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Julie Wolkenstein (Éditeur scientifique)Jean Pavans (Traducteur)
EAN : 9782080711816
274 pages
Flammarion (13/05/2004)
3.79/5   97 notes
Résumé :
Sous ce titre métaphorique, Henry James devait composer, en 1903, un très singulier colloque sentimental qui est en même temps, l'une de ses nouvelles les plus abouties.
Au hasard d'une rencontre dans une somptueuse demeure londonienne où rayonne la poésie de l'histoire, John Marcher éprouve soudain face à May Bartram, le sentiment de retrouver le fil d'une histoire dont il aurait manqué le début. Pour quel mystérieux accomplissement Marcher a-t-il si soigneu... >Voir plus
Que lire après Le Motif dans le tapis - La Bête dans la jungleVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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John Marcher se croit promis à un incroyable destin. C'est certain, un jour, il sera chaviré, bouleversé, peut-être même anéanti mais il va vivre quelque chose de fort! Et comme le dire autour de soi serait passer pour un fou, notre héros choisit le secret. Secret partagé pourtant, avec une amie qui, au fil des années d'attente, prendra de plus en plus de place dans sa vie...
Puissante et bouleversante nouvelle sur le thème de l'attente et des actes manqués car à l'automne de sa vie, alors que son amie se meurt, notre héros attend toujours et il lui faudra se confronter à la mort pour comprendre enfin que le grand bouleversement était là, à portée de main, dans la patience, la compréhension et la fidélité de cette douce femme qui l'aimait. Alors certes, notre héros est sans doute un idiot égocentrique, mais sa douleur est si profonde qu'elle nous bouleverse. Il fut aveugle, oui, pendant trop longtemps mais les regrets le feront enfin se sentir vivant. "Il n'est jamais trop tard" lui disait son amie....
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Se lancer dans la lecture d'un roman d'Henry James , c'est ouvrir la porte à des questionnements... parfois sans réponse, c'est être à 'affût du moindre indice lâché par l'auteur pour nous permettre de mieux comprendre... ou mieux nous égarer. Bref, c'est accepter un "brassage de neurones" stimulant pour certain.e.s, exaspérant pour d'autres.
Les deux nouvelles que je viens de lire : le Motif dans le tapis et La Bête dans la jungle, n'échappent pas à cette règle.
Toutefois, je n'ai pas éprouvé le même plaisir de lecture pour les deux. le Motif dans le tapis m'a beaucoup déçu. Cette nouvelle, très courte, m'a paru n'être qu'un canevas tant sur le plan de l'intrigue - la recherche du sens caché d'une oeuvre - que sur celui des personnages qui ne sont qu'ébauchés.
Tout autre est : La Bête dans la jungle.La thématique du secret s'y déroule avec une grande virtuosité et entraîne la lectrice ou le lecteur dans le déchiffrement d'une sorte de rébus dont il n'aura peut-être jamais la clé...
Le fil de l'intrigue est pourtant simple : le héros, Marcher, confie - sous le sceau du secret - à une amie, May Bartram, qu'il se sent destiné à un sort mystérieux qui le hante et le paralyse. Et ce fil d'Ariane va se dérouler tout au long de la nouvelle, de façon extrêmement retors.
Qui est vraiment Marcher ? L'avatar d'un héros tragique accablé par un destin inexorable ? Un paranoïaque qui se réfugie dans des interprétations délirantes face à un avenir incertain ? Ou encore un homme qui a refoulé un ancien traumatisme dont la seule trace tangible serait cette peur irraisonnée devant une vie qui n'est que tourments intérieurs ou façade sociale ? A nous de choisir...
Et l'aide qu'il va demander à May Bartram ne va pas éclaircir la situation, au contraire, car va s'instaurer entre les deux personnages une relation complexe. le narcissisme forcené de Marcher ou son désespoir - tout dépend du point de vue adopté - vont l'amener à quémander la complicité inconditionnelle et à sens unique de May Bartram.
Mais cette dernière, dans les longs dialogues ciselés auxquels se livrent les deux personnages, va se révéler d'une grande duplicité... Son côté sauveuse omniprésent dans la première partie va laisser la place à une autre facette du personnage lorsqu'elle va tomber malade. Un côté sphinx, un peu inquiétant va surgir, elle ne parlera plus que par énigmes pour mieux ménager ou faire souffrir son ami ? On se pose la question... En tout cas, elle essaiera de lui faire comprendre qu'elle aussi est détentrice d'un secret qu'elle ne peut révéler.
Et le dénouement ? Il est à la hauteur du reste. Brutal, énigmatique, il louvre la porte à plusieurs interprétations...
J'ai lu presque deux fois cette nouvelle pour en saisir toutes les subtilités et je me suis vraiment fait plaisir.
Bien sûr la note attribuée ne concerne que la deuxième nouvelle mais je trouvais absurde de mettre une note moyenne qui n'aurait correspondu à rien !
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Pour Henry James « Dépeindre la vie des gens n'est rien tant que l'on a pas décrit leurs perceptions ». de fait, il a écrit « La bête dans la jungle » en 1903, inspiré par la mort de Constance Fenimore Woolson, à Venise en 1894. Bouleversé, James se prépare à aller assister aux obsèques à Rome mais y renonce en apprenant qu'il s'agit d'un suicide. Solitaire et neurasthénique, elle était probablement amoureuse de lui. L'horreur de ce destin et de ce malentendu trouvera un puissant écho dans ce texte qui est sans doute le plus intime de l'auteur.

James nous emmène donc dans les méandres de la conscience. Un homme et une femme font connaissance. Ils s'étaient déjà rencontrés ; il pense s'en souvenir, elle s'en souvient très bien. Il lui avait alors confié son secret : il vit avec la conviction d'être promis à un sort mystérieux ; un événement extraordinaire, terrible peut-être, fondra sur lui un jour. Ils scellent un pacte étrange : elle sera la compagne de cette attente. Leur vie s'écoule, immobile, inquiète : la “bête” ne se montre pas. Mais, comme le suggère Henri James, n'aura-t-elle pas été, elle, cette femme, le destin qu'il n'a su saisir?

Ce texte aux accents philosophiques est saisissant et Marguerite Duras en a fait une adaptation en 1962 que je vais m'empresser de lire.
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Charles Juliet dans ‘Lambeaux' disait :
« L'existence ne présente pas grand intérêt lorsqu'on n'a pour but que soi-même. »
Henry James, à travers cette nouvelle, nous plonge dans une sorte d'enfermement, un huis clos dans lequel on rencontre John Marcher, un homme à l'humble allure. A ses côtés, une femme, May Bartram, rencontrée dix années plus tôt quelque part en Italie et qu'il recroise par hasard dans une soirée mondaine. Avant même de l'aborder, il ne cesse de la regarder, il est taraudé par le sentiment d'avoir déjà connu cette femme de très près mais il n'arrive pas à restituer avec exactitude quand et où cela a eu lieu. C'est là qu'intervient May Bartram pour rectifier les informations qu'il pensait avoir sur leur dernière rencontre (par exemple, il croyait qu'il l'a connue à Rome mais en fait c'était à Naples). Puis sur un ton malicieux, elle ne manque pas de lui rappeler qu'il lui a confié un secret par le passé. Ce dernier consiste à la croyance délirante (et narcissique avouons-le) que Marcher est promis à un destin incroyable. En effet, d'aussi loin qu'il s'en souvienne, il a toujours été obsédé et pétrifié par le pressentiment qu'un événement bouleversant - exploit glorieux ou chute dévastatrice ? - le guettait. Que quelque chose, à un moment donné de sa vie, va surgir comme une bête tapie dans la jungle de son existence. Lors de ces retrouvailles, il lui avoue que dix ans après, rien ne lui est arrivé. May Bartram, en toute bienveillance, prend son cas très au sérieux et lui promet de le soutenir et d'attendre avec lui quand surviendra « la chose ». Les dialogues entre les deux personnages sont finement ciselés, ils sont à la fois d'une implacable lucidité et d'un ton énigmatique déroutant. le texte est d'une virtuosité narrative exceptionnelle, on s'immisce, sans s'en rendre compte, dans la peau de Marcher à l'affut de la « bête » en vivant de façon abrasive les émotions du personnage.
Henry James offre un récit qui questionne énormément l'emplacement de l'être dans son existence par rapport à la notion du « choix » mais aussi de l'importance de s'engager dans sa vie. Marcher incarne, selon le point de vue, l'image d'un héros tragique accablé par une attente inexorable. C'est un individu tiraillé entre ses idées et son ancrage dans la réalité qui le plonge dans l'incapacité de vivre réellement. Il mène sa vie au gré des jours. C'est en « choisissant » qu'on décide de forger notre Être, or ici, Marcher ne choisit pas. Il attend. Et dans cette attente pesante et égocentrée, Henry James, tel un Dédale, nous jette dans les pensées labyrinthiques de Marcher et c'est à travers un fin fil d'ariane qu'on essaye de suivre ses pas ainsi que du très peu de rais de lumière que l'auteur laisse glisser dans ce récit à l'ambiance feutrée. On l'aura compris, il s'agit avant tout de décrire la psyché et la complexité de l'être humain et ses perceptions. La nouvelle incarne avec brio ce que Henry James disait : « […] Dépeindre la vie des gens n'est rien, tant que l'on n'a pas décrit leurs perceptions ».
La fin, puisque Marcher est resté assis, les bras ballants, et ayant laissé passer les meilleures années de sa vie, suggère qu'il est passé à côté de la « bête » sans qu'il s'en aperçoive, donnant alors un dénouement des plus tragiques. Mais on peut y voir autre chose.
« La Bête dans la jungle » est l'une des plus difficiles lectures qu'il m'est permis d'avoir. En somme, il s'agit là d'un texte brillant et vertigineux, vous ne serez pas à l'abri d'un intense brassage de neurones.
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Toute sa vie Marcher a le sentiment qu'il est promis à un destin extraordinaire, qu'il va lui arriver quelque chose d'exceptionnel, qu'il est différent des autres à cause de "la bête dans la jungle" tapie en lui.
Ces interrogations incessantes l'empêchent de vivre et de porter attention aux autres. Sa quête égoïste et narcissique l'empêche de se rendre compte par exemple de l'amour que lui porte sa compagne. Ne serait-ce pas cela finalement sa "bête" qu'il attend vainement ?
Le héros, en plus d'être un personnage en chair et en os, peut aussi être perçu par le lecteur comme un personnage fictif de roman à qui il doit forcément arriver quelque chose ou comme tout autre chose car s'il n'y avait qu'une solution écrite noir sur blanc, qu'un niveau d'interprétation, on ne serait plus dans un roman de James.
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Citations et extraits (16) Voir plus Ajouter une citation
Pâle comme cire, avec sur le visage des marques et des signes aussi nombreux et fins que s'ils avaient été gravés par une aiguille, la blancheur de ses douces draperies rehaussée par une écharpe d'un vert fané, au ton délicat consacré par le temps, elle était l'image même d'un sphinx serein et raffiné, mais impénétrable, dont la tête, et en fait toute la personne, eussent été poudrées d'argent. C'était un sphinx, mais avec ses pétales blancs et ses feuilles vertes, elle était aussi comme un lis - un lis artificiel, cependant merveilleusement imité et constamment tenu, sous une cloche de verre, à l'abri de la poussière et des souillures, sans être exempt d'un léger fléchissement ni d'un réseau de petites froissures.
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La bête dans la jungle
En tout temps, il s'était cru le moins égoïste des hommes, portant concentré en lui-même le fardeau de sa perpétuelle inquiétude toujours avec calme, avec retenue, se gardant d'en parler, d'en laisser entrevoir le moindre indice ni l'effet sur sa vie, de demander aux autres aucune concession à son caractère, et faisant pour sa part toutes celles qu'on lui demandait. Il n'avait pas cherché à imposer aux gens la curiosité de connaître ce phénomène : "un homme hanté", si forte qu'en eût été la tentation, lorsqu'il entendait dire à certains qu'ils se sentaient vraiment "désaxés". S'ils étaient vraiment aussi désaxés que lui - lui qui n'avait pas connu une heure d'équilibre dans sa vie - ils sauraient alors ce que cela voulait dire.
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Quand enfin ils se mirent à parler, la pièce où ils venaient de se rencontrer, réputée pour le très beau portrait au-dessus de la cheminée, avait été désertée et ils étaient seuls ; l'enchantement de ce rare instant venait de ce qu'avant même de prononcer un seul mot, ils s'étaient tacitement entendus pour rester seuls et par bonheur, cet enchantement trouvait partout un écho. C'était d'abord la splendeur de Weatherend qui ne comptait pas un endroit sans quelque merveille digne qu'on s'y attardât. C'était aussi la façon qu'avait ce jour d'automne qui déclinait d'entrer par les hautes fenêtres et celle encore qu'avaient les derniers feux du couchant de transpercer le ciel bas et sombre et de s'étirer en un long rayon qui jouait sur les vieux lambris et les vieilles tapisseries, sur les vieux ors et sur les couleurs fanées.
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Aucune passion ne l’avait jamais touché, car c’était bien cela qu’exprimait le mot passion ; il avait survécu, il avait larmoyé et langui ; mais où était son profond ravage, à lui ? [...].
La chose extraordinaire dont nous parlons fut la soudaine irruption dans sa conscience de la réponse à cette question. La vision que ses yeux venaient d’avoir lui nommait, comme en lettres de flamme, la chose qu’il avait si totalement, si absurdement manquée. Et cette chose manquée faisait de toutes les autres une traînée de feu, les faisait se révéler, lancinantes, dans son for intérieur. Il avait vu hors de sa propre existence et non appris par le dedans, la façon dont une femme est pleurée quand elle a été aimée pour elle-même.
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Il aurait pu échapper à son destin en l'aimant, alors, oui, alors, il aurait vécu. May Bartram, elle, avait vécu - qui pouvait dire aujourd'hui avec quelle passion?- puisqu'elle l 'avait aimé pour lui-même alors que lui n'avait jamais pensé à elle qu'à travers le froid intérêt de son égoïsme et à la lumière de l'utilité qu'elle avait pour lui.
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Videos de Henry James (40) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Henry James
Avec "La Bête", le réalisateur Bertrand Bonello reprend à sa manière la nouvelle "La Bête dans la jungle", de Henry James, en plongeant Léa Seydoux dans un futur dystopique qui rappelle notre propre présent et dans lequel les émotions n'ont plus lieu d'être. Il est l'invité de Géraldine Mosna-Savoye et Nicolas Herbeaux.
Visuel de la vignette : "La Bête" de Bertrand Bonello, 2024 - Carole Bethuel
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