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Ces Trophées occupaient, depuis quelques temps, un tout petit espace de ma bibliothèque numérique.
Comme beaucoup de collégiens du vingtième siècle, j'avais le souvenir prégnant de ces Conquistadors dont nous apprenions par coeur le premier chant
J'étais donc "octet" (je sais, c'est faible, mais c'est lundi-matin, fin du diverticule et de la parenthèse) pour entrer dans la belle poésie formelle, épique et puissante de José-Maria de Heredia.
Les vers de José Maria de Heredia vibrent et s'harmonisent en grande et belle musique, et c'est ainsi qu'ils restent éternels par delà les modes et les ans. Il y a un souffle, qui jamais ne semble devoir s'épuiser.
Les rimes De Herédia n'ont pas finis de tourner dans ma tête!
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Je viens de rencontrer José Maria de Heredia.
Le voici en son heureuse jeunesse, lorsque ses premiers sonnets parurent dans le "Parnasse contemporain" d'Alphonse Lemerre et le firent immédiatement célèbre.
Il venait d'épouser Louise Despaigne qui fut la compagne de toute sa vie. Comme lui elle était d'origine espagnole par son père et française par sa mère. Celle de José-Maria vivait encore, revenue avec lui en France où il avait été élevé au collège de Senlis depuis l'âge de neuf ans, ne retournant à Cuba qu'à seize et ne quittant définitivement l'île natale pour se fixer en France qu'en 1861.
Imaginez-le dans sa demeure, rue Balzac, avec sa femme et ses trois filles qu'il appelait "ses plus beaux sonnets".
Voyez-le fumant sa pipe ou ses cigares dans son cabinet de travail toujours enfumé et encombré de bibliothèques, orné de dessins, de gravures et de petits tableaux. Là il méditait longuement, récitant les vers du sonnet, le parachevant, le modifiant, hésitant entre des images, des rimes et des variantes aussi précieuses les unes que les autres.
Dans ce même cabinet de travail il recevait ses amis, poètes ou pas.
On y voyait arriver quelques jeunes hommes de grands talents ou bien quelques timides imitateurs. Il eut, ce soi-disant parnassien, la plus grande influence sur la nouvelle école étiquetée symboliste, tout autant par la clarté lumineuse de sa syntaxe que la vigueur de son don d'évocation.
Retrouvons-le chez son ami l'éditeur Alphonse Lemerre parlant avec chaleur de littérature et de poésie ou boulevard Saint-Michel, chez son maître Leconte de Lisle, écoutant avec respect le grand vieillard.
Voyez-le, rentrant chez lui, au soir de la journée mémorable de la parution de ses "Trophées" - si vos pas vous conduisent à la Bibliothèque Nationale vous y trouverez l'unique manuscrit - où les volumes s'enlevaient sans arrêt, où la queue des acheteurs impatients s'allongeait passage Choiseul.
Voyez-le, aussi candidement satisfait, sans l'ombre d'une vanité, le jour de sa réception à l'académie Française. Sa joie s'attriste de ne pas voir là son cher Leconte de Lisle, mort quelques années auparavant.
Prononcera-t-il bien son discours ? S'il fait l'éloge de son prédécesseur Charles de Mazade comme il est de coutume, il parle davantage des personnages étudiés que de la qualité littéraire des ouvrages. Qu'importe ! Il le lut sans doute superbement puisque Maurice Barrès rapporte : "il fit courir dans Paris une rumeur d'admiration...".
Barrès, celui-là même qui prendra sa place, en 1906, douze années plus tard dans le fauteuil 4.
Pauvre José-Maria ! Après avoir été nommé conservateur de la bibliothèque de l'arsenal la mort vint le chercher de bonne heure en octobre 1905 au château de Bourdonné où il passait, déjà malade, de longs séjours d'été et d'automne, cherchant sa jeunesse perdu dans les eaux dormantes du lac reflétant le château rose, sur lesquelles il guettait l'éclair azuréen du martin-pêcheur.
Prenez le temps de lire quelques diamants de cet ouvrage afin de pas laisser mourir une seconde fois ce grand poète. Cela lui aurait fait plaisir...
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Il plane sur Heredia une beauté et un calme sans égale. Chaque sonnet semble avoir été arrangé avec soin et patience, chaque mot choisit de manière à aboutir à un idéal d'harmonie. L'équilibre est parfait, presque miraculeux ; rien ne semble laborieux. La forme est rigoureuse, et pourtant l'auteur ne semble jamais y avoir sacrifié le fond.

Nombre d'entre nous ont appris ‘Les conquérants' à l'école, et parfois s'en souviennent encore. C'est un joli petit poème plein de lumière. Impossible de rester indifférent face aux rêves de ce conquistador rêvant de gloire en contemplant des constellations inconnues monter à l'horizon.

À l'intersection des anciens et des modernes, Heredia s'inspire aussi bien de thèmes tirés de l'antiquité gréco-romaine que d'éléments contemporains. Dans la première catégorie, on notera l'originalité des poèmes des centaures : leur fuite devant Héraclès, la jalousie de Nessus, le désespoir des centauresses voyant leurs époux leurs préférer les humaines...

Présente à chaque strophe, la nature est également célébrée dans ses propres poèmes, des récifs de corail aux couchés de soleil. Et il nous fait voyager de l'Amérique au Japon, de l'Égypte antique aux rivages de Bretagne.

Certains écrivains sont prolixes. Heredia, lui, choisit de consacrer sa vie à la rédaction de ces cent dix-huit sonnets. Et pour moi, il toucha du doigt la perfection.
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Parus en 1893, « Les Trophées » constituent la quasi intégralité, avec quelques poèmes de jeunesse ou d'occasion, de l'oeuvre poétique de José-Maria de Hérédia. (1842-1905). Curieux destin que celui de ce Cubain d'origine, mais par sa mère descendant d'une grande famille française cultivée. A Paris il se rapproche de Leconte de Lisle, Sully -Prudhomme et les tenants du Parnasse.
Stop ! Séquence info : le Parnasse, en littérature, est un mouvement qui en réaction contre le romantisme, jugé trop lyrique, trop sentimental, trop personnel, prône une poésie qui proclame l'art pour l'art, et la recherche de la perfection formelle. Ses instigateurs sont Théophile Gautier et Théodore de Banville (les deux Théo). Ses principaux représentants sont Leconte de Lisle, Sully-Prudhomme, Catulle Mendès, François Coppée, Léon Dierx… D'autres poètes, et non des moindres, Baudelaire, Verlaine, Rimbaud, Mallarmé et les « poètes maudits » (dont Tristan Corbière) ont pu par certains côtés, se rapprocher de ces thèses.
« Les Trophées » sont un ensemble de 118 sonnets et quatre poèmes qui répondent aux grandes recommandations parnassiennes : l'excellence formelle, le culte de la beauté (s'appuyant entre autres sur une solide érudition et une maîtrise technique sans faille) et bien entendu, l'absence de lyrisme, d'interprétation personnelle, d'émotion. Cette exigence demande un formidable travail d'artisan, d'artiste, de « ciseleur », d'orfèvre » qui se traduit par un immense effort de concentration. Il existe un danger, évidemment : le résultat peut être beau mais froid. Or la poésie, (mais peut-être me trompe-je) a justement pour raison d'être et pour but de communiquer émotion et chaleur. le poète a donc intérêt à présenter une oeuvre idéalement parfaite, dont la beauté constitue l'unique – mais définitive- caractéristique.
Les sonnets De Hérédia sont parfaits : il maîtrise à la fois le vocabulaire (son érudition fabuleuse y pourvoit largement), manie la couleur comme un véritable peintre, joue avec les rythmes, et reconstitue de véritables tableaux : ses descriptions de batailles romaines sortent tout droit des meilleurs peplums, et sa vision épique donne une force descriptive d'une réelle efficacité. le top du top du sonnet chez Hérédia, figure dans l'apothéose du dernier vers :
Et sur elle courbé, l'ardent Imperator
Vit dans ses larges yeux étoilés de points d'or
Toute une mer immense où fuyaient des galères.
(Antoine et Cléopâtre)

Tous anxieux de voir surgir, au dos vermeil
Des monts Sabins où luit l'oeil sanglant du soleil,
Le Chef borgne monté sur l'éléphant Gétule.
(Après Cannes)
Ou penchés à l'avant des blanches caravelles,
Ils regardaient monter en un ciel ignoré
Du fond de l'Océan des étoiles nouvelles.
(Les Conquérants)
Hérédia sacrifie un peu à une mode du temps (et pas seulement de son époque) : l'attrait du clinquant, du bibelot, du « pompier ». Il est très éloigné de ces maîtres du sonnet qu'étaient avant lui Du Bellay et Ronsard, Hugo, Musset et surtout Nerval, mais la facture de son travail le place au niveau des plus grands (Baudelaire, Verlaine et Rimbaud), mais à part : il manque cette pointe d'émotion qui caractérise les génies.
Mais pour les amateurs de poésie bien léchée, alliant la maîtrise technique avec le souci du vrai et du beau, votez Hérédia, vous ne serez pas déçus.
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José Maria de Heredia, parnassien accompli -sans les failles tragiques ni les pastels estompés d'un Verlaine- tout de marbre et d'onyx...personnellement, il me laisse...de glace!

Poésie formelle, ciselée et parfaite...ment ennuyeuse!
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Les conquérants" C'est un poème que nous récitons(restituons) à chaque fin de repas familial(va-t-en comprendre),dont je vous livre quelques lignes que je place dans les critiques,mais je ne manquerai pas de l'installer dans les" citations",c'est juste pour vous donner l'envie de lire ce poème;il me semble que beaucoup d'entre vous le reconnaîtront,car il est souvent appris à l'école,et c'est tant mieux:


Ou penchés à l'avant des blanches caravelles,
ils regardaient monter en un ciel ignoré
du fond de l'Océan des étoiles nouvelles.


Vous vous imaginez le trip des mecs sur ces navires...en route vers la recherche,alors,de l'or, "l'or que Cipango mûrit dans ses mines lointaines"...
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Simplement magnifique.... avec un style à la foie épique et descriptif comme dans les poèmes de J.R.R. Tolkien ( dont vous trouerez des traditions sur le site de l'association Tolkiendyl!) même si les sources ne sont pas les mêmes pour l'un c''est la mythologie nordique et les légendes arthuriennes qui lui ont fait créé un monde et pour l'autre c'est les mythes grecs et l'histoire... Heredia a une écriture aussi épique que Tolkien même si chacun à son style... ce qui n'est pas le cas de Gerard de Nerval mais qui nous emporte bien autrement bien dans le mythe, mais surtout le mystérieux... quand à Lamartine, il nous fait médité par ses descriptions émouvantes, de paysages, de thème abstraits (religion ou philosophie!)... On se dit qu'il serait bien dommage à se limiter à un seul poète.... et dans lire plusieurs... et pour des sujets plus terre à terre, on préféra l'illustre Rimbaud... qui n'a réussi à éditer un seul livre... et qui a échoué dans bien des projets terre à terre rattrapé par le matérialisme absurde de sa société!
Et si nous avons parfois des souvenir difficiles avec l'apprentissage par coeur du Coureur... en 4e, mal préparé à cette débauche de vocabulaire poétique... pourtant que c'est beau... et que, à l'âge adulte, cela donne envie d'écrire!

Pour les enfants
On pourra les intéresser à la poésie grâce aux fables De La Fontaine, mais pas seulement on eut taper aussi dans les chansons de Brassens, qui n'a pas fait que des chansons aux allusions paillardes, mais a reprit des poèmes en chanson, notamment le petit cheval! Ou bien encore cette autre chanson générique d'un film avec Fernandel : Heureux qui comme Ulysse, du fameux Joaquim du Bellay

Les adultes trouveront leurs bonheurs dans les trophées de José Maria de Hérédia, les Chimères et la traduction en vers du second Faust de Goethe de Gérard de Nerval, Poème de Rimbaud et Méditations poétiquesDe Lamartine.... et la langue française n'en déplaise à ses détracteurs, est belle et riche... et surpasse bien souvent le simple français courant qu'ils ont appris... comme toute langue humaine !
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Un petit in-8, ou un grand in-16, me fait de l'oeil sur l'étagère du haut. Toute résistance est vaine.

Reliure fin XIXème en veau havane à coins, agréables roulettes dorées sur le dos à cinq nerfs: petit mais cossu. Familier et désirable.

Lecture à nouveau frais, mais ambiance toujours aussi cosy : comme énormément de gens je me sens ici à la maison (si on ne connait pas tout on a au moins déjà croisé quelques gerfauts au sortir de leur charnier natal), aucune originalité donc, mais origines, patrimoine, cocon. Mais on ne s'endort pas dans ce cocon, on est revigoré.

Du commun donc, mais dans le bon sens du terme, du pour-tous; mais surtout du vif et du beau, dans une langue et une métrique de grande classe. Oeuvre classique, voire classiquissime, elle même fruit de l'héritage, mais nullement empesée (enfin, pas de laissez aller non plus :) . Pompeux, certes. Et alors? Je vous propose d'assumer un certain goût pour les pâtisseries bien goûtues. le paris-brest ce n'est pas du sans sucre, ni du sans gluten. Vive la gourmandise.
Bref, on écrit de belles choses aujourd'hui, mais le flot de sève du patrimoine est encore là. Il nourrit, et il amuse et il fait rêver. Ils là Scipion, Hannibal le chef borgne, les femmes de Byblos, Cipango, le récif de corail, la houle, le chêne brut, le cyprès et l'érable, la chaleur du carnage et ses âcres parfums, l'airain rutilant, la pourpre flottante.

Je n'en dirai pas ni plus ni mieux que ce qui a déjà été dit, notamment ici dans une critique sensible par Philippe Castellain, et je ne suis pas un technicien de la poésie. Cependant j'ai plaisir ici à déposer un petit témoignage pour entretenir la braise et donner rendez-vous aux amis de la belle ouvrage et des dieux des forêts.

Depuis le sommet du Parnasse, on est au spectacle. Les images explosent. La Grèce, la Sicile, Rome, les barbares, l'Orient, la nature, Michel-Ange, un marbre brisé, le bain des nymphes.

Je vous laisse. J'ai garé mon éléphant gétule en double file. Et qui plus est j'ai un lectisterne à organiser pour la fin de semaine. Débordé :)

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Le confinement est vraiment le moment parfait pour relire des livres aimés il y a longtemps et dont le souvenir est un peu passé. J'ai une tendresse particulière pour le recueil Les trophées dont ma grand-mère me récitait des pans entiers ! Il y a des enfants à qui on lit des contes et d'autres qu'on berce de vols de gerfauts avant même qu'ils soient assez âgés pour savoir ce que c'est !
Et bien c'est aussi beau que dans mon souvenir. On devrait encore les faire apprendre à l'école, plus aucun enfant n'ignorait tous ce vocabulaire délicieux qu'il utilise !
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"Le soleil sous la mer, mystérieuse aurore,
Éclaire la forêt des coraux abyssins
Qui mêle, aux profondeurs de ses tièdes bassins,
La bête épanouie et la vivante flore."
C'est ce dont je me souviens de ce sonnet appris quand j'étais au lycée. Je n'ai jamais étudié cet auteur, et évidemment je n'ai pas le bagage culturel pour apprécié à leur juste valeur ces écrits.
Mais j'adore cette poésie tellement visuelle et tellement colorée.
Alors, quand pour le challenge multi-défis 2017, je "dois" lire un recueil de poésies, c'est avec délectation que j'ouvre à nouveau celui ci, et que je grappille au hasard des pages, au hasard de quelques minutes de disponibilité, quelques vers qui m'emmène en voyage, en Grèce antique, sous les tropiques, au moyen-âge ou en Bretagne.
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