Ce recueil comporte 12 nouvelles. Certaines m'ont beaucoup intéressée, mais je suis passée complètement à côté de quelques-unes.
Voici donc mon ressenti sur chacune d'entre elles.
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Les neiges du Kilimandjaro"
Nouvelle éponyme du recueil, elle met en scène un homme atteint par la gangrène qui, conscient de vivre ses dernières heures, flotte entre réalité et souvenirs. Il fait le bilan de sa vie amoureuse, de son talent d'écrivain qu'il n'a pas su exploiter autant qu'il l'aurait pu, et de ses petites compromissions.
Le récit est évidemment haché, c'est le principe, mais pas compliqué à suivre. Il est touchant sans être bouleversant à cause de la personnalité farouche du narrateur, qui ne passe rien à personne, à commencer par lui même. La fin en revanche est d'une rare poésie.
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Dix indiens"
J'ai dû relire cette nouvelle deux fois : trop de personnages en trop peu de temps pour mon petit cerveau ! Mais une fois compris qui est qui, elle révèle à la fois la cruauté et l'inconstance dont peuvent faire preuve certains Hommes. D'autant plus intéressant que Nick, héros de cette nouvelle, est un personnage récurrent dans et l'alter ego d'
Hemingway.
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La capitale du monde"
C'est presque le négatif des "Neiges du Kilimandjaro" : un homme meurt, mais si jeune et si vite qu'il n'a ni eu le temps de perdre ses illusions, ni celui de flotter au gré de ses souvenirs. Une mort aussi stupide que celle de la première nouvelle (il y en a tant), mais l'histoire varie sur la totalité des paramètres. Intéressant !
"Hommage à la Suisse"
Je ne suis pas sûre d'avoir compris cette nouvelle. Trois temps, trois hommes qui attendent un train en retard (première incohérence : un train en retard en Suisse !), une situation qui se répète, une discussion avec une serveuse... Et l'aiguillage s'emballe, les rails changent de direction. Jusque là, l'exercice de style était amusant. Mais la discussion entre les deux membres de la
National Geographic Society confine à l'absurde. Est-ce voulu ? Quoi qu'il en soit, je n'ai pas vu le rapport avec le début.
"L'heure triomphale de Francis
Macomber"
Titre ironique s'il en est. Un safari tourne mal : un homme rate son lion et fuit comme un lapin. le souci : sa femme a été témoin de la scène et ne compte pas le laisser s'en tirer à si bon compte. Rancoeur et amertume affleurent sans que l'on ne sache rien de leur histoire passée. La vision du couple est affreuse, mais terriblement réjouissante à lire.
Inévitablement, la vision du safari et des africains a pris un coup de vieux. Mais cette histoire "à chute" m'a bien plu et m'a fait penser au recueil "
Bizarre bizarre" de
Roald Dahl.
"Le vieil homme près du pont"
Deux réalités s'entrechoquent : celle du narrateur, soldat qui surveille l'avancée des fascistes, et celle d'un vieil homme qui a du quitter son foyer et ses bêtes pour échapper à l'artillerie. Cette mini nouvelle de trois pages montre bien la différence de perception entre le militaire et le civil.
Rationalité contre affectif. L'un pense "ennemi", "surveillance", "aviation" pendant que l'autre ne songe qu'aux animaux qu'il a abandonnés, incapable de s'en éloigner d'avantage. Fuir, pour aller où, quand son pays est en guerre ?
"C'est aujourd'hui vendredi" et les légionnaires fêtent ça par un happy hour tout ce qu'il y a d'anachronique. Ils commentent la crucifixion du jour : celle de Jésus Christ.
"Premier légionnaire : Moi, je trouve qu'il a bien tenu le coup aujourd'hui, là-bas.
Troisième légionnaire : Il a été bien."
Une farce écrite sous la forme d'une pièce de théâtre.
"La lumière du monde"
Scène de bar, avec les habitués, les petits malins et les prostituées.
Ça parle pour tuer le temps, à moins que ce ne soit pour révéler une personnalité, un souvenir précieux. Qui s'en soucie ? Car personne ne sera en mesure de l'apprécier à sa juste valeur...
"La fin de quelque chose"
Un couple va pêcher. Tout se déroule à merveille, ils ont leurs habitudes... Jusqu'à ce que quelque chose se grippe. Est-ce volontaire ? Préfère-t-il son ami à sa chérie ? Nick, de retour après "
Dix indiens" avec une autre bonne amie, a un comportement pour le moins ambigu.
"Une journée d'attente"
Cette nouvelle exprime très bien les incompréhensions qui peuvent survenir lors de discussions avec un enfant. Un petit garçon, malade, se persuade qu'il va mourir car il a 102 degrés de fièvre et que ses camarades lui ont dit qu'au delà de 44 on mourait.
Son père, comme tant de parents, met du temps à réaliser puis à comprendre qu'il confond degrés Fahrenheit et degrés Celsius !
"Là-haut dans le Michigan"
La jeune Liz s'est amourachée du bourru Jim. de retour d'un séjour de chasse, celui-ci l'emmène "faire un tour". Étonnant comme Liz rêve de Jim (essentiellement lorsqu'il n'est pas là) sans avoir aucune idée de ce qu'il se passera ensuite. La voilà voulant passer à l'acte, mais craignant de le faire, endolorie mais attentive. Aujourd'hui, ses émotions mêlées seraient à charge contre Jim (qui manque pour sa part de l'attention la plus élémentaire envers sa compagne, il faut bien l'admettre).
"Trois jours de tourmente"
Cette dernière nouvelle fait directement suite à "La fin de quelque chose", même si on ne sera pas plus fixé sur les objectifs de Nick. S'est-il laissé influencer par Bill ? Voulait-il vraiment rompre avec Marjorie ? Ces relations sont dignes d'une téléréalité, alcool compris. Seul intermède : la discussion des deux garçons sur leurs lectures, assez savoureuses et cette opinion originale sur l'alcoolisme : "le père préfère que je ne boive que ce qui est débouché !
- Je comprends, fit Nick.
- Il dit que de déboucher les bouteilles, c'est ça qui fait des ivrognes.
- C'est vrai, dit Nick. Il était impressionné. Il n'avait jamais pensé à cela ! Il avait toujours cru que c'était de boire en Suisse qui faisait les ivrognes." (p.181)