Ce volume d'essais, d'entretiens et d'articles, reprend pour partie les précédents recueils intitulés
Interventions,
Interventions 2, et
Lanzarote et autres textes. La seconde moitié du livre contient d'autres proses du même genre, mais publiées de façon dispersée dans la presse, de là sans doute l'impression de désordre que des lecteurs peu habitués aux recueils d'essais (dont la forme fouillis vient de
Montaigne) ont pu ressentir.
Les textes que j'ai découverts ont été écrits entre 2003 et 2019, et ils permettent de constater que le Milieu, éditeurs, écrivains journalistes, et autres figures connues des médias et de Babelio, continuent de parler à
Michel Houellebecq, qui consent lui-même à leur répondre. Pourtant il n'a pas les opinions qu'il faut, mais il n'a pas été éliminé de la scène, grâce au succès de ses livres et aussi, peut-être, à ses dons diplomatiques. La "cancel culture" (oui, on appelle cela culture) ne l'a pas atteint, bien qu'il ait été classé par
Edwy Plenel, Lindenberg,
Assouline, Joffrin etc, parmi les néo-réactionnaires. On s'attendra donc à des propos nauséabonds.
Pour ce qui est du contenu, l'impression de variété, ou de fouillis, n'est qu'apparente, car le dernier essai du livre, sur la mort de
Vincent Lambert, résume bien les idées fondamentales de l'auteur sur l'homme, la morale et la société, rédigées dans un style sobre et sans nulle confusion. Son esthétique apparaît bien dans un essai déjà ancien (1992), "
Jacques Prévert est un con", réédité au début du volume. Entre ces deux termes, on s'intéressera aux effets de sa formation scientifique sur sa vision du monde et de la littérature. La philosophie d'
Auguste Comte revient souvent, et a laissé une profonde marque sur la pensée de l'auteur. On n'oubliera pas que
Michel Houellebecq est un artiste qui a lu toute sa vie (c'est le titre d'un des essais) : ses jugements littéraires, ses goûts, se discutent, et sont toujours intéressants, car il ne se laisse pas abuser par les fausses gloires mal acquises.
On retrouve ici une personnalité d'écrivain, mais non le plaisir que procurent la forme, le style, l'imagination romanesques ; de là viennent sans doute les réserves de
Michel Houellebecq lui-même à l'égard de son propre livre.