Ce qui devait être une adaptation dessinée du roman du Buveur de
Hans Fallada s'est progressivement transformé en enquête lorsque
Jakob Hinrichs se heurta aux premières difficultés d'écriture. L'histoire semblait pourtant simple : Erwin devient alcoolo le jour où dans sa tête, ça commence à merder. En tant que lecteur, ça ne choque pas ; en tant qu'adaptateur,
Jakob Hinrichs s'est toutefois rendu compte qu'un truc clochait : Erwin devenait alcoolo beaucoup trop soudainement – sa chute précipitée et sans prodromes semblait artificielle, en quelque sorte éludée, comme si
Hans Fallada avait dû boucler l'ellipse temporelle au-dessus d'un certain nombre de faits trop importants pour être représentés. Jakob s'est donc intéressé de plus près à la vie de
Hans Fallada pour combler les failles et élucider les mystères de la ressemblance entre Erwin et Hans, ce qui expliquerait également certaines omissions narratives de l'histoire du Buveur. L'adaptation du roman devint ainsi l'histoire de l'écriture du roman dans ses correspondances avec la vie de
Hans Fallada. Comment se répondent l'aspiration au très haut et l'appétit pour la destruction ? Cette question, constitutive de l'espèce humaine, bénéficie d'une splendide mise en scène et narration.
« J'ai déjà tenu le fruit de mon travail entre mes mains, et me voilà pourtant ici seul et solitaire et je me suis encore une fois privé de tout ce à quoi j'étais parvenu. Quelque chose en moi n'a jamais été achevé complètement, quelque chose me manque qui fait que je ne suis pas un homme véritable, juste un être humain devenu vieux. »