Cela faisait un bon moment que je n'avais pas lu de livre de Torey L.HAYDEN. J'avais donc assez hâte de retrouver ces récits si plein d'humour, de bienveillance envers ces enfants cassés par la vie et surtout de passion pour ce métier difficile et qui, à cette époque, était à ses balbutiements en Amérique. J'ai pour le coup été assez surprise et, je l'avoue, un peu déçue car on ne retrouve rien de tout cela dans cet ouvrage. le ton est beaucoup plus mature, limite froid, et tout ce qui contribuerait à dépasser les drames auxquels elle était confrontée a disparut. Chaque enfant à son histoire bien sur, chaque récit était différent et même parfois un univers particulier. Mais avec des constantes comme sa classe, "ses" enfants, son implication et ses recherches constantes pour trouver une solution adaptée et parfois originale. Ici, rien de tout cela ; Torey intervient en psychologue extérieure, sur du bénévolat, elle utilise des techniques de base sans chaleur, ne semble pas trop s'impliquer, est souvent hésitante, manque de réactivité face à sa petite patiente et n'est plus aussi combative qu'habituellement avec les autres intervenants et l'administration. Elle apparait même très vite mal à l'aise avec les contacts physiques alors qu'elle y est assez habituée avec des enfants qui n'ont pas toujours les codes ou pas d'autres moyens d'exprimer leur mal-être. Elle m'a semblée vraiment très différente que dans ses autres livres, presque constamment en distance et en observation.
Même si cela est resté assez intéressant, cette lecture a été assez frustrante en faisant perdre à l'expérience, au récit, tout son charme.
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Ce livre est l'étude d'un cas, et il n'est pas évident d'en faire un retour. On peut toujours avoir un avis sur la manière de procéder et il est intéressant de voir la progression de l'enfant sur la méthode choisie, mais on ne reste que spectateur.
Je plains de tout mon coeur cette pauvre petite Jessie, enfant non désirée et qui le sait. Est-ce que dans un autre environnement elle ne serait pas devenue mythomane ? Pyromane ? C'est difficile à dire. Si je n'ai pas connu de pyromanes, j'ai fréquenté des mythomanes... des vrais de vrais, qui croyaient dur comme fer à ce qu'ils inventaient.
Très lourde pathologie.
Ceci étant, j'ai trouvé ce livre intéressant et instructif, mais comme dans toute oeuvre du genre, il faut garder un certain recul et une certaine neutralité lors de sa lecture.
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Ce nouvel incident poussa les services sociaux à intervenir de nouveau et, après enquête, une image glaçante du mode de vie familial se dessina bientôt. Jessie était une enfant extrêmement difficile. Encline à des crises de colère explosives à la moindre contrariété, elle n’hésitait pas à faire des trous dans les meubles, à jeter des choses fragiles contre les murs, à déchirer ses vêtements ou à tenter de frapper, couper, mordre ou blesser d’une manière ou d’une autre ses parents et ses sœurs. Il lui arrivait d’uriner sur le lit parental ou sur celui de Gemma dans des accès de rage, et ils s’inquiétaient tant de son problème de pyromanie qu’ils l’enfermaient littéralement dans sa chambre la nuit, afin qu’elle ne puisse pas mettre la main sur des allumettes ou un briquet pendant que tout le monde dormait.
— Jessie, rien de tout cela n’est vrai, s’offusqua Meleri. — Mais si. Tout ce qu’il y a dans ce classeur est à moi. Ce sont mes dessins. Je les ai pas faits pour toi. — Non, Jessie, c’est ce que tu as dit sur ton frère qui n’est pas vrai. Tu n’as pas de frère. Il n’habite pas en Suisse. Et vous n’allez pas aller à Rhyl. — Si, j’ai un frère, rétorqua-t-elle froidement. — Non. S’il te plaît. On en a déjà discuté plein de fois. Tu te souviens de notre plan de progrès ? Du fait de raconter des histoires ? — J’ai un frère. C’est juste que vous le connaissez pas. Il s’est fait tuer. Quand j’étais bébé. — Jessie…, reprit Meleri d’un ton menaçant.
Un défi de taille pour moi ce jour-là, puisque tout le monde s’exprimait en gallois. Je venais d’apprendre cette langue et ne la maîtrisais pas tout à fait. D’autant que mon articulation américaine ne s’accordait pas toujours avec la prononciation galloise. En conséquence, mon seul souvenir véritable de ces instants reste la gaffe que je commis. La météo fait toujours un bon sujet de conversation, il m’avait donc paru opportun de signaler que j’aimais beaucoup l’air vivifiant et la rigueur du gel de ces jours-là. Dans l’hilarité inattendue que cela suscita, je découvris que le mot « gel » ressemble étrangement au mot « sexe » en gallois.
— Tu as de très jolis cheveux, me dit-elle. Je peux les toucher ? Elle n’attendit pas ma réponse pour le faire. — Ils sont vraiment très beaux, confirma-t-elle. — Merci. — Ils sont bouclés. Comme des cheveux de star de cinéma. Tu es une star de cinéma ? Parce que c’est exactement les cheveux qu’aurait une star de cinéma. Je n’ai absolument pas des cheveux de star de cinéma. Ce que je considérais comme une « masse », à l’époque où je vivais dans le climat sec du Montana, s’était transformé en des anglaises indomptables avec l’humidité du pays de Galles. La plupart du temps, je ressemblais à un mouton.
Elle était d’une beauté légèrement surannée, même si cette impression provenait peut-être uniquement de sa tenue. Au lieu d’arborer les leggings ou les pulls colorés de la plupart des filles de son âge, elle portait une robe de coton bien soignée et un cardigan beige qui n’auraient pas fait tache dans les années 1970. Ses cheveux raides ne lui tombaient pas tout à fait aux épaules ; d’un roux délicat, ils étaient coiffés d’un côté et retenus à l’aide d’une barrette. Ses yeux étaient d’un vert prononcé. Petite, elle paraissait moins que ses neuf ans.