Il représente un homme d'environ trente-cinq ans, dont on ne voit que le buste, mais vêtu, remarquera l'observateur, selon une mode à présent presque désuète et loin d'être en synchronisme avec l'époque où il fut peint. Son haut visage un peu étroit serait peut-être trop aquilin, n'était la beauté du front et la douceur de la bouche. Le charme qu'il dégage émeut encore mon imagination, même après tant d'années. On sent que le peintre a fortement saisi la distinction de ce type sans que néanmoins son pinceau l'ait soulignée avec vulgarité. Les yeux un peu trop rapprochés, mais, par un contraste étrange, tout à la fois indifférents et ardents, les lèvres, la joue, le menton lisses et clairs, d'un dessin admirable, la personne tout entière expriment la jeunesse, la joie et l'orgueil de vivre, le comble de l'allégresse et l'attente d'une grande fortune, avec une insolence inconsciente qui croit que tout lui est dû. Cet homme n'a jamais connu aucune humiliation, aucune déception, et si mon imagination ne s'abuse, la façon dont l'artiste l'a campé garantit qu'il mourra sans avoir jamais souffert. Bref, il est si beau que l'on peut à peine lire dans sa pensée, et si heureux que l'on peut à peine lire dans son coeur. (La Note du temps)
Nous étions en train de la fixer, quand la porte s'ouvrit et Miss Churm entra avec son parapluie mouillé. Miss Churm était forcée de prendre l'omnibus jusqu'à Maida Vale et de faire ensuite à pied un demi-mille. Elle avait l'air assez dépeignée et légèrement crottée. Je ne la voyais presque jamais entrer sans m'ébahir de ce qu'étant si peu de chose en soi elle pût néanmoins être tant de choses quand elle incarnait une personnalité. C'était une chétive petite Miss Churm, mais une multiple héroïne de romans. Elle était une simple faubourienne à taches de rousseur, mais capable de tout représenter, depuis la dame raffinée jusqu'à la bergère ; elle était douée de cette faculté comme elle eût pu avoir une belle voix ou les cheveux longs. Elle ignorait l'orthographe et aimait la bière, mais elle avait deux ou trois "atouts" et de la pratique, et un tour de main, et du bon sens, et une sensibilité fantasque, et l'amour du théâtre, et sept soeurs, et pas une once de respect pour les h aspirés.
(La Chose authentique)
Avec "La Bête", le réalisateur Bertrand Bonello reprend à sa manière la nouvelle "La Bête dans la jungle", de Henry James, en plongeant Léa Seydoux dans un futur dystopique qui rappelle notre propre présent et dans lequel les émotions n'ont plus lieu d'être. Il est l'invité de Géraldine Mosna-Savoye et Nicolas Herbeaux.
Visuel de la vignette : "La Bête" de Bertrand Bonello, 2024 - Carole Bethuel
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