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EAN : 9782073061041
272 pages
Gallimard (21/03/2024)
4.57/5   96 notes
Résumé :
12 avril 65 après Jésus-Christ, dans les environs de Rome.
Des soldats en armes envahissent la villa de Sénèque, porteurs d’un ordre de l’empereur : le philosophe doit se donner la mort.
Sénèque écrit alors une ultime lettre à son ami Lucilius, dressant pour lui le bilan de sa vie. Durant quinze années, il a été le précepteur, puis le conseiller, puis l’ami de celui qui exige désormais sa mort : l’empereur Néron.
Parce qu’il vit ses dernières he... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (47) Voir plus Ajouter une critique
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L'Ami du Prince est une véritable prouesse littéraire justement mise en valeur par le Prix Orange du Livre 2024. Marianne Jaeglé que je lis pour la première fois, m'a embarqué en laissant parler Sénèque et j'ai été subjugué, passionné par ce récit d'un homme qui va se donner la mort dans sa villa, à l'écart de Rome, à Nomentum.
Lucius Anneus Seneca, se sachant condamné par celui qu'il a formé et conseillé, l'Empereur Néron, Nero en latin, demande un délai au préfet Gavius Silvanus dont les soldats encerclent sa propriété, le 12 janvier 65 de notre ère. Il met ce temps à profit pour écrire une longue lettre à son ami Lucilius qui vit à Messine. Cette lettre, imaginée par Marianne Jeaglé qui a choisi de laisser parler Sénèque, m'a fait vivre des moments délicieux, stressants, terribles et pleins d'incertitude ; ils m'ont permis d'appréhender au plus près la vie de ceux qui détenaient le pouvoir à Rome.
Malgré tout, le peuple n'est pas oublié. Il est souvent fait allusion aux esclaves, aux affranchis, aux serviteurs, aux hommes d'armes dont la vie ne pèse pas lourd devant les caprices de ceux qui ont le pouvoir.
Alors que tout commence avec un tableau magnifique, plein de calme et de sérénité, j'apprends que l'issue annoncée est inévitable. Pauline, l'épouse bien aimée de Sénèque, pleure mais je me demande pourquoi le philosophe doit mourir et cette question va me tarauder jusqu'au bout de L'Ami du Prince, titre officiel décerné à Sénèque.
C'est après avoir passé huit années d'exil en Corse qu'à 53 ans, il est rappelé par Agrippine afin d'enseigner l'éloquence à son fils, Domitius. Ce retour en grâce a, en même temps, impressionné et inquiété Sénèque. Durant son exil corse, il avait écrit un traité, de la colère, à propos de l'éducation d'un enfant. Avec le fils d'Agrippine qui vient de contracter un quatrième mariage avec l'empereur Claude, il va pouvoir mettre en application ses préceptes.
Régulièrement, Marianne Jaeglé m'attache aux pas de Sénèque et me gratifie d'une visite détaillée de Rome, ville qu'elle connaît parfaitement. de plus, l'autrice note, de temps à autre, une petite phrase en latin tout en ayant la délicatesse de la traduire aussitôt.
Les turpitudes de ces familles qui tentent de contrôler un empire immense, sont détaillées, expliquées et je tente de comprendre ce qui motive ces gens pour qui la vie humaine n'a guère de valeur mais qui, surtout, ne pensent qu'à s'enrichir, si possible en confisquant les biens de celui qu'ils viennent d'abattre.
Si Marianne Jaeglé sait bien me guider dans Rome, elle sait aussi parfaitement détailler les menus des agapes princières et présenter la disposition des convives qui, hélas, ne sortiront pas toujours vivants comme cela est bien raconté par Sénèque lui-même… Son souci impressionnant du détail des lieux rend ma lecture des plus enrichissantes tout comme l'étude des caractères et de leur évolution.
Domitius est devenu l'Empereur Nero grâce à … Agrippine. Il semble assidu aux enseignements de Sénèque mais son évolution ne tarde pas à bifurquer lorsqu'il se pique d'être reconnu comme le plus grand des artistes. Très vite, Sénèque voit son élève lui échapper même si, avec Burrus, son ami, qui est préfet du prétoire, il tente d'endiguer cela.
Ma lecture de L'Ami du Prince est un véritable délice car je rencontre quantité de phrases merveilleuses, superbement écrites. Il faudrait toutes les mettre en exergue. le rude débat de conscience qui agite Sénèque l'amène à un cruel dilemme quand il est sollicité par ceux qui veulent abattre cet empereur de plus en plus dangereux. L'incendie de Rome, parfaitement décrit, est un exemple éloquent des doutes qui peuvent subsister devant le rôle joué par Nero qui n'hésite pas à faire mettre en croix les premiers Chrestos puis à les faire transformer en torches vivantes…
Sénèque, en bon philosophe, sait tirer un bilan équilibré terriblement émouvant de son passage sur terre avant de nous gratifier d'une magnifique conclusion, tellement juste. La lecture de L'Ami du Prince m'a profondément marqué et j'aurais vraiment aimé retenir quantité d'informations et de leçons que contient un ouvrage réussi grâce à la plume et au travail de Marianne Jaeglé.
Ce Prix Orange du Livre 2024 est amplement mérité et je remercie Geneviève Munier comme Lecteurs.com et les éditions Gallimard, collection L'Arpenteur qui m'ont permis cette lecture à la fois passionnante, enrichissante et édifiante.

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« Voilà, c'en est fini de moi. » Ainsi s'ouvre le roman, en fait une ultime lettre que le philosophe Sénèque écrit à son ami Lucilius, gouverneur romain de Sicile depuis sa villa de Nomentum, à une vingtaine de kilomètres de Rome. Nous sommes le 12 avril 65 et une cohorte arrive lui demandant de se suicider sur ordre de l'empereur Néron. Il a la journée.
*
L'historien romain antique Tacite évoque ces derniers moments de Sénèque, parlant d'un discours prononcé juste avant son suicide, pris en note par ses secrétaires mais perdu au fil des ans dans le chaos des siècles. Marianne Jaeglé s'engouffre dans ce vide pour essayer d'imaginer les mots du philosophe :« j'ai laissé Sénèque parler librement, comme si j'étais sa secrétaire » dit-elle dans la postface.

La longue lettre qu'elle imagine tient à la fois de la confession que de l'introspection sur ces seize années passées aux côtés de l'empereur Néron dont il a été d'abord le précepteur, chargé par sa mère Agrippine de l'entraîner à l'éloquence et de le familiariser avec les institutions impériales, puis le plus proche conseiller, honoré du titre d'Ami du prince. Il y revient sur les erreurs commises -sans chercher à s'en dédouaner - et sur sa relation complexe avec Néron, le « monstre »qu'il a éduqué. Soit la chronique d'une catastrophe annoncée.

C'est un roman très agréable à lire grâce à la fluidité de la plume, très accessible aussi pour réviser sa petite histoire romaine. On y retrouve tous les grands événements de la vie de Néron, racontés de façon très lisible pour les non spécialistes, ainsi que le casting complet ( son beau-père l'empereur Claude auquel il succède, sa terrible mère Agrippine, le jeune fils de Claude Britannicus, le poète Lucain neveu de Sénèque etc ).

Factuellement, tout est vrai, il restait donc à Marianne Jaeglé de construire la réalité psychique de chaque personnage ainsi que leurs interactions. Elle le fait avec une modernité très convaincante. Elle dépeint par exemple un Néron comme un psychopathe en formation, marqué par une histoire familiale d'une violence et d'une instabilité inouïe, sous le joug d'une mère ambitieuse et avide qui le lui accorde aucune marque d'affection.

Le plus prenant dans ce roman très réussi est le face-à-face entre deux hommes aux antipodes : le philosophe épris de vertu stoïcienne et le jeune empereur qui s'abandonne à ses pulsions criminelles. Durant les cinq premières années du règne de Néron, Sénèque pense avoir réussi à former un dirigeant soucieux d'équité, de justice sociale, attentif au bien commun, aimé de son peuple et estimé du Sénat.

Tout bascule avec l'assassinat de Britannicus. Et c'est là que la réflexion sur le poids du pouvoir se déploie avec des résonances très contemporaines. le constat est amer. Sénèque a commencé à éduquer Néron à douze ans, et cela semble trop tard, il reste toujours une part sombre en l'Homme, une tentation du Mal que l'on ne peut éradiquer surtout lorsqu'elle est exacerbé par l'hyper pouvoir que possède un homme d'Etat. Durant tout le roman, alors que les crimes se multiplient, on se demande jusqu'à quand Sénèque a été dupe.

Et c'est très intéressant de voir ce philosophe idéaliste se confronter au réel et devoir choisir entre de très très mauvaises solutions ou très mauvaises. Il prend le risque d'agir, d'être acteur dans le jeu politique, préférant rester pour essayer de limiter les dégâts dans l'intérêt de l'Etat, quitte à se compromettre en fermant les yeux sur des agissements coupables et la folie grandissante de son ancien élève.
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Ce roman nous ramène en avril 65 après Jésus-Christ, dans les environs de Rome.
Sénèque voit des soldats en armes envahir sa villa. II sait immédiatement qui les a envoyés et pour quoi.
Le message porté par le préfet Silvanus est clair, l'empereur lui ordonne de se donner la mort.
Le philosophe va alors profiter des quelques heures que le chef de garde lui accorde pour rédiger une ultime lettre à l'intention de son ami Lucilius, une lettre dans laquelle il explique comment il a passé ses quinze dernières années auprès de celui pour qui il a d'abord été le précepteur, puis le conseiller, puis l'ami, celui qui aujourd'hui réclame sa mort : Néron.
Maintenant que ses dernières heures sont arrivées, il regarde en arrière et se souvient.
C'est ainsi que Marianne Jaeglé, dans L'Ami du Prince, fait revivre la confrontation entre celui qui a tenté de faire d'un enfant de douze ans le prince le plus accompli qui soit, et celui qui est devenu un tyran.
Sénèque, avait durant son exil de huit ans en Corse, écrit entre autres, un traité « de la colère », développant ses conceptions en matière d'éducation et acquis une réputation de sagesse. À la demande d'Agrippine, l'épouse de Claude, il a accepté de s'occuper du fils de cette dernière et de devenir son guide, avouant que dès lors qu'Agrippine qui gagnait chaque jour en influence, avait obtenu que sa condamnation à l'exil soit levée, elle avait fait de lui son obligé.
Dans ces derniers moments d'introspection, beaucoup de questions taraudent Sénèque. Pouvait-il empêcher ce qui est arrivé et que tout aille différemment et qu'aurait-il dû faire pour y parvenir ?
Cette brillante réflexion sur les intrigues du pouvoir, l'attrait qu'il ne manque pas de susciter, les compromissions que tôt ou tard, il engendre quasi nécessairement, la lutte entre les fervents de la démocratie et les futurs despotes, n'a pas pris une ride et se révèle toujours d'actualité.
Ce roman oblige également à méditer sur les principes d'éducation et le rôle plus ou moins influent de l'entourage.
L'Ami du Prince est un roman historique richissime fort bien documenté qui se lit comme un thriller avec de multiples trahisons, rebondissements, meurtres et une angoisse latente à chaque page.
En lisant ce livre, c'est la voix de Sénèque que j'ai entendue tant Marianne Jaeglé a su rendre vivant son discours, ses réflexions, ses questionnements et ses doutes.
Avec une immense maestria, l'autrice nous fait déambuler, sur les pas de Sénèque, dans l'urbs, nous faisant découvrir cette Rome de l'Antiquité. Elle nous permet aussi de découvrir toutes les arcanes du pouvoir, la configuration géopolitique de l'époque, les opérations militaires et, en insérant quelques phrases en latin, bien décryptées, c'est à un véritable retour dans le passé qu'elle nous emmène pour notre plus grand plaisir.
Marianne Jaeglé a obtenu pour L'Ami du Prince le prix Orange du livre 2024, un prix bien mérité, même si pour moi, Camera obscura de Gwenaëlle Lenoir le méritait tout autant !

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Ce 12 avril 65 après Jésus-Christ, le philosophe Sénèque confie dans une longue lettre à son ami Lucilius ses déceptions, espoirs et doutes qui ont jalonné sa vie. Cette lettre est la dernière, il sait qu'il doit mourir, poussé au suicide par l'empereur Néro, ce prince dont il a été le précepteur, le conseiller et, surtout l'ami, titre important dans la curie.

« Ce soir donc, je serai mort…
Je ne serai pas emmené à Rome avec les pieds et les mains entravés ; on ne me fera pas subir de supplices pour me faire avouer des crimes que je n'ai pas commis. On n'essayera pas de m'extorquer les noms d'imaginaires complices. L'empereur veut ma mort, c'est tout. Il l'aura, et je lui suis reconnaissant de ne pas exiger davantage. »

La vie de Sénèque aura été multiple et bien remplie. Il a déjà échappé à une condamnation à mort transformée en exil en Corse durant huit ans années qu'il mettra à profit pour écrire « de la colère » le philosophe puise son inspiration dans les thèses de l'école stoïcienne et c'est ce courant philosophique hellénistique qui va influer sur sa vie et sur ses décisions.
C'est Agrippine qui le sort de son bannissement et le fait revenir à la cour afin de servir de percepteur à son fils Domitius afin qu'il devienne « le prince le plus accompli qui soit » et de le rendre populaire. Vaste programme auquel Sénèque va se consacrer, ne ménageant ni sa peine ni son temps.
Il est passionnant d'entendre la voix du philosophe par le truchement de la romancière. Il nous raconte avec sincérité le rôle qu'il a joué dans l'histoire tragique de l'empire. A ses débuts, il a tenté d'émanciper le jeune Domitius d e la tyrannie néfaste de cette mère ambitieuse afin qu'il prenne confiance en lui.

« Oui, je me suis imaginé qu'Agrippine partageait, dans le fond, mes conceptions en matière d'éducation. Mais sans doute m'a-t-elle plutôt choisi parce que mes écrits d'une manière générale, mais surtout mes tragédies, avaient du succès. Au sénat aussi, mon éloquence était reconnue. »

Domitius va devenir empereur à 17 ans sous le nom de Nero. Peu à peu, Sénèque, qui est son plus proche conseiller avec Burrus, va constater que son ancien élève, égocentrique et imprévisible, préfère s'énivrer dans des fêtes décadentes plutôt que de se préoccuper du peuple e t de l'empire.
Se posent alors de nombreuses questions sur la transmission due la connaissance et l'influence exercée sur un jeune homme, ainsi que sur l'exercice du pouvoir et ses conséquences.
Dans cette introspection où toute vanité est bannie, Sénèque tente d'analyser et de comprendre pourquoi, après cinq ans de prospérité, l'empire vacille, affaibli par les intrigues, les meurtres et la mégalomanie du jeune empereur trop sensible aux louanges et qui s'entoure des pires conseillers.
Marianne Jaeglé a su faire de Sénèque un personnage attachant et sincère avec lequel on est en empathie. Elle a su construire sa biographie romancée à partir des connaissances sur le philosophe qui nous sont parvenues tout en brodant habilement les points obscurs. Son récit est plausible, la lecture fluide et ce roman se lit avec plaisir et a assouvi ma curiosité.
J'ai aimé m'immerger dans cette période de l'empire romain à son apogée. On découvre les débuts du christianisme tout en se frottant aux préceptes stoïciens de Sénèque qui vont influencer de nombreux auteurs.
Servi par une écriture ample et déliée, ce roman nous fait entrer dans l'histoire de manière plaisante.
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Les dernières heures de Sénèque, entre doutes et regrets, mais ô combien humain.

Merveilleuse Marianne Jaeglé qui, pour nous être agréable choisit une écriture agréable, simple mais aussi excellemment érudite et pédagogue. Rien à jeter ni dans la forme, une lettre, ni dans le fond, la fin nous laissant sans voix.

Nous sommes le 12 avril de l'an 65, dans les environs de Rome. Sénèque est le précepteur du grand Néron ; oui mais voilà, il se meurt. Et mourir, tout le monde en conviendra, n'est pas chose aisée surtout lorsqu'on sent sa dernière heure arriver à pas de géant. Et et et, si l'on est philosophe stoïcien, la tache n'en sera que plus rude. Où sont les belles gesticulations cérébrales lorsque la mort frappe à la porte ? Où sont les explications ou encore les solutions à tout questionnement philosophique si la dure réalité vous fiche à la porte de la vie ? Que peuvent les échanges entre têtes pensantes pour rendre la vie plus douce, plus épicurienne ? Que deviennent les grandes résolutions de toute une vie lorsque le clap de fin est annoncé ?

Pourquoi se meurt-il me demanderez vous ? ben parce que l'empereur Néron a envoyé ses soldats donnant l'ordre à Sénèque de se donner la mort. Celui qui fut son ami durant quinze longues années, demande sa mort. Il le savait imprévisible, mais le choc n'en est pas moins rude.
Sans tarder il se met à l'écriture d'une ultime lettre à son ami Lucilius sur son parcours aux côtés de Néron. Avant de partir, il a besoin de rédiger son bilan de vie, mais aussi « tenir un discours de vérités sur son élève ». Il peut maintenant se permettre d'« interroger la réalité du pouvoir de ce jeune tyran sans merci » et d'ouvrir une réflexion sur la tyrannie. Par contre il n'oublie pas d'affronter ses propres erreurs, ses convictions erronées concernant cet idéal qu'il pensait trouver dans l'Empire. Aurait-il d'ailleurs pu agir autrement ?

Nous pourrions probablement, comme Sénèque, passer en revue quelques bons souvenirs de vie mais surtout nous pourrions nous aussi douter, regretter une ou plusieurs parties de notre vie : celle de nos faits et gestes, de nos pensés et certitudes, Comme pour celle de Sénèque, notre balance risque de pencher salement du mauvais côté … quoique j'ose toujours encore espérer que non.


Marianne Jaeglé nous offre un livre impossible à résumer, impossible à décrire. Il se lit, puis se vit. On se met à rêver sur une page, à réfléchir sur l'autre. Plus philosophique on ne fait pas et pourtant, cette philosophie là est accessible à tous. D'une simplicité et d'une évidence irréfutables. le peuple comprend les mêmes choses que le Prince. Au seuil de la vie, le peuple et le Prince ne font plus qu'un.

Certains classent ce livre en roman historique. Il l'est certes, mais il est tellement plus. Il éveille nos sens, il déterre notre nostalgie, il fait remonter nos déceptions, il nous rappelle nos désolations. Ce livre est d'hier mais pourrait tout autant être de demain. Les personnages sont absolument interchangeables avec des personnages du XXIe siècle. Et quelle documentation sur la famille Julio-Claudienne l'autrice a rassemblée pour en retirer un jus d'une telle concentration !
Alors où le ranger dans le rayonnage de nos amis libraires ? Je n'ai pas la réponse. La rubrique ‘'roman'' tombe à pic dans le cas de « L'ami du Prince ».

Citations :
 « Ou plutôt, à cette époque-là, suis-je moi-même aveuglé par l'éclat de ma réussite. J'ai rêvé d'être utile à l'Empire et j'obtiens des résultats inespérés. J'ai rêvé un empereur sage, un sénat prenant des décisions sans haine, ni crainte ni colère. Et je vois cela se réaliser peu à peu sous mes yeux. Qui n'aurait été comblé de fierté ? Je me considère donc le plus heureux des philosophes, et le plus fortuné des hommes, mon ami. Ainsi sommes-nous conduits par nos désirs, Lucilius, et les dieux nous mènent là où ils le veulent. Voilà pourquoi quand j'ai envie de m'amuser d'un fou, je n'ai pas à chercher bien loin. Je me regarde dans un miroir et je ris. »
« Pour parler juste, Lucilius, il faut penser justement. Et penser justement implique de mettre en rapport ses pensées, son discours et ses actes. Aujourd'hui, j'en suis intimement convaincu, Lucilius, l'apprentissage de toute notre vie pourrait se résumer à ceci : un usage approprié du langage. Quand un homme n'aurait appris que cela, au cours de sa vie, il n'aurait pas vécu en vain. »
« C'est pour la vie que nous apprenons, non pour l'école. À quoi servirait la philosophie si elle ne nous aidait pas à nous conduire dans l'existence ? »
« La justice hâtive est une marâtre de malheur. »
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Citations et extraits (79) Voir plus Ajouter une citation
Ô Lucilius, celui qui cherche la sagesse est un sage, mais celui qui croit l’avoir trouvée est un fou !
(page 257)
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Philosopher, c’est apprendre à mourir. Je n’ai jamais rien fait d’autre, Lucilius.
(page 255)
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Pour ma part, j’ai la sensation d’avoir combattu une créature qui, au fil des ans, n’a cessé de grandir, tandis que mon pouvoir sur elle diminuait, un être qui se renforçait tandis que l’âge me rendait plus faible chaque jour.
(page 254)
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Je n’étais pas celui que je m’étais figuré être, le philosophe du prince, le prince des philosophes, ayant su enseigner la vertu à un empereur. Avec les meilleures intentions du monde, j’avais éduqué un monstre. Nero commettrait encore de crimes, et je ne pourrai l’en empêcher.
(page 236)
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J’aurais pu jouer de la flûte, pendant toutes ces années où je tentais de lui peindre le bonheur d’être sage, d’être bon, d’être vertueux, pensai-je. Le résultat n’aurait pas été différent. Ou, plutôt si, il l’aurait été. Si j’avais joué de la flûte, il m’aurait sûrement écouté avec plaisir.
(pages 216-217)
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Vidéo de Marianne Jaeglé
Yann de la librairie le Divan partage ses lectures : «Une écriture magnifique pour une sujet passionnant, tout est réuni pour un grand moment de lecture ! Séneque, Néron, Agrippine et Britannicus sont les acteurs d'une tragédie résolument moderne !»
Notre mot sur L'Ami du prince de Marianne Jaeglé, lauréate du Prix Orange du livre 2024, publié aux Éditions Gallimard : https://www.librairie-ledivan.com/livre/9782073061041-l-ami-du-prince-marianne-jaegle/
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