derrière les hauts murs qui les emprisonnent. Elle quête un peu d'amour de cette femme dont elle se sent responsable, elle, la petite ; mais "la Mère" souffre trop sans doute pour donner un tant soit peu à sa fille. Pourtant elle parle parfois avec les autres femmes, les prend dans ses bras ; elles se soudent et essaient de se débarrasser des souvenirs qui les étouffent. Elles semblent attendre qu' "ils" viennent les chercher...

Au petit matin, les hommes leur déposent à manger ; et de temps en temps, l'un ou l'autre vient rendre visite à sa femme, qui va le supplier de la laisser sortir. Mais le mari refuse, toujours, embrasse sa femme, qui se laisse faire...

Un jour, pourtant, la Mère raconte aux autres femmes : la rencontre, l'attachement et le vertige de l'amour, l'homme qui lui dit que quand ils seront mariés, il lui présentera son fils aîné. La petite apprend ainsi qu'en plus d'un Père, elle a un frère.
Le plus difficile dans cette vie cloîtrée, est la promiscuité, permanente, entre ces femmes qui sont une dizaine ; pourtant naît entre elles une solidarité qui semble ne pas exister au dehors.
Puis un jour, épuisée, la Mère meurt ; la fille l'enterre et va à la rencontre de son père...

Entre les chapitres, des extraits de journaux intimes trouvés par la narratrice, où l'on comprend que pour l'une d'entre elles, il a suffi que sa belle-mère jaillisse un matin dans sa chambre à coucher, l'accusant d'avoir été avec un autre homme, pour que le mari qui se sent sali se range du côté de sa famille. Une autre, nouvelle, raconte la maison et ses curieuses habitantes. Et enfin, le carnet intime de la Mère qui permettra à sa fille de comprendre ce qui s'est passé.

Dans ce texte magnifique, la beauté de la langue frappe d'emblée : une écriture soignée, forte, qui dresse des tableaux par petites touches ; la douleur psychique qui devient physique, la vacuité des journées quand il n'y a rien à attendre, la peur et la lacheté souvent des hommes...

Un très beau livre, un chant bouleversant qui crie une douleur mais aussi un espoir. A lire absolument !

Extrait (p 31) : " Gorge nouée. Suffocation. Vertiges. Nausées. Envie brutale de fuir cette maison singulière, aux frontières de l'irréel, cette maison dont les femmes disent qu'elle est le vestige d'un temps ancien, archaïque, une maison de pierres aux chambres carrées, à peine meublées - un lit, une chaise, une tablette -, une maison sans la moindre trace de couleur où règne le silence des cimetières, l'obscurité des forêts, une maison entourée d'un terrain vague, construite à l'écart de la ville par des hommes aidés de femmes dans le but d'isoler d'autres femmes, la maison des délits du corps où l'on ne châtie ni ne violente, où on rééduque, jour après jour, au risque d'y passer des années, par la seule force de l'enfermement. Il faudrait dire de l'enmurement.
Aucun gardien, ici, ne surveille les femmes. Elles vivent sous le poids des règles familiales inculquées depuis l'enfance et sont devenues leurs propres sentinelles."

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Ce n'est pas un récit, c'est un long poème. Pas de dimensions géographiques pour cette maison des femmes où vivent recluse celles qui sont accusées d'avoir fauté, déshonoré leur famille. A l'écart de tout, cette maison de pierre n'abrite que des ombres

La narratrice est une jeune fille dont la mère a été bannie dans cette maison par son mari, a-t-elle péché ou est-elle victime de rumeurs comme tant de ces femmes qui ne savent même pas pourquoi elles sont punies. Parce que c'est bien d'une punition qu'il s'agit, écartée de toute vie familiale, chassée de la société dans son ensemble. La porte de cette maison n'est pourtant pas fermée à clé, c'est dire l'acceptation de leur sort par ces femmes, le poids de la tradition plus fort que tous les verrous ; et elles attendent le pardon des leurs, leur retour auprès d'eux.


La narratrice, cette enfant qui a grandi entre ces murs, attend elle aussi, un geste de la mère, la voix du père, le retour à la maison. Elle recherche l'amour dans le silence de la mère, ce corps qui pourrait lui servir de refuge, cette âme chaleureuse qui peu à peu sombre dans la folie ; puis vint la maladie et la mort qui lui arrachent cette possibilité. Elle se retrouve seule face au manque et au désespoir, face à cette idée de Père obscur qui a laissé sa famille chasser la Mère, alors elle ira chercher cet amour et cette protection qui lui a tant manqué, espérant que les liens du sang seront plus forts.

Aucun endroit n'est nommé car l'oppression des femmes est partout, le poids des traditions et d'une société patriarcale bien plus puissant que la volonté d'un seul homme, l'amour d'une seule femme.

Si je vous dis que j'ai lu ce récit comme on lit un long poème c'est que l'écriture et les mots choisis envoûtent le lecteur. Aucun prénom, aucun lieu comme si cette histoire bouleversante était intemporelle.

Une tragédie magnifique.
Lien : http://stemilou.over-blog.co..
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