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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce « petit traité de la consolation » est un grand livre que je recommande à ceux qui envisagent de mourir un jour et, beaucoup plus largement, à tous ceux dont la famille ou l'entourage sera visité un jour par Azraël, « l'ange de la mort ».

Conteuse merveilleuse, Delphine Horvilleur, a croisé Elsa Cayat, la psy assassinée de Charlie Hebdo, et Marc, son correspondant, Simone Veil et Marceline Loridan, les « filles de Birkenau », Yitzhak Rabin, mais aussi Moïse, Ilan Halimi, et des anonymes, Ariane, Isaac ou Sarah dont elle a présidé les cérémonies au cimetière, et Myriam, l'américaine qui a survécu à son inhumation new-yorkaise, et enfin son oncle Edgar, inhumé au cimetière alsacien de Westhoffen.

Onze chapitres qui révèlent une attention, une culture, une écoute, une intelligence et un humour extraordinaire enraciné dans une culture juive (et laïque) nourrie au quotidien de rencontres avec des personnes confrontées à la mort ou à un décès, les unes croyantes, voire pratiquantes, les autres agnostiques ou athées. Chacune avec ses doutes, ses espérances, sa foi, notamment quant à la vie post mortem et la résurrection.

Onze contes autobiographiques complémentaires et différents sur la mort, mais surtout sur la vie, qui interpellent chacune et chacun, dans une langue simple, portée par une personne bienveillante qui a l'humilité de partager ses doutes et la charité de proclamer sa foi.

« J'ai compris que l'élève-rabbin que j'étais ne remettrait plus jamais en doute la possibilité de la résurrection, puisque j'en avais été le témoin » affirme t-elle. le chrétien (que je suis) croit en la résurrection des morts et en la vie éternelle. Lecteurs de la Bible, et notamment du Deutéronome, (30:19) nous partageons le même verset « J'ai placé devant toi la vie et la mort, dit l'Eternel. Et toi, tu choisiras la vie ! ».

Un paradis où ne serait pas Delphine Horvilleur ne me semble pas concevable et j'espère avoir le plaisir de la rencontrer avant, en ce bas monde, devant un verre de Kirsh alsacien, pour proclamer ensemble « A la vie ! » … « LeH'ayim ! ».

PS : ma lecture de "Un temps pour mourir"
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Qui m'aurait dit que moi, la laïque, je me passionnerais pour le livre d'un rabbin, ce rabbin fût il une rabbine, vive, spirituelle, archi cultivée et d'une tolérance, d'une ouverture d'esprit sans pareille ?

Sitôt refermé, j'ai déjà envie de relire le magnifique livre de Delphine Horvilleur auquel je ne cesse depuis quelques jours de revenir, où je puise une sagesse qui m'apaise, un humour qui me titille les zygomatiques, une connaissance qui m'enrichit et une espérance dont j'ai le plus grand besoin.

Bref, Vivre avec nos morts au titre oxymorique, est devenu mon livre de chevet !

Delphine Horvilleur se veut avant tout conteuse, "pour que la porte reste ouverte" entre morts et vivants.

Elle passe le mot, explique le rite, noue L Histoire à la sienne, à celle des grands défunts qu'elle a connus, et à celles des défunts plus obscurs, plus modestes qui eux aussi ont des choses à raconter elle relie le monde des morts à celui des vivants avec tous les ponts possibles, le sens d'un mot hébreu, un passage de la Bible ou de la Torah, l' attentat de Charlie Hebdo qui fut un séisme pour tous, un évènement individuel mais exemplaire (une mort "injuste", une maladie brutale et sans pitié) , jusqu'à celui, inattendu, des blagues juives les plus savoureuses.

Elle fait flèche de tout bois et ce faisant construit une arche d'alliance entre notre peur viscérale de la mort et notre réflexe vital parfois aveugle. Elle nous rend plus forts, plus lucides mais aussi plus libres et plus joyeux.

Je vous laisse découvrir ce voyage pendulaire entre deux mondes et son parcours si judicieusement maîtrisé. En découvrir les étapes serait enlever du charme à votre lecture et je m'en voudrais de trahir le merveilleux talent de la conteuse !

Sachez seulement qu'en hébreu "cimetière" se traduit par "jardin des vivants" et que le toast fameux "leHaïm" à la vie est en fait un pluriel, "Aux vies !"

Nous avions plusieurs vies et ne le savions pas ! le livre de Delphine Horvilleur nous en donne le goût et la saveur avec une science pleine de tendresse et de malice !
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Elsa Cayat, la psychiatre assassinée de Charlie Hebdo, et Marc, avec qui elle devait publier un livre. Simone Veil et Marceline Loridan, les filles de Birkenau. Yitzhat Rabin, homme d'État israélien, prix Nobel de la paix, assassiné en 1995. Ilan Halimi, séquestré et torturé en 2006 parce que juif. Mais aussi Moïse et Azraël, l'ange de la mort. Des anonymes, Sarah, Isaac et Myriam, l'Américaine obsédée par l'organisation de ses propres obsèques. Des proches, comme son amie Ariane et son oncle Edgar. Tous, en croisant, à l'occasion de leur mort ou par leur lien particulier à la mort, le chemin de l'auteur dans ses fonctions de rabbin, lui ont inspiré les onze chapitres de ce livre placé sous les auspices d'un oxymore.


Rares sont les ouvrages qui impressionnent autant par l'aura de leur auteur, et qui vous vont droit au coeur par l'humanité qu'ils dégagent. Delphine Horvilleur n'est pas seulement cultivée. Elle possède le don de rendre ses connaissances accessibles en toute simplicité, dans une narration piquante et pleine d'humour, où ne manquent même pas quelques savoureuses blagues juives. C'est avec un intérêt émerveillé que l'on découvre la richesse de ses réflexions, nourries de son exégèse de textes sacrés, d'explications de rites et de traditions, mais aussi de sa formidable expérience humaine. L'on ne peut qu'être frappé et totalement séduit par l'ouverture d'esprit, la capacité d'écoute et la sincère bienveillance dont témoignent ces pages, où chacun, athée ou de quelque religion qu'il soit, trouvera son compte.


Car, face à notre condition humaine et à notre finitude, il n'est question ici que de la manière dont, en toute humilité, l'auteur rabbin tente d'accompagner les vivants dans leur douleur et leurs questionnements sans réponse, avec pour seule certitude que notre passage se nourrit de l'héritage personnel, culturel et historique laissé par les générations précédentes, et nourrira de la même façon les générations à venir. Mort et vie s'entremêlent ainsi constamment, et il nous faut bien apprendre à faire une place à nos fantômes personnels pour continuer à faire en paix notre bout de chemin.


Un livre universel, profondément humain et merveilleusement écrit, qui fait chaud au coeur par la qualité de la rencontre qu'il permet avec son auteur. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Dans son travail d'accompagnement des défunts et de leurs proches, Delphine Horvilleur, femme rabbin de tendance libérale, côtoie la mort comme une vieille connaissance, sans pour autant s'habituer à sa présence. Paradoxalement, cette "proximité" a pris un tour particulier avec la pandémie de Covid-19, au cours de laquelle elle s'est vue contrainte de célébrer des cérémonies funéraires par téléphone, à distance. Ses réflexions sur la mort ne datent cependant pas de cette actualité, elles sont antérieures : pourquoi passe-t-elle donc tant de temps dans les cimetières ?

Delphine Horvilleur nous fait part de son questionnement, de son cheminement, à travers onze chapitres, autant de récits sur la manière dont elle accompagne les morts et tente de réconforter les endeuillés. Il y est question de personnalités connues (Elsa Cayat, la "psy de Charlie", Marceline Loridan-Ivens, Simone Veil) ou anonymes, de personnes qui lui sont inconnues et d'autres chères à son coeur.

Toujours elle écoute et fait parler les proches à propos du défunt, pour pouvoir ensuite leur conter, leur donner à entendre l'histoire de celui-ci d'une manière inédite pour eux, pour retisser les fils de son histoire désormais cassée, leur livrer un récit qui leur permettra peut-être, si pas d'accepter, au moins de donner un sens à cette mort ou plutôt à cette vie arrêtée, pour qu'eux-mêmes retrouvent le sens, le fil de leurs propres vies, pour qu'ils puissent vivre avec cette mort. Elle nous livre aussi ses réflexions plus personnelles sur son parcours, ses propres fantômes, les non-dits de son enfance, et se fonde très souvent sur l'exégèse des textes sacrés, sur l'étymologie et la traduction des mots, sur la tradition juive, pour essayer de comprendre le sens de la vie et de la mort, puisque celles-ci sont inextricablement liées.

En plus d'être très instructif pour ceux qui (comme moi) ne sont pas croyants ni familiers du judaïsme, et intellectuellement passionnant, "Vivre avec nos morts" révèle une conteuse hors pair et une personnalité d'une intelligence très fine et d'une grande ouverture d'esprit, érudite, sensible, à l'écoute, bienveillante, humble ("les rabbins n'ont pas plus de réponses que les autres. Parfois, juste un peu plus de questions"), et dotée d'un humour salutaire. Ce texte, d'une profonde humanité, est très enrichissant, souvent poignant, émouvant mais sans pathos. Il est aussi un hommage au langage et au pouvoir du verbe consolateur.

Un livre lumineux et une lecture réconfortante, ou l'inverse, merci Madame Horvilleur.

En partenariat avec les Editions Grasset via Netgalley.

#Vivreavecnosmort #NetGalleyFrance
Lien : https://voyagesaufildespages..
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Delphine Horvilleur est une femme rabbin dont la mission est d'accompagner les endeuillés. Une tâche qu'elle nous raconte avec la culture et le sens de l'humour profonds qui sont les siens à travers l'histoire de familles célèbres ou pas qu'elle a assistées dans le deuil. Une façon bien à elle de nous parler de la mort, la notre et celle de nos proches, qu'elle dit impossible à apprivoiser, même pour elle qui la côtoie si souvent, mais qu'elle nous aide (si toutefois c'est possible) à approcher plus sereinement. Et c'est là l'immense force de Delphine Horvilleur : nous donner une perspective acceptable. Nous suggérer qu'emportant nos morts partout avec nous, la vie et la mort ne sont pas hermétiquement séparées. Nous sommes les maillons d'une chaîne, et croyant ou non, par nos enfants, après que nous avons disparu, nous demeurons une histoire à suivre...
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J'ai ressenti comme un sentiment de résonance étrange à la lecture de « Vivre avec nos morts », le superbe essai de Delphine Horvilleur. Au-delà du contenu du livre, c'est surtout une forme de proximité avec l'auteur qui ne laisse pas de me surprendre : nous sommes nés dans la même ville, Nancy, elle est de deux ans ma cadette, son grand-père s'appelle Isidore comme le mien. Et même si, précisons-le tout de suite, je ne suis ni juif, ni rabbin, nous partageons également une ascendance juive, qui a traversé cette tentative inouïe d'extermination de tout un peuple que l'on désigne par le terme biblique d'Holocauste.

« Vivre avec nos morts » est l'essai d'une femme rabbin, qui pour avoir officié maintes fois lors de cérémonies funéraires, en y récitant notamment le Kaddish, pour avoir accompagné de nombreuses familles dans l'exercice du deuil, se propose de partager les enseignements qu'elle a tirés de son expérience au travers de ce « Petit traité de consolation ».

Les premiers chapitres évoquent les funérailles de personnes célèbres, lors desquelles Delphine Horvilleur a officié. L'auteure revient ainsi sur l'enterrement de la psychiatre Elsa Cayat, chroniqueuse à Charlie Hebdo, lâchement assassiné le 7 janvier 2015, ainsi que sur celui de Simone Veil, une « fille de Birkenau », qui a échappé de peu à la solution finale, pour s'éteindre en 2017, achevant ainsi un destin hors du commun.

Au fur et à mesure que l'auteure déroule son essai, le texte se fait plus intime, nous narrant l'histoire touchante d'un quidam qui assiste seul à l'enterrement de sa mère ou l'agonie d'une amie proche. L'auteure réussit le tour de force de nous donner, sans avoir l'air d'y toucher, un accès à la manière dont le judaïsme aborde la mort, à l'ambiguïté qui entoure la possibilité de la résurrection, ainsi qu'à la beauté et à la profondeur d'une langue aux interprétations multiples : l'hébreu. Cette appréhension du mystère de la langue hébraïque m'a rappelé les très beaux écrits d'Erri de Luca sur le sujet, que l'on retrouve notamment dans « Première heure » où l'auteur agnostique, aborde, au lever du jour, les textes de la Torah en hébreu, et partage son interprétation lumineuse des extraits bibliques qu'il s'efforce de déchiffrer.

Outre la confrontation avec l'au-delà qui est au coeur de l'ouvrage, Delphine Horvilleur, nous propose par petites touches, à la manière d'un peintre impressionniste, d'appréhender la religion juive. Elle nous rappelle avec talent l'humour, les rites, les traditions ainsi que le goût infini de la dispute, que l'on retrouve dans le Talmud qui sont autant de « marqueurs » du judaïsme.

Elle nous livre ainsi une « blague » typique de l'humour juif qui m'a fait rire aux éclats :
« Deux rabbins sont à l'arrière d'un taxi à New York. L'un dit à l'autre : « je suis petit et médiocre. Je suis inexistant. » L'autre renchérit : « Quant à moi, je suis poussière de poussière, fumée inconsistante, informe et ridicule. » le chauffeur de taxi se retourne vers eux et s'exclame : « Mais enfin, Messieurs les grands rabbins, si avec votre sagesse, vous êtes poussière et fumée, alors moi, je suis un néant de néant, un déchet minable, un résidu... » Les deux sages se tournent immédiatement l'un vers l'autre et disent : « Non mais, pour qui se prend-il, celui-là ? »

L'auteure revient également sur cette coutume juive qui veut que lorsque l'on construit sa maison on laisse volontairement un défaut, une fissure, une trace d'incomplétude, qui est une manière de se souvenir de ceux qui ne sont plus là, ainsi qu'un rappel de la fragilité de toute chose, dont la destruction du Temple de Jérusalem fut l'emblème le plus douloureux. En lisant ces phrases, je me suis rappelé ces mots que me disait ma grand-mère polonaise : « on finit sa maison, et puis on meurt ». Je n'avais jamais compris le sens profond des paroles de mon aïeule, et des années plus tard, je viens seulement d'en saisir toute la symbolique.

Le livre de Delphine Horvilleur n'est pas seulement « un petit traité de consolation » nous relatant les enseignements d'une femme rabbin, que sa fonction place régulièrement au contact de la disparition des corps, il est aussi et surtout une manière d'appréhender la richesse et la complexité du judaïsme, un mot désignant tout à la fois un peuple, une religion et une manière d'être au monde.
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« L'histoire de deux rescapés des camps qui font de l'humour noire sur la Shoah. Dieu qui passe par là, les interrompt : Mais comment osez-vous plaisanter sur cette catastrophe ? Et les survivants de lui répondre : Toi tu ne peux pas comprendre, tu n'étais pas là ! ».

Une blague juive que se racontaient souvent Marceline et Delphine. Marceline, prénom inséparable de celui de Simone. Deux rescapées qui ont incarné pour Delphine Horvilleur, la possibilité de reprendre la parole, de dire sans gêne non seulement ce qu'elles avaient vécu mais ce que chacune d'elles avait choisi d'en faire. Mais pour nous aussi, elles sont une référence, un symbole pour la condition féminine sans oublier qu'elles ont été « les filles de Birkenau ».

Dans cet essai d'une infinie portée philosophique sur notre finitude, Delphine Horvilleur se métamorphose en conteuse lumineuse pour mieux nous faire pénétrer le sens de la parole qui console les endeuillés, le Verbe créateur, l'importance du choix des mots, une attention toute particulière à la réception de la douleur de l'affligé. En sa qualité de rabbin, elle accompagne les endeuillés et son essai compte onze chapitres, onze histoires différentes mais qui relatent tous une manière d'approcher la mort, une façon de lui donner du sens nous qui fuyons aujourd'hui la mort comme si ne pas en parler l'écartait de nos vies, comme l'histoire de Myriam, américaine, dépressive, qui ne cessait d'organiser ses obsèques sans omettre jusqu'à la couleur des fleurs. Myriam dont un imprévu lui a joué un tour. Son histoire est surprenante !

L'auteure évoque aussi bien des anonymes que des personnalités qui se sont retrouvées confrontées au mystère de la mort et à chaque fois, elle sait s'adapter à ses interlocuteurs. Elle a une écoute de qualité qui lui permet d'entendre ce que les endeuillés ne disent pas. Elle nous décrit son expérience toute en délicatesse, c'est simple, fluide, apaisant. Je ne sais pas si cet essai peut consoler une personne qui est terrassée par la douleur de la perte, mais c'est un récit qui fait du bien dans ce monde de brutes !

Delphine Horvilleur est issue d'une famille paternelle juive d'Alsace-Lorraine et d'une famille maternelle originaire des Carpates. Son grand-père Alsacien était rabbin mais il était très attaché à l'esprit Républicain ce qui lui fait dire qu'elle est un rabbin laïc. Elle appartient à l'organisation juive libérale « Mouvement juif libéral de France » et « Union Libérale Israelite de France ».

Après avoir étudié la médecine en Israël, puis passée au journalisme, elle intègre le séminaire rabbinique libéral de New York avant de revenir en France.

Jeune femme qui écrit avec son coeur, elle possède les qualités indispensables à un rabbin. La délicatesse se dégage de son écriture. Il y a de très belles pages où affleure son empathie. A la fois femme et rabbin, mère de famille, c'est d'abord la « Vie » qu'elle honore. Elle nous offre une réflexion d'une grande profondeur sur ses rencontres avec les endeuillés mais elle nous expose, de façon très intelligente et avec beaucoup d'humilité, maniant l'humour, ses questionnements, ses doutes. de ses confidences suinte une pointe de mélancolie (elle est ashkénaze). Elle relate avec beaucoup d'émotion contenue mais qui m'a gagnée, l'assassinat d'Yitzhak Rabin, ce jour maudit où sa vie a basculé avec ces quatre mots en hébreu prononcé à la radio :

« Memshelet Israël modia betadhema… »

« le gouvernement israélien annonce avec stupeur »…..la mort de son Premier ministre.
A la radio, des hurlements couvrirent sa voix. Les nôtres stoppèrent la voiture, au bord d'une route, tout près d'un village nommé Motza. C'est là, à Motza, ce lieu qui en hébreu signifie « l'issue » que pour moi, il est mort. Ni sur une place de Tel-Aviv, ni à l'hôpital où il fut transporté, mais sur une colline de Jérusalem, au bord d'un village. Mon rêve a cessé de respirer et avec lui mon amour. Mon sionisme s'est trouvé dans une impasse, au point mort. »

Dans cet essai philosophique, l'auteure entremêle la philosophie, l'humour juif et ce que j'ai apprécié, l'exégèse des récits religieux qu'elle sait parfaitement rendre accessible à tout lecteur. L'Hébreu à ceci de passionnant, qu'en fonction de la place de la lettre hébraïque, le mot change de sens et nous pénétrons ainsi dans une pluralité d'interprétations.

L'expérience de Delphine Horvilleur s'adresse à toute personne qu'elle soit athée, agnostique, croyante et de toute confession. Cet ouvrage est riche d'enseignement sur la Tradition Hébraïque mais aussi sur la Vie. Il nous réconcilie avec nos fantômes et nos démons. En terminant cette lecture, j'ai eu le sentiment d'avoir vécu un grand moment de Paix. Je n'ai pas ressenti la présence d'Azraël mais plutôt celle de la lumière de Mikhaël

« Les juifs prennent très au sérieux un verset de la Thora, formulé dans le livre du Deutéronome, sous la forme d'un ordre de divin : j'ai placé devant toi la vie et la mort, dit l'Eternel. Et toi, tu choisiras la vie !. Alors pour prouver qu'ils appliquent le Commandement à la lettre, ils la convoquent en toutes circonstances.

LeH'ayim « A la Vie ».
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"Il est mort". Non pas "Il est parti..." ou "Il nous a quitté..." mais "Il est mort". Et si nous apprenions enfin à apprivoiser ou plutôt à réapprivoiser cette mort tabou que plus personne ne veut voir?
Quand vous perdez un être cher, la société et même votre entourage vous octroient un temps de chagrin raisonnable. Au-delà de ce délai, vous êtes invité à ”faire votre deuil” et à rejoindre le monde qui, pendant ce temps suspendu, a continué sans vous. Cette opposition des vivants et des morts et très forte dans nos civilisations occidentales. Là ou d'autres cultures installent des autels dédiés aux ancêtres dans leur salon, nous, occidentaux apeurés, envoyons nos mourants à l'hôpital pour éviter à la grande faucheuse de franchir le seuil de nos maisons.

Et pourquoi pas ”Vivre avec nos morts”? J'aime ce titre de Delphine Horvilleur qui sonne comme la promesse d'une réconciliation, d'une harmonie enfin trouvée. Vivre avec nos morts, oui, et plutôt qu'en avoir peur, leur faire une place dans nos vies, eux qui peuvent tant nous apprendre encore. Car des morts, nous en avons tous et Delphine Horvilleur n'en oublie aucun. Bien sûr, il y a ceux que nous avons tant aimés, ceux dont l'absence est un grand vide qui nous attire parfois jusqu'au vertige. Mais il y a aussi ceux que nous n'avons pas eu le temps ou pas pris la peine de connaître, ceux  qui n'avaient de ”proche” que le nom. Et puis tous ceux qui nous ont précédé, la foule des ancêtres que nous ne connaissons que par les petites anecdotes que l'on raconte à leur sujet, les héros de guerre, les originaux, les féministes de la première heure, etc. Ceux-là sont morts depuis bien longtemps pourtant nous aurions tant voulu les connaître. Trouver en eux cette part intime qui résonne en nous et dont nous nous sentons les héritiers.

Ni compliqué ni triste, mais d'une infinie tendresse, ce petit essai sur la mort est avant tout un grand livre sur la vie. Regroupant plusieurs témoignages, y mêlant son propre ressenti, Delphine Horvilleur nous accompagne dans notre chemin d'acceptation de la mort, la nôtre et celle de ceux que nous aimons. Nul besoin d'être un endeuillé de fraîche date pour en apprécier le message. Et nul besoin non plus d'appartenir à une quelconque religion. Car si Delphine Horvilleur est rabbin, elle ne fait aucun prosélytisme et reste ouverte à tous. Bien sûr, il y a des références au judaïsme, d'ailleurs très éclairantes pour celles et ceux qui ne connaissent pas ou peu cette religion, mais ces références sont allégées par des blagues typiquement juives qui m'ont bien fait sourire.
"C'est tellement mystérieux le pays des larmes"... Remercions Delphine Horvilleur, "Petit Prince" des endeuillés qui sait si bien nous montrer les étoiles et nous faire rire là où nous ne faisions que pleurer.

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Parler de la mort, c'est aussi parler de la vie. J'avoue l'avoir oublié quand j'ai reculé devant le thème de Vivre avec nos morts. Un sujet dans lequel je n'avais pas envie d'entrer. Erreur réparée grâce à une amie qui m'a prêté le livre.
Le rôle d'un rabbin, c'est officier, accompagner et enseigner, mais c'est aussi raconter des histoires qui ouvrent un passage entre les vivants et les morts.
Un rôle parfaitement illustré par les paroles de Delphine Horvilleur à l'enterrement d'Elsa Cayat, psychanalyste assassinée le 7 janvier 2015 (attentat contre Charlie Hebdo).
Elle parle de Marceline et Simone, deux femmes aux antipodes l'une de l'autre, mais unies par leur statut de rescapées des camps et par leurs engagements.
Et de tellement d'autres choses
L'auteur partage un peu de la sagesse juive. Et peu importe la confession à laquelle on appartient (voire aucune), ce livre touchera beaucoup de gens.


Lien : https://dequoilire.com/vivre..
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Quelle merveille !!!
Ce livre est une merveille d'humanité, d'érudition, d'humour et d'intelligence.
J'en ressors incroyablement enrichi. Je ne suis pas juif et je suis athée mais l'interprétation et la mise en récit, cela a été longtemps mon métier. Tout comme l'écoute des endeuillés.
Delphine Horvilleur ,rabbin libéral, bien connue des médias est une conteuse hors pair.
En 222 pages lumineuses nous apprenons à mieux la connaître, à comprendre comment elle accueille les demandes de Kaddish, comment le recours au texte est bouleversant de sens et comment elle «retricote le panier »de l'histoire du défunt.
Cette éblouissante narrativité nous fait découvrir l'histoire d'Elsa , de Sarah,de Marc, de Marcelline , d'Ariane ( qui m'a beaucoup ému), de Myriam et de Delphine elle-même.
Elle nous livre simplement, clairement sa relation à la laïcité ( dont elle donne une définition géniale)au sionisme, à la résurrection(!), à la révélation ( ah comme elle parle de Moïse, un régal)et bien sûr de l'accompagnement de fin de vie et de l'enterrement et de ses rituels.
Elle nous dit tant d'autres choses qui peuvent résonner différemment à l'intérieur de chacun d'entre nous.
Mais il faut lire, ne pas trop en dire.
«LeH'ayim », « À la vie! » conclue t'elle en levant son verre !!
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