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EAN : 9782841162437
144 pages
Cheyne (06/11/2017)
4/5   3 notes
Résumé :
Les poèmes de Ra Hee-duk (lauréate de nombreux prix prestigieux en Corée du Sud) invitent le lecteur à saisir l'étrangeté du quotidien, à faire un pas de côté.
Dans Le ver à soie marqué d'un point noir, un arbre avale un oiseau, un serpent pleure, la pupille du père est de boue, un passant revêt un habit de cendres blanches. La puissance de cette poésie tient dans cette reconnaissance incertaine du monde, dans ce vacillement des impressions. À cette singular... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
 
 
Dans sa préface, Jean-Michel Maulpoix reconnait ne rien savoir de la sensibilité coréenne et de sa poésie, mais note tirer un étrange bénéfice de cette ignorance : " celui d'entendre à travers la traduction de Kim HYun-ja, … la poésie même, telle qu'elle traverse les langues par la netteté du phrasé. Car la poésie est ici une forme de nudité, tout le contraire d'un déguisement de l'expérience par de belle images : une façon de faire apparaître tel quel, sous un angle et un jour incongrus, le vrai corps e notre vie mortelle."

Ramassons et amassons, ces titres de poèmes étranges
et singuliers, tels :
" L'arbre qui a avalé un oiseau p.35 ",
" Pupille de boue p. 95 ",
" Où est passée mon ombre ? p.81-83 ",
" Nom du fichier " Poésie lyrique " p.117-119".


Ressenti, oiseau à la gorge rouge englouti par la bouche
noire de l'arbre-oiseau qui ne daigne pas m'avaler, comme
si la forêt, qui ne se trompe pas, savait ce qu'elle doit faire.

" L'arbre qui a avalé un oiseau
Un oiseau à la gorge rouge
file comme un trait devant moi et entre dans la forêt
Vive lueur rouge
dans le ciel du soir, en suivant ce feu
j'avance vers l'arbre où vient de se poser l'oiseau
Il n'a pas repris son envol, j'en suis sûre
Pourtant , m'approchant doucement, quand je lève les yeux
l'oiseau n'est plus là


Ah, de sa bouche noire l'arbre l'a englouti !


Baies rouges et sèches
comme les prunelles de l'oiseau
Et bruit de picotage dans le bois
Branches d'arbres qui sanglotent tout bas


J'ai beau rester assise longtemps à l'ombre de l'arbre-oiseau
il ne daigne toujours pas m'avaler
Seule l'obscurité, cette obscurité m'envahit
et je fais les cent pas longuement devant sa porte fermée
p.35


Evocation de la mort, et après ?
Jeu de mots possible avec Pupille debout?,
histoire de se rassurer puisqu'il [le père]
est toujours présent.
Principe de retour à la Terre.

" Pupille de boue
Quelques pas seulement nous séparent
Père ne me reconnais pas
" Père ! ", je l'appelle
il sourit, " tu es là ! "

Cette pupille ouverte
soudain refroidie
où le sang ne circule plus
quelle main l'a remplie de boue ?

" Ce n'est pas grave, un oeil est encore bon
Je dois consentir à ne voir que le monde à moitié
Je retourne à la terre petit à petit "
Il parle en regardant dehors à travers la fenêtre

Pupille de boue calme
Quelques arbres de la montagne d'en face ont déjà pris racine dedans
p.95



Que faire après avoir perdu mon double ?
L'histoire d'une vie compliquée après la
perte de son ombre.

" Où est passée mon ombre ?
Tous les matins je me dépêche d'aller au travail
tandis que mon double reste à la maison
Passent des jours où je le laisse à demeure
et m'en vais souriante dans la rue

Depuis que j'ai appris à sourire
sans mon ombre,
personne ne s'aperçoit
que je n'ai pas d'ombre derrière mon dos

Quand je déjeune à la cantine
mon ombre mange seule à la maison le riz mélangé à la soupe

Depuis que j'ai appris à manger
sans mon ombre,
la personne assise en face de moi ne se rend même pas compte
que j'ai une seule baguette

Un soir quand je suis rentrée à la maison
mon double avait disparu.
Je ne l'ai trouvé ni dans la chambre ni dans le bureau,
  ni dans la véranda ni dans la salle de bains

Sans manteau, sans chaussures,
où était-il allé
dans cet hiver glacé ?

Assise dans le noir,
d'un air absent j'ai attendu mon double
tout comme il m'avait longtemps attendue
p.81-83



Invention ? Réalité ? Texte plus proche de la
réalité que de la fiction, démontrant si besoin
était, l'importance de la poésie combattant
par des mots simples la cruelle et dérisoire
bêtise des hommes.

" Nom du fichier " Poésie lyrique "
Ils l'avaient enfermé dans un fichier intitulé " Poésie lyrique "
car ils croyaient que même la poésie lyrique était subversive


Le fichier aurait contenu ce genre de choses :


poignée de cheveux
quelques débris d'ongles coupés
mouchoir à l'ourlet élimé
veste à carreaux
vieille serviette de cuir et quelques livres
cuiller et fourchette
manuscrit en cours de révision
lunettes à montures argentée et leur étui vert
bouteille de silence
quelques feuilles d'arbres rapportées de la forêt


Un pansement imprégné de son odeur est conservé hermétiquement
 dans une bouteille
Tout ce qui faisait partie de lui se serait trouvé dans " Poésie lyrique "
avec ses poèmes lyriques, bien entendu


Ils auraient enregistré même ces choses là :


quelles sortes de bulbes qu'il a plantés dans son parterre
combien de lettres lui sont parvenues de l'étranger
quelles paroles il a échangées avec l'alouette dans la forêt
comment il a regardé un papillon de nuit endormi sur sa veste
combien de seaux d'eau il a puisés par jour
avec qui il a bu du thé au jasmin
quel livre il a emprunté à la bibliothèque
de quoi il a parlé en cours avec ses élèves
pourquoi il s'est arrêté de marcher sur un sentier au coucher du soleil
quel visage il montrait en traversant la frontière


Qu'est-ce qui est donc subversif dans ces jours d'amour ?


Ce qu'ils ont redouté :
il possédait des mots qui pouvaient ouvrir le coeur des hommes
il vivait en prenant soin des racines du coeur
il n'a pas cessé d'écrire des poèmes
malgré son dur labeur de serrurier


Les poèmes libérés du fichier " Poésie lyrique "
scintillent à présent sous les rayons du soleil


Des phrases qui ont traversé les épreuves de sa vie
un homme sort, pieds nus, sans trace d'ombre
p.117-119
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critiques presse (1)
LeMonde
04 mai 2018
Confirmation de la belle santé de la poésie coréenne avec le nouveau recueil de Ra Hee-duk (née en 1966).
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
Ce qu’est s’obscurcir



Quand la chambre de 17 heures 44
me confie à celle de 17 heures 45
alors que j’étais couchée là
Quand le rayon de soleil qui éclairait mon corps
comme s’il regardait l’intérieur d’une triste maison
retire soudain sa chaleur
Quand au loin un peuplier blanc tombe par terre
que son écorce se dessèche
et que le dos flétri de ma main s’amenuise et s’efface
Quand la mémoire se trouve arrêtée à 1 h 45
que l’obscurité ne s’épaissit plus
et que nul ne se soucie de l’arbre renversé

Mes os et ma chair restés si longtemps debout
finissent par me faire mal
Ce soir, je caresse toute seule mes côtes fissurées
tout doux, tout doux, tout doucement


/ Traduction du coréen de KIM Hyun-ja
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Si loin cette lumière


Ce grenadier aussi
c'est toujours la vie qui recherche la lumière
Fleurs écarlates et pointues
bouches grandes ouvertes, " ah ! "
qui happent un à un les rayons du soleil


Leurs gencives rouges subissent à retardement
la morsure des flammes
et les éclats d'un amour auquel j'avais renoncé
se changent au loin en rayons de soleil cet automne


Même à cet âge où je ne crois plus à l'amour
c'est toujours la vie qui recherche la lumière
j'appelle quelqu'un, moi aussi, " ah ! "

p.85
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