« L’objet propre de la religion est de régler l’esprit des hommes, d’adoucir leurs mœurs, d’inspirer l’esprit de tempérance, d’ordre et d’obéissance. » Or l’expérience prouve le contraire. L’intransigeance, si naturelle aux dévots, les engage dans des querelles et des guerres où le fanatisme justifie toutes les persécutions.
Le monde est contingent (non nécessaire) : il ne porte pas en lui la raison ou la cause de son existence. Chaque chose créée requiert une cause extérieure qui la fait exister telle qu’elle est. Par conséquent, ou bien on remonte la série infinie des causes et des effets sans jamais parvenir à un terme ultime, ou bien on rattache l’ensemble de la chaîne à un principe premier et incréé dont l’existence est nécessaire. La première hypothèse doit être écartée, car elle reviendrait à admettre que l ensemble du système est sans cause. Il ne reste donc que la seconde.
« L’expérience nous fait aussi connaître des systèmes parti-culiers de pensée et de matière qui n’ont aucun ordre ; cela est occasionné dans la première par la folie, dans la seconde par la corruption. »
Tous les sceptiques prétendent que la raison envisagée d’une manière abstraite fournit des arguments insolubles contre elle-même, et que nous ne pourrions jamais asseoir quelque conviction ou certitude sur aucun sujet si les raisonnements des sceptiques n’étaient pas, par leur trop grande finesse et subtilité, incapables de contrebalancer les arguments plus solides et plus naturels que nous tirons des sens et de l’expérience. Mais il est évident que, dès que nos arguments perdent cet avantage et s’écartent des routes de l’expérience ordinaire, alors les principes subtils du scepticisme peuvent les égaler, les arrêter et les contrebalancer. Les uns ne peuvent l’emporter sur les autres : l’esprit reste en suspens entre deux, et voilà le véritable équilibre ou la balance qui fait le triomphe des sceptiques.
Tout ce que nous concevons comme existant, nous pouvons aussi le concevoir comme non existant. Il n'y a donc pas d'être dont la non existence implique la contradiction. En conséquence, il n'y a pas d'être dont l'existence soit démontrable.
Nous saurons bientôt si votre scepticisme est aussi général, aussi sincère que vous voudriez nous le faire croire : la compagnie va se séparer ; nous verrons alors si vous sortirez par la porte ou par la fenêtre ; nous verrons si vous doutez de bonne foi que votre corps suive les lois de la gravitation ou puisse être lésé par une chute, d’après l’opinion vulgaire, produite par nos sens qui sont trompeurs et par l’expérience qui l’est encore plus.