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Critique de berni_29


Les Contemplations, c'est un recueil de poèmes aussi énorme que son auteur, Victor Hugo.
Tout y est un peu versé pêle-mêle, l'adolescence, l'amour, l'exil, la séparation et la mort. La vie, quoi ! Y a-t-il une logique dans ce vacarme ? Sans doute aucune à nos yeux, il faut tout prendre comme cela, en vrac, comme une vague. Faut-il questionner la vague lorsqu'elle nous surprend au bord du rivage ou sur la pointe d'un récif ?
Il y a plusieurs livres dans ce livre. Nous sommes là à déplier ceux-ci les uns après les autres, parfois comme des poupées gigognes. S'il me fallait donner une définition de la poésie, ce serait quelque chose avec les mots qui est plus grand que nous et qui nous grandit en même temps. Victor Hugo est incontestablement plus grand que nous et il nous entraîne dans son sillage à aimer le ciel et la terre, nous y vautrer dans une joie folle et pure, à aimer aussi d'autre poètes plus grands que nous. Ses vers nous font la courte échelle pour nous aider à atteindre les cimes. La générosité d'un poète est de nous faire toucher les étoiles. Alors nous tentons de hisser nos bras, nos yeux jusqu'à ce ciel éperdu où gisent la joie et la douleur. Les poètes aiment et pleurent.
Les Contemplations forment un temps très long dans la vie de Victor Hugo, celle-ci est d'ailleurs fort longue. Nous le voyons grandir et nous en faisons tout autant en le suivant pas à pas, dans ce voyage qui semble respecter une certaine chronologie. Il y a l'exil là-bas à Guernesey, si loin de tout, mais si près des siens. Au milieu, c'est-à-dire quasiment entre les deux grandes parties qui composent l'ouvrage, Autrefois et Aujourd'hui, il y a cette date du 4 septembre 1843, la mort de sa fille Léopoldine et ce poème Demain dès l'aube.... D'ailleurs cette date commémorative du 4 septembre reviendra souvent dans le recueil. Je ne saurai dire si c'est le plus beau poème du recueil, incontestablement c'est celui qui touche l'âme, nous fait vaciller, c'est mon préféré. Pour une fois le poète n'est pas si grand ou alors c'est nous qui le devenons, puisque brusquement nous sommes capables de l'étreindre à hauteur d'homme tout contre nous dans sa douleur, étouffer ses sanglots et les nôtres en même temps. Puis, le chemin continue, nous lui lâchons la main, il est déjà très loin alors que nos bras sont encore ballants. Hugo tutoie la terre et le ciel, Dieu, les hommes et leur itinéraire. Nous pouvons être profanes et trouver tour à tour tout cela grandiloquent, excessif, puissant et tout simplement grand. Mais dans l'exil, la séparation ou lorsqu'il effleure la mort de ses doigts d'ogre, Victor Hugo ressurgit par la joie. C'est sa force, sa bouée de sauvetage. Il souffre pourtant, sa vie est une tragédie. Les Contemplations crient cela, entre soleil et ténèbres, le répètent inlassablement presque comme une psalmodie. Dans l'exil pour Jersey et Guernesey, Victor Hugo emporte dans ses valises les siens, sa femme, ses enfants, sa maîtresse Juliette Drouet qui logeait à quelques distances de la demeure familiale. La légende dit que tous les matins Victor Hugo sortait nu sur son balcon et Juliette Drouet le contemplait, émerveillée en face à quelques encablures, depuis sa fenêtre. Sa fille Léopoldine est aussi du voyage, bien que morte sept ans plus tôt, mais les ogres emportent tout sur leur passage. Comment pourrait-il l'oublier, sa chère enfant, sa chair aussi ? Comment pourrait-elle être absente ? Là-bas, elle fera tourner les tables...
Dans cette cacophonie lyrique, que faut-il retenir, s'il fallait emporter un seul regard, un seul geste, avant de nous laisser emporter par la dernière vague ? Je me suis souvent interrogé sur ce titre, les Contemplations. On finit par l'oublier tant le souffle du dedans est grand. Le mot renvoie au templum latin, espace carré que les augures délimitaient dans le ciel et sur terre pour y observer les signes susceptibles de constituer des présages. Lire, c'est aussi contempler...
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