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Martine Rémusat (Traducteur)Edmond Jaloux (Préfacier, etc.)
EAN : 9782234055872
320 pages
Stock (16/04/2003)
4.2/5   81 notes
Résumé :

" Niels Lyhne va maintenant s'ouvrir devant vous, livre de splendeurs et de pénétrations. Plus on le lit, plus il apparaît que tout y est : du parfum le plus léger de la vie à la pleine saveur de ses fruits les plus lourds. Il n'est rien là qui ne soit compris, saisi , ressenti, et - à la résonance vibrante du souvenir - reconnu. Rien n'y est petit. Le moindre événement se déroule comme une destinée, et la destinée elle-même s'y déploie comme un tissu, a... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Dans cette oeuvre, Niels Lyhne (Entre la vie et le rêve) publiée en 1880 et traduite par R.Rémusat, le poète et botaniste danois  Jens Peter Jacobsen (1847-1885) nous emporte dans une balade romantique en suivant le parcours chaotique de Niels Lyhne dans une société en train de s'ouvrir aux changements.
Un roman d'apprentissage d'une âme sensible.
Un chemin tout tracé avant-même sa naissance car puissamment pensé et rêvé par sa mère, Bartholine. « Pour elle, ses parents, ses frères et soeurs, les voisins, les amis, ne prononçaient jamais un mot digne d'attention, car leurs pensées ne s'élevaient pas au dessus de la terre qu'ils faisaient valoir, et leurs regards n'allaient pas au-delà de ce qui s'offrait à eux tout naturellement. Mais les vers !… Ils étaient pleins de pensées nouvelles et d'enseignements profonds, montrant la vie telle qu'elle se déroule sur la vaste scène du monde, où la douleur et la joie sont intenses ; ils suscitaient des images parmi les rimes qui ruisselaient comme des perles. »
Se considérant comme un être à part, elle se laisse séduire par le jeune Lyhne de Lonborg dans lequel elle reconnaît celui qui pourra répondre à ses aspirations et s'éprend de lui : de cette union naît Niels.
Une enfance choyée sur le domaine de Lonborg mais déchirée entre l'amour paternel et maternel car depuis que le couple se désagrège Niels reste le seul lien entre ses parents.
Bercé jusqu'aux portes de son adolescence par les récits, la poésie et l'imagination fertile de sa mère, Niels est formaté pour devenir un homme au destin exceptionnel, un héros ; lui se rêve poète.

Niels atteignant l'âge adulte, et ayant confirmé ses aptitudes et ses appétences littéraires, va découvrir et affronter la réalité avec son cortège de joies et de peines.
Nous le suivons étudiant à Copenhague évoluant au milieu des artistes et de l'avant-garde intélectuelle .
Pour l'accompagner, son ami d'enfance de la ferme voisine, Frithjof , et depuis l'adolescence, Erik
Refstrup, recueilli et adopté sur le domaine de Lonborg, futur artiste, avec lequel il tisse une indéfectible amitié.
Comme un preux chevalier, il part en quête de l'amour qu'il aura du mal à trouver.
« Il aimait. Il se dit à voix haute qu'il aimait. Il le dit bien des fois. Ces paroles avaient comme une dignité, une noblesse, et leur signification était grande. Il n'était plus soumis aux influences diverses de ses chimères d'enfant, il n'était plus le jouet de désirs sans but, de vagues rêveries : il s'était échappé de la forêt fantastique qui avait grandi autour de lui, où cent bras l'avaient tenu captif, où cent mains s'étaient posées sur ses yeux pour l'aveugler. Il avait secoué ce joug, il s'était retrouvé, reconquis. »

Ainsi au gré du temps qui passe, de la vie qui s'effeuille, nous allons subir ses déceptions, ses désillusions, ses deuils, ses peines mais aussi être témoins de ses joies, de ses extases même si ces dernières sont beaucoup moins fréquentes .
Après la découverte de Copenhague, où il étudie, il découvre l'Europe , toujours sur les traces d'hommes mémorables ou d 'artistes, à Clarens en Savoie sur les pas de Rousseau pour la dernière retraite de sa mère, en Italie à Riva au bord du lac de Garde.
Au fil des années, après les désenchantements, les ruptures, les séparations, sa quête d'amour et de l'âme soeur reste inabouti. Toujours épris d'absolu et enfermé dans ses rêves, il souffre de la solitude et la ressent comme un isolement et un abandon.
Un destin qui ne sera pas à la hauteur de celui que sa mère attendait.
Une mort héroïque pourra-elle racheter sa vie ?

Une balade dans l' univers romanesque et romantique de Jens Peter Jacobsen entrecoupée et illustrée par de magnifiques visions et descriptions de la nature où l'on sent l'oeil averti du botaniste.
Cette immersion dans le 19ème siècle nous rappelle sans cesse les conditions de vie difficiles de tout être humain à cette époque: tout le long du récit des jeunes gens succombent dans la fleur de l'âge aux maladies (Jens Peter Jacobsen, phtisique, mourra à 38 ans), une jeunesse encore enchaînée arrive peu à peu où partiellement à se libérer des conventions bourgeoises et religieuses…

Une découverte et une très agréable lecture. Un style limpide et empli de poésie.

« Ce petit livre est de cette lignée de grandes oeuvres ; je voudrais qu'on le lut comme on les lit . C'est l'histoire des âmes trop grandes pour leur vie ; des âmes trop spiritualisées pour le monde où elles ont vécu et pour les amours dont elles ont souffert ; des âmes obscures et profondes que la destinée à enfermées dans un cycle de malheurs moyens. Certains êtres ont donné toute leur foi à ce désir éperdu de beauté qui vaut seul que l'on vive, mais ce désir, brutalisé par les circonstances, ne peut s'épanouir que dans le renoncement aux satisfactions terrestres et dans la création d'un songe plus beau qu'elles. » Extrait de l'avant-propos de Edmond Jaloux 28 mai 1928
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Rilke n'a pas connu Babelio, n'empêche, lui aussi aimait bien conseiller des livres oubliés ou obscurs à ses connaissances. Et à lire les lignes élogieuses qu'il consacre, dans ses lettres à un jeune poète, à un certain Jens Peter Jacobsen, j'ai eu envie d'aller y voir de plus près. Bien m'en a pris !

"Niels Lyhne" raconte la vie brève d'un danois fin de siècle, un jeune idéaliste romantique par sa mère, progressiste par son père, désireux de se lancer dans la carrière littéraire, et qui n'arrive à rien. Une histoire simple, qui pourrait même donner lieu au plus ennuyeux des romans, si n'était le regard d'une justesse et d'une tendresse incroyables que Jacobsen porte sur ses personnages. Souvent les poètes sont un peu étourdis, les psychologues sont par trop précis, mais imaginez un peu quand le miracle se produit et que soudain un auteur parvient à mêler en lui les deux natures.

Ici chaque phrase, en plus de faire preuve d'une intelligence acérée sur la nature humaine, semble extraite d'un long poème en prose, tant les images sont belles, les comparaisons émouvantes, les métaphores sensibles. Avec une grâce rare, Jacobsen peint le portrait d'un homme repu de rêve et qui ne connait que la déception, d'une génération qui à force d'idéal passe à côté de la vie, d'une humanité qui voudrait jouer au Grand mais n'est qu'un enfant abandonné et fragile. Douces et banales tragédies. En attendant que les choses changent, semble soupirer Jacobsen, faisons de notre malheur une chance, et profitons de la fugacité des choses, puisque la beauté n'est belle que de ne pouvoir durer.
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Niels Lyhne est un roman d'apprentissage dans lequel le personnage tente de donner un sens à sa vie, tout en s'affranchissant de la foi de ses ancêtres – il célèbre la nature sans pour autant y voir la manifestation d'une providence, comme si l'homme était constamment confronté à des forces contraires et arbitraires – des rêves et des illusions qui consolent. A l'amour et l'amitié se succèdent souvent les drames et les déceptions, le sentiment d'une solitude infinie. le style de Jacobsen est plein de délicatesse et de sensualité mais aussi marqué par une profonde mélancolie et une vision tragique. Il orne son intrigue de réflexions pénétrantes qui donnent à son récit une dimension philosophique et poétique autant que romanesque. Et l'émotion, à chaque page, affleure, en sorte qu'il est difficile de ne pas en être bouleversé.
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Fabuleux ! pour ce livre je donnerais tout Flaubert. Ecriture limpide, sans effets de style (c'est une traduction de Mme R. REMUSAT).

Ce roman traite, à travers les différents points de vue incarnés par les personnages, des rapports de la poésie et de la réalité, et finalement, en filigrane, des rapports de la poésie et de Dieu.

Niels Lyhme, le héros de JACOBSEN est poète dans l'âme. Niels Lyhme est athée aussi, mais d'un athéisme ni borné, ni ricanant : c'est un athéisme qui est une quasi-croyance et qui s'accompagne d'une vision poétique du sens de la vie, de la nature, de la souffrance, de l'amour et de la mort. Et du don de soi.

Après lui avoir fait perdre successivement sa femme et son enfant, Jacobsen écrit de Niels : "Il avait abandonné son drapeau. En effet, ces grands mots, athéisme et sainte cause de la vérité, n'étaient que des mots pompeux décernés à cette chose si simple : accepter la vie comme elle est avec ses inéluctables lois."

En faisant un saut au-dessus de l'abîme, j'oserai pour ma part, ajouter que la vie avec ses inexorables lois sont un attribut divin car la Nature selon Spinoza, c'est Dieu.

Spinoziste, JACOBSEN ? Peut-être.

Niels a abandonné toute revendication non religieuse (son athéisme est une croyance) en même temps que ses prétentions à devenir poète : à son insu, il s'est fait caisse à résonance pour autrui et lui-même, sa vie est devenue poésie comme son athéisme est devenu foi.

Niels a aimé, beaucoup.

Niels Lyhme est une grande oeuvre, le livre préféré de Rilke.
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Je viens de terminer la lecture de ce classique de la littérature danoise : Niels Lyhne de Jens Peter Jacobsen.
C'est indubitablement un livre remarquable et je regrette de ne pas l'avoir apprécié à sa juste valeur. Je l'ai lu dans une période d'activités et de voyages et ce n'est assurément pas un livre qu'on emporte avec soi pour le lire après une journée de randonnée. Ni une lecture de plage.
Mais ce classique du romantisme où le héros s'initie à la vie et en cherche le sens dans l'amour, l'amitié, l'art, la nature et la famille est écrit tout en poésie et en profondeur.

Un extrait :
"- Il n'y a pas de Dieu, et l'homme est son prophète, dit Niels avec amertume et tristesse.
- Oui, n'est-ce pas ? dit Hjerrild railleusement ; puis, après un silence : l'athéisme est cependant terriblement insipide et, à la fin du compte, son but n'est qu'une humanité sans illusion. La foi en un Dieu qui gouverne et qui juge, voilà la dernière des grandes illusions de l'humanité, et quand cette illusion aura disparu, que restera-t-il ? Ah !oui, je sais, elle sera devenue plus raisonnable ! En sera-t-elle pour cela plus riche et plus heureuse ? Je ne le pense pas.
- Mais, s'écria Niels Lyhne, ne comprenez-vous donc pas que le jour où l'humanité pourra librement triompher, Dieu n'existant plus, ce jour-là verra naître, comme par enchantement, un ciel nouveau et une terre nouvelle ? Alors, seulement, le ciel deviendra l'espace libre et infini, à la place de cette menace sur nos têtes ! La terre enfin nous appartiendra, comme nous appartiendrons à la terre lorsque l'autre monde obscur de béatitude ou de tourments aura éclaté comme une bulle ! La terre sera notre véritable patrie, le pays réel de notre coeur, où nous ne serons plus des étrangers invités pour quelques misérables années ; l'Eternité nous appartiendra. Quelle intensité prendra la vie qui, en elle-même, contiendra tout sans rien espérer d'extérieur à elle ! L'immense courant d'amour qui monte maintenant vers le Dieu, objet de nos croyances, se répandra sur la terre lorsque le ciel ne sera plus qu'un désert ; ce courant s'épanchera amoureusement sur toutes les vertus et les qualités humaines dont nous avons orné la divinité pour la rendre digne de notre amour : bonté, justice, sagesse ! qui pourra les énumérer toutes ? Ne comprenez-vous pas toute la noblesse dont sera revêtue l'humanité, lorsque, libre, elle pourra vivre sa vie et mourir sa mort sans crainte d'enfer ou espoir de ciel ? Elle ne redoutera plus qu'elle-même et en elle seule elle mettra ses espérances."


Si vous aimez la littérature romantique, ce livre en est l'un de ses chefs-d'oeuvre.
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Citations et extraits (27) Voir plus Ajouter une citation
De tous côtés on apercevait des baies aux tons chauds, des noisettes, des glands brillants, et les fruits écarlates de l'églantier. A côté des hêtres dépouillés de leur verdure, les cormiers ployaient sous le poids des grappes rouges, d'une senteur aigre comme celle du cidre. Des mûres tardives gisaient, noires ou brunes, sur les tas de feuilles humides, au bord des sentiers ; on trouvait au milieu des bruyères des cerisiers odorants, les framboisiers sauvages montraient leurs fruits d'un rouge éteint. Les fougères prenaient en se fanant mille nuances diverses ; et quant à la mousse, elle fournissait ample matière à étude, car il n'y avait pas seulement la mousse vigoureuse et drue des terres et des bas-fonds, qui ressemblait à des sapins, à des palmes, à des plumes d'autruche, il y avait encore la mousse légère qui revêtait les troncs d'arbre et faisait songer aux champs de blé des elfes : elle s 'élançait en tiges menues terminées par des minuscules boutons pareils à des épis.
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Ils n'étaient pas amoureux l'un de l'autre, ou, dans tous les cas, ils l'étaient fort peu. C'était une de ces vagues et agréables liaisons qui souvent s'établissent entre un homme et une femme ayant dépassé la première jeunesse: une sorte d'été vite envolé où l'on se promène côte à côte en prenant des airs de galanterie discrète, où l'on s'admire soi-même avec les yeux d'un autre et où l'on se fait de douces caresses avec la main d'un autre.
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Les années avaient passé ... L'univers n'était plus ce monde de merveilles qu'il était naguère. Les terreurs suscitées par les contes n'habitaient plus les coins ombreux derrière les vieux sureaux, ni les chambres mystérieuses sous les combles. Et la colline qui, aux premières trilles de l'alouette, se couvrait de pâquerettes, le ruisseau qui recélait tant de plantes et de bestioles, les pentes sauvages du ravin, tout cela se réduisait à être des pauvres fleurs, de petites bêtes et des cailloux très ordinaires. La baguette de la fée ne voltigeait plus par là.
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Malheureusement, il n'y avait pas dans son entourage une seule individualité supérieure qui pût lui donner la mesure de sa valeur et de son intelligence, à elle ; pas un caractère se rapprochant du sien. De sorte qu'elle s'habitua à se considérer comme un être à part, unique, une espèce de plante des tropiques née sous un ciel inclément et qui ne pouvait s'épanouir en liberté ; dans un climat plus doux et sous un soleil plus chaud, elle aurait poussé des tiges élancées avec d'éclatantes fleurs merveilleusement belles. Elle croyait être cette plante à laquelle manquaient ses vraies conditions d'existence, et elle se consumait dans les rêves et les désirs.
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- L'athéisme est cependant terriblement insipide et, à la fin du compte, son but n'est qu'une humanité sans illusion. La foi en un Dieu qui gouverne et qui juge, voilà la dernière des grandes illusions de l'humanité, et quand cette illusion aura disparu, que restera-t-il ? Ah ! oui, je sais, elle sera devenue plus raisonnable ! En sera-t-elle pour cela plus riche et plus heureuse ? Je ne le pense pas.
- Mais ,s'écria Niels Lyhne, ne comprenez-vous donc pas que le jour où l'humanité pourra librement triompher, Dieu n'existant plus, ce jour-là verra naître, comme par enchantement, un ciel nouveau et une terre nouvelle ! Alors, seulement, le ciel deviendra l'espace libre et infini, à la place de cette menace sur nos têtes ! La terre enfin nous appartiendra, comme nous appartiendrons à la terre lorsque l'autre monde obscur de béatitudes ou de tourments aura éclaté comme une bulle ! La terre sera alors notre véritable patrie, le pays réel de notre cœur, où nous ne serons plus des étrangers invités pour quelques misérables années; l’Éternité nous appartiendra. Quelle intensité prendra la vie qui, en elle-même, contiendra tout sans rien espérer d'extérieur à elle ! L'immense courant d'amour qui monte maintenant vers le Dieu, objet de nos croyances, se répandra sur la terre lorsque le ciel ne sera plus qu'un désert; ce courant s'épanchera amoureusement sur toutes les vertus et les qualités humaines dont nous avons orné la divinité pour la rendre digne de notre amour : bonté, justice, sagesse ! qui pourra les énumérer toutes ! Ne comprenez vous pas toute la la noblesse dont sera revêtue l'humanité, lorsque, libre, elle pourra vivre sa vie et mourir sa mort sans crainte d'enfer ou espoir de ciel ? Elle ne redoutera plus qu'elle-même et en elle seule elle mettra ses espérances. Considérez aussi le développement de sa conscience et la fermeté qu'elle acquerra, lorsque le stérile repentir et une vague humilité ne seront point une expiation suffisante, lorsque nul pardon ne sera plus possible et que le bien sera la récompense du bien et le mal le châtiment du mal.
- Il faut que vous en l'humanité une foi monstrueuse; l'athéisme lui imposerait-il donc des exigences plus grandes encore que ne le fait le christianisme ?
- Evidemment !
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