Au lieu de donner à bâtir à des architectes des monuments qu'ils composent de bric et de broc, prenant ici un morceau de l'antiquité, là un bout moyen âge et raccordant le tout, tant bien que mal, ne vaudrait-il pas mieux les employer à purifier, à anoblir ceux qui restent ; ne vaudrait-il pas mieux qu'un adroit chimiste se substituât aux professeurs de l'Ecole et leur apprît le moyen d'imprimer au Tribunal de Commerce, par exemple, une étampe réelle d'art, en l'incendiant ?
Éloigné de la cohue qui nous verse, à chaque mois de Marie, l'ipéca spirituel du grand art, M. Gustave Moreau n'a plus, depuis des années, immobilisé de toiles sous les mousselines qui sèchent, en pavillonnant, de même que de misérables dais, dans les hangars vitrés du palais de l'Industrie.
Il s'est également abstenu des exhibitions mondaines. La vue de ses oeuvres, confinées chez quelques commerçants, est donc rare ; en 1886, cependant, une série de ses aquarelles lut exposée par les Goupil dans leurs galeries de la rue Chaptal.
Dans ces planches, aucun concept ramassant, condensant cette Luxure même qui emplit la Bible, qui se dresse, dès les premières pages, sous l'arbre de l'Eden, qui émerge encore à la fin du Livre, alors qu'évoquée par l'ange aux sept fioles, surgit, en ses accoutrements de métaux et de pourpre, la souveraine Salope vue par saint Jean. ("Félicien Rops")
Artiste extralucide, dégageant du réel le suprasensible, M. Wisthler me fait songer avec ses paysages à plusieurs poésies d'une douceur murmurante et câline, comme confessée, comme frôlée, deM.Verlaine.il évoque, ainsi que lui, à certains instants, de subtiles suggestions et berce, à d'autres , de même qu'une incantation dont l'occulte sortilège échappe. M. Verlaine est évidemment allé aux confins de la poésie, là où elle s'évapore complètement et où l'art du musicien commence. M. Wisthler, dans ses harmonies de nuances, passe presque la frontière de la peinture ; il entre dans le pays des lettres, et s'avance sur les mélancoliques rives où les pâles fleurs de M. Verlaine poussent.
Parallèlement à ces oeuvres que M. Rodin transpose souvent dans ses sculptures, alors que M. Rops dessine la réalité authentique et brute, je l'aime moins ; en effet, sous ses paysans, l'influence de Millet se sent, et lorsqu'il aborde la femme habillée, moderne, l'être contemporain, la véridique fille, il semble attardé et n'atteint pas au pouvoir de réalité, aux irruptions de vie, au cri méchant de ce prodigieux Degas ; je lui préfère aussi, je dois le dire, M. Forain, dont le sens parisien est autrement sûr ; par contre, dès qu'il allégorise et synthétise la femme, dès qu'il la distrait d'un milieu réel, il devient tout de suite inimitable.
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