"Si nous ne voulons pas laisser le monde sombrer dans le chaos, nous devons libérer l'amour qu'abrite le coeur de tout homme."
[Nikos Kazantzakis reçut le Prix international de la paix, ces mots font partie de son discours de remerciement.]
En songeant qu'elle était seule sur Spinalonga, Alexis se sentit gagnée par une vague de peur.(...)
Elle n'avait jamais connu un tel isolement, se retrouvant rarement à plus de quelques mètres d'un autre être humain et, à l'exception des moments où elle dormait, n'étant jamais privée de tout contact extérieur pendant plus d'une heure. Son absence d'indépendance lui apparut soudain comme une chaîne, et elle se secoua. (p.38)
- La solitude ne signifiait pas nécessairement être seul. On pouvait se sentir seul au milieu d'une foule
L'histoire de ta mère est aussi celle de ta grand-mère et de ton arrière-grand-mère. Ainsi que de ta grand-tante. Leur destin était entrecroisé... Elles illustrent à la perfection ce que nous appelons la fatalité, en Grèce. Celle-ci est bien souvent le fait de nos ancêtres, et non des étoiles. Lorsque nous évoquons l'Antiquité, nous nous reférons toujours au destin, mais nous ne parlons pas réellement d'une force incontrôlable. Bien sûr, certains évènements capitaux semblent se produire sans raison et bouleverser le cours d'une vie, mais,en vérité, notre destinée est déterminée par les actions de ceux qui nous entourent et de ceux qui nous ont précédés. (p.57)
Bien qu'à une centaine de kilomètres du cœur de l'action, les citoyens de Plaka s'appuyaient sur les rumeurs et les bribes d'information, apportées par le vent d'ouest tels des pétales de chardon.
Sophia s'était toujours montrée très secrète sur son passé, et au fil des ans sa discrétion s'était dressée comme une barrière entre elle et sa fille. Alexis voyait une forme d'ironie à ce que l'étude du passé fût à ce point encouragée dans sa famille et qu'on l'empêche d'examiner sa propre histoire à la loupe ; cette impression que Sophia dissimulait quelque chose à ses enfants teintait leurs relations de défiance. Sophia Fielding avait non seulement enterré ses racines mais aussi piétiné la terre qui les recouvrait.
Maria n’était pas l’unique amour de sa vie. Il ne croyait pas à une telle chose. Son expérience lui avait appris que l’amour était une commodité. et il croyait que ceux qui en étaient largement pourvus à la naissance en aurait toujours à donner à une autre femme.
(Les Escales, p. 263)
Mais pour tout te dire, j’ai l’impression que le destin en avait après toi, mais là je suis sûre qu’il est à court de munitions.
"Mettez deux Grecs ensemble et vous aurez une dispute."
Un vent automnal s'engouffrait dans les rues étroites de Plaka, et des bourrasques glacées enveloppaient la femme, engourdissant son corps et son esprit sans réussir à apaiser son chagrin. Comme elle peinait à parcourir les derniers mètres qui la séparaient de l'appontement, elle s'appuya de tout son poids sur son père. Sa démarche évoquait celle d'une petite vieille transpercée par la douleur à chaque pas. Une douleur qui n'était pas physique, cependant. Son corps était aussi robuste que celui de n'importe quelle jeune femme ayant respiré toute sa vie le pur air crétois, sa peau aussi lisse et ses yeux d'un marron aussi profond que toutes les habitantes de l'île.