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Marie-Anne de Béru (Traducteur)
EAN : 9782021396317
992 pages
Seuil (22/08/2019)
4.68/5   57 notes
Résumé :
S'appuyant sur une très large masse d'archives et de mémoires, Julian Jackson explore toutes les dimensions du mystère de Gaulle, sans chercher à lui donner une excessive cohérence. Personne n'avait décrit ses paradoxes et ses ambiguïtés, son talent politique et sa passion pour la tactique, son pragmatisme et son sens du possible, avec autant d'acuité et d'esprit.

Des citations abondantes, éblouissantes d'intelligence, de drôlerie, de méchanceté parf... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (12) Voir plus Ajouter une critique
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Après Jean Lacouture - qui situait De Gaulle parmi les hommes qui savaient ouvrir leur regard de la droite à la gauche -, après Éric Roussel - qui lui plaçait un peu trop vite De Gaulle dans le camp des maurassiens -, on voit venir un biographe britannique qui nous apprend à juger des choses et à considérer Charles de Gaulle autrement.
Il passe un long moment à observer la production de plume de cet officier entre 1919 et 1939, qui ne raisonnait pas seulement en stratège et qui s'exprimait avant tout en homme qui se situait au carrefour de la réflexion politique et de l'analyse de l'histoire militaire et des leçons à tirer pour le présent et l'avenir, avec pour unique préoccupation la grandeur de la France. Ainsi, De Gaulle pouvait-il avoir un grand sens de l'adaptation, ne pas penser en ayant comme marqueur des critères idéologiques et ne pas juger les hommes en fonction de leur positionnement sur l'échiquier politique mais plutôt en fonction de leur aptitude à servir l'État et leur pays en faisant passer en premier ce souci des intérêts supérieurs de la France. Il était donc capable de suivre tel ou tel, de se servir de tel ou tel et de lâcher tel ou tel, en grand pragmatique, pour parvenir à ses fins, mais sans la froideur ou la raideur qu'on a parfois voulu lui prêter. Ainsi, quand il a vu qu'une certaine partie de la droite réactionnaire était prête à s'entendre avec Hitler en trahissant la France, De Gaulle, déçu de ne pas voir Paul Reynaud choisir d'endosser les habits de la résistance, résolut de les revêtir lui-même et de sauver l'honneur de son pays.
Ce fut sa seule boussole, sa seule constante, sa seule passion.

François Sarindar
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Je ne sais plus qui a dit "si vous aimez lire des histoires, lisez L Histoire", mais c'est en lisant des ouvrages tels que celui de Julian Jackson, sur des personnages tels que De Gaulle que l'on mesure à quel point c'est juste. Pourtant, Jackson ne nous livre pas une énième hagiographie sur notre héros national : c'est là un de ses plus grands mérites : il a su faire de De Gaulle un sujet de l'histoire, un personnage dans l'histoire. Et c'est lui rendre justice bien plus sûrement que d'en faire une légende, lui qui avait l'histoire en si haute estime.
Ainsi, ce grand destin, traité grandement, est un grand moment de lecture.
Je ne dis pas que, çà et là, je n'aurais pas quelques critiques à formuler (pas en mon nom évidement : des historiens à opposer à Jackson, notamment quand il s'agit de certains épisodes qui impliquent l'URSS, par exemple sur la question du pacte de non-agression germano-soviétique, du rôle des Soviétiques pour que la France siège au Conseil de sécurité de l'ONU, ou encore concernant les communistes aux premières heures de la résistance) mais c'est tout à fait secondaire pour ne pas dire tertiaire tellement il y en a peu et que ça n'est pas son objet (des remarques en passant). Pour le reste le récit de Jackson est d'abord remarquable pour la place qu'il accorde aux documents qui permettent de saisir l'homme Charles de Gaulle dans ses relations avec son entourage (ce qui ne plaide pas en sa faveur) et pour comprendre comment il aborda les grands épisodes (ce qui est, cette fois, bien plus fascinant). Comme toutes les bonnes biographies, celle de Jackson a, en plus, l'art et la manière de savoir redonner rapidement mais précisément les enjeux du contexte, de dessiner les lignes de force ; de dresser des esquisses rapides au milieu de cette immense portrait pour nous présenter les nouveaux entrants dans l'histoire. Il sait encore livrer de belles et profondes réflexions (par exemple le paragraphe sur la personnalité de Charles de Gaulle) et certains chapitres sont de vrais moments de plaisir ou alternent avec un art de l'équilibre consommé l'intime et le politique (par exemple mai 68). Bref, c'est prenant comme un roman (ça m'a fait penser à la bio d'Hitler de Kershaw).
Un vrai, bon et beau travail d'historien.
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Attention, chef d'oeuvre du genre. La traduction aussi est excellente - cela mérite d'être signalé.
Un livre dense, sans devenir indigeste. J'ai appris plein de choses. le Général, je ne l'imaginais pas habité à tel point par sa mission. Par son patriotisme. Une figure messianique. Mais je dois préciser que l'auteur n'insiste pas sur cette facette.
Un des aspects que j'ai découvert : ses conflits répétés avec les Britanniques et les Américains pendant son exil – source de sa constante méfiance deux décennies plus tard.
Pendant la lecture, j'ai dû parfois m'accrocher, car j'ai un problème avec les pavés. Et maintenant, à la fin, j'ai du mal à m'en détacher, à passer à autre chose.
Je reprends ici un très bref extrait de la chronique sur le Monde :
« le de Gaulle de Jackson bondit de la page avec une présence physique presque inquiétante. »
Moi je ne dirais pas « présence physique inquiétante ». Je dirais une présence impressionnante. Bref, voilà un livre qui m'a marquée.
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1000 pages, certes, mais quelles pages ! La biographie d'un français par un anglais nous donne à connaître De Gaulle sous bon nombre de facettes qu'on n'aborde pas si souvent.
C'est une mine d'informations, fouillées me semble-t-il, voire assez complète si je peux en juger, n'étant pas historien. J'ai appris des quantités de choses sur un des personnages les plus illustres de l'histoire de France, un des plus adulés, mais également un des plus détestés, même si ce n'est pas le plus grand nombre. de Gaulle le résistant, ambigu à souhaits, se confondant lui-même la plupart du temps avec la France, De Gaulle donnant des directives souvent incompréhensibles à ses collaborateurs qui, venus avec des questions, ressortent souvent avec d'autres questions, de Gaulle l'ambigu, avec ses rapports contrastés avec l'Angleterre ou les Etats-Unis, avec sa relation très suivie avec Jacques Foccart, l'africain, De Gaulle parfois de gauche, mais souvent très à droite, de Gaulle le social, mais tenté par la dictature, De Gaulle qui ne remercie jamais, et ne félicite pas plus, et tant d'autres encore.
Que de personnages en un seul, mais surtout Julian Jackson ne tombe pas dans la facilité de nombre de ses collègues biographes qui en font un héros. Les zones d'ombre sont tout autant analysées que les passages héroïques.
Un personnage à nul autre pareil, un livre formidable qui se lit comme un roman.
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La grande réussite du livre de Julian Jackson, est de prendre cette passion de de Gaulle pour lui-même et pour son personnage au sérieux, sans pour autant être dupe du verbe gaullien, de sa capacité à présenter une version épique de son propre rôle. A l'aide d'une documentation exceptionnelle, il narre chaque épisode marquant, depuis la captivité du ¬capitaine De Gaulle en 1916, jusqu'à sa disparition de l'Élysée au paroxysme de la crise de mai 1968, en confrontant les ¬visions de son personnage aux souvenirs d'autres acteurs et aux sources ¬contemporaines.

Lecteur ombrageux d'une biographie qui ne lui était pas favorable, la première de Jean Lacouture, De Gaulle a ce mot : « Je crains que l'auteur n'ait pas tout à fait pris la dimension du personnage. » Et quand on lui propose de le promouvoir à titre rétroactif , en avril 1946, au grade de général cinq étoiles, lui qui n'en a que deux, ainsi que de le faire grand-croix dans l'Ordre de la Légion d'honneur, il refuse : « J'y vois le désir de me diminuer en faisant de moi, en cas d'acceptation, un homme comme les autres(…] J'ai recréé la France à partir de rien, à partir de cet homme seul dans une ville étrangère (…) Je ne suis pas un général vainqueur. On ne décore pas la France. » .

On s'aperçoit que pour parvenir à ses fins – la France, sa grandeur ; l'État, son autorité –, De Gaulle était capable de la plus grande souplesse tactique, recourant au bluff, à la colère feinte comme au drame véritable, à la dissimulation autant qu'à l'usage habile des écrans et des ondes, et sans toujours avoir un plan bien conçu.

Le lecteur est tenu en haleine par cette histoire pourtant mille fois racontée. On ressent sa « réserve glaciale », décrite par tant d'interlocuteurs, (voire l'ingratitude ou le mépris envers les ses emportements, la ¬fréquence de ses accès de désespoir, il s'est en effet laissé aller à des propos d'un pessimisme apocalyptique.

Il confirme le peu de scrupules qu'il eut lors de son « dix-huit Brumaire », le 13 mai 1958, utilisant la crise d'Alger pour revenir au pouvoir. Il nuance enfin l'idée d'une prescience en matière de décolonisation : De Gaulle fut longtemps attaché à l'empire, et sa politique algérienne ¬connut de coûteux atermoiements, même si, au bout du compte, écrit l'historien, « sachant apprendre de ses erreurs », il « se montra pragmatique et s'adapta ».

Sans doute la réussite inouïe du pari initial de la France libre, parvenant à s'imposer face aux Alliés et reconnue parmi les vainqueurs, avait-elle créé chez lui la certitude de pouvoir façonner les événements.
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critiques presse (4)
Liberation
07 novembre 2019
Dans une biographie sans complaisance, le Britannique Julian Jackson rétablit quelques vérités oubliées sur le Général, son caractère et son parcours politique jalonné de contradictions.
Lire la critique sur le site : Liberation
Lexpress
23 septembre 2019
Dans une biographie magistrale, l'historien britannique Julian Jackson retrace la vie de l'homme qui s'était fait une "certaine idée de la France". Un regard neuf.
Lire la critique sur le site : Lexpress
LeFigaro
05 septembre 2019
Le regard d’un historien anglais sur le général de Gaulle: élégant, mesuré mais sans passion.
Lire la critique sur le site : LeFigaro
LeMonde
23 août 2019
L’historien britannique signe une remarquable biographie de Charles de Gaulle, toute en subtilité. Il livre ainsi le portrait d’une figure toujours fascinante.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (34) Voir plus Ajouter une citation
Beaucoup d’observateurs partagent le verdict de Lord Gladwyn : ‘indubitablement, le principal échec du Général, qui s’est avéré fâcheux à long terme, a été de vouloir faire jouer à son pays un rôle surdimensionné par rapport à ses moyens’. Les ambitions de De Gaulle pour son pays étaient-elles des illusions de grandeur inadaptées à la France du XXe siècle ? Comme nous l’avons vu, tout au long de sa carrière les accusations de ‘folie’ ont été fréquentes et, face à un homme qui parlait régulièrement de lui-même à la troisième personne, ou qui répétait (en plaisantant) ‘Je dis cela depuis mille ans’, on est tenté d’emprunter à Jean Cocteau sa boutade sur Victor Hugo, ‘un fou qui se prenait pour Victor Hugo’. Mais de Gaulle avait généralement une longueur d’avance sur ses détracteurs, et tout ce qu’ils disaient sur l’irréalisme de ses ambitions il l’avait déjà dit lui-même. Une de ses expressions favorites était ‘J’ai toujours agi comme si …’ – comme si la France était encore dans la guerre en 1940, comme si la France pouvait jouer un rôle mondial dans les années 1960.
[ ]
De Gaulle décrivit un jour sa politique pendant la guerre comme une politique du bluff, consistant à lancer du sable dans les yeux des Alliés pour qu’aveuglés ils soient amenés à croire que la France était grande. [ ] Il s’agissait de tirer le meilleur parti des cartes qu’on avait en main. Il est probablement heureux pour le monde que de Gaulle n’ait pas eu à sa disposition les ressources d’un Napoléon. P841
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Le seul journaliste français à l'accompagner dans le Pacifique, Jean Mauriac, le plus jeune fils de François, le découvre à ses dépens un soir où, surexcité, il tente de convaincre de Gaulle de monter sur le pont pour admirer une spectaculaire pleine lune. « Foutez-moi la paix avec votre lune, Mauriac », lui répond le Général. Yvonne de Gaulle n'a pas plus de succès lors d'un trajet en en avion en Afrique. Elle agrippe son mari par la manche pour lui montrer un troupeau d'éléphants. De Gaulle, irrité, lève les yeux de son livre pendant une minute, murmure doucement « Laissez, Yvonne, laissez » et se replonge dans Lord Jim, de Conrad. Le Général n'était décidément pas un touriste. (page 484)
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Lors de cette brève entrevue, Pleven dit à de Gaulle qu’il s’oppose moins à sa décision de quitter l’OTAN qu’à la brutalité avec laquelle il l’a annoncée. Mais de Gaulle campe sur ses positions : « Quand il faut faire quelque chose, il faut d’abord bousculer le pot de fleurs. Autrement on se dit : “Il faut arranger cela ; il ne faut pas faire cela.” Si vous donnez un grand coup de pied dans le pot de fleurs, le problème est posé et il faut le régler. » Pleven, qui avait été témoin de ces méthodes pendant la guerre – en Syrie, à Saint-Pierre-et-Miquelon –, n’aurait pas dû être surpris. Le problème est que cette tactique perd en efficacité à mesure que les partenaires de De Gaulle comprennent que le mieux à faire est de ne pas mordre à l’hameçon. Même si Dean Rusk, secrétaire d’État américain, avait demandé avec sarcasme si le retrait des troupes étrangères du sol français incluait les soldats morts pour libérer la France et qui reposaient dans les cimetières de guerre, Johnson avait, selon ses propres termes, refusé de « jouer à qui pisserait le plus loin [pissing match] », ce qui n’aurait servi qu’à « renforcer de Gaulle ». S’exprimant avec plus d’élégance, un autre fonctionnaire américain fit remarquer : « De Gaulle est un artiste de ju-jitsu, un poids léger dont la force vient de notre surréaction4. » Mais pour obtenir le même effet que par le passé, de Gaulle se trouve contraint de bousculer de plus en plus de pots de fleurs, et de plus en plus violemment.
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Lors de son rendez-vous quotidien avec Foccart au soir du troisième jour de manifestations, le 7 mai, de Gaulle affecte de ne pas prendre la crise au sérieux. Il a cependant été suffisamment soucieux pour annuler son week-end précédent à Colombey. Le dimanche 5 mai au matin, convoquant Fouchet, Joxe et Peyrefitte à l’Élysée, il a imposé une ligne dure : « Quand un enfant se met en colère et passe la mesure, la meilleure façon de le calmer, c’est quelquefois de lui donner une taloche. – Le problème, répond Joxe, c’est que ce ne sont plus tout à fait des enfants et pas encore des adultes. » Deux jours plus tard, cinq Prix Nobel, dont le gaulliste François Mauriac, signent une pétition contre les violences policières. De Gaulle, furieux, hurle à Joxe et à Fouchet : « Vous avez l’air terrorisé devant ces gamins […]. N’oubliez pas qu’un ministre de l’Intérieur doit savoir, s’il le faut, donner l’ordre de tirer. Sachez qu’à la fin des fins l’État a une prérogative, celle d’abattre ceux qui veulent l’abattre. » Aucun des deux hommes ne prend cela trop au sérieux. En quittant le bureau, Joxe glisse à Fouchet : « Naturellement, il ne pense pas un mot de ce qu’il dit […].
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Jacques Chaban-Delmas, devient ministre de la Défense nationale du gouvernement Gaillard que Debré dénonce chaque semaine en des termes de plus en plus violents. De Gaulle a fait une fois remarquer avec ironie que Chaban-Delmas, qui a occupé plusieurs postes ministériels, « a fait la traversée du désert mais par les oasis ». (page 496)
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De Gaulle : une certaine idée de la France Julian Jackson traduit de l'anglais par Marie-Anne de Béru
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