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Ruben Jablonski, Juif allemand, a 12 ans en 1938 lorsque son père décide de mettre sa famille à l'abri des persécutions nazies en l'envoyant dans un petit village de Bucovine, en Roumanie. Mais en 1941, la guerre les rattrape. Ruben et le Juifs de Siret sont déportés dans le ghetto de Moguilev-Podolski, en Ukraine. Lorsqu'en 1944 les Russes les libèrent, Ruben, alors âgé de 18 ans, entreprend un long périple qui le mènera vers sa Terre promise, celle qu'il se choisira.

« Les aventures de Ruben Jablonski » est une autobiographie fictionnée, un roman d'apprentissage plein de vitalité, où le défaitisme n'a pas sa place. A travers le personnage de Ruben, l'auteur Edgar Hilsenrath relate son enfance heureuse et espiègle dans un petit village juif, puis son adolescence marquée par sa déportation dans un ghetto en Ukraine. le ghetto justement, est ce moment charnière de sa vie dont il souhaite livrer un témoignage en devenant écrivain. Au gré de ses pérégrinations, en Roumanie, en Ukraine, puis en Palestine surtout, c'est cette motivation qui ne le lâche jamais. le ton est léger et désinvolte, souvent drôle. Ruben narre des anecdotes cocasses, souvent sexuelles, et des aventures assez incroyables où la chance lui a souvent souri. Mais sous cette légèreté apparente, les événements dont il nous parle demeurent graves et dramatiques. Il trace en effet un portrait glacial et coupable des rescapés de la Shoah, dont il fait partie, tableau hétéroclite de tous ces Juifs, ces hommes et ces femmes partis en quête de la Terre promise mais qui gardent en eux des séquelles fraîches, physiques et mentales, rappelant les horreurs de la guerre et la barbarie des hommes. Les femmes notamment, très nombreuses dans le roman car objets de tous les fantasmes et de toutes les convoitises du personnage, demeurent les victimes de guerre que l'auteur met le plus en avant.

A travers le regard de ce jeune homme d'une vingtaine d'années qui cherche son destin, on déambule dans les ruines fumantes d'un lendemain d'apocalypse, on assiste à la naissance de l'Etat d'Israël, on suit les premiers soubresauts du conflit judéo-arabe, on observe un peuple en quête de liberté et de jouissance. Edgar Hilsenrath a choisi de parler cru, de choquer, de parler de ce qu'il aime (le sexe et l'écriture) sur un thème quasi sacré : la Shoah. Il n'en reste pas moins qu'il nous parle de ce qu'il a vécu.

C'est tragi-comique, grinçant et glaçant. C'est le rire jaune qui cache le désespoir.

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Je découvre Edgar Hilsenrath avec sa dernière publication aux éditions du Tripode et je suis aux anges. Ce récit en partie autobographique rapporte le parcours d'un adolescent juif allemand, émigré en Roumanie au début du conflit nazi, puis en Palestine et aux Etats-Unis. L'histoire est tragique bien évidemment. Cependant Edgar Hilsenrath réussit la prouesse de traiter ce sujet épineux avec humour – non pour autant dénué de sensibilité – et dans un style très moderne, rythmé, aux phrases courtes et aux dialogues incisifs – un grand merci en passant à la traductrice Chantal Philippe !

Le récit mêle volontiers les aventures grivoises d'un jeune homme en mal d'amour – et pas toujours gentleman avec ces dames – et les anecdotes de vie quotidienne d'une famille juive bousculée par la guerre. Sans pathos et sans tabou, Edgar Hilsenrath renouvelle l'approche littéraire de la seconde guerre mondiale, vue des territoires de l'est. Je lorgne déjà les autres titres de l'auteur : Fuck America, Orgasme à Moscou... ;)
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Je n'avais encore jamais lu Hilsenrath (mon Père, pardonnez moi, j'ai pêché) et je dois dire que je savais que je ne serai pas déçu.
Ce roman, le dernier de son oeuvre, fait la synthèse de son parcours atypique et me parait un bon compromis pour découvrir l'originalité des récits d'Hilsenrath.

Ayant fuit en Roumanie l'arrivée au pouvoir d'Hitler en 1938, la famille de Jablonski (alias Hilsenrath) d'origine Juive allemande, sera déportée par le régime Nazi dans le ghetto de Mogilev en Ukraine, qui donnera naissance à Nuit, un des roman majeur d'Hilsenrath.

Le jeune Jablonski effectuera un périple, seul, à travers l'Europe pour échapper aux horreurs de l'Allemagne Nazie, qui le mènera en Palestine (Le Barbier et le Nazi), puis en Amérique (Fuck America).

Je considère ce roman comme un prologue pour entrer dans une oeuvre majeure de la littérature allemande contemporaine, faites de réalisme parfois cruel, car l'Holocauste est un thème récurrent ici mais paradoxalement avec une vision neutre, son but principal étant de lutter contre l'oubli.

Beaucoup d'humour, souvent noir, toujours drôle, ce récit montre la débrouillardise d'un gamin qui deviendra un homme à travers la misère, les petits boulots et les rencontres au fil de ses pérégrinations.

Je vais m'empresser de dévorer le Barbier et le Nazi, Nuit, et Fuck America !
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L'originalité de ce livre, c'est le ton que le narrateur-auteur adopte pour raconter sa propre vie, l'oeuvre étant en grande partie autobiographique… Et quelle vie ! Un ton un peu détaché, beaucoup d'autodérision, d'ironie et de références à une sexualité assez débridée pour évoquer une vie difficile qui a coïncidé avec une des pires périodes de l'Histoire : la Seconde Guerre mondiale et le nazisme.
En effet, Ruben Jablonski, de confession juive, quitte avec sa famille, dès juillet 1938, Halle-sur-Saale en Allemagne, pour aller vivre chez ses grands-parents en Roumanie, en Bucovine et plus précisément à Sereth (actuellement le nord de cette région est en Ukraine, l'autre en Roumanie et Sereth se trouve côté roumain juste avant la frontière ukrainienne). le père reste en Allemagne pour vendre son magasin puis compte partir pour Paris. L'enfance du narrateur dans cette région fut un bonheur absolu : les baignades dans la rivière, les balades à poney, les copains, l'école, le café, les bougies allumées pour Shabbat, l'apprentissage du yiddish. L'évocation des traditions juives et des moeurs dans cette petite ville me fait penser aux toiles de Chagall.
Une période d'insouciance bien loin des mauvaises nouvelles venues d'Allemagne, de la Nuit de Cristal et des troubles qui ont suivi. Mais la guerre semble vouloir les rattraper : la Roumanie devient fasciste et en 1941, les juifs de Sereth sont déportés vers l'est jusqu'au ghetto de Moguilev-Podolski, ville ukrainienne sur la rive orientale du Dniestr où ils parviennent à loger dans une école russe. Là, il faut survivre, se ravitailler comme on peut, ruser pour exister. « … à douze ans, on ne prend pas les choses au sérieux, et je voyais notre émigration plutôt comme une aventure » raconte Ruben qui va très vite comprendre que sans un brin de magouille, de malice et une chance inouïe, on ne s'en sort pas.
Après la libération du ghetto par les Russes en 1944, (il ne reste que cinq mille survivants sur les quarante mille juifs du ghetto), le narrateur quitte sa famille et revient à pied en Roumanie. S'en suit alors tout un périple qui a pour nom l'exil et qui mènera l'auteur jusqu'en Israël.
Il faut savoir que tous les grands épisodes de cette incroyable existence ont donné lieu à des récits : par exemple la déportation au ghetto de Moguilev-Podolsk de 1941 à 1945 est racontée dans Nuit (1964) et il s'inspire de son séjour en Israël pour écrire le Nazi et le Barbier (1971). En fait, Les Aventures de Ruben Jablonski (1997), huitième livre de l'auteur, fait la synthèse des autres oeuvres largement autobiographiques et, à mon avis, à lire absolument si l'on veut vraiment se rendre compte de ce qu'a enduré l'écrivain. Sachez aussi qu'Edgar Hilsenrath a soufflé le 2 avril 2017 ses 91 bougies !
Dans le roman, Ruben souhaite devenir écrivain et il dit après avoir découvert l'oeuvre de Remarque qu'il voudrait «  réussir à mettre en oeuvre cette légèreté apparente avec laquelle Erich Maria Remarque décrivait des scènes impressionnantes qu'il pimentait de dialogues très particuliers. » Je trouve que l'on a défini là l'impression qui se dégage effectivement du roman : une légèreté apparente, une espèce de ton neutre qui font que la terrible réalité nous est décrite sans pathos.
Évidemment, certains lecteurs seront peut-être gênés par cette distance liée à l'écriture même. Je crois qu'au contraire le projet de Hilsenrath est de dire. de TOUT dire sans rien censurer : ce qu'il a vu, ce qu'il a ressenti (et tant pis si, au pire moment de la guerre, son appétit sexuel le gagne), ce qu'il a fait (voler, trahir pour manger, pour vivre).
Oui, il dit et ça peut choquer.
Mais c'est la vie.
Et précisément, ce qui domine, finalement c'est son goût pour la vie, les femmes et l'écriture. Cela le sauvera.
Les Aventures de Ruben Jablonski sont le roman initiatique d'un jeune homme qui va faire un pied de nez à L Histoire : vous ne m'aurez pas, je m'en sortirai toujours. Bel hymne à la vie : car dans les pires moments, il trouve toujours l'envie et le besoin insatiable d'aimer, de se faire plaisir, d'apprécier le corps d'une femme, de déguster une délicieuse pâtisserie, de fumer une cigarette, d'admirer un paysage.
Cet appétit de la vie, qui donne l'impression qu'il va toujours s'en sortir, se débrouiller pour trouver une échappatoire, me rappelle celui de Charlotte Delbo dont parle Valentine Goby dans « Je me promets d'éclatantes revanches » : oui d'Auschwitz, on peut se délivrer, dit celle qui compte bien profiter de la vie, rire, fumer, aimer, manger, s'abandonner au superflu et écrire. Pour se libérer, pour prouver que l'on existe encore, que l'on est vivant.
Eh bien, Ruben (Edgar) semble avoir mis en oeuvre cette technique de survie dès son enfance. Il s'en sortira lui aussi par la parole, en racontant ce qu'il a vu, tel qu'il l'a vu, sans trémolos, sans ornements, sans cris, sans pleurs. C'était comme ça, c'est tout et inlassablement, dans l'oeuvre, dès qu'il rencontre quelqu'un, il raconte, reprend depuis le début (ce qui d'ailleurs crée un effet un peu étrange pour nous lecteurs puisque nous savons déjà tout cela, nous venons juste de le lire!) Mais peu importe. Il faut dire et redire. Raconter, répondre aux questions parfois naïves ou déroutantes sans jamais s'énerver, sans jamais verser une larme, sur le simple ton du constat.
Oui, il s'agit donc bien là d'un roman d'aventures - et l'on sait que les super héros ne meurent jamais ! - qui a quelque chose de l'esprit BD (soudain, je repense aussi au travail d'Art Spiegelman pour Maus), ce que rend très bien la magnifique couverture graphique très colorée : un pied de nez à la mort dans cette volonté absolue de s'en sortir et de jouir de la vie.
Longue vie à vous Edgar Hilsenrath, chaque jour que vous vivez est une petite victoire sur le mal qu'ils auraient aimé vous faire et la preuve même qu'ils ont échoué.
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Odyssée autobiographique et porte d'entrée idéale dans l'oeuvre de l'indispensable Edgar Hilsenrath.

Dès la fin de la guerre, Edgar Hilsenrath avait l'intention d'écrire un roman sur ce sujet impossible, la survie dans le ghetto et l'extermination des juifs. Né en 1926 dans une famille juive allemande, il a été déporté dans un ghetto en Ukraine pendant la Seconde Guerre Mondiale, avant d'émigrer en Palestine à la fin de la guerre, puis en France, aux États-Unis avant de revenir s'installer à Berlin en 1975.
C'est cette trajectoire de 1933 à 1949 qu'il raconte dans ce roman autobiographique publié en 1997, et traduit de l'allemand par Chantal Philippe pour les éditions le Tripode en 2017, par le truchement de son double, Ruben Jablonski.

La suite sur mon blog ici :
Lien : https://charybde2.wordpress...
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Je suis une grande fan d'Edgar Hilsenrath. J'ai tout lu à part Conte de la pensée dernière. Je viens de finir les Aventures de Ruben Jablonski et je dois dire que j'ai été un peu déçue.
Au niveau du style, je n'ai pas retrouvé la dynamique des précédents. Je ne sais pas si c'est dû à la traduction.
De plus, je trouve qu'on revit un peu trop à la fois le Nazi et le barbier, Fuck America et Nuit. Avec moins d'humour.
Dommage.
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De Edgar Hilsenrath, je n'avais rien lu. Après la lecture de celui-ci, je compte bien rattraper mon retard.

La vie d'un jeune garçon juif lors de la seconde guerre mondiale. Un destin singulier dans l'enfer collectif de l'Europe nazie.

En vous disant cela, je sais que j'évoque chez pas mal d'entre vous Primo Levi et Wladyslaw Szpilman. Ou encore Imre Kertetz. La distance que celui ci prenait sur les événements dans « être sans destin », se retrouve dans « les aventures de Ruben Jablonski ». Mais si l'auteur hongrois nous présentait les faits de manière presque clinique dans son sublime livre, noir et vénéneux, comme pour nous signifier que l'horreur n'a pas besoin que l'on argumente contre elle pour la condamner, Edgar Hilsenrath, lui, choisi le ton décalé, d'apparence légère et insouciante, beaucoup d'humour et un sens de la satire merveilleusement efficace.

Son odyssée, de 1933 à 1949, commence en Allemagne et se termine en route vers New-York. Entre temps il aura fuit l'Allemagne nazie, aura survécu au ghetto de Mogilev-Podolsk, et aura voyagé à travers la Palestine, d'un Kibboutz à Tel Aviv.

Son moteur ? Un appétit sexuel que rien ne semble assouvir, et la certitude d'être un écrivain, malgré les échecs successifs qui suivent chaque tentative de coucher sur le papier sa survie dans le ghetto. L'auteur passe du récit d'épisodes tragiques à ses préoccupations de jeune queutard avec une déconcertante facilité, dans une langue imagée et pleine d'humour qui nous oblige à nous accrocher au narrateur pour ne pas perdre le fil d'une vie menée à cent à l'heure.

Un roman initiatique où se mêlent humanisme et roublardise qui semblent bien être les deux facettes de cet auteur atypique.

Un grand coup de coup de coeur.
Lien : https://bonnesfeuillesetmauv..
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Contées à la manière de tribulations primesautières, on oublierait presque l'aspect tragique des aventures du jeune Jablonski.
Séparé de ses parents lors de la Seconde guerre mondiale, prisonnier puis libéré d'un ghetto, Ruben est réduit à la condition de vagabond à la recherche de sa famille et d'un meilleur destin. de l'Europe centrale détruite par la barbarie nazie aux déserts de la Terre promise, en passant par rues parisiennes, notre héros occupe milles emplois, s'initie à l'amour et se rêve écrivain.
Bien loin de son habituelle plume acide et son ton au vitriol, Edgar Hilsenrath choisit par contraste une voix truculente aux accents naïfs et guillerets pour raconter une Europe en ruine ainsi qu'un après-guerre encore plus incertain.
Si d'un point de vue littéraire, le style retenu semble en apparence plus fade, la lame de fond en est d'autant plus forte.
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Quand on aime on ne compte pas et Edgar Hilsenrarth sait conter des histoires terribles horribles mais si jouissives à lire car le ton peut être léger, coquin, cru, voir hilarant mais jamais sans impact sur le lecteur.
Ce périple de plusieurs années narre la vie d'un jeune garçon juif au sortir d'un ghetto après la seconde guerre mondiale.
Ruben cherche sa famille, l'amour et l'inspiration.
Lui qui a traversé tant de peurs réussit à rejoindre les siens en France, notamment son père perdu depuis 10 ans.
Et là subitement la dépression car il se cherche toujours le Ruben et tel un noyé il remonte à la surface et part vers les Amériques...
Les livres de Edgar Hilsenrarth me procurent un plaisir de lecture, les personnages pittoresques traversent la grande histoire, et me rappellent qu'il ne faut rien oublier.
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Ici l'auteur fait une synthèse des premières années charnières de sa vie avant d'arriver aux USA... on retrouve dans ce volume évidemment Fuck America et Nuit.
"Synthèse" correspond finalement bien au texte, car je l'ai trouvé un peu trop synthétique par rapport aux précédents. Beaucoup moins mordant. Les faits et gestes du quotidien extra ordinaire du personnage principal sont relatés avec une description un peu trop clinique à mon goût.
Il se lit toutefois avec quelques moments agréables et a le mérite de boucler la boucle. Mais on est un peu loin de la plume cynique, de l'humour noir et la tendresse si propre à l'auteur et dont on se délecte dans ses premiers romans.
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