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Marcel Duhamel (Traducteur)
EAN : 9782070362660
280 pages
Gallimard (08/05/1973)
3.64/5   193 notes
Résumé :
Comme il se tenait là, avec la mitraillette dans sa main gauche, jetant un regard circulaire avant de refermer le panneau à l'aide du crochet terminant son bras droit, le Cubain qui était allongé à bâbord et qui avait reçu trois balles dans l'épaule se mit sur son séant, visa soigneusement et lui envoya une balle dans le ventre.
Harry fut projeté en arrière et retomba assis. Il avait l'impression d'avoir reçu un coup de matraque dans l'abdomen. Il était adoss... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (17) Voir plus Ajouter une critique
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William Shakespeare s'est fait une réputation avec la formule « to be or not to be ». Ernest Hemingway a eu l'idée d'une petite déclinaison avec « to have and have not » qui fut rendue en français sous la forme « En avoir ou pas ».

En avoir ou pas, certes, mais de quoi ? du cran ? des " cojones " (comme il l'écrit plusieurs fois) ? du pognon ? du bol ?… Ou bien est-ce de l'expérience ? de la morale ? de la suite dans les idées ? de l'alcool dans le corps ?… En avoir ou pas, est-ce tout simplement une femme ? des amis ? un bateau ? une arme à feu ? Ou même un bras ?…

Quel étrange titre et pourtant si bien trouvé pour chapeauter ce qui n'était au départ que trois nouvelles séparées et que l'auteur a eu l'idée d'agglomérer en un seul ensemble pour en faire un roman. (On dit " fix-up ", paraît-il, en pareil cas, bien que je répugne à utiliser ce mot : " Assemblage " sonne mieux à mes oreilles et rappelle l'opération vinicole qui consiste à produire un vin standard et acceptable à partir de cépages pas tous exceptionnels.)

J'ai trouvé l'écriture particulièrement intéressante, à la fois très épurée et très soignée, notamment d'un point de vue narratif. L'auteur, mine de rien, alterne les points de vue narratifs et c'est vraiment très bien fait.

Les deux premières parties (qui sont aussi les plus courtes) sont, de mon point de vue, absolument " al dente ". Hemingway y trouve les proportions exactes de mystère, de suspense et d'authenticité. Les dialogues sont impeccables et annoncent déjà par leur vigueur — rappelons que l'ouvrage est publié en 1937, c'est notable — ce qui fera, stylistiquement parlant, le coeur ardent de la littérature policière de la seconde moitié du XXème siècle et du début du suivant.

J'ai vraiment adoré ce livre tant qu'il se focalisait sur le personnage de Harry Morgan. Il est central dans les deux premières parties. Or, dans la troisième partie, sans pour autant abandonner le récit des aventures de Harry Morgan, de façon assez incompréhensible pour moi, l'auteur s'épanche pendant des chapitres entiers sur d'autres personnages, qui n'ont rien à voir avec Harry Morgan, ni de près, ni de loin, sauf peut-être à habiter le même patelin, et là, j'ai un peu perdu le fil…

Ainsi, au chapitre XI de la troisième partie apparaît un certain Richard Gordon, dont on n'a, finalement, rien à faire. Ensuite on revient à Harry Morgan au chapitre XII et, pour ainsi dire, l'histoire serait finie. Mais non, Hemingway nous embarque, sans trop y croire, lors des chapitres XIII et XIV avec ces personnages fantomatiques, Richard Gordon et consort. Puis il revient brièvement à Harry Morgan au chapitre XV, l'abandonne à nouveau au chapitre XVI. Pour finalement conclure au chapitre XVII. le chapitre XVIII, sans être complètement hors sujet comme l'étaient les chapitres XI, XIII, XIV et XVI, n'apporte strictement rien.

Et c'est dommage, franchement dommage, car elle était forte et prenante cette histoire de Harry Morgan : un fier briscard qui gagne sa vie en louant son bateau et ses services à des plaisanciers américains venus goûter aux joies de la pêche au marlin (une espèce d'espadon) entre la Floride et Cuba. Bien évidemment, l'activité ne nourrit pas toujours son homme, si bien que Harry fut parfois tenté par l'import/export de marchandises illicites…

Il n'est pas faux de penser que l'arrêt de la prohibition de l'alcool aux États-Unis en 1933 n'a pas complètement arrangé ses affaires. Mais les ferments de la révolution cubaine pourraient bien ouvrir la porte à un nouveau type de business, allez savoir…

Pendant plus des deux tiers du roman, je trouvais ce personnage très intéressant, très crédible, à la fois fouillé et mystérieux et puis, tout à coup, Hemingway lui-même ne semble plus trop savoir où il veut nous emmener. Alors, il essaie un coup à la Dos Passos avec son Manhattan Transfer, il essaie — maladroitement d'après moi — de nous dresser un portrait sociologique des habitants des Keys, ces îlots qui terminent la péninsule de Floride. Et là, ça devient mou, poussif, inintéressant. le fil tendu avec Harry Morgan se détend et on patauge des quatre fers dans le Gulf Stream en se disant : « Mais que voulait-il nous dire, finalement ? »

Bref, un roman qui avait vraiment tout pour être réussi et captivant mais qui, selon moi, a été un peu bâclé sur la fin d'où une impression terminale plus mitigée. Bien entendu, comme à chaque fois, ceci ne représente que mon avis — et on peut en avoir ou pas — donc, pas grand-chose.

P. S. : si j'ai pris le temps de vous ennuyer avec le détail des chapitres dans la troisième partie, c'est justement, peut-être, pour vous éviter la petite déception que je viens d'évoquer. Si vous voulez me faire confiance, sautez sans hésitation les chapitres XI, XIII, XIV, XVI et XVIII qui sont assez copieux et qui n'apportent (je le rappelle, d'après mon seul jugement) rien. Et là, vous aurez peut-être ce que je n'ai pas eu, un vrai bon roman, tonique et plaisant de bout en bout, si le coeur vous en dit…
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Trop fort, Ernest : il commence par vous amener dans une sombre histoire de trafics en tout genre au large de Cuba, peuplée de truands plutôt minables avec au centre Harry Morgan un gars "qui en a", pour finalement élargir le plan vers une dissection complète et sans concession de toute une société humaine, jusqu'à ceux tout en haut de l'échelle qui en ont aussi, mais pas les mêmes : en bas les "cojones", le cran, la chance, les armes pour assurer sa survie, en haut les relations, l'argent, les commandes et la désinvolture qui va avec, car ce sont toujours eux qui l'emportent au final.

Et pour cette démonstration implacable il n'hésite pas à malmener son héros, ce Harry qui m'a d'abord franchement déplu mais auquel j'ai fini par m'attacher viscéralement comme à un certain idéal qu'on refuse de voir mourir.
Mal barrée, cette lecture aura finalement été un coup de coeur sur une peinture totalement désabusée du monde.
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Du Hemingway à la dure, pas du "Paris est une fête bucolique“ où des amoureux transis mangent des huîtres et jouent aux courses. Non, ici c'est une histoire de mec, d'un mec qui s'en prend plein la gueule mais qui en a tellement pris qu'il est presque intouchable, avec sa jambe en moins et sa pute au grand coeur. Une histoire de ceux qui ont du blé, des couilles et du sang...ou pas. Grandiose.
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En avoir ou pas ? Harry Morgan lui en a....et elles semblent être bien accrochées...Peu nous importe de connaître leur taille, mais vu ce qu'il s'envoie derrière le gosier et les clandestins qu'il balance sur les côtes américaines en toute clandestinité, nous permet de voir que c'est homme n'est pas un saint. Il navigue en eaux troubles, dans les Keys, plus précisément...Ces îles entre la Floride et Cuba... Cuba et son Rhum... Harry carbure au Bacardi....mais il ne perd pas la boussole pour autant. Mais au cour d'un livraison, une goutte de rhum va faire déborder le cubitainer de rhum...et là notre Harry va dégainer comme l'Inspecteur du même nom...Il va y laisser une bonne partie de lui-même dans cette traversée...

Hémingway est un homme de mer... le vieil homme et la mer...mais bien qu'il aimait "l'eau" il n'en buvait, semble-t-il, pas tant que ça...mais pour ce qui est du Rhum, là je peux vous dire qu'il nous en abreuve....ça ne me dérange pas : j'aime bien...

Mais contrairement au "Cuba Libre" que va immortaliser Hémingway, notre Harry ne sera plus jamais libre... et s'enfermera dans un isolement qui lui sera fatal. Il fera "son adieu aux armes"...et pourra se poser la question "pour qui sonne le glas"...
Au-delà du fleuve, et sous les arbres, le soleil se lève aussi, surtout pour celui qui meurt dans l'après-midi...
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Harry Morgan est de ceux qui en ont, indubitablement. Toujours dans les plans foireux avec son bateau, pour essayer de gagner de l'argent en transportant alcool de contrebande, émigrés, ou autres...
Du pur Hemingway qui m'a passionnée au début, mais déroutée quand il s'est mis à se centrer sur d'autres personnages, moins hauts en couleurs, plus stéréotypés.
Mais un bon moment de lecture, qui complète ma découverte, très ancienne, de cet auteur.
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Citations et extraits (21) Voir plus Ajouter une citation
« C'est bon, monsieur Sing, dis-je. Amenez la suite. »
Il met la main à sa poche, sort l'argent et me le tend. J'allonge la main et lui attrape le poignet qui tenait le rouleau et juste comme il venait à moi, là sur le plancher de l'arrière, de l'autre main je le saisis à la gorge. Je sens le bateau démarrer puis l'hélice brasser l'eau comme il virait et j'étais fort occupé avec M. Sing, mais je voyais le Cubain debout à l'arrière, la godille dans les mains, au moment où le bateau partait vers la pleine mer, en dépit des bonds et des culbutes auxquels se livrait M. Sing. Il faisait plus de bonds et de culbutes qu'un dauphin au bout d'une gaffe.
Je lui retourne le bras derrière le dos et je tire dessus mais je devais y aller trop fort car je le sens venir tout seul. Au moment où il casse, M. Sing fait entendre un drôle de bruit et s'affale en avant, moi le tenant toujours à la gorge et tout, et me mord à l'épaule. Mais aussitôt que je sens le bras mollir tout d'un coup, je le lâche. Il ne pouvait plus lui servir et comme ça je pouvais lui prendre la gorge à deux mains. Eh bien, mes enfants, le M. Sing s'est aplati comme un poisson, sans blague, avec son bras déglingué qui ballotait. Mais je le hisse sur les genoux, mes deux pouces profondément plantés de chaque côté de son tuyau d'orgue, et je fais basculer tout le truc en arrière jusqu'à ce que ça craque. Et n'allez pas croire que ça ne s'entend pas, quand ça craque, en plus.
Je le maintiens une seconde dans cette position, ensuite je l'étends en travers de la poupe. Il était là couché, le visage tourné vers le ciel, tranquille, dans ses beaux habits, les pieds dans le cockpit ; je le laisse là.
Ramassant l'argent tombé sur le plancher du cockpit, je sors sur le pont, j'allume la lampe de l'habitacle et je le compte. Après quoi je prends le gouvernail et je dis à Eddy d'aller sous l'arrière me chercher des morceaux de ferraille qui me servaient de corps mort quand on allait pêcher dans les hauts-fonds ou sur des rochers où je n'aurais pas voulu risquer de perdre une ancre.

Première partie, Chapitre IV.
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« Écoute, il me dit. Tu te fais sept dollars et demi par semaine. T'as trois gosses à l'école qui ont faim à midi. T'as une famille qu'a des tiraillements d'estomac et je t'offre une chance de faire un peu d'argent.
— T'as pas dit combien. J' veux bien courir des risques, mais ça se paie.
— Il n'y a plus grand-chose à gagner à l'heure actuelle, quel que soit le genre de risque qu'on prend, Al, il me fait. Regarde-moi, tiens. Je me faisais trente-cinq dollars par jour pendant la saison, à emmener des gens à la pêche. Et voilà que je prends une balle dans la peau, que j'y perds mon bras et mon bateau, et à faire quoi ? À trimbaler un lot d'alcool qui vaut à peine le prix de mon bateau. Mais moi je te le dis, mes gosses auront pas de tiraillements d'estomac et je vais pas aller creuser des égouts pour le gouvernement pour un salaire qui ne me permettra pas de leur donner à bouffer. D'ailleurs je ne pourrais plus creuser maintenant, je ne sais pas qui a fait les lois, mais tout ce que je sais c'est qu'il n'y a pas de loi qui vous oblige à crever de faim.
— Je me suis mis en grève contre les salaires, je lui dis.
— Et tu as repris le travail, il me fait. On a dit que vous faisiez grève contre la Caisse de secours. T'as jamais demandé de secours, t'as jamais demandé l'aumône ?
— Il n'y a pas de travail, je lui réponds. Y a pas de travail qui soit payé décemment nulle part.
— Pourquoi ?
— Je n'en sais rien.
— Moi non plus, il fait. Mais tant qu'il y aura des gens qui auront à bouffer, ma famille aura à bouffer. Ce qu'ils veulent, c'est vous faire crever de faim, pour vous forcer à foutre le camp d'ici, de façon à brûler les bicoques, construire de beaux immeubles et en faire une ville touristique. »

Troisième partie, Chapitre I.
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Il en était qui faisaient le grand saut du haut de la fenêtre de l'appartement ou du bureau ; d'autres se laissaient aller en douceur dans de petits garages pour deux voitures en laissant tourner les moteurs ; d'autres utilisaient la coutume du pays, le Colt ou le Smith et Wesson, ces instruments perfectionnés qui vous soulagent de l'insomnie, suppriment le remords, guérissent le cancer, évitent la banqueroute et trouvent une issue aux situations intolérables par la simple pression d'un doigt ; ces admirables instruments américains, si peu encombrants, d'un effet si sûr, si parfaitement conçus pour mettre fin au rêve américain lorsqu'il se transforme en cauchemar, leur seul inconvénient : le gâchis qu'ils font et que la famille est obligée de nettoyer.

Troisième partie, Chapitre XVI.
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Il n'avait nul besoin de se tracasser pour ce qu'il avait fait aux autres, ni pour ce qu'il leur était arrivé à cause de lui, ni pour la manière dont ils terminaient leur existence. […] Cela ne le tracassait pas. Il fallait qu'il y eût un perdant et seules les poires se faisaient de la bile.
Non, rien ne l'obligeait à penser à eux, ou aux sous-produits des heureux coups de Bourse. On gagne : il faut bien que quelqu'un perde, seules les poires se font de la bile.

Troisième partie, Chapitre XVI.
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— Cet homme est un bootlegger, n'est-ce pas ?
— Qu'est-ce que vous en pensez, vous ?
— Il y a probablement une récompense pour celui qui le prendra ?
— Ça m'étonnerait.
— Il viole la loi.
— Il est père de famille et il faut qu'il la nourrisse et qu'il bouffe. Je me demande sur le dos de qui vous bouffez, vous ? Et comment vous voulez qu'on bouffe ici quand les employés de l'administration à Key West sont payés six dollars et demi par semaine ?
— Il est blessé. Cela signifie qu'il a eu des histoires.
— À moins qu'y s' soit fait ça lui-même pour s'amuser.
— Épargnez-moi vos sarcasmes. Vous allez nous conduire à ce bateau et nous allons nous emparer de cet homme et faire saisir son bateau.

Deuxième partie, Chapitre II.
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Quel grand roman américain évoque la fin de la guerre d'Espagne, premier conflit où des hommes sont venus de l'étranger pour défendre la cause de la liberté ?
« Pour qui sonne le glas » d'Ernest Hemingway, c'est à lire en poche chez Folio.
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