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EAN : 9789973580771
320 pages
Elyzad (21/05/2015)
4.22/5   16 notes
Résumé :
Lorsque Dragan Chenah, marocain à moitié serbe et journaliste star des ragots à La Houlette Casablancaise, découvre qu’il a perdu la faculté d’écrire, il est bien ennuyé. Entamer une thérapie ? Décevoir encore sa femme ? Noyer son spleen dans l’alcool et autres substances illicites, en compagnie d’une clique aussi fantasque qu’improbable ? Une dernière option inattendue s’offre à lui. Car soudain l’actualité se déchaîne. Un attentat vient de se produire dans un gran... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Dragan, marocain à moitié serbe, est journaliste à succès à la Houlette Casablancaise, un journal à gros tirage, totalement inféodé au pouvoir royal. Il passe son temps dans un bar à consommer alcool et autres substances illicites, en compagnie d'une clique aussi fantasque qu'improbable. Au moment où il découvre qu'il a perdu la faculté physique d'écrire et qu'il se décide à consulter un psy, l'actualité se déchaîne.
Un attentat terroriste visant des touristes vient de se produire dans un grand hôtel de Casablanca. Entre piste islamiste et traumatismes refoulés, c'est le moment pour Dragan de se pencher sur les trous noirs de son passé… Une plongée à la fois jubilatoire et terrifiante dans un Maroc underground loin des palmiers et des fronts de mer ensoleillés, où l'on croise journalistes corrompus et hommes de gauche ayant retourné leur veste.
Porté par une ironie féroce et un humour sarcastique, le premier roman de Kamil Hatimi dresse le portrait d'un homme en quête de son identité dans la violence du Maroc d'aujourd'hui.
Ce livre fait partie de ces trop nombreux ouvrages que la presse ignore et qui sont pourtant de petits trésors. A découvrir.

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Dragan est journaliste pour la Pravda marocaine. Il vit plutôt bien les compromissions indispensables que cela suppose tant avec la liberté d'expression qu'avec le devoir d'informer. Dans le climat ambiant où chacun fait en sorte de ne s'occuper de rien, il s'accommode de charger tel ou tel groupuscule extrémiste de tout ce qui semble pourri au royaume de Danemark. Pour ce que ça changerait de faire autrement, de toute façon...Aussi excelle-t-il à trouver de ces phrases creuses, de ces atermoiements comme autant d'écrans de fumée destinés à laisser le bon peuple endormi. Il semble d'ailleurs que sa véritable vocation consiste davantage à s'imbiber avec une constance forçant l'admiration en compagnie de son collègue et ami Vigon.
Et puis, il fume, Dragan. Il fume, boit (beaucoup donc) et traine sa carcasse d'improbable grand blond de rades en rades. Il assiste parfois à de pathétiques conférences de rédaction où il s'agit juste d'osciller de la tête au bon moment afin que tout le petit monde de son chef incompétent continue de tourner, que les lecteurs continuent d'être enfumés et lui payé à la fin du mois. Jusqu'au jour où, de retour d'un voyage professionnel, il s'aperçoit qu'il ne peut plus écrire. Plus un mot.
Il y a quelque chose d'absurde et presque trop facile dans ce qui arrive à Dragan. Un journaliste qui ne peut plus écrire ? le gag de la page blanche poussé à son effectivité la plus concrète ? Un peu facile, non ?
Non. Car cet excès dans la symptomatologie est à la fois assumé comme une nécessité romanesque plausible et mis à distance par un regard plein d'ironie.
C'est ce qui m'a le plus enchanté dans ce premier roman : qu'on puisse à la fois adhérer à une histoire parfois croquignolesque et lire en filigrane le destin d'une société marocaine sous le joug d'un pouvoir tyrannique, l'errance d'un homme qui a renoncé depuis bien longtemps à se dire assez fier pour y résister.
Malgré quelques passages que j'ai trouvés un peu maladroitement menés, c'est un roman dont j'ai apprécié tant la profondeur que la légèreté.
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Ce livre est à la fois un premier roman tout à fait réussi et digne d'intérêt et un regard critique porté sur le Maroc du XXIe siècle. L'angle d'attaque, la presse, permet à l'auteur de mettre en évidence les paradoxes d'un pays qui s'affiche calme, modéré, tourné vers une sorte de démocratie mais dans lequel il n'est pas très bon d'ouvrir la bouche contre le roi, le pouvoir en place, les gens qui ont de l'autorité, les traditions, la religion, l'ordre établi, la bien pensance installée depuis l'indépendance, la suprématie de l'arabe et l'abandon du français...

Autant dire que Kamil Hatimi, germano-marocain né en 1960 à Rabat risque quelques soucis avec les autorités de son pays. D'autant qu'il raconte une histoire à choquer les bourgeois de Casa et les religieux garantis grand teint.
En effet, il est question ici d'un journaliste au petit pied, Dragan Chenah, dont la carrière se limite à travailler pour un journal du nom de « la Houlette casablancaise », media au service du pouvoir où on ne parle pas de choses qui fâchent. Encore mieux, les journalistes ne vont guère sur le terrain et se limitent à servir au peuple la sauce qu'il attend, entre faits divers et hommages respectueux à leur majesté.

Alors, quand Dragan (son prénom vient de sa mère Irina, gauchiste serbe mystérieusement « disparue » lors de remises au pas après les mouvements gauchistes), quand Dragan subitement perd ce qui fait son métier à savoir la capacité d'écrire, il nous entraîne dans une plongée douloureuse, sarcastique, révoltée, surnaturelle dans sa préadolescence et tout va s'éclairer dans la douleur et la libération. le glauque, l'insoutenable, le drôle, le fantastique et l'émotion se côtoient, le tout sous le microscope attentif et impitoyable d'un auteur qui dénonce ce qui dans son pays s'apparente à une dictature à peine atténuée. Les sujets tabous sont abordés : homosexualité propre au Maroc (et non pas perversité importée d'Europe), liberté de la presse, délit d'opinion, répression, corruption.


Très intéressante découverte.
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Complètement scotchée par ce livre, il m'a fallu un moment pour m'en remettre.
On est embarqué dans des décors grandioses des falaises de Tanger face à Gibraltar au bar Bogart enfumé et douteux.
C'est d'un cynisme à faire grincer des dents. On rit beaucoup avec ces journalistes à la conscience professionnelle engluée dans le politiquement correct.
Même si l'histoire se passe au Maroc, elle est tout à fait transposable à d'autres pays à l'actualité instable du fait des 'printemps arabes'.
A découvrir absolument !
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Premier roman d'un ancien musicien de bal, photographe, formateur interculturel et interprète ! On est à Casablanca, un portrait du Maroc d'aujourd'hui attachant et troublant. Une bombe explose dans un hôtel et, Dragan, journaliste serbe et marocain, devenu incapable d'écrire le moindre mot, en ressent les déflagrations dans tout son être. Ce sera son déclic et ce qui lui permettra de lever le voile sur sa part d'ombre. Volonté de l'auteur de rendre visible un fléau si peu "dit" dans le "plus beau pays du monde". Un roman de personnages, un portrait d'homme à la dérive qui tente de trouver l'apaisement en laissant enfin couler la parole. Dans un style à l'humour grinçant, Kamil Hatimi nous fait voyager dans un Maroc aussi sublime et lumineux que terrifiant et cruel.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Croire ou ne pas croire en Allah n’était donc pas son problème. Malheureusement pour lui, il ne pouvait ignorer que, lorsque l’on naît marocain, ces choses ne se pensent pas, ne se disent pas et ne s’affirment en aucun cas. Au Maroc la religion est un déterminant de l’ADN patriotique de tout individu normalement constitué. Saint et valide. Un fait de naissance. Inné. Irréfutable. Dragan savait donc très bien que, mis devant un tribunal, ou une instance chargée d’évaluer l’état de son patriotisme religieux, il n’eut jamais pu espérer s’en tirer à bon compte en invoquant, par exemple, une hypothétique clause d’irresponsabilité du type « je ne savais pas » ou encore « personne ne m’avait jamais rien dit ». C’est pourquoi, même si son instinct de conservation était au plus bas, Dragan parvenait tout de même à maintenir un fil de discernement, le minimum du minimum grâce auquel il pouvait éconduire ceux qui cherchaient à expertiser la fluidité de ses voies d’accès au paradis et à bloquer ceux qui, plus inquisiteurs encore, voulaient tirer au clair si oui ou non il fallait qu’on le condamna à un dépeçage anticipé, en guise d’avance sur salaire de tous les châtiments qu’il allait devoir subir dans les géhennes de l’enfer. Pour Dragan, la méthode était très simple. Il avait appris à reconnaître et maîtrisait à la perfection les rituels langagiers bordant les relations sociales marocaines. Il connaissait toutes les arabesques, les virgules, les pommades et les enluminures de la phraséologie quotidienne et savait qu’à chaque situation sociale, chaque événement, sacré ou profane, correspondait une formule prête à l’emploi qu’il suffisait de dire au bon moment, avec la bonne intonation et le bon rythme, pour émettre les signaux d’une religiosité de surface, le minimum syndical, à même de lui garantir qu’on lui ficha la paix. Son stratagème n’était cependant pas infaillible. Car des regards et des oreilles avisés eurent très vite fait de démasquer la duplicité de sa couverture religieuse. Ainsi pour pouvoir survire au Maroc, Dragan devait réduire au strict nécessaire son immersion dans la vie sociale : éviter les grandes manifestations ; les mariages, les enterrements, les baptêmes, les matchs de football, les grandes soirées caritatives, les réunions syndicales et politiques, et par-dessus tout, il devait éviter, à tout prix, de se retrouver pris dans le carré resserré d’une mosquée à une heure de grande affluence, au milieu d’une foule de fidèles en pleine ascension céleste.
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Des islamistes au pouvoir ! Vous y auriez cru, vous ? (...) Il nous en a fait baver ce printemps arabe de malheur ! Fort heureusement, nos islamistes sont modérés, eux. A notre main (...) Et quand ils auront assez tapé dans la caisse de compensation et que les finances seront à plat, on sifflera la fin de la récréation.
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Les autorités religieuses avaient pourtant organisé une grande prière nationale destinée à conjurer la malédiction de l'eau. Mais rien n'y fit. Les cieux demeurèrent obstinément sourds à des prières sans doute trop intéressées pour être tout à fait sincères.
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La ligne de notre journal, c'est d'être à la pointe de l'actualité.Mais nous ne devons pas oublier notre devoir d'allégeance envers nos institutions millénaires et sacrées. Institutions dont la légitimité, je vous le rappelle, est historique mais aussi populaire. Le peuple n'a-t-il pas plébiscité notre nouvelle constitution à quatre-vingt-dix-huit virgule cinq pour cent ?
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Vidéo de Kamil Hatimi
Kamil Hatimi vous présente son premier roman "La Houlette". Parution le 26 mai 2015 aux éditions elyzad.
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