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Critique de Enki


Imaginez une planète balayée continuellement par des vents dont les plus violents ne font pas plus grand cas d'un homme que d'un fétu de paille… Imaginer que trois alternatives se soient présentées alors à l'humanité, survivre terrée, condamnée, tel Sysiphe, à rebâtir inlassablement l'embryon d'une civilisation, se laisser porter par les vents, sujets au moindre de leurs caprices ou contrer les vents, les combattre, trouver leur origine et les dompter. C'est ce dernier destin qu'a choisi le peuple d'Aberlaas cité de l'extrême-aval. Des hordes y sont formées pour affronter dès leur plus jeune âge les vents dans une marche sans retour. C'est l'histoire de la 34ème d'entre elles qui nous est ici narrer.

Alain Damasio est à la science-fiction ce qu'est Jean-Philippe Jaworsky à la fantasy : un auteur exigent, porteur des lettres de noblesse du genre, indubitablement considéré au sommet par la communauté des lecteurs avertis. L'adaptation de ces textes, d'une rare profondeur, est une gageure, d'autres s'y sont cassées les dents… En outre La Horde du contrevent est son Gagner la guerre, entendez par là, son ouvrage culte. Éric Henninot relève non seulement cet immense défi, mais qui plus est avec la manière. L'adaptation comporte son lot de simplification inhérent au support : un seul point de vue ici et délestage de quelques hordiers pour faciliter l'appréhension du groupe… rien de rébarbatif, rien qu'un lecteur de bande dessinée ne puissent comprendre comme des choix éclairés. Première réussite de l'auteur, trouver dans ce premier album, un équilibre parfait entre didactique (l'univers nécessite explication), vie du groupe, destins individuels, entre action, réflexion et émotion. Les planches sont quant à elles simplement magnifiques, les couleurs discrètes mais de bons tons. Les paysages grandioses, que l'auteur n'hésite pas à exposer en mode grand angle, et les vents omniprésents sont parfaitement rendus. Devant nous prends corps la horde, noblesse d'âme du Prince, fantaisie dangereuse de Caracole, détermination sans concession du Golgoth… Les tensions sont nombreuses, la cohésion du groupe devient l'enjeu principal de l'album est par la même Henninot donne vie à des individualités mais à sa somme également, rendant crédible ce désir, toujours renouvelé et entretenu de haute lutte, de réaliser une quête, confiée vingt-sept ans plus tôt à de simples enfants, qui pourrait paraître si vaine après tant d'années. le volume se conclut sur la question de la responsabilité, ultime proposition d'un récit toujours prompt à flirter avec la matière philosophique si chère à Damasio. Henninot restitue un univers poétique et violent, complexe au point de disposer de son propre vocabulaire, nous fait rencontrer et reconnaître des personnalités en nombres, partager leur rivalités, leur complicités et finalement peint magistralement cette nécessaire solidarité, emprunte d'aspérités, seule garante de la survie de la horde. Un grand succès !
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