Un roman homéopathique.
Voici un beau "nature writing " japonais que j'ai pris le temps d'apprécier à petites doses.
Un roman zen, sans intrigue, mais apaisant.
La narratrice , pour prendre ses distances avec le stress de la vie tokyoïte, a décidé de prendre une respiration dans une péninsule aux paysages sublimes et placides.
En compagnie de son chat, elle va faire l'expérience des vingt-quatre saisons d'une année japonaise et apprendre à apprécier de nouveau l'amour de la vie et de ses plaisirs simples.
Un roman riche en couleurs, en odeurs et en sonorités doucereuses.
Un squelette et quelques vipères essaieront de troubler la quiétude des lieux, comme dans une sorte de tableau en trompe-l'oeil, mais en vain.
La sérénité s'impose et l'emporte dans ces vingt-quatre saisons propices à une véritable renaissance.
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Ce sont d'abord les falaises qui l'ont séduite, blanches, abruptes, léchées par le Pacifique. le calme et la nature ont fini de la convaincre de se faire construire une maison, près des bois et d'un marais, loin de la vie trépidante qu'elle mène à Tokyo, dans la péninsule de Shima. Puis, lasse des allers-retours entre son studio de la capitale et son havre campagnard, elle a décidé de venir y passer une année complète. Douze mois rythmés par les vingt-quatre saisons du calendrier traditionnel japonais.
Une femme fait une parenthèse dans sa vie et nous offre une bulle de douceur et de poésie. le travail de la terre, la cueillette de fruits des bois, la préparation de confitures, de longues promenades dans la nature sont ses seules occupations, avec parfois une visite à la miellerie de son amie ou une fête au hameau. le temps passe paisiblement et elle note dans son journal de bord, le rythme des saisons, l'évolution de la nature, son adaptation à ce milieu qui lui est étranger. Sa mère ou sa soeur viennent parfois lui rendre visite, sans toutefois troubler le calme de cette nouvelle vie. Elles marchent dans les champs ou dans les bois, observent les lucioles, se nourrissent des produits de la nature.
Il ne se passe rien dans ce roman, rien au sens d'action trépidante. Mais on se laisse bercer par la sérénité qui s'en dégage. C'est un roman qui met les cinq sens en éveil. On y ressent la chaleur du soleil ou le froid de l'hiver sur la peau. On y voit la beauté d'une nature intacte, de l'océan déchaîné, des falaises escarpées. On y sent l'odeur de la forêt profonde ou celle de la putréfaction des marais. On y goûte les fraises des bois, le miel, le tofu, le soju. On y entend le chant des oiseaux, le coassement des crapauds, le bruit furtif des animaux des bois.
Un roman reposant, qui fait du bien, qui sublime l'idée de vivre en harmonie avec la nature, loin du tumulte des villes, en partageant du temps, des vivres, des conversations avec ses voisins, en regardant son chat retourner à l'état sauvage, en savourant chaque minute du temps qui s'écoule. Une parenthèse enchantée.
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Quel enchantement, ce livre! Comme il fait du bien, en cette période anxiogène! J'avais déjà beaucoup apprécié " 20 ans avec mon chat", le plaisir a été encore intense cette fois.
La première de couverture, de toute beauté, ouvre sur ce que l'on pourrait appeler un journal de bord. Dans le calendrier traditionnel japonais, les périodes sont de quinze jours, d'où les vingt-quatre saisons du titre. Et c'est sur une péninsule où elle possède depuis quelques années une cabane que la narratrice, habitant à Tôkyô, se retrouve, comme elle le fait régulièrement.
Mais cette fois, elle y restera longtemps. Elle se sent vieillissante, vient de perdre une amie chère, et éprouve le besoin de se ressourcer dans la nature. Nous l'accompagnons avec émotion et ravissement dans ses promenades, ses pensées, ses relations chaleureuses avec ses voisins.
La forêt envoûtante, l'élaboration du miel, les préparations culinaires pour nous souvent surprenantes avec les produits de la nature, le lien fort avec son chat, les souvenirs qui affluent, la tendresse qu'elle offre à sa mère, qui vient admirer en juin les lucioles, tout m'a parlé, tout m'a émue.
Une bulle de sérénité, une vision contemplative du monde, des images douces au coeur, une nostalgie lancinante aussi, cela vous semble attirant? Alors, lisez ce roman!
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Se couper de l'ébullition auditive et visuelle de la ville, de la luminosité artificielle permanente de Tokyo, voilà le souhait de la narratrice de ce roman. Elle décide de se réfugier dans la maison qu'elle a fait construire pour ses vacances, située sur une péninsule entre océan et forêt. Trouvant le temps des vacances trop court et restrictif, elle y restera cette fois près d'un an. Depuis son installation à Tokyo, la certitude de continuer à y vivre, entre sorties et boutiques offertes par la métropole carnivore, n'avait pas encore été mise en doute jusqu'au tournant d'une nouvelle décennie. À quel choix aboutira cette parenthèse ?
Dans ce paysage naturel sur lequel la trace de l'homme se limite aux poteaux électriques, elle va savourer les émotions que chacun de ses sens en éveil lui apporteront.
Dans ce décor hérissé de falaises blanches déchiquetées par la mer et le vent, elle parcourt les plages, écoute et respire la mer. Elle sent sous ses pieds les ères successives à l'origine des strates géologiques de ce sol qu'elle foule chaque jour. Entre forêt, terrains marécageux et terres en friche où bambous, roseaux et carex s'égaillent dans l'humidité des lieux, la beauté saisissante de cet environnement la traverse paisiblement.
Elle va tendre l'oreille pour tenter de capter les petits bruits nocturnes venant de la mer. Sont-ils dus à de discrets déplacements frôlant le rivage ? Un défilé de crabes ou de tortues ? Ou plus fantaisiste dans la tête de notre narratrice, d'huîtres imaginaires dotées de minuscules pattes ?
Avant l'arrivée imminente du petit matin, les oiseaux poussent leur premier chant dans la forêt voisine et précèdent les rencontres avec les différents végétaux qu'elle croise chaque matin sur le chemin en pente menant à la mer. On s'arrête à ses côtés pour capter un rayon de soleil sur un massif d'azalées qui offrent leur doux sourire à un petit coin de forêt ou pour accrocher le jaune éclatant des iris tapissant le marais.
Alors qu'elle s'arrêtait peut-être en surface au cours de ses brefs séjours, cette fois-ci, c'est en pleine conscience, en profondeur, qu'elle arpente ce petit bout de terre. La nature comme les gens, ses proches comme ses voisins, auront toute son attention.
Une visite de sa mère. Cette dernière allongera son séjour pour admirer la lumière féérique des lucioles tout en s'essayant aux haïkus.
L'intérêt pour ses voisins, essentiellement des retraités aux vies tranquilles, s'aiguise. D'eux, elle remplira sa marmite de pousses de bambous offertes, admirera le jaune doré du miel fraîchement mis en pot et visualisera le travail des abeilles dans les ruches bourdonnantes.
Au fil de cette lecture contemplative, on sent croître chez notre narratrice, et par ricochet chez le lecteur attentif, un attachement profond à cette péninsule.
Prêter l'oreille, respirer, contempler, suivre le calendrier à l'ancienne rythmé par les cycles lunaires assimilés à autant de saisons. Elle notera les évènements de chaque tranche saisonnière, les plantes qui pointent leur nez, les récoltes du moment, les graines à semer ou les confitures à mitonner.
De la même manière que les saisons sont fragmentées, elle complètera ses cinq sens trop restrictifs à son goût par d'autres sensations.
Ici, pas de mièvrerie qui conduirait à idéaliser la campagne et à condamner la ville. C'est un roman plutôt objectif, une analyse personnelle dont la narratrice a senti le besoin à ce moment de sa vie.
Ce roman incite à prendre le temps d'aller au fond des choses, de ne pas céder à la course folle qui nous fait juste frôler la surface de ce qui nous entoure et arriver à la fin sur notre faim car rien n'a été approfondi, savouré, contemplé et ressenti à sa juste valeur. Une parenthèse bénéfique et enchanteresse, à lire, à vivre.
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« Dites-moi, est-ce que la femelle choisit le mâle avant de copuler ? Par exemple, elle peut préférer un macho ou bien ne pas vouloir si sa tête ne lui revient pas, que sais-je ?.......
« Figurez-vous que je n’ai jamais réfléchi à la question. Car enfin, le destin des abeilles est de laisser au monde la génération suivante et je suppose qu’aucun choix ne précède l’acte, ça doit se faire plus ou moins comme ça se trouve ! »
Sans chasteté ni fidélité, alors ? Kayoko m’a regardée avec commisération. « Mais enfin, il n’y a que les hommes pour avoir des considérations morales ! Vous y êtes ? Il y a la reine des abeilles. Les mâles s’agglutinent autour. C’est tout. Inutile de chercher plus loin, l’ordre de la nature est simple. »
Je traversais une période troublée. J’avais quitté un homme, j’avais perdu une amie précieuse, ma vie glissait au gré de la monotonie des journées qui s’écoulaient sans trouver d’issue. Je voulais fuir, n’importe où, mais fuir. C’est à ce moment-là que j’ai fait la rencontre des falaises, ces blocs de matière indéfinissable, qui ne portent pas la moindre odeur humaine.
En jetant un regard en arrière, j'ai pris conscience que les choses qui avaient eu un sens n'étaient plus que des enveloppes sans âme. Les chemins auxquels on était habitué, le petit restaurant de nouilles au sarrasin, le troquet qu'on aimait bien... Il ne restait plus rien. Plus rien n'était intéressant. Plus d'endroit qui suscite l'envie d'y aller. Est-ce que j'allais vieillir ici? Devais-je l'accepter? Était-ce inévitable ? L'homme aussi était devenu une enveloppe vide pour moi. Dans un lieu que n'habitait plus la passion, une dépouille tombait sans bruit.
p 126
Les ombres noires dans la forêt, la rangée de petits arbres devant l'entrée, la route qui passe devant la maison en plan incliné, tout déborde du crépitement silencieux des éclats tranchants du clair de lune. Moi, je me penche sur la profondeur des ténèbres silencieuses où ni voiture ni âme ne passe, et mon oreille savoure l'ineffable plaisir d'être absorbée par la densité du silence.
Je fais brûler encens sur encens, et mon plaisir de chaque soir est de contempler depuis ma terrasse le mouvement de la lune et des étoiles. Je m’étends sur une chaise longue et je regarde d’un œil nonchalant la voûte céleste. Alors, un remous traverse mon corps de la tête aux pieds. Est-ce le tremblement de la rotation de la Terre ? J’éprouve une sensation inconnue qui m’enveloppe tout entière, comme si mon corps et le ciel étaient liés pour un instant. En même temps, sans se perdre, mon être reste attaché à la terre, et j’ai l’impression sans pouvoir me l’expliquer que j’assiste à un miracle. Le frémissement du vent nocturne, le bruissement léger des feuilles font-ils fondre mes cinq sens, le corps et ses organes se séparent sans hésitation du temps humain, pour se transformer en une chose inconnue. Ah, est-ce ainsi que le corps quitte la chair ? Est-ce cela, la sensation du néant ? Il me semble que quelque part, très loin, je me suis introduite dans le corps d’un être inconnu.
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