Un gros coup de coeur pour ce récit se situant à mi-chemin entre le réel et l'onirique.
L'époque et le pays où tout se déroule ne sont pas précisément identifiables.
On sait que c'est une période contemporaine : ça se passe après la course aux étoiles, les protagonistes sont en jean et pull-over etc. ; et on imagine volontiers un pays de l'Europe de l'Est : on y cuisine du poulet au paprika, le règne est celui d'un maréchal ... (En fait, ex-Yougoslavie).
Dans ce pays imaginaire on a un accès à la mer. D'ailleurs, comme beaucoup d'images dans ce livre, l'accès à la mer est utilisé de façon très symbolique puisqu'il évoque de façon récurrente l'évasion, l'incertitude des horizons et l'infini sans retour. L'image du miroir comme porte secrète (vers soi-même, le passé ou vers le coeur de l'énigme) est aussi régulièrement présente.
Mais peu importe de mettre un nom et une date précise c'est au final très secondaire.
L'auteur raconte l'histoire de Livius, brillant étudiant en lettres à l'université, orphelin de mère, confronté à l'hermétisme d'un père diplômé d'histoire (le lien présent-passé marque énormément le personnage) ainsi qu'à des secrets de famille révélés au fur et à mesure du déroulement du fil narratif.
Livius fréquente une famille du même village, dont deux filles, Cécilia et Antonia font naître en lui des sentiments plutôt flous. Leur mère, Maria-luisa, voit déjà en ce jeune homme un gendre responsable tandis que leur père, Fabrio, un marin bedonnant se pose comme une figure plus sensible et plus compréhensive – plus complice, une autre image paternelle.
La relation Père – fils est analysée de façon soignée. le père biologique s'éloigne peu à peu tandis que le père affectif se rapproche.
De même les relations sentimentales sont délicatement décortiquées, l'image de la femme est tantôt celle de la mère (la mère tendre qui appartient au souvenir, la mère intimidante et fascinante de Cecilia et Antonia) tantôt celle de l'amante (la femme tendre, la femme révoltée) ou encore celle de la fille.
Livius abandonne l'université et demande à être mobilisé entre autre par besoin d'éloignement. Affecté d'abord à Negrov, il se trouve muté, 15 jours avant sa démobilisation, au sein d'une garnison isolée au bout du monde, dans une immense forteresse qui fait figure de piège.
Il n'a jamais rien vu de tel. Une discipline militaire réduite à sa plus simple expression, pas d'armes, des repas qui n'ont rien à voir avec les rations classiques.
Mais il y a quelque chose qui cloche (...)
http://lelabo.blogspot.com/2006/06/robert-hasz-
la-forteresse.html