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4,11

sur 878 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Grâce à un petit mot de Jérôme Garcin, en fin d'émission du Masque, j'ai eu envie de découvrir ce livre.

Vous avez peut- être déjà oublié Laëtitia Perrais, jeune fille placée en famille d'accueil, avec sa jumelle Jessica, après une enfance massacrée- mère dépressive et père affectueux avec ses filles mais brutal avec leur mère, foyer, et....famille d'accueil- ?

Sa route croise, un triste jour de janvier, celle d'un criminel récidiviste, brutal, violent, mais pas encore un assassin. L'alcool, la drogue, la frustration et la haine le font irrésistiblement partir en vrille : il va la tuer, la dépecer, éparpiller son corps martyrisé dans les étangs du pays de Retz

Le pays de Gilles de Retz , le terrible Barbe-Bleue. Tout un programme.

Encore un fait divers, me direz-vous, avec une mine un peu dégoûtée. Ce n'est pas de la littérature !

D'abord, écrit Ivan Jablonka , historien et sociologue plus que romancier et auteur de nombreux ouvrages savants , « un fait divers n'est jamais un simple « fait » et il n'a rien de « divers » ». Il « peut être analysé comme un objet d'histoire » car « il dissimule une profondeur humaine et un certain état de la société : des familles disloquées, des souffrances d'enfant muettes, des jeunes entrés tôt dans la vie active, mais aussi le pays au début du XXIème siècle, la France de la pauvreté, des zones périurbaines, des inégalités sociales. »

Ce n'est donc pas un récit linéaire , c'est encore moins un roman, et c'est beaucoup plus qu'une enquête: c'est une interrogation profonde, pertinente, et décapante sur l'espace de liberté que nos sociétés inégalitaires, machistes et sur-médiatisées laissent aux petites filles pauvres pour se soustraire à un destin tout tracé de victimes, et sur celui qu'elles laissent aux hommes de bonne volonté pour faire l'exacte lumière sur les actes et les êtres, et pour exercer la justice malgré des pressions populistes émanant du pouvoir lui-même.

Ivan Jablonka a voulu rendre justice aux unes et aux autres, redonner une place à ces humbles enfants battues, ballotées et martyrisées, et montrer l' obstination et la farouche indépendance de ces discrets travailleurs de l'ombre, gendarmes, juges d'instruction,avocats, travailleurs sociaux, à l'écoute des drames énormes de ces vies minuscules.

Que de prédateurs dans cet assassinat sordide : l'assassin lui-même, bien sûr, mais aussi le père biologique, histrion alcoolique et sentimental (mais auteur de brutalités conjugales) , le père d'accueil, vrai Tartuffe et s'avérant, après l'affaire et sa sanctification en père idéal par l'Elysée, un prédateur sexuel sans scrupule qui a honteusement abusé de ses nombreuses « filles » de passage, et, pour terminer, le président de la République, Nicolas Sarkozy lui-même, instrumentalisant l'affaire comme à son habitude pour faire monter la mayonnaise sécuritaire et durcir encore la législation pénale. « Un fait divers, une intervention publique. A chaque crime, sa loi. Un meurtre vient « prouver » les failles du système pénal existant ; la loi qui y fait suite doit « couvrir » tous les crimes à venir". Ce président n'hésite pas à accuser la magistrature de laxisme, à fausser les faits, à forcer les rôles, provoquant , en Bretagne et ailleurs, une fronde des juges sans précédent. Pauvre Laëtitia, « démembrée par un barbare, récupérée par un charognard » titrait Charlie Hebdo…

Pour résumer, dit Jablonka, la mort de Laëtitia est un véritable féminicide : une petite jeune fille de 18 ans en butte aux quatre figures du prédateur machiste : le Caïd toxico et dangereux, le Nerveux imbibé, le Père-la-Morale pervers et le Chef qui joue les « puissances invitantes », « quatre cultures, quatre corruptions viriles, quatre manières d'héroïser la violence »


L'auteur va même jusqu'à se mettre lui-même en accusation, conscient qu'il est lui aussi un homme, après tout, et même une sorte de disséqueur de cadavre et que son livre,qui jette en pâture au public la vie trop brève de Laëtitia, pratique lui aussi sur la jeune fille une forme de violence. Il entreprend avec une grande lucidité son autocritique ainsi que celle du fait divers en tant que tel, et dénonce avec vigueur les « couples » écrivain-criminel célèbres, de Genet-Pilorge à Carrère-Romand.

Il faut, dit-il, que toute la fascination provoquée par le fait divers aille cette fois à la victime.

Car cette analyse sociologique et politique n'est pas seulement intelligente et convaincante, elle est aussi tendre, empathique, bouleversante: l'auteur fait revivre la figure timide de la petite serveuse, sa vie ébauchée, son essor interrompu, avec un très grand respect, une infinie douceur, une grande justesse.

Laëtitia recouvre son intégrité, et le fait divers, dans un tel ouvrage, ses lettres de noblesse.

Un livre formidable de profondeur, d'humanité et d'intelligence. Je recommande plus que chaudement !!

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Et dire je j'ai faillit ne pas le prendre !
La bibliothécaire : t'nez celui-là vient de rentrer. Il est prix machin-chose 2016 !
Mwa : j'aime pas les prix machin-chose (un peu sur le ton de j'aime pas la tarte au concombre).
Mais lorsque j'ai voulu le reposer sur le présentoir, ma main ne l'a pas quitté. Comme ci l'âme de ce livre avait engagé un dialogue avec mon subconscient.
Un fait divers dans la région nantaise au début de l'année 2011. Laëtitia et sa soeur jumelle sont placées chez monsieur et madame Patron, famille d'accueil. Elles viennent d'un milieu défavorisé et violent. Ici elles tentent de se reconstruire espérant trouver un foyer aimant et reconnaissant. Elles viennent juste d'être majeures et suivent des cours, l'une pour être serveuse, l'autre cuisinière. Laëtitia sera enlevée, torturée, rouée de coup, poignardée, étranglée et pour finir démembrée et jetée à l'eau. Son bourreau, un ferrailleur du coin en mal d'amour, lui aussi venant d'un milieu violent.
L'affaire fait grand bruit, c'est le calme plat côté médiatique et le président de l'époque et ses acolytes ajoutent de l'huile sur le feu en pointant du doigt le dysfonctionnement de l'appareil judiciaire qui descendra dans la rue en colère pour réclamer plus de moyen. de la à dire qu'il y a un avant et un après l'affaire Laëtitia il n'y a qu'un pas.
Un livre que j'ai pris comme un coup de poing. On se croit à l'abri dans nos habitations confortables et proche de chez vous se passe des scènes dont nous ne sommes même pas conscient. La misère guette les plus faibles de nos congénères, dans ce livre ce sont les femmes qui sont les victimes. Victime de l'égo surdimensionné des hommes de tous poils et de leur taux de testostérone.
Ivan Jablonka a enquêté, interrogeant les uns et les autres : familles et amis de la victime, mais aussi de l'agresseur, avocats, magistrats, enquêteurs pour nous éclairer sur tous les dessous de cette affaire. Il nous livre un bouquin d'un travail remarquable, livre qui se veut factuel, sans parti pris. Pourtant difficile de na pas être emporter pas ses émotions devant un tel déchainement de haine et de violence.
Arrive ce chapitre 54 "fait divers, fait démocratique", une merveille sur l'analyse et le traitement de l'information.
Un livre qui me restera.
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Laëtitia... Qui aurait pu se douter, qu'un jour, ce prénom porterait le nom d'une affaire ?

Laëtitia Perrais naît dans une famille chaotique : un père peu instruit, alcoolique, violent avec sa femme et ayant fait quelques séjours en prison, une maman dépressive, une situation précaire, une absence de repères. Avec sa soeur jumelle, Jessica, elle sera très vite retirée de ce foyer. D'abord recueillies par leur grand-mère, puis placées en foyer avant d'être admises en famille d'accueil, les soeurs peinent à trouver un équilibre. Chez les Patron, elles semblent pourtant avoir trouver un refuge. Un refuge illusoire ? Elles mènent leur scolarité cahin-caha, sont plutôt dociles, accèdent peu à la culture. Un soir de janvier 2011, Laëtitia sera enlevée. Suivront de courtes mais vaines recherches puisque le coupable, Tony Meilhon, sera arrêté deux jours plus tard. Un homme alcoolique, drogué, voleur ayant effectué plusieurs séjours en prison depuis son adolescence...

Comment expliquer un tel engouement ? Une portée médiatique si importante ? Des unes de journaux et des articles longtemps après ce drame, ce sordide et tragique fait divers ? Comment et pourquoi Laëtitia a-t-elle touchée si profondément le coeur des Français ? C'est ce que tente d'expliquer dans cette enquête l'historien et romancier, Ivan Jablonka. de son enfance à son adolescence malmenées, l'auteur retrace la vie de Laëtitia. Il relate également avec minutie le déroulement de l'enquête et ses retombées judiciaires, politiques et sociales, s'attarde sur le profil non seulement du tueur mais aussi de l'entourage de la jeune fille (père et mère biologiques, père adoptif, Tony Meilhon). Un travail de longue haleine pour lequel Ivan Jablonka a rencontré et s'est entretenu avec Jessica et son avocate, a arpenté le pays de Retz, les lieux du drame, dans le seul but de redonner vie à Laëtitia. Un récit poignant, glaçant parfois. Bien au-delà d'un simple fait divers, une peinture bien sombre de la société française.
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Laëtitia n'a pas eu de chance dans la vie, après une enfance chaotique, elle a fini assassinée par un marginal. Un garçon comme elle, privé dès sa naissance de l'affection indispensable à l'équilibre de tout humain, ce qui n'excuse en rien son crime.

Le triste destin de Laëtitia — pour qui l'Etat a déployé de gigantesques moyens pour retrouver le corps supplicié — nous est raconté avec empathie et rigueur par l'historien-sociologue Ivan Jablonka qui dit avoir choisi comme héroïne « une inconnue légère et vacillante qui n'a hérité de rien, sinon d'une histoire qui la dépasse, celle des bébés qu'on rejette, des gamines de l'Assistance qu'on viole, des servantes qu'on rudoie, des passantes qu'on tue après les avoir consommées. »

Un père alcoolique et violent, une mère qui en perd presque la raison. La vie en foyer, puis dans une famille d'accueil faussement bienveillante ; Laëtitia, sa soeur jumelle et d'autres fillettes y subissent des viols. Enfin, un président de la République, chef de bande qui instrumentalise sa mort pour une politique sécuritaire démagogique. La mort de Laëtitia, un fait divers de plus si on ne sépare le sujet de la vérité de son existence, de ses carences affectives, de la violence masculine qu'elle a subie, du milieu et de la société qui furent les siens.

C'est le travail remarquable accompli dans ce livre par Ivan Jablonka qui, permettant de comprendre ce que Laëtitia a fait et ce que les hommes lui ont fait, donne une dimension universelle au fait divers. Laëtitia n'est restée au monde que dix-huit ans mais a semble-t-il vécu des siècles, son histoire, obsédante et bouleversante, rejoignant celle des femmes martyres victimes de tout temps de la violence des hommes.
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Refermer le dernier roman d'Ivan Jablonka "Laëtitia" est une chose, se détacher de son contenu et l'oublier en est une autre. Laëtita, qui ne se souvient pas de cette histoire abominable, de ce crime odieux et de la vague médiatique qui s'en suivit ? Personnellement, je n'ai rien oublié de ce que l'on nomme un "fait divers". C'est peut-être parce que je connais les lieux, parce que je suis originaire de cette région, parce que je suis une maman, parce que je suis, ou plutôt, j'ai été une enseignante et qu'au fond je le suis restée, et que tout ce qui touche aux jeunes m'est important. Alors, non, je n'ai rien oublié de cette horreur.
Mais se plonger dans ce "Laëtitia" là, c'est tout revivre au centuple. Aux confins du roman policier, de l'étude sociologique, de l'oraison funèbre, du récit historique, du devoir de mémoire, sans être rien de tout ça, l'ouvrage est d'une qualité exceptionnelle d'humanité. L'écrivain écrit, certes, mais derrière les mots on entend l'homme, le père.
Ivan Jablonka est un historien et un sociologue et on le sent. Alternant les chapitres techniques, historiques et politiques à la fois et ceux qui racontent la vie de la victime, il nous entraîne dans un compte-rendu précis, détaillé, un point de vue humain. Il rend ainsi un hommage à la victime mais recherche également la justice et la vérité. Il va essayer, tout au long du livre, sans porter de jugement et tout en retenue, d'analyser, de comprendre, d'argumenter, de rechercher les tenants et les aboutissants d'une mort que l'on peut presque croire annoncée.
Ce récit est foisonnant qui est à la fois une étude sur l'inégalité des chances et une observation de l'instrumentalisation de ce type de drame par les politiques. C'est aussi l'occasion de pointer du doigt les manques de moyens de la justice, des instances de réinsertion, les dangers de la prison, les récidives.
En lisant ce document d'une richesse incomparable, j'ai, en effet, du mal à croire à l'égalité des chances. Laëtitia semblait s'être sortie de sa condition d'enfant en souffrance et pourtant. Réussit-on à se relever d'une enfance cabossée ? Et les questions lancinantes… pouvait-on faire quelque chose, était-elle au mauvais moment, au mauvais endroit ou inconsciemment est-elle allée vers ce qu'elle pensait être son destin ?
Ivan Jablonka a réalisé un travail de fourmi pour ressortir cette histoire des cartons et il livre un hommage magnifique à cette jeune Laëtitia à laquelle il redonne toute sa dignité.
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Un documentaire sérieux et dépassionné, dont j'aimerais tant voir plus de journalistes et plus de politiques s'inspirer. Au delà de l'intention louable et réussie de redonner son identité à Laetitia, le traitement de ce "fait divers" est exemplaire de sobriété. Et c'est ce recul qui fait tout son intérêt, par un regard lucide sur les failles de notre société, et par l'analyse sans compromis mais sans haine de ce qui amène certains à déroger à ses règles, d'autres à en être les victimes. le travail est celui d'un universitaire qui sait poser les questions que suscite ce drame, et chercher des réponses. Les allers retour chronologiques dont je ne suis d'ordinaire pas fanatique sont ici bien gérés et participent avec simplicité aux interrogations de l'auteur. le style est clair. le sujet est dur, mais la lecture est enrichissante.
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Dans les faits divers les plus monstrueux comme celui de Laëtitia Perrais ou celui de la famille Romand, la lumière est, malheureusement, souvent mise sur le tueur. Je me souviens avoir lu le livre d'Emmanuel CarrèreL'Adversaire- qui montrait de la part de l'auteur une véritable fascination pour ce faux médecin qui, pendant 20 ans, a menti à tout le monde avant d'assassiner sa famille. Et je reconnais avoir été fascinée par ce livre, par cette histoire. Mais, et les victimes ? Elles sont tout le temps éclipsées par leur assassin, elles « ne sont plus que pour avoir péri ». C'est injuste et révélateur de notre société voyeuriste. Si j'ai lu ce livre, c'est parce que j'ai vu qu'Ivan Jablonka voulait mettre la lumière sur cette jeune fille qui a eu le malheur de croiser la route de son meurtrier. L'auteur a voulu la faire sortir de la case « victime » pour la faire revivre sous nos yeux, lui redonner son identité, sa personnalité, son passé.

Autant dire que la vie de Laëtitia fut courte mais aussi placée sous le signe de la violence : une petite enfance chaotique entre un père immature et violent, une mère bien trop fragile. La voilà retirée, avec sa soeur jumelle, à ses parents pour ensuite être ballotées à droite, à gauche avant de se retrouver en famille d'accueil, sous la responsabilité d'un homme autoritaire, M. Patron, qui s'avèrera par la suite, être un individu peu recommandable. Est-ce à dire que ce début de vie catastrophique l'a conduite dans les bras de son assassin ? A lire cet ouvrage, on a l'impression qu'effectivement, tout a concouru dans sa vie, à cet instant T où elle a croisé Tony Meilhon. C'est douloureux à lire, j'ai eu la gorge serrée à la lecture de certaines pages. le moins que l'on puisse dire c'est que c'est un livre que je ne suis pas prête d'oublier.
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Vie martyrisée.

Laëtitia Perrais avait dix-huit ans la nuit du 18 au 19 janvier 2011 quand elle fût assassinée. Ce fait divers est devenu une affaire d'État après que Nicolas Sarkozy ait accusé les magistrats d'avoir laissé le coupable sans suivi. Suite à cette affaire, Ivan Jablonka a décidé d'écrire l'histoire de Laëtitia.

Excellente lecture. Ce livre ne se veut pas uniquement une reconstitution d'une affaire criminelle, il est également un essai historique et sociologique. C'est réussi, Jabonka parvient à parfaitement concilier ces trois aspects. Les chapitres alternent entre la vie de Laëtitia et le déroulement de l'affaire.

L'auteur part d'un terrible postulat: Laëtitia est née dans la violence, c'est pourquoi elle est morte dans la violence. En effet, sa vie ne sera qu'un mélange de maltraitance parentale et d'errance. Elle trouvera une relative stabilité dans une famille d'accueil qui se révélera également toxique. Au final, différentes figures masculine (le père, le "père d'accueil", le meurtrier) violenteront Laëtitia durant sa courte vie.

Malgré cette vie chaotique l'auteur réussit à rendre à Laëtitia sa dignité. Elle redevient par sa plume un être humain, avec certes ses peines et sa fin tragique, mais aussi ses joies et son évolution vers la lumière. J'ai été d'autant plus impressionnée qu'il ne tombe ni dans la condescendance, ni le misérabilisme. Non, Jablonka raconte tout simplement qui était Laëtitia avec respect.

Au final, un excellent livre qui apporte un questionnement intéressant sur les faits divers.
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Laëtitia Perrais, 18 ans, a été enlevée et assassinée en février 2011 dans la région nantaise.
Sa disparition, l'enquête puis le procès de celui qui a été condamné ont fait l'objet du fait divers le plus médiatisé du début du XXIème siècle.
Yvan Jablonka, écrivain-historien, décide en 2014 d'écrire un livre sur cette affaire afin de donner une humanité à la jeune femme et de comprendre les ressorts politiques, juridiques et médiatiques qui ont émaillé cette enquête.
La construction permet de lire ce récit comme un thriller puisque les différents éléments qui le composent sont progressivement abordés en alternance avec la recherche du corps qui a duré environ 2 semaines.
Ce récit est très didactique. Il explique au lecteur le fonctionnement des institutions judiciaires qui sont alors remises en cause par le Président de la République, Nicolas Sarkozy. Les accusations de celui-ci entraîneront une des plus importantes grèves de la magistrature et sont à l'image de l'utilisation des faits divers par le Président tout au long de son mandat.
Par ailleurs, l'auteur détaille tous les critères de l'affaire qui en font un fait divers « rentable » : la beauté de la jeune fille, son statut d'enfant martyrisée et placée en famille d'accueil, le contexte général au moment de la survenue des faits.
Enfin, l'auteur relève le défi de rendre vivante la victime. A travers le récit de son existence parsemée de violence et de mépris, il dresse un portrait tout en subtilité de cette jeune fille que le lecteur arrive très vite à visualiser.
Un docu-fiction passionnant qui place le fait divers dans la littérature, tout comme l'avait fait Truman Capote avec de sang froid
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Ce livre est une énorme claque. Laëtitia a une une vie trop courte, trop pleine de violences et de douleurs, qui s'est terminée tellement tragiquement dans le sang et la violence, encore.

Ivan Jablonka revient sur un fait divers qui a fait grand bruit en 2011: la disparition puis la découverte du corps de Laëtitia, qui n'avait que 18 ans, près de Pornic. Fille de l'ASE, qui a été déplacée de foyer en famille d'accueil, elle disparaît une nuit de janvier. Très vite, le coupable est arrêté, mais l'affaire n'en est pas finie pour autant. Car l'historien, biographe et sociologue, revêt encore son costume d'écrivain pour nous raconter, nous faire comprendre, l'histoire et la tragédie de Laëtitia et de sa soeur jumelle, Jessica. Autour de cela, une affaire d'Etat, quand un gouvernant s'en prend aux magistrats dont il sait pourtant qu'il ne leur donne pas les moyens de faire correctement leur travail, et dont nous savons tous à quel point ils font de leur mieux pour faire régner l'idée de justice et de paix. Autour de cela, les interrogations des professionnels des métiers du social, quand ils font de leur mieux eux aussi, mais portent toute cette charge, cette misère sociale. Et autour de cela encore, une réflexion sur les faits divers, sur les culpabilités des uns et des autres, sur le processus de violence comme un cercle vicieux... Que d'enfants mal aimés dans ce récit, qui n'ont finalement pas su faire autrement que d'aimer mal à leur tour, que ce soit leurs proches ou eux mêmes.

Je suis étonnée moi-même d'être tombée dedans à ce point, après avoir dévoré la mini-série (excellente, je recommande!) consacrée à cette affaire. Mais l'histoire de Laëtitia, de toute sa famille, ne m'a pas lâchée, m'a bouleversée. Car il s'agit bien plus que d'une jeune fille, car cette jeune fille méritait d'avoir une belle vie, pleine, riche et heureuse. Car "la vie est fête comme ça."
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