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Antoinette Six (Traducteur)
EAN : 9782752904102
416 pages
Phébus (16/04/2009)
4.11/5   151 notes
Résumé :
Lorsque Grace Melbury revient dans le petit hameau boisé de Little Hintock, après ses études, son avenir est depuis longtemps tracé, déterminé par une promesse intérieure faite entre son père et celui de Giles Winterbone, décédé.

Grace et Giles sont promis l'un à l'autre, ils se marieront. Mais Grace a grandi. Elle a découvert, hors des frontières de son village, une tout autre vie, d'autres rêves.

Portée par l'ambition et ses nouvell... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (28) Voir plus Ajouter une critique
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"Let me bring you songs from the wood
To make you feel much better than you could know..."
(Jethro Tull, "Songs from the Wood")

Thomas Hardy m'a toujours fait penser un peu obscurément à Jane Austen, avec la typologie de ses personnages et ses trames tissées de façon aléatoire, qui propulsent ses héros (souvent malgré eux) de la situation A à la situation B. Mais à une Jane Austen plus sombre et pessimiste, dont la proverbiale ironie ne fait pas rire à chaque fois, voire pas du tout.
"Les Forestiers" n'est pas le roman le plus connu de Hardy, et très probablement pas son meilleur non plus... mais c'est sans doute mon préféré.

C'est un livre de grands contrastes - le plus grand étant celui entre la belle littérature et la triste réalité. Et Hardy sait travailler les deux avec un raffinement que défie toute concurrence. Son récit tient ensemble grâce à un ingénieux mécanisme de petits et grands événements et d'imprévisibles ironies de la vie. Rien n'est écrit sans raison : le moindre mot, la moindre description de feuille d'un arbre sont importants, car vous pouvez parier que plus tard ils auront encore leur place dans l'histoire.
Les destins de ses personnages se croisent et s'influencent sans cesse, chaque action est une roue dentée qui met en mouvement une autre, et tout se dirige lentement vers d'inévitables et terribles affrontements. Mais malgré cette construction majestueuse, les personnages des "Forestiers" ne manquent pas d'authenticité : déceptions, trahisons, grands amours, jalousies, haines meurtrières et surtout terribles erreurs banales qu'on a tous connu et regretté au moins une fois dans notre vie.

L'histoire elle-même pourrait paraître presque ennuyeuse, car qui s'intéresse encore aujourd'hui aux conventions sociales du 19ème siècle ? Aux descriptions de paysages, forêts, vergers, maisons couvertes de vigne vierge ? Beaucoup de travail, peu d'amusement... et aucun érotisme !
Mais peu importe, car Hardy compose son portrait des habitants d'un petit village perdu dans les bois avec une étonnante intemporalité. On peut voir "Les Forestiers" comme un roman social typiquement victorien sur les ambitions de ceux qui veulent s'élever au-dessus de leur condition, mais c'est surtout une histoire sur les petites tendances calculatrices propres à n'importe qui à n'importe quelle époque... alors qui oserait s'en moquer ou les condamner complètement sans rougir ? Qui n'a jamais fait des efforts pour n'obtenir que le meilleur ? Hardy écrit sur les girouettes que le moindre souffle de vent fera tourner dans une direction opposée... et sur les rocs qui restent vaillamment en place même lors d'un tremblement de terre.
Les uns - M. Melbury, sa fille Grace ou le docteur Fitzpiers changent d'opinion et de direction prévue plus vite qu'il ne faut pour le dire, sans se soucier des conséquences que cela provoquera dans leur entourage. Et les autres, le loyal Giles ou la humble Marty, vont vous surprendre par leur solidité à toute épreuve. La question reste si cela leur apportera le bonheur qu'ils méritent.

Un étonnant contrepoint est aussi créé d'une part par les plaines fertiles qui sentent le miel et le cidre fermenté, et de l'autre par les charmantes forêts échevelées du Wessex, froides, menaçantes et pourtant belles. Je crois que je ne connais pas dans la littérature anglaise un meilleur peintre-paysagiste que Hardy.
Et plus ses anciennes collines verdoyantes frémiront au crépuscule, et plus cruels seront les déceptions et les compromis devant lesquels la vie mettra les "forestiers". Leur chassé-croisé amoureux est presque frustrant... un mot, un geste, une simple explication pourraient tout changer ; vous devenez pleins d'espoir, puis non... vous entendez juste une fois de plus Hardy ricaner méchamment derrière votre dos.
Essayez, vous verrez peut-être même sa moustache tressauter... ! 5/5
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Je ne sais pas pour vous mais moi la forêt est vraiment un lieu qui ne peut me laisser indifférente. Elle peut être à la fois si accueillante et si inspirante, et d'autres fois si inquiétante et si mystérieuse... Et le pire réside sans doute dans le fait qu'elle peut être tout cela à la fois en un laps de temps fort court. Je me souviens par exemple parfaitement de m'être perdue en forêt au cours d'une randonnée et d'être passée en quelques secondes d'un état d'harmonie à un état de panique totale. Un beau soleil, des châtaignes sous vos pieds, des mousses fascinantes sous votre main et tout semble parfait, puis, d'un seul coup, un gros nuage, un bruit insolite, le vent dans la feuillée, l'écho d'un tir de chasseur et l'enchantement devient cauchemar, vous passez du décor de Blanche-Neige à celui du projet Blair Witch.

C'est dans cette ambiance ambivalente de la forêt que Thomas Hardy implante son roman "Les forestiers". Lui qui d'habitude offre à l'imagination de son lecteur des paysages de collines et de prés s'étendant jusqu'à l'horizon et de vastes champs fait ici le choix de l'inviter dans un contexte aussi exhalant qu'oppressant, sous le couvert des bois. La ruralité y est toujours très présente, notamment avec la découverte des industrieux hommes et femmes qui vivent (ou survivent) des fruits de la forêt et de l'exploitation du bois mais pour cet auteur qui affectionne particulièrement la nuit et l'action nocturne, l'ambiance se fait particulière.

Grace Melbury est la fille d'un marchand de bois plutôt prospère qui lui a fait donner de l'instruction par ambition. De retour de pension, la pauvre jeune fille est aussi à l'aise dans son milieu natal qu'un funambule débutant sur son fil. Attirée par ses racines et ses amours juvéniles mais vouée par son père à une autre destinée, prétendue plus brillante, elle se laisse voler les choix capitaux de son existence et est rapidement entraînée dans un drame sentimental contre lequel elle n'est pas armée et qui lui coûtera son rêve de bonheur et ses grandes espérances.

Ambition, adultère, jalousie, vengeance forment le terreau de ce très beau roman qui compte donc parmi les œuvres noires de l'auteur. Les personnages principaux sont comme d’habitude très bien campés, leur psychologie finement analysée et s'il émerge fugacement des sombres circonstances du récit le sentiment de l'honneur, de l'amour et de l’honnêteté, il est toutefois insuffisant à faire des "Forestiers" un roman optimiste.


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Françoise Héritier disait de ce magnifique roman de Thomas Hardy, Les Forestiers, qu'il était le livre de sa vie, celui qui l'avait bouleversé.
La littérature classique anglaise m'apparaît toujours avec ce charme particulier, je ressens ce plaisir que je ne sais jamais bien définir. L'autre matin, j'écoutais sur France Culture Mona Ozouf évoquer cette particularité qui la touche aussi, elle trouvait avec justesse les mots pour décrire la littérature anglaise du XIXème siècle, disant que "celle-ci faisait entrer L Histoire dans le concret des vies, faisait descendre le politique dans le domestique. Il y a chez les romanciers anglais, un sens du concret, du détail, de la saveur, de la couleur, du grain des choses..."
Voici le troisième roman de Thomas Hardy que je lis. Autant vous l'avouer sans détour : cette rencontre fut un enchantement.
Ici nous sommes au rythme de la forêt, ceux qui travaillent ici dépendent de cette ressource quel que soit leur niveau social : propriétaires forestiers, bûcherons, négociants, cidriers... Jusqu'à ces étroites chaumières où des femmes taillent à coup de serpe de petites baguettes à usage domestique... J'ai trouvé cette fresque sociale peinte avec beaucoup de finesse et de justesse. On s'y croirait.
Et puis il y a l'amour... C'est une histoire anodine à première vue, mais violente lorsqu'on avance dans ce roman, violente comme la passion, non pas une passion exacerbée, mais quelque chose de contenu, une force souterraine tout au long du récit. Violente et poignante.
L'intrigue repose sur trois fois rien, quoique Thomas Hardy n'en finit pas de nous égarer dans les méandres de l'âme humaine, de démêler les fils ténus qui sous-tendent cette histoire, qui emportent dans un destin partagé plusieurs personnages aux velléités parfois différentes.
Il y a tout d'abord ce personnage principal qui m'a totalement séduit, cette jeune femme Grace Melbury qui revient dans son village natal, Little Hintock, après ses études à la ville. Son avenir est déterminé par une promesse faite entre son père et celui de Giles Winterbone, décédé. Grace et Giles sont promis l'un à l'autre, c'est décidé, c'est écrit, ils se marieront. Mais voilà, Grace a grandi. Elle a découvert, hors des frontières de son village, une tout autre vie, d'autres rêves, d'autres horizons...
Et puis, un autre homme, en la personne d'un certain Edred Fitzpiers, médecin, beau, irrésistible et troublant, va en décider autrement et venir troubler ce chemin si bien tracé d'avance...
Grace appartient au milieu des forestiers, mais elle est déchirée entre deux mondes, comme si elle venait brusquement d'une autre classe sociale, comme si elle était devenue autre... Elle entre dans cette histoire avec cette déchirure.
Les personnages, leurs itinéraires qui se croisent, se vivent au rythme de la forêt, celle-ci est tantôt apaisée, tantôt tourmentée, tantôt rebelle ou mystérieuse.
J'ai aimé le personnage de Giles Winterbone, élégant et rustre, ce fiancé pressenti, promis à Grace, admirable forestier, taiseux magnifique, fidèle dans son amour, d'une noblesse de coeur, avec un rapport aux arbres qui est touchant, tandis qu'Edred Fitzpiers, le médecin qui courtise Grace, est si éloigné du coeur et des préoccupations de la jeune femme. Si éloigné des arbres aussi.
Vous l'aurez compris, derrière les ramures et les feuillages, parmi les sapins, les hêtres et les chênes, se dessine une sorte de triangle amoureux.
Quatuor amoureux plutôt puisqu'il y a aussi la belle et mystérieuse Felice Charmond, la châtelaine qui réside tout là-haut à Hintock House, traversant le paysage parfois furtivement, dans son carrosse noir, laissant deviner à travers la vitre opaque un visage énigmatique...
Dans une ambiance rustique, c'est aussi un roman aux accents modernes, dans la manière qu'a l'auteur de vouloir rompre les codes amoureux établis, dont souffrira Grace Melbury tout au long du récit, contre lesquels elle se battra, aidée du reste par l'entremise de celui qui l'aime et qu'elle aime, Giles Winterbone.
J'ai beaucoup aimé aussi le père de Grace, ce père qui voudrait aider sa fille à sa manière ; à certains moments il s'indigne des règles qui condamnent une femme une fois mariée à devoir se résigner à jamais, s'accommoder de son sort en silence. J'ai beaucoup aimé ce père, austère et digne.
Les personnages secondaires sont également attachants, comme cette Marty South, jeune fille pauvre du village, aux cheveux magnifiques et tant convoités...
La distinction des différences sociales ici est forte, dévastatrice, dicte les destins amoureux, imprime des chemins irrémédiables qui vont à la fois rassembler, séparer, unir, désunir, rendre malheureux en définitive. Chercher la compassion.
Thomas Hardy est un peintre, au geste ciselé, touchant l'intime des coeurs. C'est une peinture aux touches délicates. Peindre l'âme, c'est un peu aussi peindre une forêt, aimer l'âme humaine, c'est presque le même rapport aux arbres.
C'est fin, c'est intelligent.
Parfois je me suis demandé ce que Grace Melbury serait devenue si elle s'était emparée de son destin d'une toute autre manière, se révoltant contre les biens pensants, la bienséance, le poids d'un monde façonné par les hommes, si tant de fois on n'avait pas décidé pour elle...
Parfois aussi le destin est capricieux, tient à trois fois rien ; à quelques millimètres près à l'échelle romanesque, le sort d'un amour peut peut être sceller dans un sens comme dans l'autre...
Elle est au milieu du gué, déchirée entre deux chemins possibles et cela rend ce roman d'une incroyable beauté.
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Giles Winterborne a un don mystérieux pour faire pousser les arbres. Il y a bien à Little Hintock une jeune femme capable de déchiffrer comme lui le langage des bois, Marty South, mais si c'est elle qui fait l'ouverture et la fermeture du roman, elle semble cantonnée malgré son amour pour Giles à un rôle secondaire. C'est que notre homme a d'autres visées, il est plus ou moins entendu qu'il épousera Grace Melbury... et justement la voilà en ce début de roman qui revient au pays, après avoir fréquenté une école chic de la ville.
Mais Giles est-il encore l'homme qu'il lui faut? - à côté d'elle, maintenant, il fait quand même bien cul-terreux.
Et, pour son malheur, Grace est dotée d'un père obsédé par le bonheur de sa fille, qui ne peut supporter l'idée de faire faire ce pas en arrière à cette enfant plein de promesses, qui à ses yeux «serait à sa place dans un palais». Bon, les conseils de son père ont une propension à tourner au désastre qui serait comique si les conséquences n'en étaient pas dramatiques. Il y a une sorte de drôle et terrible ironie hardyque chez le personnage, tous ses actes visant à faire le bonheur de sa fille aboutissent systématiquement à la cata. Et mauvaise que je suis, j'avoue avoir pris grand plaisir à suivre les tristes développements de cet «éternel problème de la mésentente conjugale» dont Thomas Hardy expose les méandres avec une écriture sensible, profonde, fine. Une écriture qui me séduit complètement.
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Il me semble que c'est une habitude chez Thomas Hardy d'ouvrir ses romans en nous conviant sur une route de l'ouest de l'Angleterre où l'environnement englobe tout à la fois le lecteur et le ou les personnages avançant sur ce chemin de campagne.
Ici, c'est une route abandonnée qui va mener un barbier vers Little Hintock, un endroit perdu, un minuscule hameau composé de quelques cottages crachant leurs fumées dans la brume environnante. Un paysage de taillis, de vergers et de bois dépouillés par l'hiver, accentuant la désolation de ce pays perdu. L'odeur de feuilles mortes et de cidre qui fermente flotte dans l'air du soir.
Devant un feu nourri qui réconforte, la jeune Marty taille des branches de noisetiers et le barbier vient là pour elle, ou plus précisément pour acheter sa superbe chevelure convoitée par la châtelaine.
Le lendemain, sur cette même route, l'auteur fera converger ses principaux personnages comme il fera converger et s'entrecroiser leurs destins.

Dans ce minuscule village, Mr Melbury, le négociant en bois, se tracasse au sujet de Grace, sa fille unique. Il s'était fait la promesse de réparer une vieille injustice en offrant sa fille en mariage au fils de l'homme dont il se sent redevable. Mais cet engagement pour réparer un tort le torture car il ne veut pas sacrifier sa fille à un homme sans fortune. Giles Winterborne, pourtant profondément amoureux de Grace, n'est qu'un petit cultivateur et planteur d'arbres. le négociant a donné à Grace une solide instruction qui lui confère maintenant une supériorité sur les gens du cru et il est convaincu qu'elle mérite donc un mariage plus beau, plus digne d'elle.
Un jeune docteur, issu d'une famille solidement établie même si c'était du temps de son grand-père, entrera alors en scène pour confronter deux mondes : celui simple et rustique d'un campagnard et celui, bien plus distingué mais totalement inconstant, d'un homme instruit.
Le bonheur se trouve-t-il forcément chez ceux qui brillent par leur distinction sociale ? Mr Melbury en est persuadé.

C'est donc autour de cette ambition paternelle de voir son enfant chérie faire une belle alliance que Thomas Hardy tisse des destins où l'injustice du sort éclatera dans différentes directions, touchant cruellement certains des habitants de Little Hintock.
Grace, plutôt passive, pas vraiment ambitieuse mais tout de même envieuse d'évoluer dans une sphère plus éclatante, montera d'un étage dans la société et pourtant, au fond d'elle, l'amour du milieu forestier demeure. Mais son réveil est bien trop tardif.
Toutes les natures s'affronteront : celle fantaisiste et mélancolique de la châtelaine, la droiture et l'extrême vertu de Giles, la fièvre et l'infidélité du docteur, la naïveté et la crédulité du négociant…
L'inconséquence et les tergiversations amoureuses formeront le terreau des gens instruits alors que la droiture et la constance appartiendront aux petites gens.
Par les désastreux résultats des décisions soufflées par le père, c'est tout l'emprisonnement du mariage pour la femme du XIXe siècle qui ressort tragiquement de ce roman.


À côté des préoccupations humaines si subtilement détaillées, le décor est toujours somptueusement présent chez Thomas Hardy. L'univers sylvestre fait entendre l'activité bruyante de coupes de bois ou de l'écorçage, les roulements de charrettes acheminant les fagots pour confectionner les toitures. Il nous montre les souches récemment mises à nu, les premières ramures rongées par les lapins et nous mène derrière le pressoir ambulant de Giles à la saison du cidre.

Comparé à d'autres titres déjà lus de l'auteur, je ne dirais pas que les évènements s'affolent dans Les Forestiers même si les tourments ne manquent pas. Mais l'éblouissante écriture de Thomas Hardy efface incontestablement les petites lenteurs de l'histoire.
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Citations et extraits (28) Voir plus Ajouter une citation
Il savait qu'une fois donnée en mariage à un homme une femme doit, en général, s'accommoder de son sort et s'y résigner sans que personne ait à intervenir. Pour la première fois il se demanda s'il était juste que cela se passât ainsi. D'ailleurs il se disait que le cas de Grace était exceptionnel. Sans compter que Grace elle-même était une femme exceptionnelle, sa situation particulière, à mi-chemin entre deux étages de la société, ajoutée à la solitude de Hintock, rendait l'abandon de son mari beaucoup plus grave pour elle que pour une femme qui aurait eu un large cercle d'amis. À tort ou à raison, et indifférent à ce que faisaient les autres parents ont pareil cas, il résolut de prendre en main le bonheur de sa fille.
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Un beau jour, il y eut quelque chose de changé dans les jardins. Les légumes voyaient leurs feuilles les plus tendres diminuer sous la première gelée blanche et pendre lamentablement comme des haillons fanés. Dans les bois, les feuilles, qui jusque-là étaient descendues de leurs branches à loisir, tombèrent soudain et toute hâte et par multitudes, et toutes les teintes dorées qu’on avait vues au-dessus de soi étaient maintenant amalgamées dans la masse informe qu’on voulait aux pieds et où des myriades chaque jour plus rousses et plus dures s’enroulaient avant de tomber en pourriture.
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Oui, l'on doit tout connaître de ces êtres disparus qui, jadis, traversèrent ces champs si gris, vus de sa fenêtre ; on doit se rappeler qui poussa la charrue grinçante le long de ces sillons, quelle main planta ces arbres qui aujourd'hui s'élèvent sur la crête de la colline, à qui appartenaient les chevaux et la meute qui traversèrent haletants ce sous-bois, quels oiseaux affectionnent certains de ces fourrés, et quels drames domestiques de l'amour, de la jalousie, de la vengeance et de la déception se sont joués jadis dans ces cottages, dans ces maisons, dans cette rue, sur ce pré.
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Par son aspect et par son odeur il semblait la personnification de l'automne. Son visage hâlé était couleur de froment, ses yeux étaient deux bleuets des champs, il avait les manches et les houseaux teintés de taches de fruits, les mains collantes du jus sucré des pommes, le chapeau tout éclaboussé de pépins ; tout autour de lui flottait une atmosphère de cidre, qui, tous les ans à la même époque, dégage le même charme pour tous ceux qui sont nés et ont vécu parmi les vergers. Le cœur de Grace se détendit, comme une branche qu'on lâche soudain. Elle jouit tout à coup pleinement de ce retour dans la nature sans fard.
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Juste avant le départ de Grace, elles s'arrêtèrent toutes deux par hasard devant un miroir qui leur renvoya leurs images côte à côte, rendant ainsi tangibles leurs traits communs et leurs dissemblances. L'une et l'autre étaient jolies, mais la proximité du visage de Grace eut pour effet de vieillir Mrs Charmond. S'il existe des types de beauté qui se font valoir mutuellement, il en est d'autres qui se heurtent, l'une faisant impitoyablement tort à l'autre.
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