En un peu moins de deux cents pages,
Frédéric Haziza ne se contente pas d'effectuer un simple survol de son sujet mais parvient à mener une véritable attaque en piqué. Les propos introductifs évoquent la motivation d'un auteur dont la vie a basculé à force d'être harcelé par des activistes extrémistes. Dans chaque phrase l'on sent qu'il est littéralement à bout et qu'il désire rendre les coups pris ou promis.
En l'occurrence, l'ouvrage est le fruit du travail d'un journalisme d'investigation : recherches, enquêtes sur place, entretiens (des plus hauts nivaux de l'État aux extrémistes infréquentables, en passant par un bel échantillon de la classe politique contemporaine). Les passages développés privilégient un effort de synthèse franchement impressionnant et un appréciable abandon du secret de la source.
L'essentiel est là : une présentation en profondeur et détaillée de la "fachosphère", qui s'appuie sur des individus, des faits passés et sources de qualité variable. Ladite description rayonne dans plusieurs directions qui auraient mérités d'être approfondies (ainsi la concurrence mémorielle n'est ici évoquée que dans son acception la plus caricaturale). Inversement, le texte s'attache également à démontrer que les pouvoirs publics ont conscience de la situation, restent vigilants, mais pour que cet effort soit pleinement efficace il est nécessaire que les citoyens prennent conscience de la banalisation de comportements odieux. Une alerte d'autant plus pertinente qu'elle met en lumière un avilissement des comportements quotidiens qui ne peut que faire penser à des bien sombres périodes de l'histoire.
Le journaliste mène également une charge virulente et vigoureuse, emplie d'ironie contre des discours et de pseudos argumentaires qui ne résistent pas une seule seconde à l'examen du bon sens. Aussi l'ouvrage inquiète : pourquoi ou comment en est-on arrivé là ? Est-il possible qu'une société puisse faire un tel bond dans le passé et se laisser séduire par des propos haineux, discriminants, excluant et pourtant clairement identifiés par l'Histoire? Hélas, la réponse est positive…
Assurément, il s'agit là d'une lecture utile rapide, efficace, engagée. Un livre d'actualité à mettre entre toutes les mains et à échanger, à faire tourner. Assurer sa promotion est une forme de résistance, d'engagement, de devoir d'Histoire, un impératif républicain. Un devoir pour tout citoyen !