VOICI VENIR L'ANYO ONSHI !!! le scénariste
Youn In-Wan et le dessinateur
Yang Kyung-Il ont voulu réaliser un "
Berserk" coréen, et ils ont été à deux doigts d'être au niveau de l'oeuvre d'exception de
Kentaro Miura qui a fait et fait toujours référence dans l'univers du manga fantasy…
L'univers relève de la supracoolitude !
On a d'un côté une Europe steampunk, et d'un autre côté une Asie dark fantasy, du coup on assiste à des rencontres et à des affrontements entre guerriers, magiciens, pistoléros et artistes martiaux, ce qui donne parfois un côté western post-apo à la Hokuto no Ken avec guns, épées et karaté !!! L'essentiel de l'action se déroule dans le Royaume du Jushin, alter ego fantasmé de la Corée qui puise dans son histoire, ses contes, ses légendes et ses mythes... (et pour ne rien gâcher le scénariste nous explique en appendices le pourquoi du comment de leurs détournements ^^)
L'histoire relève de la supracoolitude !
Pour commencer des auteurs vont la part belle aux héros biclassés espions / justiciers propres à l'histoire coréenne. Les mêmes causes produisent les mêmes effets : on avait les mêmes dans l'Empire perse (les Yeux et les Oreilles du Roi), l'Empire byzantin (les Agentes in Rebus) et l'Empire carolingien (les Missi Dominici). En leur offrant carrément un habillage tokusatsu (à la Powers Rangers pourrait-on dire pour les néophytes ^^), nous entrons dans le domaine de la supracoolitude (quel dommage que les guerriers fantômes n'aient pas été explicitement les âmes perdus de ses compagnons disparus, la touche moorcockienne aurait alors été parfaite !)…
Mais ce n'est qu'un début : les petits gens qui ne connaissent le héros ni d'Eve ni d'Adam l'accueille à bras ouvert, tandis que les grands qui semblent tous le connaître l'accuse de haute trahison… Que s'est-il passé pour qu'il en arriver là ? Nous découvrons petit à petit sa véritable identité et son véritable objectif, ainsi que sa relation avec le défunt Roi du Jushin… Et derrière une histoire de vengeance d'anthologie, les auteurs nous offrent les remakes et/ou les détournements des classiques de la culture populaire coréenne, du coup on se retrouve avec les équivalents asiatiques des Contes de Perrault ou de Grimm, mais à la sauce Dark Fantasy ! Oh Yeah !!!
Les personnages relèvent de la supracoolitude !
Mun-su, qui ressemble pas mal au personnage principal de la série Island des mêmes auteurs, est terriblement badass : il est même au top du top des personnages manga/anime les plus badass de tous les temps ! A ses côtés Chun-Hyang, sa garde de corps surpuissante dont la timidité n'a d'égale que les compétences martiales hors du commun, puis l'Ecuyer, le petit gros sans pouvoir ni expérience mais dont la volonté est sans égale… Puis Wonsul le bretteur maudit, Mito le général magicien, Yonsil le champion de Taekwondo, Ulpaso le pistoléro rigolo, Teyu l'épéiste manchot qui s'essaye à la sorcellerie, Marlène von Lucida l'escrimeuse anglaise, Miss Fang la justicière féministe… et dans le camp des méchants c'est bien fourni aussi : chacun des personnages principaux ou secondaires de cette série a largement les épaules pour porter sa propre série !
Mieux Mun-su qui a renoncé à tout pour repartir de zéro, accusé d'avoir trahi son pays et tué sa bien-aimée et qui parcourt des jeunes royaumes en ruines poursuivi par une terrible maladie qui l'affaiblit… Il ne vous rappelle personne ? si, si, cherchez bien… Elric de Melniboné ! Oh Yeah !!! (du coup sa némésis Ajite officie carrément en tant que sosie du dieu-démon Arioch ! ^^)
Mais il y a quelques trucs qui tirent un peu l'ensemble vers le bas…
- le comic relief ça va, l'humour cartonnesque ça va, mais des fois ça jump the shark et bonjour les dégâts surtout quand la transition entre l'épique et le comique est abrupte… Encore que, tout cela c'est quand même un peu les goûts et les couleurs, toutefois il y a un truc vraiment enquiquinant mais assez difficile à expliquer donc je vais prendre un exemple : à un moment on fait le remake du Robin des Bois coréen, OK, on aborde une opposition entre deux vision antagonistes de la justice, OK, on fait porter tout cela par une bâtarde kagemusha, pourquoi pas, on l'entoure de compagnons dotés de super pouvoirs, pourquoi pas, mais quand déboule un gangsta afro-américain doté d'épées-fouets et un samouraï racaille qui retournent leurs vestes je dis stop ! ^^
- le build up est mine de rien sacrément déséquilibré… Au début on a une série de saynètes dark fantasy où un justicier solitaire vient châtier ceux qui ont fauté quoi qu'il puisse en coûter, puis on met en avant les mythes et légendes de la civilisation coréenne, puis un climax avec l'affrontement avec Wonsul et Wonhyo, puis un autre climax avec l'affrontement avec les Walbin… Et là boum, on attaque directement le compte à rebours final qui annonce l'ultime bataille du Bien et du Mal… Il est été plus pertinent de faire de chaque épisodes l'occasion d'apporter à l'antihéros badass des réponses à ses question et des alliés en vu de la bataille finale (d'ailleurs c'est ce que font les auteurs mais trop peu malheureusement) !
- mais d'abord et surtout, au bout de 3500 pages impossible de savoir qui est vraiment l'archi-ennemi de l'antihéros et ce qu'il veut vraiment… (mais aucun doute, celui-ci est l'une des pires ordures de l'Histoire de la Planète Manga !)
On apporte bien des explications mais aucune d'entre elles n'apportent vraiment les réponses attendues, et avec moult incohérences des familles on alterne entre le saint déjanté, le réformateur illuminé et le démon suprématiste… Ce flou artistique coupable fait que l'évolution psychologique de pas mal de personnages frôlent le WTF, pourtant allégoriquement c'est simple car on est comme dans "Berserk" dans une réappropriation du "Devilman" de Go Nagai, et on voit bien qu'il y a une opposition existentielle entre Ajite, le Grand Tentateur/Corrupteur qui derrière ses discours humanistes n'apporte que le désespoir (car il voit le mal en chacun, et en flattant les bas-instincts transforment les gens en démons hédonistes et le monde en enfer suprématistes), et Mun-Su qui derrière ses déclarations misanthropes répétées apporte l'espoir là où il n'y en avait plus (car il tapasse les faibles pour avoir été trop faibles avant de se retrousser les manches pour aller tabasser les forts pour avoir abusé le leurs forces : « aide-toi, le Ciel ne t'aideras pas » !)… Quels que soient ses pouvoirs Ajite ne peut rien contre Mun-Su qui lui est diamétralement opposé : l'antihéros qui a tout perdu et qui n'a plus rien à perdre n'est que force d'âme et inébranlable résolution (et si jamais il se met à douter, il peut compter sur celui qui possède encore plus de force d'âme et d'inébranlable résolution que lui : son écuyer !!! ^^)… Si Ajite est un prédateur lâché parmi les hommes alors Mun-Su est un prédateur lâché parmi les démons, et si Ajite avait tout prévu pour amener Mun-Su sur les sentiers de la perdition, pas une seconde il n'a envisagé que Mun-Su avait tout prévu pour lui faire subir le même sort ! Justice Forever certes, mais nous sommes dans une série coréenne donc préparez à l'avance vos mouchoirs car la Grande Faucheuse ne va pas se gêner pour prélever son terrible tribut en n'épargnant rien ni personne…
Les couvertures de cette édition double sont très classes, et dans cette 1ère intégrale nous découvrons le justicier cynique et sarcastique dont le mantra est "aide-toi, et peut-être que le Ciel d'aidera", nous découvrons ensuite Chun-Hyang la jeune, laconique et peu vêtue garde du corps aux capacités surhumaines, mais aussi un pays à la dérive soumise aux forces obscures de la crevardise... Et c'est en découvrant l'envers du décor d'une île paradisiaque aux plages de rêves que Mun-su trouve le premier indice qui le met sur la route de sa Némésis Ajite, en la personne d'un médecin qui n'a plus rien d'humain...
si besoin est, rdv aux critiques 1.0 :
http://www.babelio.com/livres/Yang-Le-Nouvel-Angyo-Onshi-tome-1/440181/critiques/1280739
http://www.babelio.com/livres/In-Wan-Le-Nouvel-Angyo-Onshi-tome-2/167815/critiques/1282428
Challenge Pavés 2016-2017 1/9