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Critique de PhilippeCastellain


Années 1950. La France se relève péniblement de ses ruines, et tente comme elle peut de récupérer un peu de prestige. le sport est un moyen comme un autre. Et dans ce domaine, en cette époque où l'alpinisme en est encore à ses temps héroïques et où des zones entières n'ont jamais été grimpées, les « premières » déchainent encore les passions. Or aucun des quatorze « huit mille » n'a encore été conquis. Quel triomphe ce serait pour la France si elle y parvenait en première ! Et puis après tout, l'Armée des Alpes n'est-elle pas la seule à être restée invaincue pendant la débâcle de 40 ?

Qui plus est des alpinistes on en a, et des bons. Une équipe est constituée. Deux spécialistes des Dolomites, Jean Couzy et Marcel Schatz ; un médecin lui-même bon montagnard, Jacques Oudot, et les trois meilleurs grimpeurs de l'époque : Louis Lachenal, la tête brûlée ; Gaston Rébuffat, le plus technique ; Lionnel Terray, le spécialiste du passage en force. Et Maurice Herzog… ? Parisien, pratiquant l'alpinisme de haut niveau, il est cependant loin d'avoir l'expérience de ces-trois là. Il reste relativement évasif sur les raisons de sa participation.

Son récit n'en est pas moins prenant et enthousiaste. La chasse aux sponsors, les préparatifs de l'expédition, la camaraderie et l'esprit d'équipe. Arrivé au Népal, le groupe hésite entre deux sommets : l'Annapurna et le Dhaulagiri. Les deux font plus de huit mille mètres d'altitudes, et leurs abords sont pratiquement inconnus. Une longue première phase consiste donc à les reconnaître, pour déterminer lequel est le plus accessible. Il faut faire vite, car l'escalade n'est possible que pendant quelques mois de printemps ; après cela l'arrivée de la mousson rend toute ascension impossible.

Verdict : bien que son escalade en elle-même devrait être plus facile, les abords du Dhaulagiri sont si accidentés qu'il est pratiquement inaccessible. Ce sera donc l'Annapurna. Et il faudra faire vite. Une fois le camp de base établit l'avance se fait par étape successive : reconnaissance, établissement d'un camp intermédiaire – une tente ou deux et un peu de ravitaillement, cela suffit – et ainsi de suite. Enfin le 3 juin, alors que la tempête approche, dans un rush final Herzog et Lachenal parviennent au sommet. le premier huit-mille est conquis ! La descente sera éprouvante. L'un et l'autre y perdront une partie de leurs pieds, gelés. Terray et Rébuffat viendront à leur secours et leur sauveront la vie. le retour en France de l'expédition sera triomphal.

Ce récit permettra à Herzog d'en retirer le gros de la notoriété, et de faire une belle carrière politique : secrétaire d'État à la Jeunesse et aux Sports, maire de Chamonix, président du tunnel du Mont-Blanc… Mais il devra également faire face à de féroces critiques, l'accusant d'avoir tiré toute la couverture à lui, d'avoir largement exagéré son rôle, et surtout d'avoir absolument voulu atteindre le sommet alors que les conditions étaient trop dangereuses. Qu'il ait voulu à tout prix y aller lui-même, alors que la cordée Terray – Rébuffat, plus expérimentée, avait de bien meilleures chances. Il est également certains que Lachenal ne se remit jamais de la perte d'une partie de ses pieds, qui l'empêcha de retourner en montagne.

Mon père, qui dans sa jeunesse a connut Rébuffat et a gardé une immense admiration pour ce « danseur des parois », m'a raconté qu'il se fermait comme une huitre à la simple évocation de l'Annapurna…
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